Monsieur le ministre, pour apprécier le budget que vous nous présentez aujourd’hui, je partirai du même point que mon collègue Franck Montaugé : le budget 2018 devait être la « première étape d’une transformation sans précédent de l’agriculture française ».
En jetant un œil dans le rétroviseur sur les avancées engrangées depuis ce budget, on se dit que, à ce rythme-là, la transformation prendra du temps ! Or du temps, nous n’en avons guère, puisque, selon une récente étude du Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement, le CIRAD, et de l’Institut national de la recherche agronomique, l’INRA, tous les indicateurs sont à l’orange.
Ces deux grands organismes de recherche agronomique ont travaillé sur cinq scénarios d’évolution possible d’usage des terres. Un seul de ces modèles permet de concilier tous les impératifs : préservation de l’environnement, atténuation du changement climatique, garantie d’une alimentation saine et suffisante, développement rural plus inclusif.
Si vous souhaitez réellement aller vers une transformation sans précédent de notre agriculture, c’est sur la voie étroite, certes, mais praticable que ces organismes décrivent, qu’il faut vous engager. Or ce budget semble s’inscrire dans la stricte lignée du précédent : nous n’y trouvons ni les réponses aux grands enjeux de demain ni les solutions aux problèmes d’aujourd’hui.
L’urgence, nous le savons tous, est de garantir un métier rémunérateur aux agriculteurs. Comme l’a justement souligné Franck Montaugé, la question du revenu est l’un des principaux motifs de déception de la loi ÉGALIM, après l’espoir qu’avaient suscité les États généraux l’année dernière.
Avec la suppression programmée de l’exonération des charges patronales pour l’emploi des travailleurs saisonniers, les TO-DE, vous allez encore fragiliser des filières entières. Des voix se sont élevées toute une après-midi sur toutes les travées de cet hémicycle pour vous en faire la démonstration.
Vous nous aviez répondu que, bien qu’il soit sympathique, le dispositif que nous adoptions ne pourrait pas tenir à l’Assemblée nationale. Et plutôt que d’essayer de convaincre les députés de ce que les sénateurs vous avaient fait remonter à l’unanimité, monsieur le ministre, vous vous êtes empressé d’émettre un avis favorable sur l’amendement du rapporteur de l’Assemblée nationale qui tend à éteindre cette exonération en 2021, ce qui est bien dommage.
Puisque vous voulez vous poser en « bouclier » contre l’agri-bashing – cet anglicisme n’est évidemment pas de moi –, vous devriez peut-être commencer à le faire quand vous êtes face aux députés de votre majorité