Intervention de Laurence Rossignol

Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes — Réunion du 29 novembre 2018 : 1ère réunion
Échange de vues sur la loi visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées

Photo de Laurence RossignolLaurence Rossignol :

Je travaille sur ce sujet depuis la Coupe du monde de football de 2006 en Allemagne ; que n'ai-je entendu ! J'ai néanmoins tenu bon, même si la prostitution arrange tout le monde, n'ayons pas peur de le dire. De plus, autoriser l'achat de services sexuels, c'est finalement tolérer en quelque sorte le viol, car le consentement ne s'achète pas avec de l'argent...

Que pouvons-nous faire à l'égard de cette QPC ?

Dans cette procédure, seules peuvent être parties aux débats contradictoires le Gouvernement, représenté par le Secrétaire général du Gouvernement (SGG) sur la base d'un dossier proposé par la Chancellerie, et les associations telles que le Nid, qui vont produire des mémoires.

J'ai demandé à être entendue en tant qu'ancienne ministre par le Conseil, mais cette démarche ne s'intègre pas dans la procédure.

De fait, nous comptons sur les associations, dont le Mouvement du Nid, pour défendre les dispositions contestées de la loi du 13 avril 2016. Nous espérons aussi que les membres du Conseil comprendront que la constitutionnalisation du droit d'acheter le corps d'autrui, au-delà de la question de la prostitution, libérerait ensuite tout verrou constitutionnel à la gestation pour autrui (GPA) ou à la remise en cause de la gratuité des dons d'organes.

J'ai pour ma part été invitée à la première réunion de la commission de mon département, à laquelle participait le syndicat des hôteliers, qui peut jouer un rôle d'alerte dans la lutte contre le proxénétisme.

Dépénaliser l'achat de services sexuels priverait les forces de police de points d'entrée dans les réseaux : les enquêteurs m'ont confirmé que cette loi était très utile, en particulier pour lutter contre la prostitution des mineurs.

L'objectif des associations telles que le STRASS ou Médecins du Monde, qui sont à l'origine de la QPC, est d'instaurer le réglementarisme comme en Allemagne ou en Hollande, où la prostitution est légalisée. Les personnes prostituées y sont des « travailleurs sexuels » disposant d'un statut et dont l'activité est encadrée dans des « Eros Center ».

Ce qu'il faut comprendre, c'est que la légalisation conduit paradoxalement à l'explosion du business, car les clients en quête de transgression se tournent davantage vers la prostitution illégale impliquant des mineurs ou des prostituées étrangères victimes de la traite des êtres humains. Sachons-le, la traite des êtres humains prospère dans les pays où la prostitution est réglementée et légalisée.

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