Intervention de Michel Forissier

Commission des affaires sociales — Réunion du 28 novembre 2018 à 8h30
Projet de loi de finances pour 2019 — Mission « travail et emploi » - examen du rapport pour avis

Photo de Michel ForissierMichel Forissier, rapporteur pour avis des crédits de la mission « Travail et emploi » :

Les derniers chiffres, ceux du troisième trimestre 2018, montrent que la baisse du chômage observée depuis la fin du quinquennat précédent demeure très limitée. En effet, le taux de chômage s'est maintenu au troisième trimestre et ne baisserait que de 0,5 point sur un an pour s'établir à 9,1 %. La situation du marché de l'emploi demeure donc préoccupante.

Dans ce contexte, les crédits de la mission « Travail et emploi » baisseraient de près de 3 milliards d'euros. Certes, cette baisse s'explique en partie par des effets de périmètre, et notamment par la suppression de dispositifs spécifiques d'exonération, consécutive à l'augmentation des allègements généraux, qui sont compensés, non pas par des crédits budgétaires, mais par l'affectation de recettes fiscales. À périmètre constant, les crédits de la mission baisseraient tout de même de 2 milliards d'euros.

Pour l'essentiel, cette baisse des crédits résulte, d'une part, du recentrage du recours aux contrats aidés sur les publics les plus éloignés de l'emploi, d'autre part, de l'extinction progressive de dispositifs qui ont fait la preuve de leur échec, et dont la suppression a été décidée par le Gouvernement actuel ou le précédent.

Je partage globalement la philosophie du Gouvernement sur les contrats aidés et je note que la réduction des moyens qui leur sont alloués s'accompagne d'une hausse des crédits dédiés à l'insertion par l'activité économique. De même, le Sénat a eu l'occasion d'approuver la suppression de certains dispositifs peu efficaces, comme les contrats de génération ou les dispositifs de préretraite.

L'année 2019 doit marquer la première année pleine de mise en oeuvre du plan d'investissement dans les compétences, le PIC, qui serait doté de 2,5 milliards d'euros en crédits de paiement et 3 milliards d'euros en autorisations d'engagement. Une action forte en faveur de la formation des demandeurs d'emploi et des jeunes décrocheurs est tout à fait nécessaire et les crédits demandés à ce titre semblent tout à fait pertinents.

L'effort affiché par le Gouvernement doit toutefois être fortement relativisé. En effet, une partie importante des crédits présentés comme relevant du PIC finance en fait des dispositifs déjà existants qu'il aurait bien fallu financer, même en l'absence de plan spécifique. Il en est ainsi de la garantie jeune, qui représenterait près de 500 millions d'euros en 2019. La progression des crédits du programme 102 au titre du PIC est même gonflée quelque peu artificiellement par l'inscription sous ce label de dispositifs qui étaient présentés dans d'autres enveloppes en 2018, comme les parcours contractualisés d'accompagnement vers l'emploi et l'autonomie ou la rémunération de fin de formation. En outre, le programme 103 doit bénéficier d'un fonds de concours de 1,5 milliard d'euros provenant de la future agence France compétences en application des nouvelles modalités de collecte et de répartition de la contribution des entreprises au financement de la formation professionnelle.

L'année 2019 marquera, par ailleurs, la première année de mise en oeuvre de la loi du 5 septembre dernier pour la liberté de choisir son avenir professionnel. Cette loi a prévu un certain nombre de changements dans la gouvernance et le financement de la politique de formation professionnelle. Il est regrettable de constater que très peu des mesures d'application nécessaires ont à ce jour été publiées. Notamment, le montant de l'aide unique aux employeurs d'apprentis n'est pas encore connu et les annonces du Gouvernement sont nettement en deçà de ce qui nous avait été annoncé au moment des débats sur le projet de loi.

Avant d'évoquer les articles rattachés, je souhaite aborder un point qui sort du cadre du PLF, mais qui relève de la politique de l'emploi.

La loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel a prévu la suppression des contributions salariales d'assurance chômage. Cette suppression devait être intégralement compensée à l'Unedic par l'État. Or l'affectation d'une part de CSG se traduit dès 2019 par une perte de recettes de 200 millions d'euros pour l'assurance chômage. À long terme, la CSG étant moins dynamique que les cotisations salariales, la trajectoire de solde pourrait s'en trouver dégradée. Mme la ministre a confirmé la compensation, hier, mais nous ne voyons rien venir pour l'instant dans les textes financiers.

Deux articles sont rattachés à la mission « Travail et emploi ». L'article 84 révise les conditions de versement de l'aide en cas d'activité partielle. Il est proposé de ramener de quatre à un an le délai dont les entreprises disposent pour demander le versement de cette aide et de prévoir des sanctions en cas de fraude. L'article 84 bis, inséré par l'Assemblée nationale, crée une contribution de 25 millions d'euros de l'association de gestion du fonds de développement pour l'insertion professionnelle des handicapés, l'Agefiph, pour le financement des entreprises adaptées.

Faute de pouvoir majorer les crédits demandés, et tout en constatant que les résultats de la politique menée en matière d'emploi ne sont encore que peu visibles, je vous propose de donner un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission et des articles rattachés, ainsi que du compte d'affectation spéciale pour le financement de l'apprentissage.

Si cela ne doit pas conditionner la position de notre commission, je précise que la commission des finances a aussi émis un avis favorable, sous réserve de l'adoption d'un amendement de ses rapporteurs spéciaux tendant à augmenter les crédits dédiés aux maisons de l'emploi. Je serai à titre personnel favorable à cet amendement.

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