Intervention de Bruno Retailleau

Réunion du 22 février 2007 à 9h30
Diffusion audiovisuelle et télévision du futur — Adoption des conclusions modifiées du rapport d'une commission mixe paritaire

Photo de Bruno RetailleauBruno Retailleau :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous voici parvenus au terme du processus législatif sur ce projet de loi.

La discussion a parfois pris une forme quelque peu absconse en raison du caractère extrêmement technique de ce texte qui, comme vous l'avez rappelé, monsieur le ministre, va concerner chaque Français. Il constitue un véritable pont entre contenant et contenu, entre communication et culture.

Permettez-moi de revenir sur ses trois grands enjeux, à propos desquels la commission des affaires économiques, saisie pour avis, s'était battue afin de faire prévaloir un certain nombre d'idées : la couverture du territoire, le dividende numérique, enfin, la télévision du futur, notamment la télévision mobile.

Le premier enjeu est celui de la couverture du territoire.

À ce sujet, nous avions une idée assez simple : éviter absolument une nouvelle fracture numérique, l'édification d'une France à deux vitesses, car c'était la seule chance d'opérer avec succès un basculement définitif réel de l'analogique au numérique avant la fin de l'année 2011. Nous y sommes parfaitement parvenus grâce à votre soutien et à deux dispositifs que vous avez rappelés.

Le Sénat, dès l'examen en première lecture, a affiché cette ambition d'une couverture à 100 % du territoire, et ce grâce à deux technologies : la diffusion hertzienne et la diffusion numérique. Pourquoi, en effet, nous passerions-nous de la couverture à 95 % par la voie hertzienne terrestre, complétée par la voie satellitaire ? L'Assemblée nationale a fort opportunément apporté un complément technologique, avec les réseaux publics de communications électroniques.

Le deuxième dispositif est le fonds d'aide destiné aux plus démunis. Ce fonds sera désormais plus ciblé et technologiquement neutre. Concrètement, cela signifie que les aides permettront de s'équiper indifféremment pour la réception satellitaire ou hertzienne terrestre. Toutes les chances sont donc réunies pour que le basculement de l'analogique au numérique s'effectue dans des conditions convenables.

Le deuxième enjeu est celui du dividende numérique.

À ce sujet, ne voulant absolument pas hypothéquer l'avenir, notre idée était de préserver les chances de la France d'optimiser la gestion du spectre hertzien.

Le très récent rapport de MM. Maurice Lévy et Jean-Pierre Jouyet, intitulé L'économie de l'immatériel, La croissance de demain, nous rappelle fort opportunément que la qualité de la gestion du spectre hertzien déterminera très largement, à l'avenir, le positionnement des grandes industries françaises de la défense, des télécommunications, de l'audiovisuel, sur des secteurs porteurs.

Nous avons donc fait oeuvre utile en essayant d'arrimer au texte deux mécanismes.

Le premier est la commission du dividende numérique, destinée à permettre au Parlement de participer au processus décisionnel. Nous pourrons ainsi faire entendre notre voix lorsque la commission se prononcera sur le projet de schéma national de réutilisation des fréquences libérées par l'arrêt de la diffusion analogique que lui soumettra le Premier ministre.

Le second mécanisme est tout aussi important. Désormais, la loi fixe des objectifs très clairs en matière de réaffectation des fréquences qui seront libérées, pour un meilleur aménagement du territoire, pour servir une meilleure couverture numérique, pour la diversification de l'offre de service, mais aussi pour une gestion efficace des fréquences par l'État. Une fréquence est d'abord une ressource rare, un bien public, un actif public, immatériel, mais c'est aussi une ressource extrêmement prometteuse en termes d'emplois, et la commission des affaires économiques a eu raison de le rappeler.

Le troisième et dernier enjeu de la télévision du futur est celui de la mobilité, avec la télévision mobile personnelle. Nous nous sommes battus pour promouvoir un modèle coopératif entre deux mondes qui parfois s'ignorent, même s'ils s'entrecroisent souvent, d'un point de vue capitalistique notamment, celui de la télévision et celui de la téléphonie mobile.

Deux raisons fortes nous motivaient pour organiser cette coopération.

D'abord, la télévision mobile sera la passerelle la plus importante entre les deux plus grands marchés de la convergence, l'audiovisuel et les télécommunications.

Ensuite, il fallait tisser des liens entre deux types de télévision mobile qui ne peuvent s'ignorer : les télévisions mobiles bénéficiant des technologies de téléphonie mobile qui s'appuient sur la norme UMTS, aujourd'hui la troisième génération, dite 3 G, demain, la quatrième génération, dite 4 G, et la télévision mobile utilisant la technologie DVB-H, Digital Video Broadcasting-Handheld, adaptation du système utilisé pour la télévision numérique terrestre visée par ce projet de loi.

L'utilisateur aura besoin de passer indistinctement de l'une à l'autre. Par conséquent, si l'on veut couvrir une grande partie du territoire et diversifier l'offre des chaînes, il est nécessaire d'organiser la coopération entre ces deux modes de mobilité audiovisuels et la coexistence de réseaux UMTS et DVB-H.

Les moyens d'y parvenir sont inscrits dans le texte. Ils ont été complétés, si j'ose dire, par la commission mixte paritaire.

Le premier consiste à garantir la présence des uns et des autres dans le tour de table qui gérera les multiplexes. La commission mixte paritaire a opportunément retenu un processus décisionnel qui pondère les voix de chacun en fonction de l'investissement et de la masse financière consacrés à la couverture du territoire. C'est un point positif.

Le second mécanisme consiste en une obligation réciproque de reprise négociée entre les uns et les autres, entre d'un côté les distributeurs de services et les opérateurs et, de l'autre, les chaînes, notamment en clair.

Là aussi, il y a eu une avancée en commission mixte paritaire, cette dernière ayant tenu à rappeler que cette réciprocité devait tenir compte à la fois des intérêts des auteurs, en respectant les droits d'auteur, mais aussi ceux du public, notamment le droit pour tout un chacun de procéder à des copies privées.

Je sais bien qu'en matière législative il faut toujours être modeste et humble. D'ailleurs, la Commission européenne travaille actuellement à l'élaboration d'un nouveau cadre, notamment en matière de fréquences télécoms. Mais je crois que nous sommes parvenus à un bon équilibre. Cet équilibre a pu être obtenu grâce à l'excellent travail que nous avons conduit en coopération avec nos collègues de la commission des affaires culturelles, avec son président, Jacques Valade, ou avec son rapporteur, Louis de Broissia. Je remercie aussi M. le ministre d'avoir entendu nos préoccupations et d'en avoir tenu compte.

Ce texte est important pour l'avenir de la France, pour la communication, pour la culture, pour l'économie, pour les industries culturelles françaises. Il permettra à notre pays de tenir sa place, une place qui, je l'espère, se situera au premier rang dans ce nouveau monde du numérique prometteur en termes de croissance, d'emplois et de création.

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