Intervention de Jean-Claude Requier

Réunion du 21 novembre 2018 à 14h30
La ruralité une chance pour la france — Débat organisé à la demande du groupe du rdse

Photo de Jean-Claude RequierJean-Claude Requier :

Plus que des espaces ruraux, je veux d’abord parler des gens qui y vivent, qui y sont nés et qui veulent y rester, ou qui s’y installent pour la qualité de vie, malgré les difficultés auxquelles ils se heurtent. Par ce débat, nous entendons aussi nous faire les porte-parole de l’exaspération de ces habitants.

Mes chers collègues, vous m’avez souvent entendu tonner à cette tribune contre la limitation de la vitesse à quatre-vingts kilomètres par heure sur les routes nationales. Je note que cette mesure, dont je doute toujours de l’efficacité, contribue à allonger les trajets quotidiens de millions de personnes. Elle a aussi été perçue comme une incompréhension des réalités vécues.

En effet, pour beaucoup de Français, il n’existe pas, en tout cas pas encore, de moyen de se passer de la voiture individuelle. Cela explique sans aucun doute l’accès de fièvre qui touche actuellement notre pays, lequel voit nombre de nos compatriotes revêtir un gilet jaune.

Monsieur le ministre, la question des mobilités est une dimension majeure de l’aménagement du territoire. Un projet de loi d’orientation, très attendu, devrait être prochainement inscrit à l’ordre du jour du conseil des ministres. Pouvez-vous nous éclairer quant aux dispositions qui s’appliqueront plus spécifiquement aux espaces ruraux ?

Parmi les autres motifs de préoccupation, j’évoquerai tout d’abord l’accès à des soins de proximité et de qualité. En la matière, plusieurs actions ont été engagées ces dernières années, comme la promotion de la création des maisons pluridisciplinaires ou le renforcement des mécanismes incitatifs à l’installation de médecins dans des zones sous-dotées.

Nous avons évidemment porté une grande attention aux mesures du plan « Ma Santé 2022 », présenté en septembre dernier par le Président de la République. Ce plan ambitionne de réviser en profondeur l’organisation territoriale, pour la médecine de ville comme pour le maillage hospitalier. Sans entrer dans les détails, il s’agit de créer un collectif de soins de proximité à l’horizon de 2022.

Certaines de ces dispositions ont déjà pris place dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale que nous avons adopté hier. D’autres constitueront l’architecture du projet de loi Santé, annoncé pour 2019. Même si ces thématiques ne relèvent pas directement de vos attributions, pouvez-vous nous en dire davantage à propos de son impact sur la carte des hôpitaux de proximité ?

L’accès aux services publics est une autre problématique récurrente. En la matière, les maisons de services au public, les fameuses MSAP, ont pu constituer une réponse intéressante en permettant de maintenir, via des formes nouvelles, la présence de services au plus près de nos concitoyens. Comment entendez-vous poursuivre l’effort dans cette direction ?

Je tiens également à dire un mot de l’administration territoriale de l’État. Ces dernières années, nous avons été témoins de vagues de réorganisation qui ont entraîné la fermeture d’implantations. Je pense notamment aux trésoreries et aux gendarmeries. À la révision générale des politiques publiques, la RGPP, et à la modernisation de l’action publique, la MAP, succède aujourd’hui le plan Action publique 2022, qui suscite certaines inquiétudes. Le Gouvernement doit les entendre, surtout quand un même territoire est touché par des fermetures en cascade sans que les différents services de l’État semblent se concerter.

À ce stade, je souhaite également m’attarder sur la dimension numérique de l’aménagement.

Nous le savons, l’accès à l’internet à très haut débit et la couverture mobile partout en France constituent un sujet de préoccupation majeure pour nos concitoyens. Alors que le numérique est présent chaque jour dans nos vies, l’accès à une connexion internet de qualité est devenu aussi important que l’accès à l’eau ou à l’électricité.

Au regard des constantes innovations, nous sommes à l’aube de bouleversements plus grands encore, qui seront permis par ces technologies. Assurer leur développement partout et pour tous relève donc de l’égalité républicaine.

Dans les espaces ruraux, le numérique peut constituer une formidable chance de dépasser certaines contraintes géographiques, à condition, bien sûr, que l’on dispose d’une couverture de qualité. C’est un défi considérable qui nous est collectivement posé, et pour lequel l’État, en partenariat avec les opérateurs de télécommunications et les collectivités territoriales, a décidé d’engager des moyens sans précédent, notamment dans le cadre du plan France très haut débit.

Ce plan connaît ainsi une montée en puissance régulière, même si nos concitoyens trouvent que le mouvement ne va pas assez vite. Entendons leur impatience.

Dans les zones peu denses, l’outil majeur est constitué par la mise en place de réseaux d’initiative publique, les RIP, qui bénéficient d’une enveloppe de subventions de l’État de 3, 3 milliards d’euros. Les RIP se déploient dans les départements. Mais, ces derniers mois, s’est posée la question d’un nouvel abondement de l’État et de la réouverture du guichet de subventions. Une quarantaine de départements sont concernés. Pouvez-vous nous donner des informations quant à la réouverture du guichet France très haut débit ?

Pour ce qui concerne, plus spécifiquement, la couverture mobile, pouvez-vous nous dresser un rapport d’étape, quant à la mise en œuvre de l’accord historique de janvier dernier et quant à l’atteinte de l’objectif de généralisation d’une couverture mobile de qualité dès 2020 ?

Les enjeux dont il s’agit sont prégnants, ce qui commande de les inclure dans notre politique d’aménagement. C’est la raison pour laquelle nous avons milité, au début de ce mois de novembre, pour que l’Agence du numérique rejoigne la future agence nationale de la cohésion des territoires, dans le cadre de la proposition de loi que notre assemblée a adoptée. Pouvez-vous nous confirmer l’inscription de ce texte à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale ?

Vous le savez : nous avons voulu cette agence nationale pour épauler les collectivités territoriales ne disposant pas d’importantes ressources en ingénierie. Celles-ci sont souvent situées dans des zones rurales. Outil au service des territoires, cette agence doit contribuer à ce que l’on sorte d’une logique descendante et à ce que l’on reconnaisse enfin aux élus leur rôle de moteur du développement rural.

Je pourrais poursuivre mon propos en évoquant la nécessaire revitalisation des centres-bourgs, les thématiques de l’habitat ou le soutien à la vie culturelle. Mais, ayant évoqué les difficultés auxquelles font face les territoires ruraux, je ne voudrais pas alimenter le cliché d’une ruralité malheureuse.

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