Madame la présidente, messieurs les ministres, mes chers collègues, selon les simulations menées à l’aide du modèle Ines, le revenu disponible moyen par ménage, en euros constants, serait, en 2016, inférieur de 1, 2 % à son niveau de 2008.
Les réformes fiscales visant le redressement structurel des comptes publics engagé à la suite de la crise économique, la hausse du chômage et du temps partiel et les évolutions démocratiques sont sûrement des facteurs qui peuvent expliquer cette diminution.
Sans les réformes fiscales intervenues entre 2008 et 2016, le revenu disponible moyen des ménages aurait été supérieur de 1, 4 % en 2016. Les effets de ces réformes diffèrent selon la place des ménages dans la distribution des niveaux de vie.
Les ménages les plus aisés – mais c’est bien le minimum – ont été les plus mis à contribution : les 5 % du haut de la distribution ont vu leur revenu disponible annuel diminuer de 5 640 euros sous l’effet des mesures nouvelles concernant les prélèvements – hausse des cotisations sociales, création d’une tranche d’impôt sur le revenu à 45 %, imposition au barème de l’impôt sur le revenu des revenus du capital, etc.
Les ménages les plus modestes ont bénéficié de la politique sociale et des amortisseurs sociaux encore existants : les 5 % les plus modestes ont vu leur revenu disponible annuel s’accroître de plus de 450 euros et les 5 % de la tranche au-dessus l’ont vu s’accroître de 890 euros du fait des réformes des prestations – revalorisation des minima sociaux, création de la prime d’activité, etc.
Messieurs les ministres, les réformes des prestations et prélèvements mises en œuvre en 2017 ont, à nos yeux, un impact quasi nul sur les inégalités de niveau de vie.
Ce que je viens de citer ici, mes chers collègues, ne pouvait figurer dans le document de présentation du budget pour 2019, puisque ces lignes sont issues d’une fort instructive note d’actualité de l’INSEE, publiée avant-hier.
Si elle ne réhabilite pas – loin de là ! – les politiques du précédent quinquennat, elle témoigne, en revanche, que les quelques garde-fous encore préservés pour freiner l’aggravation des inégalités sociales ont sauté en 2017, avec ce que nous appelons l’avènement d’une course folle vers un ultralibéralisme sans limites.
Oui, c’est bien un nouveau projet de société qui est à l’œuvre, encore plus violent pour les salariés, pour les familles populaires et les classes moyennes, un projet toujours plus protecteur pour les actionnaires des grandes entreprises et pour les marchés financiers.
Ainsi, si l’on compare la première année du précédent quinquennat, largement rejeté par les milieux populaires, et la première année du quinquennat en cours, c’est-à-dire les lois de finances initiales pour 2013 et 2019, il semble bien que quelques données ont évolué et qu’elles n’ont certainement pas contribué à améliorer la situation de la grande majorité de nos compatriotes.
Dans la loi de finances pour 2013, on avait ainsi prévu, entre autres, de percevoir les recettes suivantes : pour l’impôt sur le revenu, 72, 8 milliards d’euros ; pour l’impôt sur les sociétés, 52, 3 milliards d’euros, malgré le CICE ; pour la TVA, 141, 8 milliards d’euros ; pour la TICPE, 13, 8 milliards d’euros. Et nous avions une prévision de 85, 2 milliards d’euros en remboursements et dégrèvements d’impôts d’État et de 10, 9 milliards d’euros pour les impositions locales.
Devenu sénateur et rapporteur de la mission « Remboursements et dégrèvements », je me devais de le souligner.
La part de la fiscalité indirecte était déjà importante dans l’ensemble des recettes, mais il n’en demeure pas moins que la situation n’était pas celle d’aujourd’hui.
Dans le projet de loi de finances pour 2019, nous avons une prévision ainsi fixée : pour l’impôt sur le revenu, 70, 5 milliards d’euros ; pour l’impôt sur les sociétés, 31, 5 milliards d’euros ; pour la TVA nette, 166, 9 milliards d’euros, très fortement impactée par le transfert de plus de 36 milliards euros pour compenser les allégements sociaux ; pour la TICPE, 17 milliards d’euros. Par ailleurs, le montant des remboursements et dégrèvements continue son ascension.
Ainsi, les correctifs sur impôts d’État vont atteindre 116 milliards d’euros et il est possible que les allégements divers frappant les impositions locales atteignent les 20 milliards d’euros.
Sur les crédits très approximatifs ainsi ouverts, on peut cependant noter, ce qui est un signal clair quant au projet de société vers lequel on nous propose d’aller, que 100 milliards d’euros sont fléchés vers les entreprises, 17, 5 milliards vers les ménages et environ 13, 5 milliards vers les collectivités locales.
Quand on regarde l’évolution des recettes fiscales, on constate l’effondrement du produit de l’impôt sur les sociétés, celui-ci se situant à environ 1, 3 % du produit intérieur brut. Pour dire les choses simplement, cela représente quatre jours et demi de production, c’est-à-dire de travail des salariés. C’est un peu comme si les entreprises de notre pays commençaient l’année 2019 en se disant que, dès le 6 janvier, elles auraient fini de payer l’impôt sur les sociétés !