Intervention de Fabienne Keller

Réunion du 2 décembre 2018 à 10h00
Loi de finances pour 2019 — Compte d'affectation spéciale : transition énergétique

Photo de Fabienne KellerFabienne Keller :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, à mon tour je voudrais dire quelques mots de l’actualité dramatique que nous vivons depuis plusieurs semaines, et tout particulièrement depuis hier.

Au lendemain d’actes de violence inadmissibles, je veux dénoncer, comme nous tous, les attaques et les dégradations inacceptables contre des symboles de la République et dire mon soutien total aux forces de l’ordre.

La grande majorité des « gilets jaunes », qui s’expriment depuis maintenant plusieurs semaines, nous lance un appel. Le message est fort, le besoin de dialogue impératif, mais extrêmement difficile en l’absence d’interlocuteurs structurés.

Nous devons tous pacifier la situation pour tenter de construire cet indispensable dialogue. Il nous faut aussi, madame la ministre, entendre l’exigence de rendre compte de l’utilisation de la fiscalité carbone. J’ai été très impressionnée de constater que les « gilets jaunes » ne sont pas contre l’environnement. Bien au contraire, ils adhèrent aux objectifs, notamment pour leurs enfants, mais ils demandent à être mieux accompagnés et que cette fiscalité qui pèse sur eux soit totalement réinvestie dans des actions d’accompagnement de la transition énergétique.

Mais j’en viens à l’objet de cette intervention.

Je voulais tout d’abord inscrire mon rapport dans la perspective du projet de loi d’orientation des mobilités, que le Sénat examinera au début de l’année prochaine. Ce texte comportera pour la première fois une programmation financière pluriannuelle des infrastructures de transports pour la période 2018-2037, programmation que notre commission avait réclamée à l’issue des travaux de notre groupe de travail consacré à cette question et présidé par notre ancienne et dynamique collègue Marie-Hélène des Esgaulx.

Cette programmation prévoit que l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, l’AFITF, sera dotée de 13, 4 milliards d’euros sur la période 2018-2022 pour investir dans les infrastructures de transport, soit un peu moins de 2, 7 milliards d’euros par an, puis de 14, 3 milliards d’euros sur la période 2023-2027, soit 2, 9 milliards d’euros par an.

Si beaucoup parmi nous espéraient des chiffres plus ambitieux, je tiens à relever à ce stade que les 13, 4 milliards d’euros annoncés pour les cinq années à venir constituent un effort financier très significatif, puisqu’ils représentent une hausse de 40 % des crédits consacrés aux infrastructures par rapport à la période de cinq ans précédente.

Cette augmentation des moyens marque cinq priorités que vous rappelez régulièrement, madame la ministre.

La première consiste à mieux entretenir et moderniser les réseaux routiers, ferroviaires et fluviaux existants, dont l’état s’était considérablement dégradé.

La deuxième priorité consiste à désaturer les grands nœuds ferroviaires, ce qui permet d’améliorer le fonctionnement des services ferroviaires du quotidien – RER, TER – et de rendre plus crédible la perspective d’une réalisation de certaines LGV – 2, 6 milliards d’euros y seraient consacrés.

La troisième priorité serait le désenclavement routier des villes moyennes et des territoires ruraux, à travers une vingtaine d’opérations au sein des contrats de plan État-régions, pour un montant de 1 milliard d’euros. Ces opérations sont très attendues par un grand nombre d’élus locaux et par l’ensemble de nos collègues.

Vous faites du développement des mobilités propres, auxquelles je suis très attachée, comme beaucoup d’entre nous, la quatrième de ces priorités. Vous prévoyez d’y consacrer un peu plus de 1 milliard d’euros sur dix ans.

La dernière priorité est celle du rééquilibrage, tant attendu, du transport de marchandises de la route vers le train et le transport fluvial. Là encore, les crédits consacrés s’élèveront à 1 milliard d’euros sur cinq ans et à 2, 3 milliards sur dix ans.

Voilà pour ce qui concerne le projet de loi d’orientation sur les mobilités, même si ce texte risque de se traduire également par un décalage, voire par un renoncement, à certaines opérations – je pense notamment au projet d’autoroute A45, entre Lyon et Saint-Étienne, dont vous avez déjà annoncé l’arrêt.

Les dépenses de l’État en faveur des transports sont réparties entre l’AFITF et le programme 203.

Comme chaque année, nous ne disposons pas du budget de l’AFITF pour l’année suivante, seulement de quelques orientations : 200 millions d’euros supplémentaires, avec un effort particulier consenti pour la régénération des réseaux.

Un bémol toutefois, madame la ministre : après le renoncement du gouvernement précédent à la taxe « poids lourd » qui devait servir de recettes pour l’AFITF, c’est le projet de vignette qui est désormais abandonné. Le budget de cette agence connaîtra très rapidement un déséquilibre financier de 500 millions d’euros.

Les crédits du programme 203 sont en très légère hausse. Je dirai quelques mots des trois grands opérateurs qui en relèvent.

SNCF Réseau poursuivra le grand plan de modernisation et bénéficiera prochainement d’une situation financière assainie grâce à la reprise de 35 milliards d’euros de sa dette par l’État en 2020 et en 2022. Cela mérite d’être souligné.

Le coût du Grand Paris Express a été réévalué de manière probablement plus réaliste et raisonnable, pour tenir compte d’éléments de risque, à 35 milliards d’euros, contre 25 milliards précédemment. Vous proposez d’augmenter les moyens humains, ce qui est tout à fait souhaitable eu égard à l’ampleur de ce qui constitue le projet du siècle en matière d’infrastructures.

Voies navigables de France va devoir consentir d’importants efforts de réduction de ses personnels, avec une centaine d’équivalents temps plein en moins par an.

Le Gouvernement a plutôt pris en compte les priorités que notre commission avait identifiées, en particulier la nécessité d’investir pour nos réseaux routier, ferroviaire et fluvial.

J’en viens au programme 205 « Affaires maritimes », dont la dotation s’établit à 162, 6 millions d’euros. Je note l’effort consenti pour acquérir de nouveaux patrouilleurs.

Si je partage certaines des réserves formulées par Jean-François Husson, en particulier sur l’insuffisance du programme d’accompagnement des ménages pour la transition écologique, je suis favorable aux crédits des programmes de transport 203 et 205.

Il me reste à vous présenter brièvement les crédits du compte d’affectation spéciale « Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs », que je vous propose d’adopter. Je vous rappelle que les trains d’équilibre du territoire, les TET, ont été largement réduits à la suite du rapport Duron, voilà deux ans.

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