La secrétaire d’État nous répondra certainement qu’évaluer la fraude est toujours une opération délicate. J’en conviens et c’est la raison pour laquelle nous avons eu des échanges extrêmement précis aussi bien avec la DGFiP qu’avec l’AMF ou l’ACPR. Nous leur avons ensuite adressé des questionnaires écrits.
L’AMF a ainsi pu nous donner des indications extrêmement intéressantes sur les volumes concernés.
Bien évidemment, le prêt-emprunt de titres est une opération tout à fait normale pour la vie des affaires. Toutefois, au cours de la période de détachement du dividende, le montant de ces opérations a été de 183 milliards d’euros en 2018. En comparaison, le cumul des opérations de prêt-emprunt de titres sur les valeurs du CAC 40 est de 23 milliards d’euros sur l’année. Concrètement, le volume a donc été multiplié par huit au cours de cette période.
Les Allemands ont bâti leur dispositif autour de cette idée : l’opération est soumise à fiscalité si elle a lieu dans les quarante-cinq jours précédant le détachement du titre.
L’AMF a estimé la perte fiscale à environ 1 milliard d’euros pour les seules opérations de prêt-emprunt de titres. Nous avons également des chiffrages pour d’autres opérations plus complexes. Quel que soit le volume concerné, il est manifestement important.
D’autres moyens en droit permettent de lutter contre ces procédés. Je pense, par exemple, à la clause anti-abus de l’OCDE qui permet d’écarter de la convention fiscale le bénéficiaire non-résident. La notion d’abus de droit peut aussi être utilisée par l’administration fiscale pour redresser une opération.
Dans le cas du recours à la notion d’abus de droit, la difficulté réside dans le renversement de la charge de la preuve : c’est à l’administration fiscale de prouver que l’opération a une finalité fiscale. Il s’agit donc d’un contrôle fiscal très lourd.
La commission est très favorable à ces amendements, qui visent à mettre en place un système de prélèvement à la source, recueilli par l’établissement bancaire, ce qui inverse la charge de la preuve : au contribuable de prouver qu’il ne poursuivait aucun but d’évasion fiscale. Ce dispositif est effectif et fonctionnel.