J’ai d’ailleurs remarqué que, lors de plusieurs rappels au règlement, des sénateurs de la majorité ont expliqué qu’ils ne souhaitaient pas suivre le Sénat sur cette taxation et sur la réforme des retraites. Nous aurons sans doute l’occasion d’y revenir, monsieur le rapporteur général…
Au cours des débats qui nous ont animés l’an passé et en ce début d’année, j’ai fréquemment insisté sur trois points de méthode, qui me semblent partagés par la grande majorité de cette assemblée : plus de sincérité dans les comptes publics, plus de lisibilité dans la politique fiscale et moins de verticalité, notamment dans les relations entre l’État et les collectivités locales.
De ce triple point de vue, j’ai le plaisir de vous confirmer que nous continuons à tenir nos engagements.
S’agissant de la sincérité du budget 2018, vous remarquerez que nous faisons mieux que de tenir nos engagements, puisque, pour la première fois depuis l’entrée en vigueur de la loi organique relative aux lois de finances, nous ne présentons aucun décret d’avance.
S’agissant de la clarification et de la simplification de la politique fiscale, nous proposons que le Sénat poursuive le travail de l’Assemblée nationale, qui a prévu la suppression d’une vingtaine de petites taxes. Inefficientes, ces taxes occupent malheureusement beaucoup d’agents de mon ministère sans manifestement faciliter, bien au contraire, la lisibilité de la fiscalité, notamment locale.
Je crois que le Sénat aurait intérêt, comme l’Assemblée nationale, à s’intéresser à la proposition du Gouvernement de définir au mieux les locaux industriels. Nous en avons débattu l’an passé, cette question touche une partie de nos agriculteurs et des entreprises françaises.
En ce qui concerne le troisième engagement que j’ai mentionné, j’ai le plaisir de vous indiquer la réussite de la contractualisation avec les collectivités locales les plus importantes.
Je rappelle à cette occasion que, contrairement à ce que j’ai pu entendre ici ou là, il n’y a pas eu de censure du Conseil constitutionnel – le dispositif présenté par le Gouvernement est conforme à l’article 72 de la Constitution – et que cette mesure émane des propositions formulées par MM. Malvy et Lambert.
Comme le montrent les chiffres du projet de loi de finances rectificative, les collectivités locales les plus importantes ont su limiter leurs dépenses publiques, sans limiter leurs dotations. Là aussi, nous aurons évidemment l’occasion d’y revenir lors de nos débats.
Nous confirmons les engagements présidentiels, notamment en faveur des ménages qui travaillent et des entreprises.
Ainsi, l’année 2019 sera marquée par le plein effet sur les salaires de la suppression des cotisations chômage et maladie pour les salariés et les trois quarts des indépendants. Nous conjuguons cette mesure avec la désocialisation, un mot malheureux qui veut dire qu’il y aura moins de fiscalité sur les heures supplémentaires. Nous avons eu un long débat à ce sujet avec M. le rapporteur général et votre assemblée lors de la discussion du PLFSS.
S’agissant des entreprises, ce PLF vise un double objectif. Premièrement, nous poursuivons les allégements généraux de charges, qui bénéficient, je le rappelle, non pas simplement aux grandes entreprises, mais à toutes celles qui embauchent, et aussi au secteur associatif employeur, aux coopératives agricoles, ce qui n’était pas le cas du CICE. Deuxièmement, en lien avec le projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises, dit projet de loi PACTE, nous renforçons l’attractivité de la marque France, avec un environnement fiscal simplifié, des effets de seuil supprimés et une meilleure répartition entre le capital et le travail. Je veux parler du forfait social ou encore de la participation. Nous aurons sans doute des débats autour de la fiscalité agricole, qui, si elle a fait pousser un certain nombre de sujets lors du PLFSS, est bénéfique dans le cadre du PLF, notamment sur les réserves de précaution. Nous discuterons également des aides fiscales outre-mer.
Il s’agit encore d’un budget d’affirmation des priorités de ce gouvernement, en ce qu’il vient en appui d’une politique sociale en faveur des plus vulnérables. Nous avons déjà eu l’occasion d’en parler lors du PLFSS, mais cela se traduit aussi dans le cadre du PLF. En effet, la ministre des solidarités et de la santé a un certain nombre de crédits qui relèvent de ses parts budgétaires. Ainsi est prévue l’augmentation pour les 550 000 bénéficiaires du minimum vieillesse de leur pension, à hauteur de 35 euros, en janvier 2019, puis en 2020 pour le même montant. Nous aurons sans doute l’occasion d’y revenir l’année prochaine. Par ailleurs, l’allocation aux adultes handicapés, l’AAH, pour la première fois dans l’histoire sociale de notre pays, va atteindre 900 euros à la fin de 2019. La prime d’activité augmentera de 20 euros par mois au niveau du SMIC, comme l’avait promis le Président de la République lors de sa campagne électorale.
Nous assurerons également des versements plus justes aux Français, ainsi qu’une juste imposition, grâce notamment à la « contemporanéisation » des prestations. Nous reviendrons bien sûr sur la question des aides personnalisées au logement, les APL, mais aussi sur la mise en place de la grande réforme du prélèvement à la source, largement soutenue par votre rapporteur général, ce dont je le remercie.
Nous aurons l’occasion d’évoquer les augmentations de crédits très importantes dans des domaines que le Gouvernement a choisis, avant tout dans le régalien : la défense, les forces de sécurité et de justice reçoivent ainsi des crédits en nette hausse, avec une augmentation confirmée de 1, 7 milliard d’euros pour le budget des armées, qui atteindra dès lors quasiment 36 milliards d’euros au total, une augmentation de 400 millions d’euros de la mission « Sécurité » du ministère de l’intérieur, à presque 14 milliards d’euros, tandis que le budget de la justice, conformément à la loi de programmation que vous avez votée, va atteindre 7, 3 milliards d’euros, ce qui permettra le recrutement de 1 300 emplois supplémentaires et la mise en œuvre du programme immobilier pénitentiaire, auquel le Sénat est attaché.
Enfin, il s’agit d’un budget d’investissement tourné vers l’avenir. Pour la première fois depuis sept ans, l’investissement public repart à la hausse en 2018 et en 2019. En 2019, il va croître deux fois plus vite que l’année dernière, ce qui est une bonne chose. C’est notamment grâce au Grand plan d’investissement qu’a mis en place le Gouvernement au début de l’année dernière.
Nous avons fait le choix de l’environnement et des mobilités, comme l’a dit M. le ministre de l’économie et des finances. Nous prévoyons déjà un certain nombre de mesures qui viendront en soutien du projet de loi d’orientation des mobilités sur les territoires, que présenteront Élisabeth Borne et François de Rugy. Nous avons traduit dans le texte que nous présentons les principes de l’économie circulaire portés par Nicolas Hulot et Brune Poirson. Nous aurons sans doute des discussions autour de la TGAP déchets en contrepartie d’une baisse de la TVA – je sais que cela intéresse particulièrement la chambre des territoires –, du renforcement de l’éco-prêt à taux zéro, ou éco-PTZ, ainsi que, comme M. Le Maire l’a annoncé, de l’alignement de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques, ou TICPE, applicable au gazole non routier sur le droit commun.
Le choix en faveur de l’avenir, c’est également le choix en faveur de l’éducation de nos enfants, qu’il s’agisse de l’éducation nationale ou de l’enseignement supérieur, avec plus d’un milliard d’euros de crédits pour le monde éducatif. Il s’agit de la plus grande hausse en proportion qu’ont connue les ministères de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur, ce dernier devant notamment accueillir 40 000 étudiants supplémentaires chaque année. C’est effectivement un sujet très important de discussion pour l’avenir de nos enfants.
Les transformations de l’action publique sont nombreuses. J’évoquerai d’abord la décrue des effectifs de l’État et de ses opérateurs, avec une proposition de 4 200 suppressions de postes l’an prochain en net. Nous aurons l’occasion d’y revenir, notamment dans la trajectoire qui nous mène effectivement aux 50 000 suppressions de postes figurant dans le programme présidentiel.
Nous aborderons l’indispensable réflexion autour de l’offre audiovisuelle, avec le début de la réforme audiovisuelle publique, telle qu’elle a été annoncée par le Gouvernement l’année dernière. Il y a aussi la question, très importante évidemment, de la suppression des impôts qui vont avec la taxe d’habitation, ou l’accompagnement de ces impôts. Nous aurons l’occasion, monsieur le rapporteur général, monsieur le président de la commission des finances, de l’évoquer lors d’un projet de loi spécifique, qui sera présenté le 17 avril prochain en conseil des ministres et qui concernera la fiscalité locale. J’aurai donc un avis réservé sur les amendements qui porteront sur la fiscalité locale, sans lien direct avec le PLF, puisque nous aurons des débats, que j’espère intéressants et passionnés, à partir du mois d’avril prochain.
Autre point important, l’unification des réseaux de recouvrement de l’impôt, à commencer par ceux des services douaniers et des services fiscaux, mais demain, également, avec ceux des services sociaux. Nous nous attachons à simplifier pour les entreprises et les citoyens le recouvrement de l’impôt.
Par ailleurs, la décrue du chômage sera accompagnée par le service public de l’emploi, renforcé notamment par la réforme de Pôle emploi. Nous assumons aussi que notre présence diplomatique soit redéployée en fonction de l’évolution des priorités stratégiques. Le Président de la République et le ministre des affaires étrangères ont eu l’occasion de l’évoquer.
Voilà, madame la présidente, sans être plus long, quelles sont les grandes lignes de ce projet de budget. J’aurai l’occasion, pendant de longs débats, assisté d’Olivier Dussopt et Bruno Le Maire, de pouvoir répondre aux questions des parlementaires et de discuter des amendements que ne manqueront pas de présenter votre commission des finances et tous les parlementaires du Sénat. C’est avec la conscience non seulement du travail accompli, mais aussi de ce qu’il reste à faire pour redresser la France et nos finances publiques que le Gouvernement vous présente ce projet de budget pour l’année 2019.