Intervention de Éliane Assassi

Réunion du 22 février 2007 à 9h30
Prévention de la délinquance — Adoption des conclusions du rapport d'une commission mixe paritaire

Photo de Éliane AssassiÉliane Assassi :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous voici donc au terme du parcours législatif portant sur le projet de loi relatif à la prévention de la délinquance, qui n'a que très peu à voir avec son intitulé.

C'est sans surprise que l'Assemblée nationale et le Sénat sont parvenus à un accord en commission mixte paritaire sur le présent texte. Force est d'admettre que, tout au long des débats parlementaires, celui-ci a fait l'unanimité contre lui, malgré les propos que vient de tenir M. le ministre.

Les critiques ont fusé de toutes parts : syndicats, associations, assistants sociaux, éducateurs, psychiatres et j'en passe. Les élus aussi dans leur grande majorité - les maires particulièrement refusent le rôle que vous voulez leur faire jouer - se sont opposés à ce texte.

Je vous épargne ici le rappel du nombre de manifestations qui ont été organisées pour protester contre votre projet. Enfin, j'évoquerai à peine le Collectif national unitaire de résistance à la délation, regroupant de nombreux détracteurs des dispositions que vous souhaitez mettre en place, qui a vu le jour dès la présentation de votre projet.

Cependant, comme à votre habitude, vous êtes restés sourds à cette mobilisation. Ce texte a été, au fil des navettes, largement étoffé et ce, toujours dans le même sens : celui d'une répression accrue. Alors qu'il constituait déjà initialement un catalogue de diverses mesures sécuritaires, largement inspirées de faits divers, votre texte a été complété au fur et à mesure par de nouvelles dispositions, l'Assemblée nationale et le Sénat se livrant à une surenchère en la matière.

À ce titre, je souhaite évoquer le durcissement de la législation relative aux chiens dangereux, l'évacuation forcée des gens du voyage et les mesures relatives aux jeux de hasard.

Je tiens aussi à parler de la création de nouvelles infractions, telles que le happy slapping, renommé vidéo-lynchage, le délit d'embuscade, celui de détention ou de transport de substances incendiaires, l'incrimination spécifique des violences volontaires commises contre les forces de l'ordre, les pompiers ou les agents de transport public.

Il faut également citer la réintroduction de la notion de guet-apens dans le code pénal, l'aggravation de la répression de la rébellion, la sanction plus sévère prévue en cas de circulation sur la voie publique avec un quad ou une mini-moto.

Enfin, il convient de dénoncer les nouvelles sanctions comme la sanction-réparation et la sanction-restauration, les nouvelles peines complémentaires et la multiplication des circonstances aggravantes.

Vous agissez sur les conséquences, mais jamais sur les causes. Les critiques que nous avons formulées en première et en deuxième lecture sont toujours d'actualité. Les modifications finalement retenues en commission mixte paritaire sont à la marge. Sur le fond, l'esprit et l'idéologie sécuritaire inhérents à ce texte demeurent.

Monsieur le ministre, permettez-moi de vous rappeler nos critiques en dix points non exhaustifs bien entendu.

Première critique : ce texte a été déposé et examiné en l'absence totale d'une quelconque étude d'impact et d'un quelconque bilan de l'application des textes législatifs existants. Aucune information ne nous est parvenue concernant les décrets d'application de ces textes, encore moins concernant les budgets nécessaires à leur mise en place. Vous empilez les textes jusqu'à rendre les lois illisibles et inintelligibles.

À cet égard, permettez-moi de citer le rapport 2006 très critique de la Chancellerie sur la politique pénale. Il relève, notamment, que les services d'enquête n'ont pas assimilé les réformes pénales qui se sont succédé à un rythme soutenu ces dernières années.

Deuxième critique : cette inflation législative va de pair avec l'inflation sécuritaire. Vos textes sont de plus en plus répressifs, à tel point que l'on peut légitimement se demander : « Mais jusqu'où ira cette droite ? »

La réponse paraît, hélas ! évidente : suppression de l'excuse de minorité, c'est-à-dire de ce qui fait la spécificité de la justice des mineurs, et mise en place des peines planchers pour les multirécidivistes, que vous n'avez finalement pas introduites dans le présent texte, mais qui demeurent dans le programme de l'UMP.

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