Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je ne peux débuter mon intervention sans rappeler, comme mes collègues l’ont fait à l’instant, combien nous avons été collectivement choqués par le saccage de l’Arc de Triomphe, ce monument national, ce symbole des valeurs de la République.
Nous sommes solidaires de nos forces de l’ordre et de nos soldats, dont la mémoire a été, hier, atteinte. Un monument qui symbolise la mémoire se doit d’être respecté. Si l’on veut être écouté et entendu dans la République, il faut en respecter les symboles.
Madame la ministre, vous allez entendre ce matin toutes les critiques qu’adresse le Sénat aux crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ». Comme Jean-François Husson l’a souligné à l’instant, on ne peut déconnecter ce débat de questions qui agitent notre société aujourd’hui, celle de la taxation de l’essence et du gasoil en particulier. Cette situation va évidemment servir de prisme à notre analyse.
J’interviens ici au titre du programme 159 « Expertise, information géographique et météorologie », ainsi que du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ».
Le programme 159 regroupe depuis 2017 les subventions pour charges de service public du Centre d’études et d’expertise pour les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement, le CEREMA, de l’Institut national de l’information géographique et forestière, l’IGN, et de Météo France.
Ces trois opérateurs se sont vus signifier cette année une trajectoire financière dont on pourrait dire, selon une formule diplomatique, qu’elle est difficile, mais qu’elle est claire. Si je devais emprunter une phrase chère à Jean-Pierre Raffarin, je dirais que la pente des baisses de crédits est forte.
Toutefois, après avoir entendu les dirigeants de ces établissements, j’entends qu’ils préfèrent connaître la trajectoire des cinq années à venir plutôt que de continuer à découvrir, au fil des orientations données avant un conseil d’administration ou dans une loi de finances, le gel, puis le surgel de leurs crédits.
Vous avez donc donné une trajectoire enfin claire, même si elle difficile. Je veux saluer l’ensemble des personnels et des dirigeants de ces organismes, qui ont la mission particulièrement ingrate de mettre en musique ces perspectives financières assez raides.
Nous connaissons tous l’importance de Météo France, à un moment où des événements climatiques extrêmes se déroulent parfois sur nos territoires
La subvention pour charges de service public portée par le programme 159 va diminuer en 2019, à 183, 8 millions d’euros. Dans le même temps, les effectifs baisseront de 94 équivalents temps plein travaillés, mouvement qui devrait se poursuivre dans les cinq ans à venir. Ce dernier chiffre montre bien combien la pente est raide.
Ces ajustements seront rendus possibles par une centralisation des activités à la Météopole de Toulouse.
Le gros enjeu des années à venir pour Météo France est l’acquisition de son nouveau supercalculateur, pour un coût total de 144 millions d’euros. Or l’État ne versera que 26, 4 millions d’euros pour ce supercalculateur, au lieu des 34, 4 millions espérés. Sur cette somme, 5 millions sont prévus par le projet de loi de finances pour 2019, quand 10 millions d’euros étaient attendus.
La secrétaire d’État, que j’ai interrogée en commission des finances, nous a rappelé qu’un prélèvement pouvait être opéré sur le fonds de roulement. Je voudrais tout de même alerter sur le fait que ce fonds de roulement va passer de 33 millions d’euros en 2018 à 12 millions en 2022. On peut demander à Météo France un effort sur le fonctionnement, mais on ne doit plus sacrifier l’investissement. Il s’agit d’un enjeu majeur sur lequel, madame la ministre, je souhaiterais que vous preniez un engagement clair.
Si la pente est raide pour Météo France, elle l’est tout autant pour l’IGN, qui verra sa subvention pour charges de service public baisser en 2018, à 91, 7 millions d’euros, et ses effectifs perdre 63 équivalents temps plein travaillés.
Le modèle économique de l’IGN va changer avec l’avènement de l’open data. Un projet d’établissement visant à en faire l’opérateur interministériel unique en matière de données géographiques souveraines s’est fait jour. Il faut désormais procéder rapidement à une révision du décret statutaire de l’établissement et à l’élaboration d’un nouveau contrat d’objectifs et de performance, le précédent COP étant arrivé à échéance depuis bientôt trois ans.
Le CEREMA doit aussi se réinventer. Il s’est quelque peu stabilisé, après une crise très importante. Il subit une baisse de 5 millions d’euros de sa subvention pour charges de service public et de 100 équivalents temps plein travaillés.
Il s’agit, là encore, d’un cap difficile à tenir, même s’il est sans doute nécessaire au regard des contingences de la dette publique. Il y a là un vrai travail à mener sur ce point.
Je voudrais insister sur les investissements nécessaires : le matériel scientifique et technique du CEREMA doit être modernisé. Peut-être est-il possible d’assumer cette trajectoire en fonctionnement, non en investissement. Il faut lui redonner du mou en ce domaine.
J’en viens à présent au budget annexe « Contrôle et exploitation aériens », le BACEA, qui porte les 2, 2 milliards d’euros de crédits de la direction générale de l’aviation civile, la DGAC, dont les recettes sont assises sur la croissance du trafic aérien.
Or cette croissance est plutôt bonne : elle s’élève à 4, 8 % en 2018 et devrait être comprise entre 2, 7 % et 5 % en 2019, cette fourchette plus large étant notamment due aux incertitudes liées au Brexit.
Air France a commencé à se réformer et à reconstruire un pacte social. Cependant, la situation du secteur me paraît particulièrement fragile.
Vous avez lancé des assises du transport aérien, ce dont je vous félicite. Comme vous le savez, le Sénat a adopté différents amendements s’inscrivant, me semble-t-il, dans la trajectoire de ces assises. Nous souhaitons simplement permettre au Gouvernement d’aller au bout des arbitrages. Je sais que vous plaidez en ce sens : la perche tendue par le Sénat me paraît devoir être saisie par l’exécutif. Il s’agit, selon moi, d’une coproduction législative utile.
Le BACEA va voir sa dette réduite. C’est une bonne chose.
Je voudrais enfin insister sur la situation de la direction des services de la navigation aérienne. J’ai commis un modeste rapport sur ce sujet, au nom de la commission des finances, voilà quelques mois. Nous sommes en situation d’alerte : nous sommes en retard et pointés du doigt à l’échelle européenne. Vous devez prendre la mesure des difficultés. Je serais sensible au fait que vous acceptiez de transmettre au Parlement les récents résultats de la mission d’inspection que vous avez lancée.