Il aura mis en place les bases nécessaires pour que s’exprime vraiment une solidarité entre l’urbain et le rural.
Car c’est bien de cela qu’il s’agit.
Mettre en œuvre une politique de l’aménagement du territoire en France, c’est disposer de l’expertise, des moyens et de l’autorité nécessaires pour faire vivre, au quotidien, la République des territoires.
Or, depuis des décennies, force est de constater que nous avons assisté à un abandon en règle des territoires. Aujourd’hui, l’État doit impérativement avoir une vision stratégique. La France métropolitaine est, semble-t-il, entrée dans les mœurs : c’est un ressenti. Elle concentre déjà 75 % de la croissance : c’est une réalité ! Comme par hasard, on se rend compte maintenant que la métropolisation peut engendrer un phénomène ségrégatif : la belle affaire !
Bien sûr, il est nécessaire et urgent de promouvoir une politique spécifique pour les petites et moyennes villes, dont beaucoup ont de grandes difficultés, en particulier celles qui n’ont pas de noyau métropolitain.
Bien sûr, il est nécessaire et urgent de venir en aide aux territoires laissés pour compte et qui s’enfoncent petit à petit dans le repli et la désertification. Ce n’est plus une fracture territoriale, c’est un abandon en rase campagne !
Alors, nous dit-on, l’Agence nationale de la cohésion des territoires est certainement l’outil nécessaire pour que le territoire national ne fasse qu’un. Soit !
Le chef de l’État lui-même a indiqué, lors de la Conférence nationale des territoires, que le travail effectué se fera en lien direct avec les régions et que l’agence apportera un appui en ingénierie publique aux territoires les plus périphériques, dans une logique de guichet unique et de simplification à destination des porteurs de projets et des élus.
Selon ses termes, « ce que demande la ruralité, ça n’est pas l’aumône, ça n’est pas d’être compensé, c’est d’avoir les mêmes chances de réussir », et il défend une approche « différenciée » de l’État, qui « ne doit pas craindre de donner plus à ceux qui ont moins ».
Il s’agit là du discours de façade, mais, « en même temps », qu’en est-il dans la réalité ? Depuis le fiasco de la Conférence nationale des territoires et de son double langage, la confiance n’est plus là !
Quid, par exemple, des capacités financières ? Mes collègues rapporteurs Dominique Estrosi Sassone et Philippe Dallier l’ont dit précédemment, le compte n’y est pas.
Le renversement du tropisme métropolitain, qui a prévalu lors de la funeste réforme territoriale, ne s’opérera pas avec de belles paroles !
Si je ne devais prendre qu’un seul exemple révélateur d’un aménagement du territoire chaotique et d’une cohésion des territoires à géométrie variable, je choisirais celui que je connais le mieux, c’est-à-dire celui de mon département, l’Essonne.
Dans la partie urbanisée, au nord du département, s’agissant d’un projet d’envergure nationale, le fameux plateau de Saclay, le Président de la République est venu sur place le 25 octobre 2017 nous parler, les yeux dans les yeux, en disant : « Je ne ferai rien qui pourra contrarier l’avenir du plateau de Saclay, ce cœur battant de la science française […] Une grande partie des réponses aux défis contemporains vient d’ici […] Il s’agit de gagner la bataille de l’intelligence [et] d’être à la pointe de l’excellence scientifique ». Parlons-en ! Quelques semaines après cette déclaration d’amour enflammée, le Premier ministre est venu, en service commandé, annoncer brutalement aux élus locaux, faute de crédits, un report en 2027 de l’avènement de la ligne 18 du Grand Paris Express, axe principal des transports en commun censés irriguer ce fameux plateau de Saclay.
Dans le même temps, pour la partie périurbaine et rurale, plus au sud du département, le Gouvernement continue aveuglément d’intimer l’ordre aux élus locaux, sur les bases du sacro-saint article 55 de la loi SRU et à coups de constat de carence, de construire toujours plus de logements, alors même que les transports en commun sont déjà sursaturés le long des lignes C et D du RER, dont la réputation n’est plus à faire !
Est-il besoin de rappeler ici la mémoire des sept morts lors du drame de Brétigny-sur-Orge, le 12 juillet 2013, par manque d’entretien du réseau ?
Voilà quelle est la réalité de la cohésion des territoires, au moins dans le département de l’Essonne. Alors aujourd’hui, monsieur le ministre, nous n’avons pas besoin d’usine à gaz administrative, pas plus que de discours lénifiants. Nous avons besoin de confiance et d’actes concrets !