Le débat sur le projet de loi de finances pour 2019 reprend au Sénat dans un contexte de grave crise sociale, mais aussi de crise politique.
Le mouvement des « gilets jaunes » fait remonter à la surface toute la souffrance d’une grande partie de notre peuple qui, des exclus socialement aux classes moyennes, subit l’austérité dictée par les dogmes libéraux.
Depuis des années, le pouvoir d’achat des salariés et pensionnés baisse. Il serait d’ailleurs intéressant de reprendre pour nos travaux le graphique de cette baisse. Les « gilets jaunes » et bien d’autres, comme les blouses blanches dans les hôpitaux ou le personnel des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, les EHPAD, le personnel des bureaux de poste ou des écoles, crient – nous le constatons tous dans nos territoires – leur angoisse des débuts de mois difficiles, car les découverts interviennent dès le premier jour du mois. Ils crient leur angoisse de ne pouvoir nourrir convenablement leur famille, ils crient leur angoisse de ne pouvoir offrir des cadeaux de Noël à leurs enfants.
On fait souvent référence à l’Europe. Or la Commission européenne évoque le chiffre de 11 millions de personnes en risque de pauvreté en France. Cette réalité, beaucoup ne voulaient pas la voir, beaucoup la maintenaient sous le boisseau.
La « trajectoire », terme très technocratique utilisé par le Gouvernement, d’augmentation de la taxe sur le carburant a mis le feu aux poudres. Mais c’est la question du pouvoir d’achat, d’une nouvelle répartition des richesses, du rétablissement de l’impôt de solidarité sur la fortune, l’ISF, dont Gouvernement et droite ne veulent plus, de l’emploi, qui revient sans cesse.
Ce qui émerge, c’est une contestation profonde du libéralisme, comme le soulignait une pancarte ce samedi sur laquelle était inscrite : « Vos profits nous bouffent la vie » !
Les sénatrices et les sénateurs du groupe CRCE ont déposé, comme d’autres ici, un amendement de suppression de l’augmentation de la taxe sur le carburant, et ils se félicitent de la probable adoption de ces propositions. Mais ils alertent sur la nécessité d’un changement de logiciel, c’est-à-dire sur la nécessité de substituer au logiciel de la finance celui de l’intérêt général et de la justice sociale. Or, au Sénat, s’il y a unanimité pour supprimer la hausse de la taxe carburant, il n’y a pas unanimité, tant s’en faut, pour taxer les riches plutôt que de réduire la solidarité. Or c’est cela que demande le mouvement social.
Il est bien que nous nous retrouvions sur cette question de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques, la TICPE, mais soyons aussi clairs par rapport à nos débats. Car nous apportons des réponses très différentes selon les travées où nous siégeons à la question : faut-il faire payer les riches pour redistribuer à ceux qui sont plongés dans de très grandes angoisses ? Je pense particulièrement à ces millions de nos concitoyens qui perçoivent des bas salaires et des petites retraites. Bref, clarifions nos débats au sein de notre assemblée.