Intervention de Albéric de Montgolfier

Réunion du 26 novembre 2018 à 22h00
Loi de finances pour 2019 — Article 8, amendement 133

Photo de Albéric de MontgolfierAlbéric de Montgolfier :

Nous avons parlé précédemment de la trajectoire de la TICPE. Nous abordons désormais, avec les dix-neuf amendements que nous allons examiner, la TGAP déchets, qui concerne aussi bien le stockage que l’incinération, et ce à partir de 2021.

L’article 8 prévoit également des exemptions pour les déchets qui ne peuvent pas faire l’objet d’une valorisation ; nous venons ainsi de parler de certains résidus et des dépôts de déchets abandonnés. Il prévoit aussi une suppression progressive des tarifs réduits de la TGAP déchets, sauf pour certaines installations qui réalisent une valorisation énergétique élevée.

La loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte a fixé des objectifs ambitieux, notamment en termes de pourcentage de déchets à valoriser. Nous sommes assez loin du taux de 55 % de valorisation des déchets, qui devrait théoriquement être atteint à partir de 2020, puisque le taux actuel est environ de 39 %. La trajectoire est donc clairement insuffisante.

On peut par conséquent comprendre l’objectif qui sous-tend l’article 8. Mais il faut aussi considérer les choses en termes de rendement.

La mesure proposée est d’un rendement très élevé, puisqu’elle représente, en cumulé, 1 milliard d’euros de recettes supplémentaires pour l’État d’ici à 2025.

Je rappelle que les recettes de TGAP s’élevaient à 450 millions d’euros en 2017 et devraient donc atteindre 800 millions d’euros en 2025.

Nous avons débattu précédemment de la TICPE. Il serait plus acceptable, ou moins contestable, que ce surcroît de recettes bénéficie, par exemple, à l’ADEME. Or il est affecté au budget général, au budget de l’État.

Par ailleurs – nous en revenons, là encore, à notre précédent débat –, il n’y a guère de mesures compensatoires nouvelles.

Qui supportera cette hausse ? Ce seront évidemment les collectivités locales, et donc les contribuables, qui devront payer 850 millions d’euros cumulés, jusqu’en 2025. Nous avons déjà évoqué l’augmentation supportée par le consommateur à propos de la TICPE sur les entreprises. En l’occurrence, cette augmentation concernera les collectivités, et donc les contribuables.

Est prévue, certes, une baisse du taux de TVA afférente, qui va passer à 5, 5 %, mais cette diminution ne compensera pas le surcroît de fiscalité sur la TGAP. Nous verrons qu’elle n’en compensera qu’à peu près la moitié.

Il faut considérer la part de déchets qui ne sont pas valorisables, et que l’on peut estimer à peu près à un tiers. Pour ces déchets, il n’existe aucune alternative : on ne peut ni les recycler ni les trier, et l’incinération n’est pas forcément possible.

Or cette part de déchets non valorisables subit néanmoins de plein fouet la hausse de la TGAP. Il n’y a aucune alternative possible dans le dispositif proposé par le Gouvernement ; c’est là que le bât blesse.

C’est la raison pour laquelle, mes chers collègues, je vous proposerai un amendement visant à instituer une franchise, un pourcentage de TGAP, sur un volume par habitant, qu’il reviendrait au Gouvernement de déterminer par décret, en fonction de la part des déchets non valorisables. Cette franchise s’appliquerait à compter de 2021, date à laquelle la taxe devra être revue à la hausse.

Les nombreux amendements qui ont été déposés concernent des exonérations, des suppressions, de nouveaux tarifs de la TGAP, ou renvoient à des périmètres d’exemption… Tout cela est assez technique. Nous avons de beaux tableaux chiffrés, mais nous ne sommes pas capables, dans le délai qui nous a été imparti, de mesurer l’impact précis de ces mesures sur les collectivités et les habitants. Il peut être extrêmement dangereux de modifier des tableaux sans faire de simulations…

Mes chers collègues, plutôt que de modifier à l’aveugle les tarifs de TGAP, je vous propose de vous rallier à l’amendement n° I-133 de la commission des finances que je présenterai ultérieurement, lequel tend à modérer la hausse de la TGAP pour tenir compte de ce pourcentage de déchets non valorisables, que l’on estime au tiers de la totalité des déchets.

Je demande par conséquent, madame la présidente, pour le bon déroulement de nos travaux, la priorité de vote de cet amendement n° I-133.

J’espère avoir fait une synthèse satisfaisante de ce sujet complexe, qui a donné lieu à des amendements nombreux et parfois contradictoires. La balance n’est pas équilibrée : d’un côté, une forte augmentation de la fiscalité TGAP – plus de 800 millions d’euros –, de l’autre, une baisse de la TVA qui n’est pas à due concurrence. Au final, les recettes de l’État seront en hausse, de même que la fiscalité pesant sur les collectivités locales.

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