Intervention de Michel Magras

Réunion du 3 décembre 2018 à 10h00
Loi de finances pour 2019 — Outre-mer

Photo de Michel MagrasMichel Magras :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, notre commission des affaires économiques analyse ce budget des outre-mer pour 2019 comme l’addition de trois principaux mécanismes, que j’ai appelés « les trois R » : une reconduction et deux recyclages.

Reconduction, tout d’abord, de l’enveloppe de 2 milliards d’euros, qui se maintient à ce niveau depuis 2011, avec une difficulté récurrente d’activation des crédits.

La situation est particulièrement alarmante en matière de logement : au fil des ans, les crédits sont stables ou affichés en hausse, mais la construction ralentit pour un certain nombre de raisons, parmi lesquelles la complexité du parcours administratif figure en bonne place.

Notre premier message, qui vaut aussi pour la défiscalisation, porte sur la nécessité de fluidifier les procédures pour favoriser le climat de confiance avec les opérateurs et leur permettre de consacrer plus de temps à leur cœur de métier.

Ensuite, le Gouvernement propose, pour 2019, de greffer sur cette reconduction deux recyclages, lesquels ont suscité des réactions inédites par leur nombre et leur intensité. J’ai écouté les acteurs ultramarins pour analyser l’impact économique réel de l’ensemble de la tuyauterie sociale, budgétaire et fiscale pour 2019 et suggérer des réajustements.

Le premier recyclage a surpris les Ultramarins. Au sortir des Assises des outre-mer et après la publication du Livre bleu outre-mer, l’État nous propose en effet une démarche budgétaire de recentralisation.

Le projet de loi de finances prévoit, en particulier, de prélever en première partie 170 millions d’euros de fonds immédiatement disponibles entre les mains des ménages et des entreprises et de les redistribuer en seconde partie sous forme de subventions accessibles aux Ultramarins après instruction par l’administration d’un dossier de demande.

Sur le plan comptable, les chiffres sont à peu près équivalents, mais, économiquement, les subventions sont lentes à se mettre en place et les crédits sont volatiles d’année en année, alors que les suppressions de compensations fiscales sont pérennes !

Notre second message vise donc à demander au Gouvernement des garanties sur l’activation rapide de ces crédits et sur la continuité de l’effort budgétaire pour les prochaines années.

Le second recyclage est celui du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, transformé en exonération de charges, ce qui pose des problèmes d’évaluation et d’impact.

D’une part, on se demande encore s’il ne manque pas quelque 180 millions d’euros, peut-être parce que les calculs du Gouvernement se sont fondés non pas sur le CICE exigible, mais sur le CICE constaté, ce qui revient à pénaliser de fait certaines entreprises ultramarines qui n’ont pas exercé leur droit.

D’autre part, la concentration au voisinage du SMIC va certainement « booster » l’embauche dans un premier temps, mais risque, à l’avenir, d’enfermer les outre-mer dans la « smicardisation » et les productions de moyenne gamme, alors qu’il faut aussi aider les entreprises à retenir les talents ultramarins pour mener l’offensive sur les activités à haute valeur ajoutée.

Le Sénat a cependant voté des mesures de rééquilibrage en matière de réduction du coût du travail ainsi que des réaménagements fiscaux. Sous réserve de leur prise en compte, il nous est apparu logique de ne pas nous opposer à l’adoption des crédits de la mission « Outre-mer » pour 2019.

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