Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des finances, mes chers collègues, les autorisations d’engagement en matière d’aide publique au développement vont donc s’accroître de manière très sensible de plus de 1, 4 milliard d’euros supplémentaires. Nous nous en réjouissons, en espérant que la trajectoire budgétaire des années prochaines suivra le même rythme. Et nous nous réjouissons plus particulièrement que le Gouvernement ait d’ores et déjà décidé d’affecter les deux tiers de la progression des crédits de l’aide publique au développement à des financements bilatéraux, comme l’ont rappelé nos rapporteurs.
Ne nous méprenons pas : les financements multilatéraux ont souvent permis des avancées importantes et, à condition d’y exercer une influence à la hauteur de nos contributions, ils peuvent constituer des leviers pour atteindre nos objectifs. Ainsi, le Partenariat mondial pour l’éducation cofinance notre priorité éducative au Sahel. L’augmentation annoncée de notre contribution à ce fonds, qui a montré son efficacité, est évidemment un point positif – nous la réclamions d’ailleurs depuis plusieurs années.
Toutefois, j’ai eu l’occasion de m’en entretenir avec vous, monsieur le ministre, est-ce vraiment le cas des 50 contributions multilatérales de la mission « Aide publique au développement », dont les 850 millions d’euros versés chaque année au Fonds européen de développement, les 380 millions d’euros destinés au Fonds mondial de lutte contre le Sida ou les 775 millions d’euros au Fonds vert pour le climat depuis quatre ans ? Nous ne contestons pas leur fondement et leur utilité, mais ils devraient être mieux articulés les uns avec les autres, mieux expliqués, et surtout mieux évalués ! En tout état de cause, le fait d’augmenter en priorité les financements bilatéraux apparaît cohérent avec la volonté que nous exprimons tous de reprendre en main le pilotage politique de notre politique d’aide au développement.
Une seconde manière d’y parvenir est d’améliorer l’évaluation.
Le Président de la République a dit récemment : « Chaque euro doit être utilisé à bon escient. » Aujourd’hui, l’évaluation reste marquée par son caractère lacunaire, par sa dispersion entre de multiples services – le principal appartenant à l’agence même dont il évalue les projets, à savoir l’AFD – et, enfin, par son caractère trop procédural. Ainsi organisée, l’évaluation de l’aide publique au développement ne permet en aucun cas d’organiser un pilotage par les résultats, ce qui ne fait qu’alimenter de constantes interrogations sur l’utilité de l’aide, son efficience et le devenir des projets dans le long terme.
Dans ce domaine, sachons tirer parti de l’exemple de la commission indépendante pour l’impact de l’aide créée en 2011 par le gouvernement britannique ! Il faut notamment mettre davantage à contribution les cabinets d’expertise, fussent-ils privés, non pas, comme c’est le cas actuellement, pour qu’ils se livrent à une analyse polie et consensuelle sur tel ou tel programme, mais pour qu’ils produisent des évaluations indépendantes, incisives et sans concession.
Enfin, monsieur le ministre, la décision de rapprocher Expertise France de l’Agence française de développement au sein d’un même groupe a été, c’est le moins qu’on puisse dire, un peu précipitée au cours de l’été dernier.