Que dire également du droit au logement opposable, sinon que, sans la proximité des élections présidentielles et la nécessité de prendre en compte l'une des principales préoccupations de la population de ce pays, donc des électeurs et électrices, vous n'auriez sans doute pas engagé la discussion de ce projet de loi ! Mais je sais que vous ne le reconnaîtrez pas !
En d'autres termes, on ne pouvait rester sans rien faire, au risque de se couper d'une part importante de la population. Le Président de la République a, lui, compris que cette disposition était nécessaire, ne serait-ce que s'il voulait pouvoir partir tranquille !
Que dire encore sinon que, dans ce cadre, la loi, sous des formes dont nous avons suffisamment souligné les limites, consacre l'opposabilité du droit au logement et constitue une avancée réelle que nous apprécions à sa juste mesure.
Le principe est posé, acté par l'article 1er du projet de loi. Certes la forme est imparfaite, mais nous ne manquerons pas de la modifier dès l'été prochain, si un changement profond a lieu au sommet de l'État. Quoi qu'il en soit, il convient maintenant de rendre ce droit effectif.
Or il n'y a pas d'effectivité du droit au logement sans construction de logements sociaux, sans mise en oeuvre d'une lutte résolue contre la spéculation immobilière, contre la vacance organisée, véritable insulte au droit au logement, sans recours, quand le besoin s'en fait sentir, au droit de réquisition. Mais ce dernier n'est jamais ô grand jamais utilisé !
Il n'y a pas d'effectivité, non plus, du droit au logement, source de stabilité pour les familles, sans participation élargie des collectivités locales, notamment par la généralisation et l'application des principes de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains.
Oui, il faut qu'il y ait partout 20 % de logements sociaux ! Il le faut non seulement parce que c'est possible, mais aussi parce que c'est tout simplement nécessaire au regard de la situation des familles, même dans les villes dites « bourgeoises » - je pense surtout à mon département, les Hauts-de-Seine !
En ce qui concerne les modalités de mise en oeuvre de ce droit au logement opposable, nous avons déjà souligné quels étaient les problèmes posés par la procédure mise en oeuvre.
Le moindre d'entre eux n'est pas celui de la complexité, d'autant que l'opposabilité du droit au logement peut trouver, à notre sens, d'autres voies que celles de la commission de médiation réactivée par l'article 2 et celle de la saisine des tribunaux administratifs prévue par l'article 3.
Quant à l'effectivité de ce droit, il faut lui donner une application élargie et concrète sur l'ensemble du pays et sur tous les territoires.
C'est évidemment en raison du constat de la fragilité de la mise en oeuvre du droit opposable que nous ne pouvons, a priori, que maintenir la position qui était la nôtre lors de la première lecture.
Nous apprécions positivement que les velléités de certains députés - je pense aux initiatives renouvelées de notre collègue Yves Jego dernièrement et à celles de notre collègue Patrick Ollier - quant aux conditions de rupture des contrats de location ou à la définition du logement social aient été mises en échec, soit par la mobilisation des acteurs, soit par le débat parlementaire lui-même, soit encore par la commission mixte paritaire. Tant mieux !
Nous apprécions également que des dispositions tendant à faciliter l'accès au logement aient été inscrites dans le texte, même s'il semble nécessaire de les améliorer encore.
Ce sera peut-être l'affaire d'un texte examiné sur l'initiative d'un autre gouvernement, dans le cadre d'une autre législature. Quoi qu'il en soit, il importe que soient effectivement levés les obstacles qui entravent l'exercice plein et entier du droit au logement.
Si par malheur ce gouvernement devait être reconduit, ce que je ne crois pas, il n'en resterait pas moins vrai que vous vous retrouveriez, madame la ministre déléguée, avec la « patate chaude », si vous me permettez l'expression, que vous avez vous-même lancée dans cette dernière heure des débats parlementaires. Nous serions là, si du moins nous étions encore dans l'opposition à l'issue des prochaines élections, ce que nous ne souhaitons pas, pour vous rappeler les engagements qui sont les vôtres.
Je ferai maintenant quelques observations sur les dispositions de la seconde partie du texte.
La notion de cohésion sociale, pour ce qui nous concerne, ne nous semble pas nécessairement la plus adaptée : réduire les inégalités sociales, lutter contre les violences quotidiennes subies par les plus modestes et contre les discriminations de toute nature, cela impose de mettre en oeuvre des politiques plus audacieuses, plus porteuses de transformation sociale. On ne peut se contenter de simples accommodements des individus aux rigueurs du temps !
Dans ce contexte, la question de l'emploi et, par là même, celle de la nécessaire sécurité des parcours professionnels sont posées.
Nous devons nous extraire des solutions toutes faites, des protocoles occupationnels, des dispositifs de stages sans lendemain qui gouvernent par trop les politiques publiques de l'emploi.
Au moment où la Cour des comptes s'interroge sur la pertinence des contrats aidés, au moment où l'Assemblée nationale met en cause la logique des onéreuses politiques d'allégement du coût du travail, nous nous devons de tracer les grandes lignes d'une autre intervention publique en matière d'emploi et de formation.
Notre pays est victime des bas salaires et de la précarité de l'emploi. Les salariés pris dans cette spirale continue de la précarité sont aussi ceux dont le droit au logement est foulé aux pieds !
Les mesures inscrites dans la seconde partie du texte ne changent d'ailleurs pas grand-chose au problème posé. Force est de constater que, à part l'amélioration du dispositif de l'article 7 et des dispositions relatives au surendettement qui ont dû être recyclées d'un défunt texte sur le droit de la consommation, peu de chose sont à retirer de cette partie du texte qui s'attaque à quelques droits sociaux pourtant fondamentaux.
Rupture de l'égalité devant l'impôt à l'article 6, privatisation encouragée des services d'éducation avec l'article 8, mise en cause des droits à prestations sociales avec l'article 9 : le texte a toujours bien des défauts. Rappelez-vous de nos débats sur ce fameux article qui empêche les Roumains et les Bulgares d'accéder à des droits sociaux dans notre pays. Vive l'Europe unie et universelle !
Quant au contrat unique d'insertion ou au statut des assistants familiaux, même si certains peuvent se satisfaire de leur mise en place, il faut constater que ce sont là des moyens d'ouvrir la voie au minimum social unique dégressif et conditionné ou à la création de pseudos emplois ou activités à caractère familial.
De telles dispositions auraient mérité un tout autre débat que celui qui ne fut mené, malgré tous nos efforts, qu'à la sauvette, à la faveur de la discussion d'amendements.
Vous avez reconnu, madame la ministre déléguée, la ténacité de l'opposition sur ce texte, ...