La séance, suspendue à douze heures cinquante-cinq, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Thani Mohamed Soilihi.
La séance est reprise.
Ce matin, la présidente du groupe communiste républicain citoyen et écologiste a pris la parole pour un rappel au règlement, invitant le Sénat à prendre en compte la situation de crise politique que connaît actuellement le pays, et soulignant qu’il était hors de propos de poursuivre l’examen du projet de loi de finances, alors que des consultations sont engagées, qui pourraient conduire à de nouveaux arbitrages budgétaires. Ce rappel au règlement n’a visiblement pas provoqué la moindre réaction. Nous nous en étonnons, d’autant qu’il semblerait que nous nous dirigions dorénavant vers un débat de politique générale mercredi à l’Assemblée nationale et jeudi au Sénat. Je renouvelle donc cette demande qui faisait appel à la sagesse du Sénat.
Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances pour 2019, adopté par l’Assemblée nationale.
Nous poursuivons l’examen, au sein de la seconde partie du projet de loi de finances, des différentes missions.
Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Aide publique au développement » (et article 72), ainsi que du compte de concours financiers « Prêts à des États étrangers ».
La parole est à M. le rapporteur spécial.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser l’absence de Jean-Claude Requier, appelé, avec une délégation d’élus radicaux, par M. le Premier ministre à donner son point de vue dans le cadre des consultations que celui-ci mène en ce moment. J’exposerai donc la totalité du rapport, puisque nous devions nous partager la présentation des crédits de cette mission.
L’exercice 2019 constituera une année charnière pour notre politique d’aide publique au développement : les décisions prises cette année détermineront si notre pays respectera l’objectif posé par le Président de la République d’une aide représentant 0, 55 % de notre revenu national brut, ou RNB, en 2022.
En effet, étant donné le décalage entre l’engagement des crédits et leur décaissement effectif, qui dépend de la mise en œuvre concrète des projets, le niveau de l’aide publique au développement de la France en 2022 dépend en grande partie du niveau des engagements de 2019.
C’est donc à l’aune de cet objectif que nous avons analysé la présente mission, en nous demandant, monsieur le ministre, si les moyens engagés nous placent sur la bonne trajectoire en attendant la loi de programmation dont la discussion devrait intervenir en 2019 et qui détaillera les moyens consacrés à cette politique dans les années ultérieures.
Tout d’abord, quelle est l’évolution des moyens financiers affectés au développement en 2019 ?
Je ne m’attarderai pas sur les éléments techniques qui figurent dans le rapport spécial, mais je souligne que les circuits de financement connaissent cette année deux changements significatifs : d’une part, l’Agence française de développement, l’AFD, ne percevra plus de « ressource à condition spéciale », à la suite de sa requalification comptable par l’Office statistique de l’Union européenne, Eurostat, et l’Institut national de la statistique et des études économiques, l’INSEE, et, d’autre part, le Gouvernement a choisi de « rebudgétiser » la part de la taxe sur les transactions financières affectée à l’AFD.
Cette rebudgétisation a été critiquée par certaines ONG, mais nous ne partageons pas cette vision. La taxe sur les transactions financières, ou TTF, est affectée au Fonds de solidarité pour le développement, le FSD, et à l’AFD. La part affectée au FSD ne diminue pas d’un euro, et les moyens de l’AFD sont augmentés dans des proportions quatre fois supérieures à la perte de la TTF. Aussi, ces critiques nous semblent focalisées sur l’outil plutôt que sur le niveau des moyens.
En définitive, en tenant compte de ces évolutions des circuits de financements, nous constatons un effort substantiel en faveur du développement en 2019, en autorisations d’engagement du moins. Au total, celles-ci augmentent de 1, 4 milliard d’euros par rapport à 2018. L’effort est moindre en crédits de paiement, qui augmentent de 127 millions d’euros sur l’ensemble de la mission.
Il est normal de constater un écart significatif, même si cela peut paraître bizarre, entre les autorisations d’engagement et les crédits de paiement, étant donné le temps de mise en œuvre des projets, mais le plus important est de pouvoir engager de nouveaux projets dès 2019. Cependant, concrètement, si les moyens pour engager des projets sont là, une grande partie de l’effort financier, vous le savez bien, monsieur le ministre, est reporté aux années ultérieures.
Cet effort financier est d’autant plus nécessaire que nous ne respectons toujours pas nos engagements internationaux et que nous sommes distancés par nos voisins. Certes, notre aide a fortement progressé – de 15 % – en 2017 et atteint 0, 43 % de notre revenu national brut, mais nous restons distancés par l’Allemagne et le Royaume-Uni, dont l’aide représente respectivement le double et 60 % de plus que la nôtre. Cet écart s’explique notamment par le niveau des dons bilatéraux, trois fois supérieur chez nos voisins.
Sommes-nous sur la bonne voie pour atteindre l’objectif de 2022 ?
Le budget pour 2019 n’apporte pas les réponses attendues. Le comité interministériel de la coopération internationale et du développement, le CICID, a défini en février dernier une trajectoire en pourcentage du RNB, mais sans la traduire budgétairement.
Notre aide publique au développement, au sens de l’OCDE, devra augmenter en 2022 de 5 milliards d’euros par rapport à 2017, sans que cela signifie qu’il faille réaliser un effort financier de cet ordre, compte tenu de l’effet de levier des prêts. Nous n’avons pas obtenu plus de précisions sur le montant des crédits budgétaires qui seront nécessaires pour y parvenir. Cette trajectoire sera définie – ou du moins il faudra y veiller – dans la future loi de programmation de l’aide publique au développement, qui devrait être examinée au Parlement au premier semestre de 2019. Des arbitrages budgétaires difficiles vont devoir être rendus. Il faudra fixer précisément le niveau des autorisations d’engagement et des crédits de paiement jusqu’en 2022 au moins.
Malgré ces points à préciser, nous constatons suffisamment d’éléments positifs pour accorder une confiance, certes vigilante, au Gouvernement et considérer que nous sommes sur la bonne voie pour atteindre l’objectif. En effet, ce budget porte une hausse inédite des moyens financiers. De même, nous observons un engagement personnel du Président de la République sur ce sujet, qu’il aborde régulièrement lors de ses déplacements et qui s’est illustré dans la création d’un « conseil de développement ».
Je passe à la partie du rapport que devait présenter M. Requier.
Quels sont les moyens dont disposera l’AFD en 2019 ? Ces moyens vont considérablement augmenter. S’agissant des dons, l’AFD disposera de près d’un milliard d’euros supplémentaires en autorisations d’engagement. En crédits de paiement, en revanche, l’augmentation n’est que de 68 millions d’euros. On observe à nouveau ce décalage entre autorisations d’engagement et crédits de paiement, qui confirme que le gros de l’effort financier est à venir. Ce milliard d’autorisations d’engagement supplémentaires sera décaissé sur treize années. Concernant les prêts, l’AFD bénéficiera de 500 millions d’euros supplémentaires de bonification, qui devraient lui permettre d’accorder 1, 5 milliard d’euros d’engagements supplémentaires.
Par ailleurs, l’augmentation de l’activité de l’Agence remet à l’ordre du jour un sujet régulièrement abordé devant la commission : le niveau des fonds propres de l’Agence. Comme vous le savez, l’AFD est une société de financement, soumise au respect des ratios prudentiels, qui peuvent l’empêcher de prêter à certains États, comme c’est déjà le cas aujourd’hui, par exemple au Maroc ou en Colombie.
L’article 71 bis du présent projet de loi de finances prévoit une solution à court terme : l’État apportera une garantie explicite à certains prêts souverains accordés par l’Agence, et ce dans la limite de 750 millions d’euros. Par ailleurs, à compter de 2020, il faudra envisager un renforcement des fonds propres de l’agence.
Par ailleurs, une des conditions essentielles de l’atteinte de l’objectif réside dans la capacité de l’AFD à absorber cette hausse de son activité.
D’après les informations que nous avons recueillies, pour respecter l’objectif de 0, 55 % en 2022, il faudra, à cette date, que les engagements de l’Agence s’élèvent à 17, 6 milliards d’euros, soit une multiplication par deux en six ans. Demander à un opérateur de multiplier par deux son activité en aussi peu de temps n’est pas anodin, c’est donc l’une de nos préoccupations. S’y ajoutent des inquiétudes sur la capacité des pays en développement à absorber des volumes de prêts en hausse importante.
Je dirai un mot sur la répartition entre l’aide bilatérale et multilatérale.
Le budget pour 2019 met l’accent sur la hausse de notre aide bilatérale, à travers les ressources de l’AFD. En effet, le CICID a décidé que l’aide bilatérale bénéficiera des deux tiers de l’augmentation des crédits d’ici à 2022. Cette priorité en 2019 est d’autant plus logique que l’aide bilatérale est plus longue à mettre en œuvre que l’aide multilatérale.
Nous soulignons cependant la nécessité de ne pas négliger notre aide multilatérale, dans un monde où le multilatéralisme est fortement contesté, notamment aux États-Unis.
Je terminerai mon intervention en présentant l’article 72, rattaché à la mission.
Cet article autorise à souscrire à l’augmentation de capital de la Banque internationale pour la reconstruction et le développement et de la Société financière internationale. Ces deux institutions multilatérales appartiennent au groupe de la Banque mondiale.
La première intervient auprès des pays à revenu intermédiaire et dans des pays plus pauvres, à condition qu’ils soient solvables ; la seconde intervient pour sa part dans les pays en développement, mais exclusivement auprès du secteur privé. Cette souscription correspond à un coût total de 464 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 93 millions d’euros en crédits de paiement par an entre 2019 et 2023.
Cette augmentation de capital s’accompagne d’évolutions au sein de la Banque mondiale conformes aux souhaits de la France, y compris en ce qui concerne sa gestion. De plus, cela permettra de maintenir la place de notre pays au sein de l’actionnariat de cette institution.
En raison de l’ensemble des éléments que j’ai présentés, la commission des finances vous invite à adopter les crédits de la mission et du compte de concours financiers, ainsi que l’article 72 rattaché à la mission.
M. Richard Yung et M. le président de la commission des affaires étrangères applaudissent.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, on doit se féliciter de l’ambition de porter à 0, 55 % du RNB l’aide publique au développement française. Il s’agit d’un instrument important pour lutter contre les désordres du monde : pauvreté, conflits, mouvements de population subis. Le milliard d’euros supplémentaire d’autorisations d’engagement en dons prévu pour 2019 devrait donc aider à orienter davantage notre aide vers les pays les plus pauvres, ce que nous demandions depuis longtemps. C’est pourquoi notre commission a donné un avis favorable aux crédits inscrits au sein du projet de loi de finances pour 2019.
Néanmoins, conformément aux priorités affichées par le Président de la République lui-même, si l’aide au développement, c’est mettre plus de moyens en direction des pays qui demandent plus, c’est aussi s’assurer de l’efficacité de l’aide apportée. On ne peut mesurer le succès d’une politique publique à sa seule capacité à dépenser davantage, surtout quand on peut s’interroger sur la définition de la stratégie, ses objectifs, ainsi que sur son pilotage politique et son évaluation. Ainsi, on ne peut que souscrire à l’excellent constat du député Hervé Berville et au récent rapport de la Cour des comptes à ce sujet.
Concernant la stratégie, le comité interministériel de la coopération internationale et du développement s’est réuni en février dernier, après plus d’un an sans réunion. En vingt ans, monsieur le ministre, il n’aura été réuni que onze fois.
Quant au conseil du développement auprès du Président de la République et au conseil d’orientation stratégique de l’AFD dont on doit se féliciter, on ne peut pas leur demander plus que de fixer les grandes orientations. Ainsi, aujourd’hui, entre la lutte contre la pauvreté et la transition écologique, entre l’aide à l’Afrique subsaharienne et les prêts à la Chine, entre la stabilisation des zones de conflit et la réduction des migrations subies, notre aide vise à atteindre des objectifs nombreux, peut-être même contradictoires dans certains cas, en tout cas peu lisibles pour nos concitoyens.
Dès lors, il nous paraît difficile de faire l’économie d’un vrai pilotage ministériel, s’agissant d’une politique qui va peser plus de 15 milliards d’euros en 2022. L’Agence française de développement, qui va passer à près de 18 milliards d’euros d’engagements en 2022, a profité du retrait relatif de l’État pour acquérir une large autonomie. Si l’on veut répondre à l’ambition politique affichée, il est nécessaire que le Gouvernement et le Parlement puissent être davantage impliqués. L’aide au développement ne peut pas consister en une accumulation de projets, mais en une vraie politique de la France pour soutenir la volonté de développement des pays aidés.
Vous avez compris, monsieur le ministre, l’importance que nous accordons à la préparation de la prochaine loi d’orientation et de programmation.
En dernier lieu, il va de soi que le déficit de transparence et de « redevabilité » récemment relevé, de même que la trop faible part des crédits dépensée et évaluée, ne sont pas acceptables. Il importe que davantage de crédits impliquent davantage d’évaluation. Là aussi, monsieur le ministre, nous comptons sur vous pour mettre en place une évaluation plus efficace.
M. Jean-Pierre Vial, rapporteur pour avis. Pour notre part, nous soutiendrons l’adoption des crédits de la mission « Aide publique au développement. »
MM. Bruno Sido et Richard Yung applaudissent, de même que M. le président de la commission des affaires étrangères.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme mon collègue rapporteur pour avis Jean-Pierre Vial, je me félicite de l’augmentation des moyens consacrés à l’aide publique au développement, mais surtout du choix de privilégier l’instrument des dons et le bilatéral dans la progression à venir. Une telle orientation permettra au Gouvernement d’avoir une meilleure maîtrise de nos financements et de les diriger davantage vers les pays les plus pauvres, en particulier ceux d’Afrique subsaharienne, où se concentrent pour une large part les enjeux de l’avenir.
La progression des crédits se traduira notamment par une forte augmentation des moyens de l’Agence française de développement, dont les engagements devraient passer de 11 milliards d’euros en 2018 à près de 18 milliards d’euros en 2022. C’est considérable, d’autant que cette augmentation doit avoir lieu dans un contexte de moindre capacité à emprunter de certains pays émergents et, surtout, de nombreux pays africains, qui ont parfois contracté des emprunts massifs auprès de banques chinoises, avec les effets que l’on sait. Augmenter ses engagements sans diminuer en rien ses exigences en matière financière, environnementale et sociale, c’est un défi de taille qui attend l’AFD pour les prochaines années.
Je souhaiterais par ailleurs souligner l’importance de la contribution française à la lutte contre le changement climatique, avec notamment un financement à destination du Fonds vert pour le climat de 775 millions d’euros sur la période 2015-2018. Cet enjeu, tout comme celui de la préservation de la biodiversité, ne peut plus être séparé de l’enjeu du développement. J’ajouterai deux remarques sur ce point.
D’abord, le Fonds vert a actuellement beaucoup de mal à décaisser ses financements, et ses procédures sont très longues. Il faudra donc réfléchir l’année prochaine, dans le cadre des discussions du G7 à Biarritz, à une amélioration de sa gouvernance et de ses procédures.
Deuxième remarque : nos contributions aux divers fonds climatiques ou, plus largement, en faveur du développement durable sont aujourd’hui très complexes, pour ne pas dire illisibles. Ce problème concerne d’ailleurs en réalité l’ensemble de l’aide publique au développement française. Les vecteurs budgétaires et non budgétaires sont si nombreux qu’il est très difficile, parfois impossible, de savoir précisément lesquels de nos financements contribuent à cette cible des 0, 55 % que nous sommes censés atteindre en 2022, et dans quelle proportion.
Des évolutions de la présentation budgétaire de la mission « Aide publique au développement » ayant été évoquées pour améliorer cette situation, pourriez-vous, monsieur le ministre, nous en dire plus ?
Par ailleurs, nous regrettons – je sais que ce n’est pas l’avis de tous ici – que la part de taxe sur les transactions financières affectée à l’aide au développement diminue en raison de la rebudgétisation des 270 millions d’euros auparavant directement affectés à l’AFD. Cette évolution, et surtout l’absence de réelle visibilité sur la trajectoire censée nous permettre d’atteindre les 0, 55 % du RNB consacrés à l’aide publique au développement, a, au demeurant, conduit le groupe socialiste et républicain à s’abstenir lors du vote de cette mission en commission.
En tout état de cause, nous suivrons avec une très grande attention les travaux de la future loi d’orientation et de programmation annoncée pour 2019, afin d’y inscrire aussi précisément que possible la stratégie, les moyens et, surtout, les mécanismes de contrôle qui permettront de donner un nouvel élan à notre politique de développement. Nous pourrons ainsi rejoindre les leaders européens que sont le Royaume-Uni, les pays nordiques et l’Allemagne, car ils ont déjà compris que l’aide au développement constituait un investissement indispensable, à la fois pour préserver leur influence et pour contribuer à réduire les désordres du monde qui en a grand besoin.
M. Bruno Sido applaudit.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des finances, mes chers collègues, les autorisations d’engagement en matière d’aide publique au développement vont donc s’accroître de manière très sensible de plus de 1, 4 milliard d’euros supplémentaires. Nous nous en réjouissons, en espérant que la trajectoire budgétaire des années prochaines suivra le même rythme. Et nous nous réjouissons plus particulièrement que le Gouvernement ait d’ores et déjà décidé d’affecter les deux tiers de la progression des crédits de l’aide publique au développement à des financements bilatéraux, comme l’ont rappelé nos rapporteurs.
Ne nous méprenons pas : les financements multilatéraux ont souvent permis des avancées importantes et, à condition d’y exercer une influence à la hauteur de nos contributions, ils peuvent constituer des leviers pour atteindre nos objectifs. Ainsi, le Partenariat mondial pour l’éducation cofinance notre priorité éducative au Sahel. L’augmentation annoncée de notre contribution à ce fonds, qui a montré son efficacité, est évidemment un point positif – nous la réclamions d’ailleurs depuis plusieurs années.
Toutefois, j’ai eu l’occasion de m’en entretenir avec vous, monsieur le ministre, est-ce vraiment le cas des 50 contributions multilatérales de la mission « Aide publique au développement », dont les 850 millions d’euros versés chaque année au Fonds européen de développement, les 380 millions d’euros destinés au Fonds mondial de lutte contre le Sida ou les 775 millions d’euros au Fonds vert pour le climat depuis quatre ans ? Nous ne contestons pas leur fondement et leur utilité, mais ils devraient être mieux articulés les uns avec les autres, mieux expliqués, et surtout mieux évalués ! En tout état de cause, le fait d’augmenter en priorité les financements bilatéraux apparaît cohérent avec la volonté que nous exprimons tous de reprendre en main le pilotage politique de notre politique d’aide au développement.
Une seconde manière d’y parvenir est d’améliorer l’évaluation.
Le Président de la République a dit récemment : « Chaque euro doit être utilisé à bon escient. » Aujourd’hui, l’évaluation reste marquée par son caractère lacunaire, par sa dispersion entre de multiples services – le principal appartenant à l’agence même dont il évalue les projets, à savoir l’AFD – et, enfin, par son caractère trop procédural. Ainsi organisée, l’évaluation de l’aide publique au développement ne permet en aucun cas d’organiser un pilotage par les résultats, ce qui ne fait qu’alimenter de constantes interrogations sur l’utilité de l’aide, son efficience et le devenir des projets dans le long terme.
Dans ce domaine, sachons tirer parti de l’exemple de la commission indépendante pour l’impact de l’aide créée en 2011 par le gouvernement britannique ! Il faut notamment mettre davantage à contribution les cabinets d’expertise, fussent-ils privés, non pas, comme c’est le cas actuellement, pour qu’ils se livrent à une analyse polie et consensuelle sur tel ou tel programme, mais pour qu’ils produisent des évaluations indépendantes, incisives et sans concession.
Enfin, monsieur le ministre, la décision de rapprocher Expertise France de l’Agence française de développement au sein d’un même groupe a été, c’est le moins qu’on puisse dire, un peu précipitée au cours de l’été dernier.
Au lieu de chercher à améliorer le modèle économique d’Expertise France, dont les résultats ont été remarquables, le Gouvernement a décidé de l’adosser à une AFD dont les moyens augmentent fortement. Cette solution de facilité pourrait engendrer d’autres problèmes, tant la culture de l’AFD est éloignée de celle d’une agence d’expertise technique.
Monsieur le ministre, comment envisagez-vous ce rapprochement, qui devra créer des synergies entre ces deux entités, mais aussi préserver l’autonomie d’Expertise France et sa capacité à poursuivre son action indispensable, notamment dans le domaine du continuum sécurité-développement ?
Sous le bénéfice de ces observations, la commission s’est prononcée très largement en faveur du soutien à ces crédits.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe Union Centriste, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe La République En Marche.
Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque unité de discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Jean-Louis Lagourgue.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des affaires étrangères, mes chers collègues, l’aide publique au développement est une composante essentielle de notre politique d’influence, mais également un impératif de justice et de solidarité internationale qui fait la fierté de la France.
Néanmoins, force est de constater que nous avons échoué depuis quarante ans à remplir nos engagements internationaux en la matière. L’aide publique française n’a jamais dépassé 0, 6 % du revenu national brut, contre un objectif fixé à 0, 7 % par l’Assemblée générale des Nations unies en 1970. Elle est aujourd’hui plus proche de 0, 4 %, ce qui semble insuffisant pour remplir les missions fixées au groupe AFD notamment, au Sahel et dans d’autres zones prioritaires.
Face à ces défis, nous saluons l’initiative du Gouvernement, conformément aux orientations données par le Président de la République, de remettre la France sur la voie du respect de ses engagements. L’objectif intermédiaire de 0, 55 % du RNB en 2022 nous semble réaliste, et l’augmentation de 4, 7 % des crédits de la mission « Aide publique au développement » cette année, est un bon signal dans ce sens.
Le groupe Les Indépendants – République et Territoires regarde avec bienveillance cette évolution, mais restera vigilant quant au respect effectif de cet engagement. Dans un contexte budgétaire contraint, la tentation est en effet, souvent, de considérer l’aide au développement comme une variable d’ajustement. D’autres pays comme la Chine en ont au contraire fait une composante essentielle de leur diplomatie d’influence, en Afrique, et en Europe de l’Est notamment, avec un volontarisme politique fort et un effort financier important, appuyé sur de puissants opérateurs.
Nous devons changer de logique dans notre approche de l’aide au développement. Elle est certes un impératif de solidarité, mais elle est aussi, et surtout, un investissement : un investissement dans l’avenir, un investissement dans la réussite, chez elle, d’une jeunesse qui s’abîme trop souvent dans une course folle vers l’Europe, un investissement pour que la prospérité, demain, ne soit plus dans ces pays un rêve d’ailleurs, mais une réalité concrète.
Avec cet objectif à l’esprit, il faut penser notre aide au développement d’une façon plus large, à la fois dans la définition des bailleurs, dans les types de projets financés et dans le pilotage des fonds.
En ce qui concerne les acteurs, nous devons impérativement améliorer l’articulation entre l’État, les collectivités territoriales, les ONG et les entreprises ou fondations privées. L’avenir de l’aide publique au développement est aussi, peut-être, dans des partenariats entre les différents types de bailleurs, en fonction des expertises de chacun.
En ce qui concerne les objectifs de l’aide au développement, nous voyons d’un bon œil la convergence des processus « objectifs du développement durable » et « financement du développement » sous l’égide des Nations unies.
Ce rapprochement entre aide au développement et développement durable s’est matérialisé lors de la troisième conférence internationale sur le financement du développement à Addis-Abeba en juillet 2015. Le programme d’action d’Addis-Abeba adopté à son issue a envoyé un message fort sur l’importance du climat et de son intégration dans l’ensemble des politiques de développement. Les événements climatiques extrêmes tels que les sécheresses ou les inondations sont des menaces importantes qui touchent l’ensemble des composantes – économique, sociale et politique – du développement.
Enfin, à propos du pilotage des fonds, deux divisions nous apparaissent structurantes et gagneraient à être éclaircies : tout d’abord, la division entre aides bilatérales et aides multilatérales – elles n’ont ni la même signification politique ni la même efficacité – ; ensuite, la division des crédits entre deux programmes distincts, pilotés par deux ministères différents. Cet émiettement conduit à multiplier les instances de coordination. Il fait perdre à notre politique d’aide au développement à la fois lisibilité et efficacité.
Sous réserve de ces quelques points de vigilance et en espérant, monsieur le ministre, que vous pourrez tenir compte de nos pistes de réflexion, le groupe Les Indépendants – République et Territoires votera ces crédits, qui poursuivent une remontée en puissance bienvenue de notre aide au développement.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes appelés à débattre de deux programmes : le programme 110, relatif à l’aide économique, et le programme 209, relatif à la solidarité. Le premier représente 960 millions d’euros, le second 1, 8 milliard d’euros. Le total dépasse donc 2, 7 milliards d’euros.
À ce titre, une première question se pose : pourquoi y a-t-il deux programmes ? Bien sûr, on peut opérer certaines distinctions, mais, en réalité, ces programmes couvrent des activités très similaires. Pour ma part, j’ai un peu de mal à comprendre pourquoi il n’y en a pas qu’un.
J’ajoute que nous ne voyons ici que la partie émergée de l’iceberg. Ces crédits représentent 36 % de l’APD ; les 64 % restants sont ailleurs. Monsieur le ministre, j’ai bien conscience qu’ils ne sont pas perdus : je suis tout à fait serein ! §Mais ils ne figurent pas dans l’enveloppe dont nous débattons au titre de l’aide publique au développement.
En la matière, nous avons dénombré, au total, vingt-quatre programmes budgétaires, c’est-à-dire les deux que j’ai mentionnés et vingt-deux autres, et quatorze ministères compétents. Un tel découpage est quand même une particularité française… En définitive, on n’y comprend rien !
Mes chers collègues, je ne sais si vous avez essayé d’analyser, globalement, la politique d’aide publique au développement menée par la France : c’est tout à fait impossible ! D’ailleurs – plusieurs intervenants l’ont dit –, il y a une multitude de fonds, bilatéraux ou multilatéraux, représentant respectivement 700 millions, 300 millions ou 20 millions d’euros. Notre aide au développement est tout à fait dispersée ; je ne suis pas le premier à le dire, peut-être même s’agit-il d’une banalité, mais, à mon sens, il faudrait se pencher sur la question.
M. le président de la commission des affaires étrangères acquiesce.
Certains ont demandé un ministère à part entière, ce qui reviendrait à rétablir le ministère de la coopération. C’est le balancier classique de l’histoire : ce ministère a été supprimé, et à présent il est question de le recréer. Pour ma part, je ne suis pas convaincu qu’il s’agisse d’une très bonne idée. Ce qui compte, c’est le contrôle des crédits, et il ne suffit pas de créer un ministère de la coopération pour que ce dernier dispose du pouvoir politique de décider.
Peut-être faudrait-il donner davantage de pouvoirs à l’AFD, dont les responsabilités s’étendent. Mais certains – pas moi ! – estiment qu’elle a déjà trop de pouvoirs et qu’elle échappe en quelque sorte à ses maîtres.
Je ne crois pas que ce soit vrai, mais ce n’est peut-être pas non plus une bonne idée de confier tous les crédits à l’AFD.
Monsieur le ministre, il s’agit là d’un problème délicat : excusez-moi de ne pas pouvoir, pour l’heure, vous suggérer une solution.
Les objectifs de l’APD sont bien connus.
Le premier, c’est la lutte contre la radicalisation et le djihad, par notre action non seulement militaire, mais aussi économique, sociale et humanitaire au Sahel. Souvenez-vous de la phrase de Lyautey : quand je construis une école, je libère un bataillon. Aujourd’hui, c’est encore vrai : partout où nous menons des actions de développement, nous aidons à la lutte contre la radicalisation.
Le deuxième objectif, c’est la lutte contre l’émigration illégale. L’action menée à ce titre est peu ou prou la même que la précédente, même si, en la matière, nous avons peut-être un peu moins de succès.
Le troisième objectif, c’est la lutte contre le changement climatique. À cet égard, le verdissement des projets financés par l’AFD mérite d’être salué. Depuis plusieurs années, cette agence a fait un effort considérable pour prendre en compte la question du climat, dans un contexte de sociétés plus ouvertes.
Nous avons déjà évoqué les différents débats habituels, et même classiques. Je pense à la répartition entre les dons et les prêts, question qui revient chaque année. Je sens que le don a le vent en poupe, et c’est peut-être une bonne chose.
Je pense à la distinction entre le bilatéral et le multilatéral ; pour l’instant, à en croire nos différents débats, le bilatéral semble l’emporter. Beaucoup le soutiennent. Mais, pour ma part, j’estime que le multilatéral a de grands mérites, en particulier lorsqu’il est organisé à l’échelle européenne.
Enfin, monsieur le ministre, je pense à différents débats, que vous connaissez bien, quant aux modes de financement : il s’agit de la taxe sur les billets d’avion et de la taxe sur les transactions financières, la fameuse TTF, dernière laquelle les États de l’Union européenne courent tous depuis de nombreuses années. Où en sont les discussions relatives à la mise en place de la TTF à l’échelle européenne ?
Mes chers collègues, vous l’aurez compris, les membres du groupe auquel j’appartiens voteront, avec enthousiasme, les crédits de cette mission.
M. le président de la commission des affaires étrangères applaudit.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous abordons avec cette mission ce qui devrait être l’un des axes majeurs de la politique internationale de la France. Or notre pays n’a jamais été au rendez-vous de l’engagement international fixant à 0, 7 % du PIB l’aide publique au développement. Longtemps, nous nous en sommes même éloignés.
Pour la première fois, le budget inverse la trajectoire, et c’est tant mieux, mais en fixant d’emblée un objectif pour 2022 qui reste inférieur à 0, 7 %. Si la trajectoire est nouvelle, l’ambition nécessaire n’est pas encore au rendez-vous.
Cette discussion reprendra très vite, dès 2019, avec le projet de loi de programmation de l’aide publique au développement. J’espère que nous réviserons à la hausse l’ambition affichée – pour ce qui nous concerne, nous travaillerons en ce sens. Ce serait un signe fort de réorientation de notre politique extérieure, aujourd’hui clairement dominée par la militarisation de nos relations internationales.
Si l’on ajoute la LPM, les OPEX et le niveau des ventes d’armes, dont nous sommes champions, on mesure à quel point l’APD fait figure de parent pauvre de notre politique internationale. Or c’est un grave contresens historique, tant le développement et la réduction des inégalités mondiales sont aujourd’hui les véritables clefs de la paix et de la sécurité collective mondiales. Je note toutefois que, adossées à l’effort budgétaire nouveau annoncé, la création d’un conseil de développement et la réactivation du conseil d’orientation stratégique de l’AFD constituent de premiers pas vers un nouveau pilotage de notre politique en la matière. Néanmoins, la trajectoire budgétaire appelle plusieurs remarques.
Selon le budget triennal proposé par le Gouvernement, les crédits budgétaires devraient progresser de manière exponentielle : cette hausse devrait être de 4, 9 % en 2019, de 10, 3 % en 2020, puis de 51, 4 % en 2021 et 2022. À terme, l’abondement public atteindrait ainsi 7 milliards d’euros, contre 2, 8 milliards d’euros aujourd’hui. L’effort est important, mais il est renvoyé dans le temps, ce qui laisse planer un doute regrettable quant au respect de la trajectoire annoncée.
Pour cette année, le Gouvernement annonce une progression de 1, 4 milliard d’euros, mais la hausse réelle est plus limitée. En effet, 1 milliard d’euros crédité cette année ne pourra être décaissé que sur plusieurs années, et 270 millions d’euros proviennent d’une réécriture budgétaire, avec l’inscription dans la mission des fonds provenant initialement de la taxe sur les transactions financières.
À ce propos, nous regrettons vivement la décision de diminuer la part de cette taxe dédiée à l’aide au développement. Elle laisse craindre de futures amputations du même type. Pourtant, des leviers existent pour atteindre et surpasser les objectifs annoncés par le Président de la République. Plusieurs organisations ont fait, en ce sens, des propositions que nous avons choisi de relayer par nos amendements au titre de la première partie du projet de loi de finances. Ainsi, en réorientant la totalité du produit de la TTF et de la taxe sur les billets d’avion, et en lissant sur l’ensemble du quinquennat la hausse des crédits, nous aurions pu obtenir une trajectoire montant plus rapidement ; ce faisant, les objectifs finaux auraient même été dépassés.
D’autres questions essentielles demeurent, quant au périmètre et aux objectifs de notre aide au développement. Notre politique reste étroitement autocentrée.
Monsieur le ministre, vous avez souligné qu’« il faut reconnaître comme légitime le lien entre notre effort de solidarité et les bénéfices à en attendre pour notre pays ». Mais cette action est-elle bien à la hauteur de la situation ? Est-ce bien comprendre les enjeux du développement, quand la survie de la planète et le développement humain sont en cause ? Est-ce cette logique qui nous conduit, par exemple, à considérer que la régulation de l’immigration est du ressort de notre aide publique au développement, à y inclure le financement d’accords discutables avec la Turquie ? Ce choix est d’autant plus discutable que le développement des pays favorisera nécessairement des migrations à court et moyen terme. Ces dernières seront alors conçues comme des vecteurs d’échanges et des chances d’élévation sociale. Cette conception restrictive de l’APD est d’ailleurs contraire aux intentions premières de la déclaration de Paris et des principes de Busan.
À nos yeux, la volonté exprimée d’inscrire dans l’APD des dépenses de sécurité et de défense est également très contestable. Procéder ainsi, c’est prendre le problème à l’envers, quand l’insécurité naît de plus en plus de l’accumulation des inégalités de développement.
Par ailleurs, à une question que je vous avais posée, vous aviez répondu le 30 août dernier que vous comptiez lever les freins au soutien financier du secteur privé et inscrire ces investissements comme partie intégrante de l’APD. Si le secteur privé investit à l’étranger via des fondations, c’est tant mieux. Mais l’État ne peut arguer de ces initiatives pour freiner les engagements propres du développement public.
Vous le constatez, ces choix nous inspirent de multiples réserves – et je pourrais en détailler d’autres. Nous aborderons avec exigence le débat décisif que nous consacrerons au projet de loi de programmation en 2019.
Les membres de notre groupe ne pourront pas voter ce budget. Nous soulignons les progrès accomplis, mais nous souhaitons que la France s’engage au plus vite vers un effort autrement ambitieux, vers une réelle réorientation des aides apportées.
Mme Christine Prunaud et M. Yvon Collin, rapporteur spécial, applaudissent.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la France et l’Europe sont aujourd’hui au cœur d’enjeux structurels majeurs : d’abord, la crise écologique ; ensuite, la pression des migrations économiques. Ces défis appellent, de par leur ampleur et leur pérennité, des réponses structurelles.
Nous pouvons et nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour adapter notre pays et trouver des solutions qui répondent aux effets de tels phénomènes. Mais nous devons aussi et surtout chercher à agir – je dis bien « agir » – sur leurs causes, principalement dans les territoires où ils naissent. C’est en cela que l’aide au développement nous est essentielle.
Il faut accompagner le développement des pays d’origine, pour permettre à leur jeunesse de demeurer sur place dans de bonnes conditions, de construire une famille et une vie décente. Nous éviterons ainsi que ces personnes viennent alimenter les flux de migration.
De même, une réponse efficace à l’urgence climatique serait de proposer, à des pays qui polluent malgré eux énormément, des infrastructures urbaines, technologiques et énergétiques pourvues de technologies propres. L’enjeu est bien de limiter leur phase de dépendance aux énergies fossiles. À cet égard, faire du respect de l’accord de Paris un critère majeur dans la sélection des projets aidés par la France est une très bonne chose, et je tiens à saluer cette décision.
Ne l’oublions pas : cette politique ne doit pas seulement être justifiée par ce qu’elle pourrait nous rapporter, dans une logique purement comptable de retour sur investissement. Elle doit également résulter d’une responsabilité de solidarité à l’égard de nations dont les conditions de vie doivent être améliorées.
Monsieur le ministre, nous saluons la progression significative des fonds alloués à l’aide publique au développement. Ils croissent en effet de 4, 3 % en crédits de paiement et de près de 46 % en autorisations d’engagement, pour pas moins de 1, 3 milliard d’euros supplémentaires.
La montée en puissance de l’Agence française de développement démontre l’implication de notre pays dans le soutien au développement : l’AFD totalise près de 40 milliards d’euros de bilan et environ 10 milliards d’euros d’engagements nouveaux en 2017, contre seulement 7 milliards d’euros en 2012. Je salue assurément cette progression.
Essentielle à la politique d’influence de la France, l’aide publique au développement telle que mise en œuvre par l’AFD doit en outre nous permettre de continuer à exister face au nouveau poids lourd qu’est la Chine ; ce grand pays est de plus en plus présent dans le monde, tout particulièrement en Afrique.
Le Président de la République a annoncé que l’aide publique au développement passerait à 0, 55 % du revenu national brut en 2022. En conséquence, l’AFD devra encore accroître son activité, pour atteindre près de 18 milliards d’euros à cette échéance. Si nous l’encourageons, je m’interroge sur sa capacité à mettre en œuvre une telle hausse, qui représente tout de même près de 80 % en cinq ans : ça n’est pas rien !
Je mets donc l’accent sur le fait que cette hausse ne doit pas être uniquement un affichage quantitatif. La volonté d’augmenter massivement les engagements ne doit pas aller à l’encontre de la pertinence des actions menées. Elle ne doit pas nuire à l’efficacité de l’aide. Nous devons ainsi veiller à ce que l’aide soit allouée à des projets œuvrant effectivement au développement des régions concernées, en y associant pleinement les acteurs locaux. Les critères de sélection de ces projets doivent demeurer au cœur de notre stratégie d’aide. Nous y serons particulièrement vigilants.
Enfin, j’aborderai la question de l’aide multilatérale au développement. Il faut bien admettre que nous en parlons peu, malgré son importance : nous versons beaucoup d’argent aux fonds multilatéraux, qui font sans doute du bon travail, mais dans une opacité que je qualifierai de regrettable. Les crédits alloués à l’aide économique et financière multilatérale augmentent de 9, 14 % et les montants affectés à la coopération multilatérale progressent de 28, 7 %. Il serait bon que le Gouvernement et le Parlement s’engagent vraiment, l’un et l’autre, dans un suivi effectif de ces fonds.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, vous l’aurez compris, après avoir mis en avant toutes les observations que je viens d’exprimer, en leur nom, à cette tribune, le groupe Union Centriste votera le budget de l’aide publique au développement.
Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et au banc des commissions, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, pour 2019, le budget de l’APD connaît une hausse substantielle, et je m’en félicite. Mais n’est-ce pas là une augmentation en trompe-l’œil ?
Le chiffre de 1 milliard d’euros d’augmentation est impressionnant, mais il s’agit d’autorisations d’engagement. En crédits de paiement, cette hausse se limite à 130 millions d’euros.
Cela masque un recul grave. La taxe sur les transactions financières, jusqu’alors affectée à 50 % à l’APD, ne le sera plus qu’à hauteur de 32 %. Si cette déviation du flux de la TTF est, cette année, compensée budgétairement, donnant la possibilité de communiquer sur une augmentation de budget largement artificielle, rien ne dit que tel sera le cas dans le futur. Le risque est d’entériner le principe d’une baisse de l’affectation de ce financement innovant. Pour aller plus loin dans la recherche de financements innovants, pourquoi ne pas, par exemple, taxer les cargos, qui acheminent plus de 90 % des marchandises de la planète et dégagent une pollution massive ?
Il y a un certain manque de réalisme dans la réaffirmation de la cible de 0, 55 % du RNB en fin de quinquennat, objectif déjà peu ambitieux par rapport à nos engagements anciens de 0, 7 %, auxquels nombre de nos partenaires européens sont déjà parvenus. Il risque fort de ne pas être tenu, car la trajectoire proposée fait reposer l’essentiel de l’effort sur la fin du quinquennat. Nous étions à 0, 43 % en 2017, nous ne serons qu’à 0, 44 % en 2019, loin de l’objectif affiché.
Je salue en revanche le début de rééquilibrage entre dons et prêts. Octroyer des prêts n’est pas la raison d’être de notre APD, surtout quand il s’agit de pays ayant les moyens de financer leur propre développement, voire d’investir dans les pays du Sud, comme la Chine, encore fortement bénéficiaire de notre APD, qui investit massivement en Afrique sans se préoccuper de normes sociales ou environnementales. Les aides sous forme de dons, privilégiées par les agences de développement britanniques et allemandes, favorisent des projets en faveur de biens communs comme l’environnement, la santé ou l’éducation.
Cela fait des années que je plaide pour un renforcement du soutien français à l’éducation, notamment celle des filles, et je ne peux que me réjouir qu’il soit enfin élevé au rang de priorité. Les bienfaits des investissements dans l’éducation sont en effet nombreux, tant en matière de développement économique que d’égalité femmes-hommes, de santé, de lutte contre le changement climatique ou de limitation de la pression migratoire.
Mais l’APD délivrée sous forme de dons est aussi plus coûteuse pour le contribuable, d’où une exigence accrue en matière de contrôle et de recevabilité, surtout au regard des contraintes budgétaires qui pèsent sur l’ensemble des autres budgets de l’État.
Pour renforcer le contrôle et l’évaluation, nous avons besoin de définir avec beaucoup plus de rigueur des indicateurs assortis de cibles chiffrées. C’est notamment indispensable pour évaluer notre impact sur des enjeux transversaux tels que l’égalité de genre ou la cohérence de nos actions en matière d’empreinte carbone.
Autre enjeu sur lequel notre budget manque de vision à long terme : la francophonie. La France ne consacre que 32 % de son APD à des pays francophones – presque deux fois moins que ce que le Royaume-Uni flèche vers son espace géolinguistique. L’ensemble des seize pays identifiés comme prioritaires, tous situés en Afrique, ne représentaient en 2017 que 7, 2 % des engagements de l’AFD à l’étranger ! Une plus grande implication dans l’aire francophone serait doublement vertueuse, puisqu’elle permettrait de renforcer notre ancrage dans une zone en forte croissance tout en nourrissant cette dernière.
Dans un contexte de forte concurrence internationale, notamment chinoise, il est important de jouer toutes nos cartes. Je défendrai tout à l’heure un amendement visant à sécuriser des financements pour notre audiovisuel extérieur.
J’estime également qu’un déploiement financier de l’AFD réalisé sur fond d’étranglement budgétaire du Quai d’Orsay est contre-productif. Si nous voulons sortir du saupoudrage et du court-termisme, nous devons intégrer notre aide au développement dans un dialogue diplomatique de qualité. À cet égard, le financement de 50 millions d’euros au gouvernement gambien, qui n’est pas le meilleur exemple de démocratie, apparaîtrait presque comme une provocation au regard des coupes budgétaires drastiques imposées à notre ministère des affaires étrangères pour 2019.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Je conclurai simplement en rappelant combien nous devons être vertueux et combien notre aide au développement devrait aussi servir d’élément déterminant dans notre action diplomatique extérieure, avec un contrôle accru.
Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.
Applaudissements sur des travées du groupe socialiste et républicain.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, plusieurs orateurs l’ont rappelé avant moi, le Président de la République s’est engagé à consacrer, d’ici à la fin de son mandat, 0, 55 % de la richesse de notre pays à l’aide publique au développement. Or, pas plus que le budget pour 2018, le budget pour 2019 n’engage la France sur une trajectoire crédible vers cet objectif.
Certes, cette trajectoire prévoit une forte augmentation en fin de quinquennat, mais on peut s’interroger sur cette accélération très forte à partir de 2020 quand on sait que l’APD a souvent servi, par le passé, et sous tous les gouvernements, de variable d’ajustement en cas de difficultés budgétaires. En tout cas, nous sommes loin d’allouer à l’APD 0, 7 % du revenu national brut ; 0, 7 %, ce chiffre qui fait consensus dans les instances internationales et que d’autres pays européens ont déjà atteint : la Norvège, le Royaume-Uni, le Danemark ou encore l’Allemagne.
Après cette introduction, j’en viens à la répartition du budget lui-même.
Monsieur le ministre, je relève tout d’abord deux points positifs.
Premièrement, les financements dédiés à la lutte contre le changement climatique seront renforcés, pour atteindre 1, 5 milliard d’euros par an d’ici à 2020. Dans ce cadre, la priorité sera donnée à l’Afrique, aux pays les moins avancés, ou PMA, et aux pays les plus vulnérables au réchauffement.
Deuxièmement, l’éducation sera favorisée – Christian Cambon en a parlé. Sur les trois prochaines années, une contribution de 200 millions d’euros sera accordée au partenariat mondial pour l’éducation, le PME, contre seulement 17 millions d’euros pour la période précédente, et 100 millions d’euros de subventions additionnelles, via l’AFD, seront dédiés au secteur de l’éducation de base.
Je tiens à dire un mot de la répartition entre les prêts et les dons et entre l’aide bilatérale et l’aide multilatérale, sujets dont a parlé Richard Yung.
On sait que la faiblesse des dons conduit depuis longtemps l’APD française vers les pays les plus solvables ; les pays les plus pauvres ne bénéficient, eux, que d’un quart de l’aide française, les autres étant notamment des pays émergents, comme la Chine, le Brésil ou encore l’Afrique du Sud.
Je relève également la montée de nos contributions multilatérales, qui s’observe depuis quelques années, au détriment de nos aides bilatérales. Lors de sa réunion du 8 février dernier, le CICID, le comité interministériel de la coopération internationale et du développement, a préconisé de corriger cette évolution, conformément à ce que souhaite le Sénat depuis de nombreuses années. Les deux tiers de la hausse des autorisations d’engagement de l’APD d’ici à 2022 devront contribuer à la composante bilatérale de l’aide au développement. Parallèlement, les dons progresseront aussi, l’AFD devant bénéficier dès 2019 de plus de 1 milliard d’euros d’autorisations d’engagement.
Pour résumer, en valeur relative, les dons augmentent par rapport aux prêts et le bilatéral progresse par rapport au multilatéral, ce qui correspond aux préconisations du Sénat. Toutefois, en crédits de paiement, les dons projets de l’AFD ne passeront que de 213 millions à 280 millions d’euros et les autorisations d’engagement, en forte hausse, ne seront mises en œuvre que sur plusieurs années. L’aide réelle aux pays les plus pauvres, notamment ceux du Sahel, dépendra donc du renouvellement de ce niveau élevé d’autorisations d’engagement au cours des prochaines années. Il s’agit d’un véritable défi pour l’AFD, qui, ces dernières années, s’est concentrée sur l’instrument « prêts » au détriment de l’instrument « dons », l’Agence étant devenue, de facto, davantage une banque de développement qu’un opérateur de l’aide au développement.
Pour ce qui concerne les prêts, le plan de croissance rapide des engagements de l’AFD pose deux questions.
Premièrement, la majorité de ces engagements correspond à des prêts à taux de marché ou faiblement bonifiés, contractés avec des pays à revenu intermédiaire ou des pays émergents. Je pense à la Turquie, au Maroc, à la Colombie, à l’Inde, au Brésil, à l’Égypte, ou encore à la Jordanie. Or, dès 2018, la forte dégradation des capacités d’emprunt de plusieurs de ces États risque de rendre l’objectif de croissance des engagements de l’AFD plus difficile à atteindre.
Deuxièmement, si l’AFD parvient à augmenter encore ses prêts, ne risque-t-on pas d’observer une diminution de la qualité de ces engagements, avec des projets qui ne répondraient pas forcément à toutes les exigences environnementales, sociales ou de bonne gouvernance, de démocratie, pour être tout à fait clair, que l’AFD doit respecter ?
Dans le même ordre d’idées, ce plan de croissance va obliger l’Agence à demander l’extension de son mandat à de nouveaux pays, au risque de nuire à la cohérence de la politique d’aide au développement.
Richard Yung a déjà évoqué la gouvernance de l’AFD. Jean-Pierre Vial en a beaucoup parlé, avec raison, et nous l’avons déjà dit en commission : les sénateurs, toutes tendances confondues, pensent qu’il faut améliorer l’articulation entre la politique d’aide au développement et les autres dimensions de la politique extérieure que vous conduisez, monsieur le ministre, à savoir la diplomatie, le commerce extérieur, les interventions militaires contre le terrorisme, la lutte contre l’immigration irrégulière et, surtout, contre les causes profondes des migrations. Il est donc clair que, dans les prochains mois et les prochaines années, le Gouvernement doit renforcer le pilotage politique de l’AFD.
Enfin, je dirai un mot de la taxe sur les transactions financières, la TTF.
En 2018, le Gouvernement a décidé de revenir sur la mesure votée par le Parlement en 2017. En cessant de taxer les opérations intrajournalières, le fameux intraday, il a renoncé à des recettes représentant 2 milliards à 4 milliards d’euros supplémentaires par an. Cette année, vous aggravez votre cas, si je puis dire, en proposant que la TTF, jusqu’à présent allouée à 50 % au développement, ne soit plus affectée au développement qu’à hauteur de 30 %.
Jusqu’à présent, la TTF était allouée pour 528 millions d’euros au Fonds de solidarité pour le développement, le FSD, et pour 270 millions d’euros à l’AFD. Or le projet de loi de finances pour 2019 supprime la part affectée à l’AFD. Marie-Françoise Perol-Dumont en a parlé à l’instant. Elle a raison d’exprimer la crainte ressentie sur toutes les travées du Sénat. Il s’agit d’un recul historique, alors même que 2019 sera une année charnière, ponctuée de rendez-vous incontournables : le G7, bien sûr, la reconstitution du Fonds vert pour le climat, évidemment, et la reconstitution du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme.
Monsieur le ministre, ce budget n’est pas à la hauteur des ambitions que vous affichez et qu’affiche le Président de la République. Il n’est pas à la hauteur de ce que l’on attend de la France dans le monde. C’est la raison pour laquelle les sénateurs du groupe socialiste et républicain s’abstiendront.
Applaudissements sur des travées du groupe socialiste et républicain.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il est d’usage, dans le cadre de nos débats sur le projet de loi de finances, de structurer nos interventions par des moissons de chiffres et de comparaisons traduisant notre approbation, nos craintes ou nos réserves. Permettez-moi de déroger à cette tradition en abordant les crédits consacrés à l’aide publique au développement.
Les montants de ces crédits sont peu de choses au regard des grands postes de dépenses de l’État, mais ils ont, à mes yeux, une importance déterminante sur le sens de la politique mise en œuvre par notre pays.
Comme la plupart d’entre nous, je me félicite que cette politique publique bénéficie d’une hausse d’environ 4, 7 %, les crédits de paiement augmentant de 127 millions d’euros et les autorisations d’engagement, de 1, 4 milliard d’euros.
Je me remémore le discours du Président de la République prononcé à Ouagadougou en novembre 2017. Je me souviens plus précisément d’une phrase : « J’ai pris l’engagement d’avoir une France au rendez-vous du défi de développement. »
Il n’est pas dans mes habitudes de complimenter – on me le reproche assez –, mais je constate qu’il a tenu parole, car cette hausse de crédits est loin d’être négligeable au regard du contexte économique auquel notre pays est confronté. Elle est d’autant plus significative qu’au niveau mondial l’aide publique au développement, d’un montant de 146 milliards de dollars, est en baisse de 0, 6 %. À l’heure où les crises liées au changement climatique s’ajoutent aux guerres et conflits, nous pouvons être fiers de joindre actes et paroles, même si bien des efforts restent à accomplir.
Je n’insisterai pas non plus sur les équilibres entre autorisations d’engagement et crédits de paiement structurant les moyens alloués à cette politique publique. Ils s’expliquent par l’augmentation de notre contribution au Fonds européen de développement et trouvent aussi leur justification dans les fluctuations des autorisations d’engagement auxquelles nous avons à nous adapter.
Ayant fermement critiqué l’an passé, à cette même tribune, le risque de déclassement de notre pays, comment ne pas être réconforté en constatant l’inversion de la trajectoire inscrite dans le projet de budget pour 2019, qui nous laisse entrevoir la possibilité d’atteindre le chiffre de 0, 55 % de notre revenu national brut consacré à cette politique en 2022 ? Les esprits chagrins feront remarquer que nous sommes loin des objectifs électoraux du Président de la République. Pour ma part, je préfère voir le verre à moitié plein d’un chapitre budgétaire qui inverse « à la hausse » la courbe du montant de nos aides, alors que l’Allemagne ou le Royaume-Uni ont déjà atteint ce seuil de financement.
Si je salue notre trajectoire, en refusant de m’adonner à la litanie des indices et des chiffres, c’est pour insister sur le sens que nous devons donner à cette politique.
Nous avons tous entendu les critiques lancées à l’encontre de l’aide au développement, qualifiée de « sparadrap sur des fractures » ou de « tonneau des Danaïdes ». Pourtant, la réalité infirme ces jugements, et les besoins pour lutter contre la faim, la pauvreté, permettre à l’accès à l’eau et favoriser l’éducation rendent cette aide indispensable. Même imparfaite, même insuffisante, elle est l’une des pièces essentielles au travers de laquelle nous traduisons un devoir de solidarité.
À l’heure où la France traverse une grave crise et où nos concitoyens nous demandent de penser à leur pouvoir d’achat, renforcer l’aide publique au développement, c’est dire clairement que rien ne pourra se faire ici si l’on ne prend pas soin de ceux et celles qui souffrent aussi ailleurs. N’oublions pas, mes chers collègues, les 17 000 enfants qui meurent chaque jour dans le monde ! Plus que jamais, le développement constitue un enjeu géopolitique fort.
Monsieur le ministre, malgré les réserves que je viens de formuler, parce que ces crédits sont orientés à la hausse et parce que l’aide publique au développement n’est qu’une part du soutien que la France apporte aux pays les plus fragiles, le groupe du RDSE votera ce budget.
Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe La République En Marche. – M. le président de la commission des affaires étrangères applaudit également.
Monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires étrangères, mesdames, messieurs les sénateurs, je formulerai, après les rapporteurs et les différents orateurs qui sont intervenus, quelques observations sur une mission qui, chacun a bien voulu le reconnaître, enregistre une progression très significative de ses crédits.
Le programme 209 représente 3, 2 milliards d’euros en autorisations d’engagement et 2 milliards d’euros en crédits de paiement. Hors dépenses de personnel, il est doté de 1, 86 milliard d’euros en crédits de paiement, en progression de 80 millions d’euros en comparaison avec 2018. En matière d’autorisations d’engagement, l’augmentation est de 1, 37 milliard d’euros. Je tiens à le dire, en particulier à M. Vallini, qui formulait quelques observations pas forcément agréables, il s’agit d’une hausse sans précédent dans l’histoire de ce programme.
Madame Garriaud-Maylam, vous avez fait une comparaison entre les crédits de paiement et les autorisations d’engagement. Si l’on veut faire les choses correctement, les crédits de paiement doivent être mesurés par rapport aux autorisations d’engagement. L’important est de fixer les autorisations d’engagement, car, en matière d’aide au développement, vous le savez, vous qui connaissez bien ces sujets, les choses prennent du temps, les décaissements étant par nature progressifs. Je peux donc vous l’assurer, les autorisations d’engagement d’aujourd’hui seront les crédits de paiement de demain.
Je le répète, une trajectoire définie en fonction du PIB a été retenue par le CICID du 8 février dernier. Celle-ci sera confortée lors de la discussion du projet de loi de programmation de l’aide publique au développement, qui sera bientôt soumis au Parlement.
Par ailleurs, je voudrais préciser un point technique, le Gouvernement ayant déposé deux amendements – je présenterai le premier dans le cadre de cette mission, le second lors de l’examen de la mission « Action extérieure de l’État ».
Le Gouvernement a décidé, pour financer les annonces récentes du Premier ministre, un ajustement à la baisse de certains plafonds budgétaires. Or, pour ce qui concerne mon ministère, nous avons appris à la fin du mois de novembre que la contribution française au FED serait inférieure à la prévision initiale, ce qui nous permet de porter l’ensemble de l’ajustement qui nous est demandé sur le programme 209, sans qu’aucune des actions prévues soit remise en cause, tout en préservant les programmes de la mission « Action extérieure de l’État ». Pour le programme 209, cela signifie une hausse des crédits de paiement de 265 millions d’euros par rapport à 2018, ce qui représente, je le répète, une hausse sans précédent.
La hausse de nos engagements permettra de financer des priorités claires, que vous avez tous identifiées : la moitié de ces crédits ira aux secteurs de l’éducation, de la jeunesse ou de la santé ; l’autre moitié financera des actions pour résorber les fragilités en zone de crise, la lutte contre le changement climatique et l’égalité entre les femmes et les hommes. Elle permettra aussi d’affirmer nos choix géographiques : l’Afrique et, plus particulièrement, dix-neuf pays prioritaires seront les principaux bénéficiaires de cet effort. Ainsi, en 2019, l’aide publique apportée à l’Afrique sera de 1, 2 milliard d’euros, dont 429 millions d’euros pour le seul Sahel.
Je récapitule les orientations que j’ai indiquées à plusieurs reprises devant vous : l’inversion de la proportion entre dons et prêts, au bénéficie des dons, entre bilatéral et multilatéral, en faveur du bilatéral, et réorganisation géographique parallèle. Ce sont les souhaits que vous avez émis dans vos différentes interventions ; c’est ce que nous mettons en œuvre très concrètement dans le cadre de ce projet de budget.
Ces crédits en hausse permettront également de financer l’aide humanitaire, dont j’ai fait, vous le savez, une priorité. Comme je m’y étais engagé l’an dernier, les crédits de gestion et de sortie de crise augmentent, cette année encore, de 14 millions d’euros, pour atteindre 100 millions d’euros. À ce titre, le Fonds d’urgence humanitaire sera porté à 45 millions d’euros et notre aide alimentaire programmée sera également renforcée. Nous devenons enfin un acteur humanitaire significatif et sortons d’une situation où nous investissions dans ce secteur moins qu’un pays comme la Belgique – j’avais eu l’occasion de vous le dire l’année dernière.
Je souhaite que le débat sur la future loi de programmation sur l’aide publique au développement soit l’occasion de réfléchir aux moyens permettant de suivre l’utilisation de ces ressources importantes. Il convient en effet de disposer de moyens de pilotage et d’évaluation adaptés à l’effort consenti. Plusieurs d’entre vous sont intervenus sur ce point, avec raison. Il nous faudra donc mettre en œuvre un dispositif adéquat. À cet égard, permettez-moi de souligner trois décisions.
Premièrement, l’AFD sera en première ligne dans la mise en œuvre de ces moyens nouveaux. Nous renégocierons en 2019 sa rémunération. Les ressources ainsi dégagées abonderont le Fonds de solidarité pour les partenariats innovants, le FSPI, qui est facile d’usage, très réactif et généralement à la main des ambassadeurs pour financer des programmes de volume modeste ou dans leur phase initiale. C’est ainsi que ce fonds a permis les premiers travaux de conception du futur campus franco-sénégalais de Dakar.
Deuxièmement, les nouveaux moyens financiers accordés à l’AFD doivent conduire à renforcer son pilotage. Dans la réflexion que nous menons pour élaborer le projet de loi, plusieurs propositions formulées par le député Hervé Berville dans le rapport qu’il nous a remis ont retenu notre attention. Comme il l’a proposé, nous envisageons de créer un conseil de développement sous l’autorité du Président de la République. Par ailleurs, il sera bien précisé dans le projet de loi qu’il reviendra au ministre chargé de la coopération, qui est aujourd’hui le ministre des affaires étrangères, c’est-à-dire moi-même – j’assume ma tâche complètement, vous le savez, madame la sénatrice Garriaud-Maylam –, de présider le conseil d’orientation stratégique de l’Agence.
Troisièmement, une commission nationale d’évaluation indépendante sera amenée à juger l’impact, l’efficacité et l’efficience de nos actions en matière de développement. La création de cette instance, qui répond également à une demande du président Cambon et de certains d’entre vous, sera mise en œuvre par le biais de la loi de programmation.
Je formulerai encore quelques observations complémentaires.
Monsieur Yung, je suis favorable à une clarification de notre architecture budgétaire. Sans doute serait-il souhaitable d’inscrire les dons dans le programme 209 et les prêts dans le programme 110. Quant au FSD, il devrait être abondé par la TTF et orienté prioritairement vers les fonds multilatéraux. Une telle simplification paraît indispensable pour sortir du maquis des fonds dans lequel certains d’entre vous se perdent. Il m’arrive moi-même de m’y perdre, tant l’architecture est complexe.
Notre volonté d’un meilleur suivi de l’augmentation des crédits qui seront affectés à l’AFD doit également s’étendre à l’affectation des fonds multilatéraux, lesquels continuent à être abondés par le budget français. Dans le cadre de leur articulation avec les actions bilatérales et de leur bonne utilisation, ils devront nécessiter de notre part une plus grande vigilance. En effet, le Fonds européen de développement bénéficiera quant à lui de 850 millions d’euros. C’est une somme très importante, sans doute la plus importante qui lui soit affectée, ce qui nécessite, certains l’ont souligné, une vigilance accrue concernant son utilisation.
Concernant Expertise France, j’ai eu l’occasion de m’en entretenir avec le président Cambon, je serai très vigilant sur le maintien de son identité au sein de l’AFD et pour éviter toute dérive. À l’heure actuelle, rien n’est tranché pour ce qui concerne les modalités, les synergies étant possibles.
Il a été fait état de l’importance du Fonds vert pour le climat. Je le souligne, sa reconstitution est prévue en 2019. La conférence de reconstitution se réunira au cours de l’année. Nous apporterons notre propre contribution sur l’aspect pluriannuel. Nous serons très vigilants sur le maintien et l’augmentation de ce fonds.
Par ailleurs, le Secrétaire général des Nations unies a demandé au Président de la République, lors de la réunion du G 20 à Buenos Aires, que la France joue un rôle majeur dans le cadre du sommet sur le climat de septembre 2019 qu’il organisera à New York. Nous aurons la responsabilité, avec la Jamaïque, d’identifier les enjeux de financement du futur et de faire en sorte que les outils de financement soient au rendez-vous.
Enfin, Mme Perol-Dumont a évoqué le problème de la comptabilisation de l’APD. Comment une somme est-elle identifiée dans le cadre de l’aide publique au développement ? Il existe des règles internationales établies par l’OCDE mentionnant tous les critères nécessaires pour rendre une intervention financière, publique ou privée, éligible à l’aide publique au développement. C’est en fonction de ces critères que nous avons identifié le chiffre de 0, 55 % de notre revenu national brut, que devra représenter notre aide en 2022. Tel est l’engagement du Président de la République. La trajectoire qui vous est aujourd’hui proposée permettra d’atteindre cet objectif.
Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains et au banc des commissions.
Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Aide publique au développement », figurant à l’état B.
En euros
Mission
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Aide publique au développement
Aide économique et financière au développement
Solidarité à l’égard des pays en développement
Dont titre 2
153 150 588
153 150 588
L’amendement n° II-687, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
En euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Aide économique et financière au développement
Solidarité à l’égard des pays en développement
dont titre 2
TOTAL
SOLDE
La parole est à M. le ministre.
Je viens d’expliquer les raisons qui ont conduit le Gouvernement à déposer cet amendement : la contribution qui nous est demandée pour abonder le Fonds européen de développement est moins importante que celle que nous envisagions au départ. Il est donc proposé de la réduire de 6 684 507 euros. Nous retrouverons cette somme dans un autre chapitre budgétaire du ministère des affaires étrangères. Elle sera destinée au renforcement du fonctionnement de ce ministère.
Il s’agit d’une opération purement technique, pour éviter de déployer des fonds qui ne seront pas mobilisés par le Fonds européen de développement.
Au cours de l’examen du projet de loi de finances à l’Assemblée nationale, nos collègues députés ont augmenté plusieurs dépenses, notamment les crédits relatifs à la prime pour l’emploi. Au total, 236 millions d’euros ont dû être financés en seconde délibération par la « solidarité gouvernementale », appelée plus communément « rabot ». Les missions budgétaires « Action extérieure de l’État » et « Aide publique au développement » ont donc été minorées de près de 20 millions d’euros : 6, 7 millions d’euros pour la mission « Action extérieure de l’État » et 12, 6 millions d’euros pour la mission « Aide publique au développement », dont 8, 3 millions d’euros pour le programme 209.
Le Gouvernement souhaite désormais que l’ensemble de la minoration porte sur la mission « Aide publique au développement ». Il nous propose donc, par cet amendement, de minorer les crédits du programme 209 de 6, 7 millions d’euros. Un second amendement, qui a déjà été déposé, vise à majorer du même montant les crédits de la mission « Action extérieure de l’État ». Ce choix vient du fait que les appels de la Commission européenne pour le Fonds européen de développement devraient être moins importants que prévu, ce qui donne une petite marge sur la mission « Aide publique au développement ».
Le Gouvernement peut-il nous confirmer que cette minoration supplémentaire sera bien supportée exclusivement par le FED ? Pouvez-vous nous indiquer, monsieur le ministre, quel est le montant exact de cette économie de constatation ? Permettra-t-elle également d’absorber la « première minoration » du programme 209 ? Si tel est le cas, à titre personnel, je pourrai émettre un avis favorable sur cet amendement. En effet, la commission, à son grand regret, n’a pu émettre un avis sur cet amendement, dans la mesure où il a été déposé quinze minutes après le début de la séance…
Je vous remercie, monsieur le rapporteur spécial, de cette observation positive.
Si on nous demande moins d’argent, je ne vois pas pourquoi nous en mobiliserions toujours autant. La sollicitation du FED est moindre que prévu. Pour autant, les crédits budgétés ici permettent de couvrir l’ensemble de la dépense. Je propose donc que ces 6 684 507 euros soient soustraits de notre participation au Fonds européen de développement, pour abonder le budget de fonctionnement du ministère des affaires étrangères, dont ils avaient été amputés dans un premier temps.
La parole est à Mme Marie-Françoise Perol-Dumont, pour explication de vote.
Monsieur le ministre, nous avons bien l’entendu vos explications. Pour autant, cette révision à la baisse de notre contribution au FED est un mauvais signal politique. Tel est en tout cas l’analyse de notre groupe.
Le Fonds européen de développement est un outil essentiel pour relever les nouveaux défis, notamment pour ce qui concerne les routes migratoires. Il nous semble important que la France défende une position ambitieuse lors du prochain renouvellement du FED post-2020.
L ’ amendement est adopté.
L’amendement n° II-419 rectifié bis, présenté par Mme Garriaud-Maylam, MM. Vall et Brisson, Mme Deromedi, MM. Danesi, Frassa, Grosdidier et Regnard et Mme Renaud-Garabedian, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
En euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Aide économique et financière au développement
Solidarité à l’égard des pays en développement
dont titre 2
TOTAL
SOLDE
La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam.
Cet amendement vise à permettre, par la création d’une ligne de crédits dans le programme 209, « Solidarité à l’égard des pays en développement », le financement des actions d’aide publique au développement réalisées par France Médias Monde.
Cet opérateur de l’action audiovisuelle extérieure de la France diffuse sur ses antennes linéaires – RFI, France 24, MCD – et numériques des programmes de service public destinés aux populations des pays en développement les plus pauvres, notamment en Afrique et dans les zones de crise. Nombre de ces programmes portent ou sont susceptibles de porter sur des domaines considérés comme prioritaires par le CICID, le comité interministériel de la coopération internationale et du développement : éducation, apprentissage du français, santé, environnement…
Il s’agit de reconnaître cette mission de service public. Nombre de médias internationaux, au premier rang desquels figure la BBC World Service, bénéficient, à ce titre, de financements budgétaires de leur gouvernement.
Afin d’assurer la pérennité de ce financement, il est proposé de doter cette ligne d’autorisations d’engagement et de crédits de paiement. Les montants, 12 millions d’euros en autorisations d’engagement et 4 millions d’euros en crédits de paiement, correspondent au besoin de financement nécessaire, voire indispensable, pour maintenir la production et la diffusion de ces programmes en Afrique, notamment dans les langues locales, et de développer de nouvelles émissions thématiques de service public. Cette action est financée par une réduction d’un même montant sur les crédits du programme 110, « Aide économique et financière au développement ».
Il s’agit vraiment, monsieur le ministre, d’une priorité au regard d’un environnement extrêmement compétitif, au sein duquel nous avons vraiment besoin de nous affirmer. Sinon, nous risquons de perdre énormément de parts de marché que nous aurons beaucoup de mal à récupérer par la suite.
Cet amendement vise à minorer de 12 millions d’euros les crédits consacrés aux fonds multilatéraux de développement. Il s’agit notamment de la participation de la France au Fonds pour l’environnement mondial ou au Fonds vert pour le climat. Par ailleurs, il tend à majorer de 12 millions d’euros les crédits de Canal France International.
Cet amendement ouvre, au sein de l’examen de la présente mission, un débat qui concerne en fait la mission « Médias, livre et industries culturelles », qui sera examinée demain en séance.
Les moyens de France Médias Monde, qui regroupe les outils de l’audiovisuel public extérieur français, ont diminué en 2018 et connaissent une nouvelle baisse en 2019 de 2 millions d’euros. En conséquence, le présent amendement vise à accorder 12 millions d’euros supplémentaires à l’audiovisuel extérieur français.
Les crédits de France Médias Monde ne sont pas portés par la mission « Aide publique au développement », mais par le compte de concours financiers « Avances à audiovisuel public ». Dès lors, l’adoption de cet amendement n’aurait pas pour conséquence d’abonder le budget de France Médias Monde, mais de Canal France International, qui finance des projets de coopération technique avec les médias du Sud. Certes, CFI est une filiale de FMM, mais il n’y a pas de fongibilité des budgets. Ainsi, ces crédits permettraient non pas de maintenir la production et la diffusion de programmes en Afrique, contrairement à ce qu’indique l’objet de cet amendement, mais de financer des missions de coopération technique dans les pays en développement.
Les missions de CFI consistent notamment à promouvoir la diffusion par les médias locaux de contenus sur les enjeux du développement durable et à soutenir les instances locales de régulation et l’optimisation des grilles des programmations des chaînes de ces pays. Je précise que la dotation pour 2019 de CFI s’élève à 8, 2 millions d’euros, soit une hausse de 10 % par rapport à 2018. Ainsi, votre amendement, ma chère collègue, conduirait à l’augmenter de 150 % environ.
J’ajoute que plusieurs amendements ont déjà été déposés sur le compte de concours financiers « Avance à l’audiovisuel public », afin d’augmenter les moyens de France Médias Monde. M. Roger Karoutchi, rapporteur spécial de la commission des finances, propose d’augmenter de 5 millions d’euros ces crédits. Mme Joëlle Garriaud-Maylam, au nom de la commission des affaires étrangères, est favorable à une hausse de 3 millions d’euros. Enfin, M. Jean-Pierre Leleux souhaite également les majorer de 3 millions d’euros.
Je comprends la préoccupation de nos collègues pour l’audiovisuel public. Toutefois, il est important de maintenir une certaine lisibilité : l’aide publique au développement est, au sens de l’OCDE, un agrégat complexe. N’ajoutons pas de la complexité en demandant à l’aide publique au développement de financer l’audiovisuel, sinon, demain, on demandera aussi à cette mission de financer les universités, la vie étudiante, l’accueil des réfugiés, la recherche agricole, la diplomatie culturelle, la gendarmerie et même certaines des bases militaires.
Ma chère collègue, je vous invite à retirer votre amendement. Le débat sur les ressources de France Médias Monde aura lieu demain après-midi, dans le cadre de l’examen par le Sénat de la mission « Médias, livres et industries culturelles » et du compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel public ». À défaut de retrait, la commission émettra un avis défavorable.
Le Gouvernement est défavorable à cet amendement, pour les raisons qui ont été développées par M. le rapporteur spécial.
Il existe déjà un financement de l’audiovisuel dans le cadre de la coopération et de l’aide publique au développement, vous l’avez rappelé, par le biais du dispositif Canal France International, à hauteur de 8, 2 millions d’euros. L’augmentation significative des crédits de la présente mission ne doit pas conduire à la transformer en une sorte de guichet, où ceux qui seraient en manque de financements viendraient frapper, ce qui dénaturerait complètement l’objectif que nous cherchons ensemble à atteindre.
Je précise toutefois que certains projets montés par France Médias Monde peuvent éventuellement bénéficier de l’aide publique au développement. Cependant, cela ne peut se faire que sur la base de projets et non pas sous la forme d’une subvention à un établissement public.
J’en parlais il y a quelques instants avec David Assouline, le Sénat a adopté un dispositif permettant à l’audiovisuel public en général de récupérer un peu plus de 80 millions d’euros. Malheureusement, je le dis tout de suite à notre collègue Assouline, l’Assemblée nationale n’en veut pas, et le Gouvernement non plus. Il le fera donc supprimer par l’Assemblée nationale en seconde lecture. Je défendrai donc demain un certain nombre d’amendements sur le sujet.
Monsieur le ministre, les responsables de France Médias Monde, lorsqu’on les rencontre, sont les premiers à dire que leur action joue terriblement à l’international – c’est une évidence ! –, essentiellement dans des pays francophones, c’est-à-dire, très souvent, africains. Mais France Médias Monde ne parvient pas à financer ses programmes ; elle va d’ailleurs supprimer un certain nombre de stations et de dispositifs.
Quand on regarde ce qui se passe ailleurs en Europe, on constate que d’autres sociétés de programme obtiennent de leurs ministères respectifs des crédits d’aide au développement strictement ciblés sur l’audiovisuel international – je pense au Royaume-Uni ou à l’Allemagne.
Pourquoi la France ne ferait-elle pas le même effort ?
Monsieur le ministre – je vous félicite en passant pour l’augmentation de votre budget –, 12 millions d’euros – en réalité, 4 millions d’euros en crédits de paiement –, …
… même si cela peut paraître beaucoup par rapport à l’ensemble de la mission, rapporté au budget total de l’action internationale de la France, ce n’est pas un montant si élevé.
Monsieur Requier, vous dites qu’il faut empêcher que l’AFD ne se transforme en guichet, …
… sinon certains vont lui demander de financer des universités. Mais l’AFD a financé l’université solidaire et rebelle de Grenoble en 2018 !
J’ai d’ailleurs, comme d’autres à l’Assemblée nationale, posé au ministre une question écrite pour savoir si l’AFD était compétente pour ce genre de choses.
Si l’AFD a un vrai programme, très bien ! Si l’AFD est un guichet, qu’on nous le dise !
M. Jérôme Bascher et Mme Joëlle Garriaud-Maylam applaudissent.
Avant la mise aux voix de cet amendement, je voudrais éclairer notre assemblée sur ce qui s’est passé la semaine dernière, lorsque nous avons examiné la première partie du budget.
Je considérais que la baisse du budget de l’audiovisuel public d’environ 80 millions d’euros était injuste. Elle touchait France Médias Monde, Arte, l’ensemble du groupe France Télévisions, en particulier avec la suppression de chaînes comme France Ô ou France 4, et Radio France, qui récolte pourtant des succès d’audience incroyables et concourt vraiment à magnifier le rôle de l’audiovisuel public.
J’étais contre les amendements du type de celui que nous sommes en train d’examiner ou de ceux que M. Karoutchi présentera demain. Dans la pénurie, on nous somme en effet de choisir qui nous ne voulons pas affaiblir et de prendre aux autres. Or c’est l’ensemble de l’audiovisuel public, France Médias Monde compris, qui voit ses crédits diminuer.
Je ne suis pas d’accord pour dire, comme M. Karoutchi, qu’il faut prendre les crédits dont on a besoin à France 2 ou, comme vous, madame Garriaud-Maylam, à l’aide au développement. Vous proposez de financer l’abondement de France Médias Monde à hauteur de 12 millions d’euros non par une augmentation des crédits de la mission, mais par la réduction, à due concurrence, d’autres financements.
Ce débat est maintenant derrière nous, puisque le Sénat a voté, sur mon initiative – c’est un vote du Sénat ! –, le rétablissement de l’affectation d’une part de la TOCE, à hauteur de 86 millions d’euros, à l’audiovisuel public. Il y a là de quoi satisfaire les demandes formulées par Mme Garriaud-Maylam et par M. Karoutchi – France Médias Monde mérite absolument, c’est vrai, de ne pas voir son budget réduit.
M. Karoutchi peut bien dire que rien ne garantit que l’Assemblée nationale nous suivra dans cette voie, …
… mais sur quelle base discuter si nous commençons à ne pas tenir compte de nos propres votes et à les décrédibiliser ? Nous avons voté, ici, beaucoup de dispositions dont le sort était suspendu à la décision de l’Assemblée nationale…
Reste que, dans la perspective de la suite du débat sur le projet de loi de finances, grâce à l’amendement que j’ai présenté, il y a l’argent suffisant pour habiller France Médias Monde sans déshabiller ni l’AFD ni le reste du service public de l’audiovisuel.
J’ai bien entendu l’argumentaire enflammé du rapporteur spécial contre cet amendement. Je voudrais quand même rappeler qu’il y a urgence : le budget de France Médias Monde est en retrait de 7 millions d’euros par rapport aux engagements pris par le Gouvernement dans le contrat d’objectifs et de moyens. C’est énorme !
Cette situation d’urgence fait que, si France Médias Monde n’obtient pas au début de 2019 des crédits suffisants, elle se trouvera rapidement dans l’obligation de supprimer un certain nombre d’émissions, à un moment où jamais il n’a été aussi important d’avoir une présence médiatique à l’étranger, notamment en Afrique.
Mon cher collègue Assouline, nous sommes contraints d’inscrire nos propositions dans le cadre défini par la LOLF. En outre, ma demande ne revient pas à retirer quoi que ce soit au budget de l’aide au développement, puisque, précisément, c’est de l’aide au développement que fait France Médias Monde. Avec ses émissions en peul, ses émissions sur la santé, sur l’égalité entre les femmes et les hommes, sur la protection contre les violences ou sur l’apprentissage des langues, elle joue un rôle considérable, qui me paraît vraiment essentiel, en matière d’éducation.
Nous n’avons rien contre France Médias Monde qui, en effet, fait du bon travail et dont l’action correspond à ce que nous souhaitons.
En commission, madame Garriaud-Maylam, nous nous sommes abstenus sur un amendement que vous présentiez visant à ponctionner France Télévisions, qui subit la plus lourde ponction. Aujourd’hui, vous proposez de prendre à l’aide au développement. Le ministre et le rapporteur spécial ont bien expliqué qu’il existe d’autres solutions.
Si vous ne retirez pas votre amendement, le groupe socialiste votera donc contre.
Notre collègue Jean-Marc Todeschini vient de donner la position de notre groupe sur cet amendement. Je pense néanmoins qu’il est possible que nous nous entendions.
France Médias Monde réalise un certain nombre d’émissions en coproduction. Il serait important que ces émissions soient soutenues par le ministère des affaires étrangères dans le cadre du budget dont nous sommes en train de débattre.
Il y aurait d’ailleurs beaucoup à dire sur cette évolution vers toujours plus de coproductions ou de sous-traitances, qui pose d’autres difficultés, en termes d’indépendance éditoriale notamment.
Cela étant, s’agissant du point concret qui nous occupe ici, dès lors que l’aide publique au développement permet de financer un certain nombre de coproductions, les choses peuvent fonctionner dans le cadre du budget qui nous est présenté.
Madame Garriaud-Maylam, l’amendement n° II-419 rectifié bis est-il maintenu ?
Je souhaite vraiment que M. le ministre étudie cette question de manière approfondie…
J’interprète son regard comme étant une approbation, un engagement à examiner attentivement ce dossier. Je retire donc cet amendement.
L’amendement n° II-419 rectifié bis est retiré.
Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Aide publique au développement », figurant à l’état B.
Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits.
Les crédits sont adoptés.
J’appelle en discussion l’article 72, qui est rattaché pour son examen aux crédits de la mission « Aide publique au développement ».
Aide publique au développement
Le ministre chargé de l’économie est autorisé à souscrire :
1° À l’augmentation générale de capital de la Banque internationale pour la reconstruction et le développement, soit la souscription de 9 022 nouvelles parts dont 20 % appelées et 80 % sujettes à appel ;
2° À l’augmentation sélective de capital de la Banque internationale pour la reconstruction et le développement, soit la souscription de 9 185 nouvelles parts dont 6 % appelées et 94 % sujettes à appel ;
3° À l’augmentation générale de capital de la Société financière internationale, soit la souscription de 261 749 nouvelles parts intégralement appelées. –
Adopté.
Nous allons procéder au vote des crédits du compte de concours financiers « Prêts à des États étrangers », figurant à l’état D.
En euros
Mission
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Prêts à des États étrangers
Prêts à des États étrangers en vue de faciliter la vente de biens et de services concourant au développement du commerce extérieur de la France
Prêts à des États étrangers pour consolidation de dettes envers la France
Prêts à l’Agence française de développement en vue de favoriser le développement économique et social dans des États étrangers
Prêts aux États membres de l’Union européenne dont la monnaie est l’euro
Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits.
Les crédits sont adoptés.
Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Aide publique au développement » et du compte de concours financiers « Prêts à des États étrangers ».
Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Action extérieure de l’État » (et article 71 ter).
La parole est à M. le rapporteur spécial.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, dédiée au financement de notre réseau diplomatique et consulaire et à notre rayonnement culturel à l’étranger, la mission « Action extérieure de l’État » constitue l’une des principales missions régaliennes de l’État. Doté d’un peu moins de 3 milliards d’euros en crédits de paiement, ce budget est relativement sobre compte tenu des missions qu’il doit remplir.
L’exercice 2019 se caractérise par la poursuite des efforts budgétaires réalisés ces dernières années par le ministère de l’Europe et des affaires étrangères.
Le projet de loi de finances pour 2019 prévoit 2, 9 milliards d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement. À périmètre courant, les crédits de la mission diminuent ainsi de 4, 3 %. Les mesures de périmètre sont volumineuses cette année, avec notamment la suppression des loyers budgétaires, qui, bien que simple écriture comptable, étaient abondés en crédits. À périmètre constant, les crédits de la mission diminuent donc de 2, 2 % environ.
Cette baisse est moins importante que prévu par la loi de programmation des finances publiques votée au mois de juillet. De ce point de vue, la distinction entre périmètre courant et périmètre constant est utile au Gouvernement, car le périmètre courant permet d’afficher un respect du plafond fixé par la loi de programmation des finances publiques à 2, 75 milliards d’euros, hors contribution au compte d’affectation spéciale « Pensions ».
Mon appréciation d’ensemble est que le ministère fait preuve de sérieux budgétaire, alors même qu’il devrait conduire des réformes structurelles importantes en 2019.
Mon examen a porté plus précisément sur le programme 105 de la mission, sur lequel reposent les dépenses de personnel et de fonctionnement des réseaux diplomatique et consulaire ainsi que les contributions internationales. J’ai aussi examiné les crédits relatifs à l’organisation du G7 par la France en 2019.
Le programme 105 est au cœur de la reconfiguration des réseaux de l’État à l’étranger souhaitée par le Président de la République. En effet, à partir de 2019, le programme 105 devient le programme support de l’ensemble des opérateurs et ministères à l’étranger. Par conséquent, il devient affectataire de l’ensemble des immeubles possédés par l’État à l’étranger, ce qui devrait contribuer à l’élaboration d’une stratégie interministérielle plus efficace de gestion du parc immobilier de l’État.
L’objectif de diminution de 10 % de la masse salariale des opérateurs et ministères employeurs d’agents à l’étranger d’ici à 2022 devrait nécessairement impacter les dépenses de personnel du ministère de l’Europe et des affaires étrangères. Toutefois, cet effort sur la masse salariale devrait être partagé avec les autres ministères, dans une proportion qui reste à définir.
Monsieur le ministre, pouvez-vous nous apporter des précisions sur les pistes de réduction de cette masse salariale qui vous ont été proposées par les postes diplomatiques et consulaires, ainsi que sur la répartition de l’effort entre votre ministère et les autres ? Je sais que, en la matière, vous avez reçu des réponses assez récemment.
Ce nouvel exercice d’effort budgétaire pour nos postes à l’étranger est bienvenu. Le cloisonnement des fonctions supports ne permet pas d’établir une vision transversale des moyens mis en œuvre. Je regrette toutefois que la conduite de la réforme ait éclipsé une réflexion sur la valeur ajoutée de certains postes diplomatiques et consulaires, au nom du choix de l’universalité du réseau.
Je souhaiterais appeler votre attention sur plusieurs points de vigilance.
Premièrement, l’érosion des moyens humains du ministère n’empêche pas le dynamisme des dépenses de personnel. Depuis dix ans, le nombre d’équivalents temps plein travaillé a diminué de près de 12 %, mais les dépenses de personnel ont augmenté de 23 %. Une réflexion sur la gestion des ressources humaines du ministère doit impérativement être enclenchée.
Les documents budgétaires montrent par ailleurs un dérapage des dépenses de personnel pour l’exercice 2018, ce qui expliquerait l’écart avec la trajectoire définie par la loi de programmation des finances publiques. Comment expliquez-vous que les dépenses de personnel, en 2018, soient près de 30 millions d’euros supérieures aux prévisions ?
Deuxièmement, les contributions internationales et européennes devraient diminuer de 70 millions d’euros environ entre 2018 et 2019, sous l’effet de l’évolution des opérations de maintien de la paix.
La réduction de ce poste de dépenses n’est pas un motif de satisfaction. Elle provient en partie d’une diminution de la quote-part française dans le budget des organisations internationales, laquelle est liée au poids de notre PIB dans le PIB mondial, ce qui témoigne d’un décrochage économique de la France par rapport aux autres États.
Un petit peu, certes, mais suffisamment pour que nous gagnions de l’argent : comme précédemment avec le budget de l’AFD, notre moindre importance nous fait faire des économies.
Non ? Soit !
Troisièmement, la politique immobilière du ministère doit faire l’objet d’un pilotage renforcé. À la fin de 2016, son parc immobilier était estimé à 4, 3 milliards d’euros.
L’immobilier du ministère va être mis à contribution pour financer les dépenses de sécurisation des implantations à l’étranger. Les avances du compte d’affectation spéciale « Gestion immobilière de l’État » devraient représenter 100 millions d’euros, qui devront être remboursés par les produits de cession. Or ceux-ci ne cessent de se réduire et ne devraient représenter que 30 millions d’euros en 2018. Comment comptez-vous rembourser ces avances et à quelle échéance ?
Enfin, concernant le programme 347, « Présidence française du G7 », le coût estimé s’élève à 36, 4 millions d’euros, auxquels s’ajoutent 3, 2 millions d’euros au titre des dépenses de protocole. Ce coût est supérieur à celui de l’organisation du G20 en 2008, à Deauville, même en tenant compte de l’inflation. Par conséquent, je présenterai deux amendements visant respectivement à aligner le coût du G7 sur celui du G20 de 2008 et à réduire les dépenses liées à l’organisation de la réunion des ministres des affaires étrangères du G7, qui ne figurent pas dans ce programme et sont rattachées aux dépenses protocolaires.
Le projet de budget pour 2019 de la mission « Action extérieure de l’État » a été critiqué en raison des réformes structurelles qui ont été annoncées, notamment de la diminution de 10 % de la masse salariale d’ici à 2022, qui inquiète beaucoup. Il me semble qu’un examen attentif permet plutôt de souligner une relative préservation de nos moyens à l’étranger pour 2019 et de mettre en évidence l’existence de certaines marges de manœuvre budgétaires, sous réserve des points de vigilance dont je vous ai fait part. Par conséquent, la commission des finances s’est prononcée en faveur de l’adoption des crédits de la mission « Action extérieure de l’État ».
Applaudissements sur des travées du groupe Union Centriste, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe La République En Marche. – M. le président de la commission des affaires étrangères applaudit également.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à la suite de Vincent Delahaye, je vais brièvement vous présenter les programmes de la mission « Action extérieure de l’État » qui concernent, d’une part, les Français à l’étranger et les affaires consulaires et, d’autre part, la diplomatie culturelle et d’influence et l’enseignement français. Les crédits afférents à ces programmes représentent environ un tiers du total des crédits de la mission.
Le premier constat, à la lecture du projet du Gouvernement, est celui du maintien global de la prévision budgétaire pour 2019 par rapport à l’exercice en cours. Après plusieurs années de baisse, la stabilité réelle de ces crédits doit être soulignée. Cependant, la réduction des emplois du ministère de l’Europe et des affaires étrangères reste préoccupante. La répartition des crédits ne semble donc pas totalement en accord avec la volonté d’avoir de grandes ambitions diplomatiques et une vocation universelle pour notre pays.
Le budget de l’administration consulaire ne pose pas de difficulté. Celle-ci mène de nombreux chantiers de modernisation qui sont source d’économies et qui font preuve d’une réelle efficacité, à telle enseigne que la délivrance des documents d’identité s’avère beaucoup plus rapide pour les Français de l’étranger que pour ceux qui vivent sur le territoire national. Autre marqueur de modernisation : la mise en place du vote électronique sera effective dès le prochain scrutin européen. Le budget alloué à l’organisation des élections européennes est de 3, 5 millions d’euros, soit une somme équivalente à celle de 2014. Cela ne devrait donc pas poser de difficultés.
S’agissant du remplacement de la réserve parlementaire, le Gouvernement a mis en place un dispositif nommé « STAFE », soutien au tissu associatif des Français de l’étranger, doté d’un budget de 2 millions d’euros pour 2018, reconduit pour 2019. La première année d’existence de ce dispositif semble relativement prometteuse, puisque 223 projets ont été approuvés, pour un montant de 1, 74 million d’euros. Il est intéressant de noter que près de la moitié des subventions sollicitées sont destinées à soutenir un projet éducatif. Nous pourrons certainement mieux en juger l’an prochain – nous pourrons tirer le bilan de l’année 2018 –, en espérant que les crédits pour 2019 pourront être intégralement consommés, car la campagne d’examen des demandes de subventions commencera plus tôt. Mais nous pouvons d’ores et déjà constater que ce dispositif de remplacement de la réserve parlementaire semble fonctionner avec efficacité.
Concernant les acteurs culturels et l’enseignement ainsi que les opérateurs chargés de la politique d’influence de notre pays, la stabilité des crédits apparaît davantage comme un sursis bienvenu, qui n’enlève rien à la nécessité d’établir une stratégie claire de développement du soft power français pour les années à venir.
À la suite des annonces du Président de la République sur le plan Langue française, en mars dernier, l’Institut français bénéficiera de 2 millions d’euros supplémentaires. Il faut saluer cet effort, en ajoutant que des précisions doivent encore être apportées, notamment, sur le rapprochement entre l’Institut français et la Fondation Alliance française, qui a été acté lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2018.
Les subventions et les emplois des autres opérateurs sont, eux, maintenus à un niveau équivalent à celui de 2018, ce qui marque la volonté de préserver leurs missions en matière d’attractivité de notre pays.
J’en viens à l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, l’AEFE, sur laquelle nous avons travaillé, avec Vincent Delahaye, dans le cadre de la mission de contrôle budgétaire. Il s’agit d’un des plus grands réseaux d’enseignement public à l’étranger au monde, ce qui en fait un atout très précieux pour la scolarisation des enfants français à l’étranger et pour le rayonnement de notre pays.
Si la préservation, cette année, du budget de l’enseignement français à l’étranger semble positive, elle ne saurait occulter d’importantes tensions. L’annulation d’une partie de la subvention de l’AEFE, à hauteur de 33 millions d’euros, à l’été 2017, avait mis en évidence la difficile équation budgétaire de l’Agence. Celle-ci fait face, depuis de nombreuses années, à une hausse structurelle de ses dépenses parallèle à un désengagement progressif de l’État. Dans ces conditions, les familles sont de plus en plus mises à contribution et les frais de scolarité par élève ont beaucoup augmenté ces dernières années. La stabilité budgétaire, pour 2019, était donc indispensable. Il faut saluer sa concrétisation.
Pour faire face aux difficultés, en effet, l’AEFE a réduit le nombre de postes d’enseignants et d’encadrement qu’elle finance : elle a supprimé 80 postes d’expatriés et 100 postes d’enseignants résidents cette année ; elle prévoit d’en supprimer 166 autres en 2019. Or ces suppressions de postes, qui sont difficiles à accepter pour les établissements, risquent de nuire à la qualité de l’enseignement. Elles sont en outre contradictoires, en apparence en tout cas, avec l’objectif de doublement du nombre d’élèves scolarisés dans le réseau d’ici à 2030. Cet effet ciseaux fragilise l’Agence et l’ensemble des établissements d’enseignement qui lui sont liés. Il devient donc urgent que le Gouvernement donne aux acteurs une visibilité de long terme – tous l’attendent impatiemment – et nous dise comment il entend parvenir au doublement du nombre d’élèves dans les prochaines années.
Pour ma part, et comme beaucoup, je suis attaché à ce service public exceptionnel de l’enseignement français à l’étranger – nous devons trouver les moyens de le projeter dans l’avenir.
Pour conclure, je dirai que ce budget, s’il est tout à fait convenable du point de vue de l’examen de cet exercice budgétaire, semble insuffisant à long terme au regard des ambitions exprimées. Les subventions accordées aux opérateurs chargés de mettre en œuvre la politique d’influence de la France, quoique stables, demeurent d’un niveau insuffisant. Cette insuffisance est plus frappante encore lorsqu’on la compare aux annonces et aux ambitions affichées au début de son mandat par le Président de la République.
Si, comme l’a dit Vincent Delahaye, la commission des finances a décidé de proposer au Sénat l’adoption des crédits de la mission, nous resterons très attentifs, dans les années qui viennent, à leur inscription dans la durée.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, trois minutes pour présenter un budget de 1, 7 milliard d’euros, ce n’est franchement pas beaucoup ! Je vais donc me contenter de vous adresser quelques messages, car, s’agissant des chiffres, je vous renvoie à ceux qu’a présentés Vincent Delahaye et à mon rapport.
Monsieur le ministre, je voudrais exprimer quelques insatisfactions et de réelles inquiétudes. Je fais partie de ceux qui, lors de la Conférence des ambassadeurs, étaient vraiment inquiets : j’avais trouvé, ce jour-là, que, tout à votre contentement de voir augmenter votre budget de l’aide au développement, vous aviez un peu trop vite « lâché » votre budget des affaires étrangères.
Certes, mais je suis rapporteur pour avis du programme 105.
Nous considérons, nous, sénateurs, que la diminution de 10 % de la masse salariale d’ici à 2022 n’est pas une bonne nouvelle, d’autant que, en dix ans, la mission « Action extérieure de l’État » a déjà perdu 12 % de ses effectifs.
Quant à la réorganisation des modes de gestion des réseaux de l’État à l’étranger, elle n’est pas plus rassurante. Rassembler sous la tutelle de l’ambassadeur l’ensemble du réseau et tous les fonctionnaires de chaque ambassade, c’est une bonne idée.
Certes, mais si vous, vous jouez le jeu, ce n’est pas le cas des autres ministères. C’est ce que nous montrent les premiers retours concernant le ministère des finances, le ministère de l’intérieur et le ministère de la défense – je mets les ministres concernés devant leurs responsabilités ! Je ne suis donc pas sûr que cette réforme parte sur de bons rails.
Mon deuxième message sera le suivant : votre politique immobilière – le président de notre commission vous le disait déjà à l’époque où il était rapporteur du programme 105 – est à bout de souffle.
Vous avez tout vendu ! Vous n’avez donc presque plus rien à vendre. Comment allez-vous payer l’entretien des ambassades et de l’ensemble de votre patrimoine ? Non seulement vous n’avez plus rien à vendre, mais vous n’avez inscrit cette année que 12 millions d’euros sur la ligne budgétaire dédiée à l’entretien de vos bâtiments. Or nous savons très bien qu’il faut entre 40 millions et 80 millions d’euros pour financer cet entretien. Sur ce point aussi, nous ne sommes pas tout à fait rassurés.
Mon troisième et dernier message sera sous forme de question : quelle place voulez-vous donner à la France dans le monde ?
Une telle place peut se traduire de différentes manières : par les deux sujets que je viens d’évoquer, mais aussi par l’ensemble des contributions internationales obligatoires. Or elles baissent de près de 10 %. La raison en est très simple : comme le poids économique de la France baisse dans le monde, notre quote-part baisse elle aussi. C’est peut-être bon signe budgétairement parlant, mais, économiquement parlant, ce n’est pas très bon pour la France, de surcroît à un moment où l’Allemagne augmente son budget et ses effectifs et où le Royaume-Uni augmente son budget, ses effectifs et le nombre de ses ambassades !
Monsieur le ministre, c’est sous la mandature Macron, sous le gouvernement de M. Édouard Philippe, sous votre mandat de ministre, que la France est déjà passée du deuxième au troisième rang, derrière les États-Unis et la Chine, pour la taille du réseau international.
Nous allons passer, l’année prochaine, au quatrième rang : le Royaume-Uni va nous passer devant !
Ils ne sont d’ailleurs pas très bons camarades. Je vous renvoie à la déclaration du vice-chancelier allemand demandant, la semaine dernière, que la France…
… perde son siège de membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies au profit d’un siège européen, qui pourrait être allemand…
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en 2019, les efforts en faveur de la sécurité extérieure au sens large se poursuivent. Cependant, nous avons quelques interrogations sur le financement.
Notre commission se félicite de la stabilisation des crédits de la coopération de défense et de sécurité, qui constitue notre « premier bouclier au loin », illustration parfaite du continuum entre sécurité intérieure et sécurité extérieure. Il s’agit là d’un rééquilibrage, à un étiage encore bas, mais essentiel à la cohérence de notre politique. Après une forte baisse, les crédits retrouvent le niveau qu’ils avaient voilà dix ans, soit 104 millions d’euros. Nous avons dans ce domaine deux recommandations.
La première consiste à veiller à ne pas imposer une réduction d’effectifs : il faut laisser la direction gérer une baisse de la masse salariale et retrouver ainsi une certaine souplesse au lieu de prévoir la suppression de vingt équivalents temps plein de 2019 à 2022.
La deuxième concerne la loi d’orientation et de programmation de l’aide publique au développement, qui doit permettre d’assurer le financement du continuum entre la sécurité et le développement, en finançant, si possible, hors programme 105 les actions de la DCDS renforçant les capacités des États partenaires dans les domaines de la sécurité intérieure et de la protection civile.
En 2019, les crédits budgétaires dédiés à la sécurisation des emprises françaises à l’étranger diminuent, passant de 75 millions à 44 millions d’euros. Cette réduction de crédits est compensée par une avance de 100 millions d’euros sur deux ans du compte d’affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l’État ». Notre commission souhaite la définition d’un programme d’investissements à hauteur des besoins de financement et la réforme des dépenses éligibles au compte d’affectation spéciale. Nous veillerons à ce que le ministère garde toute latitude et indépendance pour définir le programme de cessions dont le produit remboursera l’avance.
Nous notons que la sécurisation est la grande priorité de ce budget. Nous nous en félicitons.
Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j’interviens comme rapporteur pour avis du programme 151, qui concerne les dépenses du réseau consulaire. Mon propos portera sur les aspects budgétaires.
Pour 2019, les crédits du programme 151 enregistrent une modeste augmentation, de 1, 5 %, qui ne doit pas dissimuler le régime d’austérité imposé à notre réseau consulaire. De fait, cette hausse s’explique avant tout par une réévaluation des crédits de titre 2, réévaluation destinée à compenser leur sous-évaluation l’année dernière. Il ne s’agit en aucun cas d’augmenter les effectifs, puisque le programme 151 perdra trente-sept équivalents temps plein en 2019, afin de se conformer aux objectifs du projet Action publique 2022 de réduction des réseaux de l’État à l’étranger.
Hors titre 2, les crédits du programme diminuent de 2, 6 %, malgré des transferts de crédits à son profit liés à la nécessité de préparer les élections européennes de mai 2019, à l’abondement du dispositif STAFE, créé pour compenser la suppression de la réserve parlementaire, et, dans une moindre mesure, au rapatriement de crédits d’adoption en provenance du programme 185.
C’est ainsi que certaines lignes subissent des ajustements. C’est le cas de l’aide sociale distribuée par les comités consulaires, en diminution de 1, 9 million d’euros. Cette diminution, nous dit-on, s’expliquerait par une baisse du nombre d’allocataires. Nous en doutons un peu. Je rappelle que ces aides, souvent d’un faible montant, n’en sont pas moins importantes pour nos compatriotes à l’étranger en difficulté. Ce sont donc les plus modestes qui risquent de souffrir. De même, la dotation destinée aux bourses scolaires, qui était stable l’an passé, se trouve diminuée de 5 millions d’euros, à 105, 3 millions d’euros, au motif qu’il sera possible de puiser dans la soulte de l’AEFE pour compléter si besoin. Certes, cette soulte constitue une réserve confortable qui a de surcroît l’avantage de se reconstituer grâce aux effets de change, mais cela pourrait ne pas durer. Qu’adviendra-t-il si les circonstances sont moins favorables ? La baisse de l’enveloppe budgétaire sera-t-elle réversible ? Ma crainte est que ne se produise un « effet de cliquet ».
Les suppressions d’emplois prévues en 2019 – elles ne sont que la première marche d’un effort appelé à s’accentuer les années suivantes – ne seront possibles qu’au prix de nouvelles mesures de rationalisation : regroupement d’activités, par exemple en matière de transcription de l’état civil, ajustement au strict minimum des effectifs des « postes à gestion simplifiée », poursuite de l’externalisation du traitement des demandes de visas, transformation de postes d’agents titulaires en postes d’agents de droit local… Je le souligne, cette manœuvre n’est pas sans risque dans certains pays.
Par ailleurs, l’administration consulaire continuera à moderniser ses procédures et à dégager des gains de productivité, à travers des projets tels que le paiement en ligne des droits de chancellerie, la pré-demande en ligne des passeports ou encore le lancement d’une expérimentation visant à permettre la transmission dématérialisée des actes d’état civil aux Français de l’étranger.
Bien que notre commission ait émis un avis favorable à l’adoption de ces crédits, je tiens à faire part de mon inquiétude quant à la réduction continue des moyens d’une administration efficace et appréciée, qui – nous avons déjà eu l’occasion de le dire – ne pourra pas indéfiniment faire plus avec moins. Au final, c’est la capacité d’influence et de rayonnement de la France dans le monde qui en sera amoindrie.
M. le président de la commission des affaires étrangères applaudit.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avant de mettre l’accent sur quatre points importants, je souhaite rappeler toute l’importance du programme 151, qui représente les services publics aux Français de l’étranger.
Le premier point concerne le dispositif de soutien au tissu associatif des Français de l’étranger, dit STAFE. Bien que faisant suite à la suppression de la réserve parlementaire, celui-ci accuse une baisse d’un tiers des crédits consacrés, passant de 3 millions à 2 millions d’euros.
Par ailleurs, nous regrettons qu’aucune place n’ait été prévue pour les parlementaires dans ce dispositif, contrairement au précédent.
Pour autant, le bilan de la première campagne semble encourageant. Monsieur le ministre, quels enseignements en tirez-vous ? Quelles adaptations envisagez-vous pour la suite ?
Le deuxième point, également abordé par mon corapporteur Jean-Pierre Grand, est celui des bourses scolaires et des aides aux familles. En la matière, il me semble important d’avoir un travail commun entre les associations des Français de l’étranger, la représentation nationale et votre ministère pour aboutir à un diagnostic partagé, afin de sortir de la situation devenue préoccupante sous l’effet de la réduction des prestations. Cette démarche pourrait être organisée sous votre égide.
Le troisième point a trait au Brexit et à la situation de nos 300 000 compatriotes qui résident au Royaume-Uni.
Nous nous réjouissons de la signature de l’accord entre Londres et l’Union européenne le 25 novembre dernier, après des semaines et des mois d’atermoiements. Certes, nous le savons, le processus de ratifications n’est pas simple. Il est même parfois source d’incertitudes. Quelles mesures nos postes consulaires ont-ils prises face aux différents scenarii en présence ?
Par ailleurs, en vertu du compromis sur le maintien des droits convenu le 19 mars 2018, des dispositions sont prévues pour les citoyens européens présents sur le territoire britannique au terme de la période de transition fixée au 31 décembre 2020. Ils pourront continuer à vivre, travailler ou étudier dans les mêmes conditions qu’actuellement. Je veux néanmoins me faire l’écho des préoccupations exprimées par un certain nombre d’associations de ressortissants européens résidant au Royaume-Uni. Elles s’inquiètent de la capacité de l’administration britannique à procéder, sans erreur et dans les délais, au recensement de tous les citoyens de l’Union européenne. Avez-vous des informations à nous apporter sur ce travail ?
Le quatrième point concerne la réforme de la représentation des Français de l’étranger. Annoncée par le Président de la République, elle n’a donné lieu pour l’heure qu’à une consultation des élus et des associations. Mais, vous le savez, son contenu fait encore débat. Pouvez-vous nous en dire davantage, à la fois sur son contenu éventuel et sur son calendrier ? La tradition républicaine voudrait qu’elle puisse être adoptée avant le mois de juin 2019. Ce sujet nous semble très important.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la diplomatie culturelle et d’influence est actuellement un chantier de réflexions multiples, encore inabouties. Un rapprochement de l’Institut français et de la Fondation Alliance française est en cours. L’enseignement français à l’étranger doit être développé. Le Président de la République a présenté un plan ambitieux pour la langue française et le plurilinguisme. Dont acte ! Mais les moyens sont-ils au rendez-vous ?
Je concentrerai mes remarques sur l’AEFE.
La subvention est stable, après une année difficile. Plusieurs mesures très contraignantes pour les établissements scolaires ont été mises en œuvre. Je vous rappelle l’augmentation du taux de la participation française complémentaire sur les frais de scolarité, à 9 %. On nous dit que ce sera 7, 5 %. Nous demandons instamment de revenir à 6 % au maximum. En effet, l’équation du financement de l’AEFE repose fondamentalement sur le diptyque État-familles. Lorsque l’État se désengage, ce sont donc automatiquement les familles qui paient. Or elles paient de plus en plus, et de plus en plus de familles françaises à l’étranger à revenus modestes ont des difficultés.
Par ailleurs, comment participer à la sécurisation de locaux n’appartenant pas à l’État ? Comment remédier au fait que l’Association nationale des écoles françaises de l’étranger, l’ANEFE, ait stoppé ses activités de prêts garantis par l’État aux établissements ?
Tout semble concourir à compliquer la tâche des établissements français à l’étranger, alors qu’un doublement des effectifs des élèves dans la prochaine décennie est prévu dans les écoles de l’AEFE, mais également en dehors. Nous espérons que les crédits des bourses seront augmentés ; c’est nécessaire, car il y aura de nouveaux enfants français. L’éducation nationale aura-t-elle davantage de professeurs détachés ?
Monsieur le ministre, vous le voyez, nos interrogations sont multiples, tant les objectifs de la diplomatie culturelle paraissent disproportionnés par rapport aux moyens déployés.
Je terminerai par une suggestion : une part du budget doit provenir de la vente d’immeubles. Pourquoi ne pas s’inspirer de certains pays voisins et amis dont les ambassades appartiennent à une institution financière nationale ? Nos joyaux diplomatiques – il y en a encore quelques-uns – pourraient, par exemple, être cédés à la Caisse des dépôts et consignations, qui les louerait au ministère. Non seulement ils resteraient français, mais en plus le loyer serait probablement moindre. Étant à moitié autrichien, de résidence en tout cas, je me permets de formuler cette proposition un peu baroque…
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je centrerai mon intervention sur l’augmentation des frais d’inscription pour les étudiants extracommunautaires, une augmentation à la fois brutale et considérable. Certes, le Premier ministre a annoncé en contrepartie une hausse du nombre de bourses, mais cela ne fera que compenser la diminution régulière des crédits, qui ont été divisés par deux en douze ans. Cette mesure aura en tout cas un effet très négatif sur les étudiants originaires du continent africain. Ils sont à la fois les plus nombreux et les plus fragiles économiquement. Or, contrairement à un cliché trop souvent répandu, ils sont bien loin d’être tous issus des classes favorisées.
Au moment où se dessine un mouvement de restitution aux pays africains de biens mal acquis sur l’initiative du Président de la République, au moment de l’amorce d’un processus d’inventaire de la colonisation, notamment de la colonisation de l’Algérie, cette hausse brutale du montant d’inscription constitue un très mauvais signal. En renonçant à accueillir une majorité d’étudiants africains, la France renonce à toute relation privilégiée avec les cadres africains de demain. Or ces futurs cadres sont convoités par de nouveaux acteurs, comme la Chine, l’Inde et la Russie.
En 2018, les étudiants africains inscrits en Chine devraient atteindre le chiffre de 80 000. Ils y bénéficient de la scolarisation et du logement gratuits ainsi que de bourses de 400 euros mensuels. Si l’Europe et la France restent leur priorité, nous perdons du terrain, notamment au profit de l’Arabie saoudite, des Émirats arabes unis ou de la Turquie, qui proposent des bourses dans des universités islamiques. L’Arabie saoudite est ainsi passée de la trentième à la treizième place dans la liste des pays pourvoyeurs de bourse, et la Turquie est passée de la vingt-septième à la onzième place.
Le désengagement de la France auprès de la jeunesse africaine est un renoncement. On abandonne à d’autres pays le soin de former les cadres de demain. Ce renoncement va aggraver la perte d’influence de la France sur le continent africain, la déception, le dépit et, demain, le rejet de notre pays par la jeunesse du continent le plus jeune du monde.
Les réactions en Afrique, notamment à Dakar, mais pas seulement, relatées ces derniers jours par la presse, la manifestation de samedi ou des tribunes dans le journal Le Monde doivent vous alerter, monsieur le ministre. Il faut absolument revoir cette décision funeste pour le rayonnement culturel et économique de la France, mais aussi pour la francophonie.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les crédits destinés à notre diplomatie culturelle et d’influence ont été les grands sacrifiés du quinquennat de François Hollande : de plus de 750 millions d’euros en 2012, ils sont tombés à moins de 685 millions d’euros cinq ans plus tard, soit une baisse inédite de près de 10 % !
En cette deuxième année du quinquennat d’Emmanuel Macron, nous voyons déjà ce que sera la marque de fabrique du nouveau Président de la République : de grandes envolées, de beaux discours, des intentions louables, trente-trois mesures dans le plan Langue française et plurilinguisme… Qui d’entre nous ne serait pas derrière le Président de la République pour « donner un nouvel élan à notre diplomatie culturelle », comme il s’y est engagé ? Personne ! Mais, derrière les beaux discours, derrière les grandes envolées lyriques, quand on regarde dans le détail le budget, qui est le reflet de la véritable politique menée par le Gouvernement, que voit-on ? Des crédits durablement maintenus au niveau bas atteint en 2017, comme une confirmation, une acceptation, de la politique menée durant le précédent quinquennat ! Et les années à venir risquent d’être particulièrement douloureuses, le Gouvernement ayant annoncé dans le cadre du plan Action publique 2022 la réduction de 10 % de la masse salariale de l’ensemble des réseaux de l’État à l’étranger d’ici à 2022 !
Dans ces conditions, si l’on regarde les opérateurs de notre diplomatie culturelle, comment mettre en œuvre dix-sept des trente-trois mesures du plan Langue française et plurilinguisme avec seulement 2 millions d’euros supplémentaires non reconductibles et aucun emploi pour l’Institut français ? Comment doubler le nombre d’étudiants internationaux accueillis en France avec un budget inchangé pour Campus France ? Surtout, comment doubler le nombre d’élèves scolarisés dans notre réseau à l’étranger, avec un budget également inchangé pour l’AEFE ? Atteindre les 700 000 élèves dans le réseau en 2030, comme l’a annoncé le Président de la République, c’est l’équivalent de l’ouverture de quarante-huit établissements tous les ans pendant treize ans. Est-ce un objectif vraiment raisonnable ?
Je m’interroge aussi sur le devenir de la Fondation Alliance française, qui, si elle a échappé à la disparition, est néanmoins profondément dévitalisée dans l’opération de rapprochement avec l’Institut français. Notre pays a encore la chance d’avoir deux beaux réseaux d’influence dans le monde : les instituts français et les alliances françaises. Il faut absolument rétablir la confiance. Nous avons besoin d’un « travailler ensemble » serein et apaisé entre ces deux réseaux. Ce sont des pépites pour notre pays. Mais pour combien de temps encore, au regard des coupes budgétaires drastiques dont fait l’objet notre réseau à l’étranger ?
Mes chers collègues, vous le voyez, ma frustration est grande et mes réserves sont immenses. La commission de la culture, sans enthousiasme aucun, mais au vu de la stabilité de ce programme, a néanmoins choisi d’émettre un avis favorable à l’adoption des crédits destinés à notre diplomatie culturelle au sein de la mission « Action extérieure de l’État ».
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, quoi de plus essentiel en vérité, malgré leur modestie, que les crédits du Quai d’Orsay ? Ce budget porte en effet l’action diplomatique de la France dans le monde. Or la voix de la France est aujourd’hui absolument primordiale. Le monde est confronté à une forme de « chaos » géopolitique.
D’un côté, il y a l’aggravation des menaces. Menaces de la force, on le voit ces jours-ci en mer d’Azov, comme hier en Crimée, mais aussi en mer de Chine, dans les îles Éparses et jusqu’en Méditerranée. Menaces de la faiblesse, celle des États faillis, qui nourrissent le terrorisme djihadiste. Menaces hybrides, créant des situations « troubles », dans la zone grise entre guerre et paix, via l’utilisation de milices ou la désinformation massive. Nouveaux espaces de conflictualité : face au cyberespace, il faut aussi désormais l’espace extra-atmosphérique.
De l’autre côté, les outils de régulation des crises internationales issus de la Seconde Guerre mondiale sont contestés : le Conseil de sécurité de l’ONU est bloqué sur la Syrie, sur le Yémen, sur le conflit israélo-palestinien. Le droit international est bafoué, la liberté de circulation des mers est contestée, les traités de maîtrise de la prolifération chimique et nucléaire sont fragilisés. Nos alliances les plus solides, comme la relation transatlantique, vacillent. L’Europe elle-même est frappée en plein cœur par la montée des populismes et la sortie de sa troisième puissance économique, le Royaume-Uni.
Pourquoi, dans ce contexte, les crédits du Quai d’Orsay sont-ils si importants ? Parce que la France a, par sa diplomatie universelle, un rôle particulier à jouer sur la scène internationale.
Membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU, puissance militaire parmi les seules au monde à se projeter au-delà de ses frontières, nation qui « parle à tous », indépendante, dotée d’armées disposant d’une autonomie stratégique basée sur une capacité d’appréciation propre, la France est l’une des seules puissances mondiales à ne pas avoir « d’agenda caché » dans la gestion des crises. La France, pour résumer, ne vise qu’à « produire de la sécurité » et à se battre pour la paix.
Néanmoins, si nous soutenons l’objectif de mieux intégrer les « 3 D » – diplomatie, défense et développement –, nous ne partageons pas toutes les orientations prises pour y parvenir.
Nous l’avons indiqué précédemment, l’aide au développement ne nous semble pas assez fermement pilotée du point de vue des priorités politiques. Nous l’avons dit samedi, notre confiance dans la bonne exécution de la loi de programmation militaire est désormais entamée : la défense a dû financer 400 millions de surcoûts des OPEX, qui auraient dû être pris sur la solidarité interministérielle.
Venons-en à la diplomatie.
Sur plusieurs sujets, la France n’est pas toujours au rendez-vous de son rôle historique. La vision un peu trop angélique qu’a l’exécutif du multilatéralisme ne nous permet pas de peser vraiment sur le cours des choses. Je déplore que nous soyons quasiment sortis des radars au Moyen-Orient, une région dont nous connaissons si bien les complexités. Il convient aussi de réinvestir l’Afrique, où notre leadership est sévèrement contesté.
Sur l’Europe, enfin, la vision très ambitieuse portée par le discours de la Sorbonne est quand même assez loin de la réalité. Prenons l’exemple du couple franco-allemand, qui – il faut bien le dire – ne pèse pas du même poids des deux côtés du Rhin !
Monsieur le ministre, à l’instar de Ladislas Poniatowski, je souhaite entendre votre réaction sur cette étonnante proposition allemande de mutualiser notre siège de membre permanent au Conseil de sécurité.
De mon point de vue, c’est une faute de la part de nos amis Allemands, non seulement parce que cela affaiblit la légitimité française au sein du Conseil de sécurité, mais aussi parce que cela joue contre une réforme plus globale défendue par la France : faire entrer l’Allemagne au Conseil de sécurité, mais également élargir ce dernier au « nouveau monde » qui a émergé, avec le Brésil, l’Inde, le Japon et des pays africains.
M. Christian Cambon, président de la commission des affaires étrangères. Cette proposition joue aussi contre l’intérêt de l’Union européenne, qui est d’avoir plusieurs sièges au sein du Conseil de sécurité. J’espère que vous aurez l’occasion de le dire haut et fort à votre collègue allemand, dont les déclarations ne sont pas acceptables pour nous.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe socialiste et républicain. – M. Alain Fouché applaudit également.
Revenons à ce budget si modeste, mais si crucial. Je voudrais insister sur deux inquiétudes que nos rapporteurs ont bien mises en lumière.
On se réjouit que les dépenses contraintes baissent ? C’est en fait le reflet de notre recul au classement économique international. Est-ce donc le moment d’amputer en plus cet outil d’influence qu’est le réseau diplomatique ? À l’heure où l’Allemagne et le Royaume-Uni augmentent leurs budgets et leurs effectifs, la réforme précipitée du Gouvernement est un non-sens. Pour économiser 110 millions d’euros, soit une demi-journée de dépenses de l’assurance maladie, on risque de se priver de leviers d’actions essentiels : amputer la diplomatie économique, alors que notre balance commerciale est décevante ; rogner sur l’action culturelle, alors qu’on lutte contre l’obscurantisme partout dans le monde ; saper notre capacité diplomatique, alors que le monde est à feu et à sang ! N’est-ce pas là un contresens ?
Nous serons évidemment très attentifs aux effets de cette réforme et à la répartition des efforts d’économies entre les différents ministères.
Le modèle de gestion immobilière du Quai d’Orsay nous paraît à bout de souffle. L’entretien courant des bâtiments provient des cessions d’immeubles, qui financent aussi la moitié de la rénovation des sites parisiens du ministère ! L’entretien lourd du patrimoine à l’étranger est doté de 12 millions d’euros, pour des besoins réels qui se situent entre 25 millions et 80 millions d’euros. Pis, la sécurisation de nos emprises à l’étranger n’est pas financée par des crédits budgétaires, mais par des cessions ! Car c’est bien à cela que mène le dispositif d’avance que Bercy vous a proposé pour 100 millions d’euros sur deux ans ! La commission le dit haut et fort : il faut mettre un terme à l’érosion du patrimoine qui découle de cette politique mortifère !
Monsieur le ministre, je veux vous donner acte que, depuis votre arrivée au ministère, cette politique a cessé.
Je souhaite que nous poursuivions dans cette voie.
Au-delà de toutes ces observations, nous sommes évidemment à vos côtés. La commission a massivement voté vos crédits pour faire en sorte de défendre l’action diplomatique de la France. J’en suis persuadé, malgré les difficultés intérieures que nous vivons actuellement – elles risquent malheureusement de porter atteinte au rayonnement de notre pays –, nos diplomates, qui font un travail absolument extraordinaire et auquel je souhaite rendre hommage ici, méritent qu’on les soutienne, qu’on les encourage et qu’on les aide à agir pour le bien et le rayonnement de la France et pour la paix.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste, ainsi que sur des travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe socialiste et républicain.
Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de vingt minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Christine Prunaud.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous en convenons tous ici, il n’y a aucun doute sur le potentiel de la France en matière d’action extérieure de l’État, mais cela a un prix et nécessite un investissement. À ce titre, nous regrettons que la diplomatie économique soit considérée comme le levier majeur de notre diplomatie. Ce choix stratégique nous semble contestable.
Il existe toujours malgré tout un reliquat de colonialisme dans notre pratique des échanges commerciaux avec certains pays, notamment d’Afrique. Ainsi, sous couvert d’aide au développement de ces pays, l’enjeu est aussi d’assurer un avenir international à nos entreprises. Sauf que le focus mis sur la diplomatie économique a conduit, par exemple, à une diplomatie politique des ventes d’armes, à propos desquelles vous connaissez notre opposition. Ces ventes massives d’armes n’ont pas développé d’emplois en France, puisque le secteur de l’industrie de l’armement a vu disparaître 44 000 emplois en dix ans.
Dans le cadre de cette discussion budgétaire, je tiens aussi à intervenir sur un sujet dont on ne parle pas trop souvent, même si nous avons déjà abordé ce point avec vous, monsieur le ministre, à savoir le franc CFA, c’est-à-dire le franc des anciennes colonies d’Afrique.
Le maintien d’une zone franc après la décolonisation grève fondamentalement les capacités d’investissement des États et nuit à leur indépendance monétaire. Le franc CFA a le mérite de limiter l’inflation et d’apporter de la stabilité aux économies nationales, mais son indexation sur l’euro, une monnaie forte, freine de nombreuses PME africaines et encourage la fuite des capitaux.
Le fait d’aborder la problématique du franc CFA dans le cadre de cette mission vous surprendra peut-être, mes chers collègues, mais il me semble que ce point n’est pas sans lien avec nos objectifs dans le domaine des actions extérieures de la France. Si le franc CFA permet de maintenir un pré carré pour la France, il est aussi de plus en plus un motif de rejet de notre pays dans les pays concernés. Il faudra bien qu’on s’attelle un jour à ce problème.
J’aborde maintenant un autre point : la nécessité de réinvestir massivement dans notre diplomatie culturelle.
La situation de la diplomatie culturelle aujourd’hui est très délicate. C’est le domaine d’action qui présente le plus gros déficit entre les moyens mis en œuvre et les besoins auxquels ils sont censés répondre. À ce titre, monsieur le ministre, vous m’aviez dit en commission que la fermeture de l’institut français de Naplouse n’était pas figée et que les discussions restaient ouvertes. Qu’en est-il désormais ? La situation a-t-elle changé ? Plus largement, nous nous interrogeons sur la fusion des alliances françaises et des instituts français comme sur leur financement. Le désinvestissement de l’État, au motif d’encourager l’autofinancement, est contradictoire avec une ambition forte de politique étrangère.
Cette ambition se fracture également avec l’exemple des étudiants étrangers. On ne peut que condamner la décision du Gouvernement d’augmenter drastiquement les frais d’inscription des étudiants étrangers à l’université. Dire qu’il s’agit d’une mesure visant à compenser ce que ces étudiants coûtent, c’est remettre en cause le sens même d’un service public ! Certes le principe du service public repose sur le caractère contributif de son fonctionnement, mais un étudiant étranger crée lui aussi de la richesse puisque, en travaillant, il consomme et paie des impôts indirects.
Avec cette décision, vous ôtez tout espoir aux étudiants modestes de venir étudier en France, alors même qu’il existe déjà une barrière à l’entrée par le biais des revenus minimaux exigés. Doit-on considérer que les 620 euros demandés ne sont pas suffisants pour vivre en France ?
Cette sélection par l’argent se couple à l’absence de critères sociaux dans l’attribution de bourses du Gouvernement, comme vient de le souligner l’un de mes collègues. Au-delà de leur accessibilité directe, cela empêche chaque année un certain nombre de jeunes étrangers de postuler dans l’une de nos universités. Alors que la France est le quatrième pays d’accueil d’étudiants étrangers, cette situation risque d’entraîner un recul de notre pays en la matière.
Je terminerai en évoquant l’un des piliers les plus importants de notre action extérieure : notre réseau consulaire. La baisse des effectifs au sein des représentations françaises à l’étranger inquiète. Alors que le Quai d’Orsay a perdu 53 % de ses effectifs en trente ans et un tiers depuis 2008, le Gouvernement a encore annoncé la suppression de 10 % des effectifs. Aujourd’hui, on décompte seulement 13 800 agents pour 2 millions d’expatriés, sans tenir compte des touristes. J’y reviendrai lors de l’examen des amendements, mais le schéma « fermeture des accueils et dématérialisation des procédures » conduit à un certain recul.
Au vu de ces éléments, il nous est impossible de voter des crédits en baisse qui affaiblissent plus encore l’action extérieure de la France.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’action extérieure de l’État, on le sait, est l’un des principaux instruments du rayonnement de la France dans le monde. À ce titre, il est important de préserver les moyens de la mission que nous examinons, ce maintien étant le gage de la diffusion des valeurs universelles qui nous sont chères.
Avec une dotation de 2, 9 milliards d’euros pour 2019 en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, j’observe, à périmètre constant, une diminution de 2, 2 % des crédits par rapport à 2018. Cependant, même si en matière de chiffres les jeux d’écriture restent toujours possibles, vous avez affirmé, monsieur le ministre, que cette baisse était toute relative, puisque les dépenses de sécurisation des implantations à l’étranger relèvent d’un programme extérieur à la présente mission.
Dans un monde multipolaire fragilisé, d’un côté, par la faiblesse des États faillis et, de l’autre, par les nouvelles stratégies de puissance, le projet kantien de paix perpétuelle demeure un idéal. Aussi, nous avons besoin d’un outil diplomatique efficace pour conserver à la France ses capacités d’influence et de pleine participation à la résolution des conflits. Cette influence, nous devons continuer à la déployer sur tous les fronts de l’action extérieure, que ce soit celui de la diplomatie culturelle, celui de notre emprise consulaire et, bien sûr, celui de notre implication dans les grandes organisations internationales.
S’agissant de la diffusion de notre culture, la promotion de la langue française reste une composante majeure de notre diplomatie. Je me félicite donc de la sanctuarisation des crédits du programme 185. Toutefois, sans un soutien plus affirmé, il me semble que l’objectif de 700 millions de locuteurs au milieu de ce siècle, au lieu de 274 millions aujourd’hui, sera difficile à atteindre. Dans ces conditions, l’effort en direction du réseau des lycées français à l’étranger doit être conforté. N’hésitons pas aussi à nous appuyer davantage sur nos outre-mer pour mieux diffuser la francophonie.
Pour ce qui concerne le réseau consulaire, je m’inquiète des conséquences que pourrait avoir la poursuite à marche forcée de la rationalisation qui affecte le programme 105. Je pense, en particulier, à la réduction de la masse salariale amorcée dans ce budget pour coller à l’objectif d’une diminution de 10 % des effectifs d’ici à 2022. Il s’agit d’une nouvelle saignée, alors que les réseaux consulaires sont déjà fortement contraints dans l’actuel schéma pluriannuel d’emploi, comme l’a souligné M. le président de la commission des affaires étrangères.
Pour autant, je ne conteste pas le chantier de la mutualisation des fonctions supports de l’ensemble des ministères et opérateurs de l’État à l’étranger opéré dans le cadre du plan Action publique 2022. Je partage l’idée que cela contribuera à faire de chaque ambassade une véritable agence de l’État. Mais attention à ne pas effectuer ces réformes dans la brutalité, au risque d’affaiblir un réseau dont l’universalité en fait le troisième au monde ! Tout comme le président de la commission des affaires étrangères, j’espère que nous nous maintiendrons à cette place.
Enfin, au-delà du maillage des continents par nos ambassades, nos lycées et nos alliances françaises, c’est également au sein des grandes organisations internationales que la France expose son point de vue pour répondre aux défis du monde actuel. À cet égard, je salue l’initiative du Président de la République d’installer annuellement un Forum de la paix – preuve qu’il m’arrive parfois d’être d’accord avec lui ! Cette enceinte permettra, parmi d’autres, de promouvoir l’action multilatérale de la France. C’est aussi, on peut le dire, une façon de conforter notre rôle dans la résolution des conflits.
Reste que nous devons être vigilants, car, sans être ouvertement contestée, notre place peut parfois être discutée. Je pense à notre partenaire allemand qui souhaite – Ladislas Poniatowski l’a rappelé – que la France abandonne son siège de membre permanent au Conseil de sécurité des Nations unies au profit de l’Europe. Or rappelons à nos amis Allemands qu’il faudrait au préalable que l’Union européenne ait une politique étrangère unique pour qu’elle ait un siège unique.
Nous n’en sommes pas là ! J’ajouterai que ce n’est pas forcément avec des excédents budgétaires exemplaires que l’on répond aux défis stratégiques…
L’engagement des militaires français sur les théâtres extérieurs est parmi les plus importants, ce qui justifie la place centrale de la France dans les instances multilatérales et sa légitimité à parler à tous.
Sans prétendre à l’arrogance, nous devons préserver la place qui est la nôtre, car, au-delà de l’attractivité de notre pays, il s’agit de lui conserver son autonomie. J’entends bien sûr par autonomie celle qui nous permet de contrôler nos intérêts tout en continuant à nous ouvrir au monde, comme l’a très justement rappelé le Président de la République au Forum de la paix.
Le cycle mémoriel de la Grande Guerre, qui vient de s’achever, a ouvert des instants de commémoration rappelant que la paix d’hier avait été chèrement payée, et que celle d’aujourd’hui n’était pas éternellement acquise.
Je vous encourage donc, monsieur le ministre, à poursuivre dans la voie de la consolidation de tous les outils diplomatiques qui se mettent au service des libertés humaines.
Malgré tout, le groupe du RDSE votera ce budget.
M. Jean-Claude Requier applaudit.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’action de la France dans le monde est plus que jamais attendue et nécessaire. Dans un contexte international dégradé, dangereux, instable, comme le montrent une fois encore les conditions du G20 ce week-end, le monde a besoin de plus de diplomatie et de plus de dialogue.
Jean-Pierre Raffarin, qui a été un grand président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat, comme l’est aujourd’hui Christian Cambon, avait l’habitude d’affirmer devant cette assemblée que le grand rôle de notre pays au XXIe siècle serait double : à la fois défendre inlassablement la paix entre les nations et promouvoir farouchement le multilatéralisme. L’actualité internationale lui donne chaque jour un peu plus raison.
Avec le troisième réseau diplomatique et consulaire, avec l’un des meilleurs corps diplomatiques au monde, avec des relais d’influence culturels, stratégiques et politiques anciens sur tous les continents, la France a toutes les cartes en main pour demeurer une grande puissance de diplomatie et de paix. Néanmoins, nous devons veiller à ne pas prendre pour acquise cette position unique sur la scène internationale. L’histoire nous montre que, lorsque nous cessons d’investir dans notre diplomatie et notre action extérieure, notre connaissance du monde s’amoindrit, notre voix s’affaiblit.
À ce titre, l’affaiblissement continu du Quai d’Orsay et des réseaux culturels français depuis plusieurs années est inquiétant. II faut cesser de considérer notre action extérieure comme une variable d’ajustement. De l’aveu même de nombreux diplomates, le Quai d’Orsay est aujourd’hui à l’os. Je le dis aujourd’hui avec force : notre diplomatie est un actif précieux pour la France et un atout pour l’avenir ! Or vous semblez, monsieur le ministre, poursuivre dans cette logique de rabot progressif sur les crédits dédiés à cette mission, une fois corrigées les mesures de périmètre.
Si nous croyons souhaitable la rationalisation du système de prime des agents diplomatiques, si des économies de fonctionnement sont encore possibles, nous estimons que la logique d’économies structurelles arrive à son terme, à moins de revoir drastiquement notre stature diplomatique. Cette stature, pour l’avenir, doit reposer sur trois piliers dans lesquels nous devrons investir des moyens financiers et humains importants.
Le premier est la diplomatie d’influence, le fameux soft power. D’autres pays affichent des efforts colossaux dans ce domaine : la Chine, l’Allemagne, la Grande-Bretagne, par exemple, investissent massivement dans leur réseau culturel à l’étranger et occupent les espaces que nous délaissons. Notre propre réseau, atomisé et en perte de puissance, gagnerait à être rationalisé pour répondre à ce défi. Il pourrait s’appuyer sur une ambition renouvelée.
Le deuxième pilier est notre présence dans les institutions multilatérales. Elle doit être renforcée et pilotée au plus haut niveau politique. La France, comme l’ont rappelé le président de la commission des affaires étrangères et d’autres collègues, est un membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies, et elle occupe ce rôle avec dynamisme et esprit d’initiative. Elle ne doit naturellement pas renoncer à ce privilège, comme je l’ai récemment entendu dire par nos amis Allemands. Face au retrait des États-Unis, face aux blocages persistants de la Russie, la France a une responsabilité accrue pour maintenir vivantes et efficaces les enceintes du multilatéralisme.
Le troisième pilier est l’Europe. Elle est l’horizon naturel de notre action extérieure qu’elle a vocation à amplifier et à catalyser. Nous devrons œuvrer à la construction d’une véritable politique extérieure commune – nous en parlons depuis tellement d’années ! – sur les grands sujets qui touchent à notre sécurité commune, aux crises dans notre voisinage et aux biens communs de l’humanité.
Monsieur le ministre, ces points de vigilance ayant été rappelés, le groupe Les Indépendants – République et Territoires s’abstiendra sur ces crédits qui ne nous semblent pas à la hauteur des enjeux que doit affronter notre diplomatie.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la disproportion entre l’ampleur des efforts réclamés au Quai d’Orsay et son poids de moins de 2 % dans le budget de l’État est flagrante. Pour l’année prochaine, il lui est demandé de contribuer à 8 % de la baisse totale des emplois de l’État, alors qu’il ne représente que 0, 7 % de l’ensemble de ses emplois ! Alors qu’il a déjà perdu 12 % de ses effectifs au cours de la dernière décennie, il reçoit cette fois l’injonction de conduire d’ici à 2022 une réduction de 10 % de la masse salariale de l’ensemble des réseaux français à l’étranger.
Bien sûr, les Français de l’étranger ont un pouvoir de blocage limité, très inférieur à celui des gilets jaunes. Bien sûr, la saignée que l’on fait subir à nos ambassades et à nos réseaux culturels et économiques à l’étranger ne laisse que peu de traces visibles sur le sol français dans l’immédiat. Mais c’est là faire preuve d’une bien courte vue de la part du Gouvernement. Cynisme de Bercy ou bien réelle absence de vision à long terme ?
Comment ne pas être exaspéré par le décalage entre les ambitions affichées et des moyens toujours plus restreints ? Oui nous devons, dans tous les domaines, apprendre à faire mieux avec moins ! Mais malgré l’immense qualité et le dévouement hors norme du personnel consulaire et diplomatique, auquel je tiens à rendre hommage, il faut cependant une baisse budgétaire minimale incompressible. Une réduction de 31 ETP pour le personnel consulaire ne permet pas de faire de vrais miracles.
Ce budget pose aussi un problème de sincérité. Plusieurs des évolutions affichées s’apparentent à des tours de passe-passe. C’est notamment vrai pour notre patrimoine immobilier à l’étranger. Notre histoire nous a légué de véritables joyaux qui constituent une véritable vitrine de la France à l’étranger : si une gestion innovante est nécessaire pour mieux en optimiser l’usage, gardons-nous de les brader, surtout dans des conditions de transparence douteuses.
Je note aussi que 30 millions d’euros non inscrits au budget seront consacrés en 2019 et en 2020 à des investissements de sécurité dans le réseau sous forme d’avances, avances que le ministère devra rendre entre 2021 et 2025 par des cessions de biens immobiliers. Je soutiens donc la proposition, qui n’est pas si baroque que cela, de notre collègue Robert del Picchia de les vendre à des institutions françaises, comme la Caisse des dépôts et consignations.
De même, la suppression de la réserve parlementaire s’est traduite par une perte nette de budget pour nombre de structures françaises à l’étranger. Non seulement le dispositif STAFE, censé la remplacer, est bien moins doté d’un tiers, mais il décourage de nombreuses petites associations, incapables de trouver elles-mêmes la même somme en autofinancement. Plus inquiétant encore, nous assistons à des effets de substitution où des budgets dépendant autrefois de l’action extérieure de l’État passent désormais sur la ligne STAFE. Je l’ai noté à Londres justement.
Le nombre de Français à l’étranger ne cesse d’augmenter, et les moyens ne suivent pas. Soyons bien conscients qu’une stagnation des budgets équivaut, sur le terrain, à une dégradation des services publics.
Le budget des bourses scolaires, par exemple, va continuer de baisser : il sera cette année amputé de 5 millions d’euros. Cela fait des années que nous demandons une étude sérieuse sur l’effet conjugué de l’augmentation des frais de scolarité et de la réforme du système de bourses. Malgré les dénégations des gouvernements Hollande et Macron, il est clair que les classes moyennes et les familles à faible revenu sont en train d’être écartées de nos écoles.
L’Agence pour l’enseignement du français à l’étranger subira une diminution de 3, 7 % de ses crédits et une baisse de 166 équivalents temps plein. Ces nouvelles contraintes sont imposées alors même que les effectifs d’élèves ne cessent de croître, occasionnant des dépenses en hausse. Emmanuel Macron s’est même engagé à doubler le nombre d’élèves scolarisés dans nos écoles françaises à l’étranger. Cherchez l’erreur ! Ce sont évidemment les frais de scolarité qui vont flamber.
Alors que le Président de la République a multiplié les annonces en faveur de la francophonie, ce dont nous lui sommes reconnaissants, les crédits du programme « Diplomatie culturelle et d’influence » baisseront de 2, 6 %, après une année 2018 stable et deux années de recul. La faible augmentation des crédits aux instituts français et alliances françaises n’est pas à la hauteur des enjeux.
Au-delà des questions budgétaires, les modalités du rapprochement de ces deux réseaux demeurent floues et laissent craindre des fermetures de centres culturels, de vastes zones, voire des pays entiers, risquant de se retrouver sans foyer de diffusion francophone.
Ce budget pour 2019 donne l’impression que le Quai d’Orsay, déjà affecté par des années de rabot budgétaire, est maintenant à l’os et en est réduit à des expédients et à des économies « de bouts de chandelles ». Je ne reviendrai pas ici sur la menace de suppression des journées défense et citoyenneté à l’étranger, pourtant peu coûteuses, puisque j’en ai parlé dans le débat relatif au budget de la défense, et pour le maintien desquelles j’avais déposé des amendements. Nous en reparlerons ultérieurement, d’autant que je sais, monsieur le ministre, que le ministre de la défense doit également évoquer ce point avec vous. Mais il est clair qu’en supprimant les JDC nous refusons la diffusion de nos valeurs parmi nos jeunes compatriotes et binationaux à l’étranger. À un moment où cela est indispensable, nous nous privons de nos meilleurs ambassadeurs de demain. Ce serait une faute aussi morale que stratégique !
La France a toujours eu une place à part dans les relations internationales. Dans ce village global où les rivalités font rage, nos concurrents ont, eux, bien compris que le progrès et le développement économique passaient obligatoirement par l’international. Ils se donnent, eux, les moyens de leur réussite. Dans quelques années, nous risquons de regretter notre aveuglement si nous ne prenons pas les mesures adéquates.
Mmes Hélène Conway-Mouret et Claudine Lepage applaudissent.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, tandis que nous examinons les crédits de la mission « Action extérieure de l’État », nos diplomates et nos services consulaires sont à la tâche aux quatre coins de la planète. Ils ont cette mission impérieuse de nouer, de tisser et de maintenir des relations entre notre pays et le reste du monde. Ils ont aussi cette lourde responsabilité de s’adapter à la croissance continue de nos communautés à l’étranger et de les protéger.
Je voudrais leur rendre hommage, les remercier, au nom de la représentation nationale, pour leur travail au service de la France, pour leur engagement immuable, pour leur immense impact dans tous les coins et recoins du monde. Ils font face à de multiples défis, l’environnement stratégique mondial étant durablement marqué par l’incertitude et l’instabilité.
Je pense ainsi au changement climatique. La COP24, qui s’est ouverte hier en Pologne, tout comme les signes déjà visibles des dérèglements climatiques sont là pour nous rappeler l’urgence d’agir ensemble, l’urgence de trouver des solutions ambitieuses pour sauver notre planète et pour nous assurer que, demain, nos enfants et nos petits-enfants ne naîtront pas condamnés. Je pense aux défis sécuritaires, qui engagent nos intérêts et nos forces civiles et militaires, en particulier dans la lutte contre le terrorisme. Je pense aux grands mouvements migratoires, aux remises en cause du libre-échange et de la stabilité de l’ordre international ou encore aux coups portés au projet européen.
Pour compliquer encore la donne internationale, tout comme nos actions diplomatiques, le multilatéralisme hérité du siècle passé est aujourd’hui sérieusement ébranlé. Des puissances comme les États-Unis, qui, hier encore, défendaient ce système, se mettent désormais à le contester, préférant jeter leur dévolu sur un repli nationaliste bien plus qu’inquiétant. Nous ne pouvons que le regretter amèrement.
Toutes ces questions sont prépondérantes pour notre diplomatie. Elles sont cruciales pour notre avenir. C’est pourquoi notre pays doit pouvoir continuer à compter sur un outil diplomatique efficace et crédible.
Avec un budget de 2, 79 milliards d’euros dédié à la mission « Action extérieure de l’État », le ministère de l’Europe et des affaires étrangères subit une diminution d’environ 4 %. Comme vous aviez eu l’occasion de l’expliquer, monsieur le ministre, cette baisse s’explique à la fois par une réduction du coût des contributions internationales et des opérations de maintien de la paix, par une diminution de la quote-part française et par une gestion améliorée du risque de change par votre ministère.
Ce montant est aussi à mettre en perspective avec le budget global du Quai d’Orsay, d’un montant de 4, 89 milliards d’euros, mission « Aide publique au développement » comprise. Au total, le ministère bénéficie d’une hausse de plus de 151 millions d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2018. Cette hausse, répercutée dans l’aide publique au développement, est inégalée et salutaire, puisqu’elle est un précieux outil de l’influence internationale de la France. Elle nous permet d’adopter une approche globale et concrète des crises et des enjeux internationaux.
Avant tout, le budget de la mission « Action extérieure de l’État » reflète notre fervent engagement envers le multilatéralisme et la sécurité collective, ainsi qu’envers les acteurs qui l’animent et agissent au quotidien pour rendre le monde plus équitable et moins incertain. Le maintien de notre rang international est porté par cet engagement. Il passe par notre participation et nos contributions obligatoires aux opérations de maintien de la paix conduites sous l’égide de l’ONU, qui atteignent 326 millions d’euros. Il passe aussi par notre action constante au sein des organisations internationales. Notre contribution à leur fonctionnement s’élève à 194 millions d’euros en crédits de paiement pour 2019. Concrètement, cet argent servira à soutenir le travail remarquable effectué par le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés en faveur de l’action humanitaire ou encore celui mené par l’UNICEF pour les droits des enfants.
Ce budget est aussi celui du renforcement de l’influence et de l’attractivité de la France dans le monde. Étant donné l’importance des ambitions de renforcement de notre attractivité universitaire et de diffusion de notre culture et de notre langue, nous nous réjouissons de la sanctuarisation des moyens de notre réseau de coopération et d’action culturelle, comme vous l’aviez promis l’an passé, monsieur le ministre, au moment d’acter une hausse de ce budget, dans la loi de finances pour 2018. Ainsi, les crédits alloués à l’Institut français sont rehaussés, après avoir diminué de 11 % entre 2012 et 2017, …
… tandis que les bourses d’étudiant sont sanctuarisées.
Soulignons que notre réseau d’enseignement français est unique au monde et scolarise 350 000 élèves dans 500 établissements.
De même, notre groupe tient à réaffirmer son soutien pour le travail exceptionnel et complémentaire qu’effectuent le réseau des Instituts français et celui des Alliances françaises.
Enfin, ce budget doit permettre d’acter une réforme structurelle du ministère, attendue de longue date, qui s’inscrit dans le cadre de la démarche de modernisation Action publique 2022. Le Quai d’Orsay se voit effectivement confier le pilotage de l’ensemble des réseaux de l’État à l’étranger. L’ambassadeur en poste devient le chef de file de l’ensemble de son équipe. Il aura une vision globale sur les moyens dont il dispose et fixera les compétences requises au regard du plan d’action de l’ambassade.
Nous nous félicitons de cette unité budgétaire et de commandement, qui aura un impact positif direct sur la qualité de nos actions diplomatiques. Elle permettra à notre diplomatie de mieux embrasser les priorités thématiques et géographiques. À travers ses 163 ambassades, la France a la responsabilité de faire entendre sa voix au nom de la paix, de la prospérité mondiale et du bien commun.
Face à cette tâche immense qui nous incombe, nous savons, monsieur le ministre, que nous pouvons compter sur votre engagement total, ainsi que sur celui du Gouvernement. Le groupe La République En Marche votera par conséquent en faveur des crédits de la mission « Action extérieure de l’État », pour témoigner de son soutien en faveur de notre diplomatie.
Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche. – M. Jean-Claude Requier applaudit également.
Monsieur le ministre, vous êtes à la tête d’un grand et beau ministère qui mériterait d’être au cœur de l’État, parce qu’il est d’abord, comme le rappelait le président Christian Cambon, le ministère de la paix. Nous en avons plus que jamais besoin !
Notre pouvoir d’influence à l’international reste fort, parce que nous avons fait le choix, fruit d’une longue tradition, d’être présents physiquement grâce à notre réseau diplomatique et consulaire, considéré comme l’un des premiers au monde, et grâce à notre présence culturelle éducative et économique. La France compte ! On nous fait confiance, parce que nous allons au contact porter notre voix, et vous êtes le premier à montrer l’exemple.
C’est bien notre force de persuasion et d’attraction qui a fait de la COP21 un formidable succès pour notre pays. Pourtant, notre diplomatie souffre d’une vision obsolète du rôle de l’ambassadeur, se traduisant par des choix budgétaires qui ne sont guère en faveur du Quai d’Orsay, traité depuis longtemps par le ministère des finances comme une variable d’ajustement. Cela se traduit, notamment, par la vente et le retrait de nos antennes et de certaines missions à l’étranger, qui entraînent immédiatement une baisse de la présence française, toujours très mal perçue par nos ressortissants et les autorités des pays concernés.
Si vous vous inscrivez dans un mouvement qui n’est pas nouveau, son ampleur est nouvelle. Vous nous annoncez une ponction inédite de 10 % sur la masse salariale de toutes les missions, ce qui entraînera d’importantes suppressions de postes. Vous en conviendrez, on nous impose un vrai massacre à la calculette.
Les effectifs concernés, 130 pour 2019, sont issus de plusieurs ministères. Néanmoins, six de vos collègues du Gouvernement, et non des moindres – les ministres de l’action et des comptes publics, de l’économie et des finances, de l’agriculture, des armées, de l’intérieur et de la transition écologique –, ont d’ores et déjà annoncé qu’ils refusaient de se laisser imposer de futures suppressions de postes internationaux par votre ministère. Allez-vous être forcé de concentrer ces économies sur le seul Quai d’Orsay ?
Si vous deviez supporter majoritairement les suppressions demandées, celles-ci entraîneraient indéniablement la fermeture de nombreuses ambassades et consulats et mettraient fin, d’un coup, à ce que nous avons laborieusement construit depuis longtemps. Cela nous amènerait également à entamer de longues négociations pour payer des primes de licenciement à des personnels recrutés localement, qui ont souvent fait toute leur carrière au service de la France. Les économies réalisées risquent fort de nous coûter très cher sur le long terme. L’image de la France sera également ternie.
Dans ce contexte, pourriez-vous préciser quelles sont les intentions du ministère de l’Europe et des affaires étrangères quant à cette politique de suppressions de postes ? J’imagine que la dématérialisation et l’externalisation seront accélérées, alors qu’elles ne sont pas accessibles par tous et partout.
Je regrette le choix d’un service public d’où disparaît progressivement le contact humain, pour des raisons comptables. Heureusement, nous avons nos 442 conseillers consulaires, qui sont nos meilleurs liens de proximité avec les Français établis hors de France et qui sont élus, notamment, pour les conseiller et les accompagner lors de leurs démarches administratives. Nous aurons, semble-t-il, de plus en plus besoin de ces femmes et de ces hommes, élus locaux indispensables au maintien d’un lien social, essentiel, dans nos communautés.
Je voudrais maintenant aborder la question de l’enseignement français.
Nous avons 497 établissements implantés dans 197 pays, gérés par l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger ; 350 000 élèves y sont scolarisés, avec une augmentation de 2 % par an de ces effectifs.
Après l’annulation de 33 millions d’euros des crédits de l’AEFE en 2017, le taux de participation financière complémentaire versée par les établissements conventionnés est passé de 6 points à 9 points en 2018 pour compenser cette baisse. Ce sont les familles qui ont été mises à contribution, avec une augmentation des frais de scolarité. Il n’est pas logique de conserver une enveloppe des bourses à budget constant, alors que la demande croît, de par l’augmentation des frais de scolarité et de par la hausse de 3 % par an de nos communautés françaises présentes à l’étranger.
Le Président de la République a annoncé vouloir doubler le nombre d’apprenants de français dans le monde. Nous avons donc besoin de davantage d’établissements pour les accueillir, nécessitant plus de moyens financiers et humains. Or la décision d’arrêter brutalement la garantie de l’État, accordée jusqu’alors par l’Association nationale des écoles françaises de l’étranger, l’ANEFE, bloque aujourd’hui l’agrandissement de certains établissements et ne permettra pas à d’autres de contracter les prêts nécessaires. Un remplacement de ce système de garantie est-il recherché afin de sortir ces établissements de l’impasse dans laquelle ils se trouvent et qui engage leur stabilité financière et l’avenir scolaire des élèves qui y sont scolarisés ? Ce retrait de l’État est-il la première étape vers la recherche d’investisseurs privés qui se substitueront à lui ?
Si le doublement du nombre d’élèves semble reporté à 2030 dans les documents budgétaires du projet de loi de finances pour 2019, ce qui diffère de l’engagement présidentiel d’origine, cet objectif ne pourra être atteint que si le recrutement des professeurs, et surtout leur détachement, est planifié. Or la réduction du nombre des enseignants, après cinq ans d’augmentation, et la circulaire limitant leur détachement ne vont pas dans le sens de la hausse importante du nombre de détachements dont le réseau aura besoin. Sans compter les postes nécessaires au réseau de la Mission laïque française, conseillers culturels, directeurs d’alliances françaises et d’instituts français.
L’ambition constante du Président de la République à déployer une diplomatie universelle et des services consulaires de qualité pour nos compatriotes établis hors de France est incompatible avec son engagement de réduire, en même temps et dès 2019, le budget du ministère sur ces missions essentielles à notre service public. C’est l’image et le rayonnement de la France qui sont en jeu, partout dans le monde.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’examen de la mission « Action extérieure de l’État » que nous abordons aujourd’hui est un rendez-vous essentiel pour la vie des Français vivant hors de nos frontières, ces compatriotes que j’ai l’honneur de représenter au sein de cette assemblée.
Avant de commencer mon intervention, je souhaite témoigner que l’élection d’Emmanuel Macron à la présidence de la République a donné un lustre à l’image de notre pays à l’international que nous n’avions pas connu depuis très longtemps.
Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe Les Républicains.
M. Vincent Éblé, président de la commission des finances. Une grosse ficelle pour susciter les réactions !
Sourires.
C’est une source de satisfaction pour tous ceux qui sont attachés à promouvoir la France à l’étranger. Pourvu que ça dure !
En quatre ans de mandat, j’ai effectué 289 déplacements dans 79 pays à l’étranger. Cela m’a permis d’engager un contact étroit avec nos ambassadeurs, nos conseillers consulaires, qui forment le tissu de nos élus locaux à l’étranger, nos consuls, nos consuls honoraires et tous les acteurs des domaines économique et culturel. Je souhaite ici tous les remercier pour leur aide et leurs suggestions afin de m’aider dans mes missions.
Le budget de l’action extérieure de l’État recouvre trois grands programmes. Schématiquement, le programme 105 recouvre le budget des ambassades et l’action diplomatique ; le programme 151 concerne les consulats, qui assurent l’administration des Français à l’étranger ; enfin, le programme 185 a trait à notre action culturelle, avec ses écoles, instituts français et alliances françaises. Je tiens à ce titre à saluer nos rapporteurs, notamment mes collègues de l’Union Centriste Claude Kern et Vincent Delahaye, pour la qualité de tous leurs travaux dans ces domaines.
La baisse globale des crédits dédiés à l’action extérieure de l’État va dans le sens souhaité par les Français d’une réduction de la dépense publique. Mais si nous pouvons être d’accord sur l’objectif, nous émettons des réserves sur les chemins empruntés pour y parvenir. Comme certains l’ont dit, pour le Quai d’Orsay, Bercy a inventé le coup de rabot permanent.
Commençons par la réduction moyenne de la masse salariale de 10 % d’ici à 2022. La méthode engagée pour y parvenir a des effets qui conduisent les personnels en poste au découragement. Pour obtenir l’adhésion, il faudrait assortir cette démarche d’une vision qui permette aux 90 % des agents restants de s’attendre à ce que leur futur soit plus glorieux. Nos ambassades, nos résidences sont la vitrine de la France à l’étranger ! C’est ce qui nous permet de communiquer.
J’ai pu constater à Hong Kong ou Cape Town que la vente de nos résidences pour financer l’entretien d’autres biens dégradait notre image localement. Cela n’est même pas pertinent financièrement, car nous sommes contraints de louer des résidences là où nous étions propriétaires.
Maurice Gourdault-Montagne, secrétaire général du ministère de l’Europe et des affaires étrangères, s’est exclamé lors d’une audition : « Les bijoux de famille ont été vendus ! »
Nous n’avons plus beaucoup de marges de manœuvre. M. Gourdault-Montagne a rappelé que notre immobilier n’était financé que par des cessions, et ce qu’il s’agisse de maintenance ou de construction. Depuis une dizaine d’années, nous avons donc débudgétisé l’immobilier.
Nous avons connu, en 2018, onze opérations de cession à l’étranger, pour un total de 30 millions d’euros. Nous aurons, en 2019, un montant à peu près équivalent, ce qui n’est pas suffisant et a entraîné, par exemple, la suspension de la construction d’une nouvelle ambassade en Corée.
Parce que nous n’investissons pas suffisamment dans l’entretien de nos bâtiments, ils se dégradent. Déjà, l’an dernier, nous vous posions ici la question suivante, restée sans réponse : quelle est, monsieur le ministre, la stratégie du Gouvernement à moyen terme dans ce domaine ?
Dans le cadre de la « modernisation des services consulaires », nous proposons en outre plusieurs pistes de travail qui servent toutes cette ambition d’offrir un service public de qualité aux Français de l’étranger.
Nous avons de plus en plus d’expatriés, mais de moins en moins de moyens, c’est le fameux effet ciseaux. Nous souhaiterions expérimenter une approche plus audacieuse, au terme de laquelle les consulats seraient transformés en centres de profit via la récupération intégrale du produit des services fournis. Parmi les solutions envisagées pourrait figurer également l’équipement d’outils de saisie d’empreintes biométriques pour les consuls honoraires, à l’image de ce que font nos amis Allemands.
Autre sujet majeur : l’enseignement français à l’étranger.
Tout d’abord, je veux faire part d’une véritable satisfaction. Je vous proposais à cette tribune l’an dernier, au nom du groupe Union Centriste, l’objectif de doubler le nombre d’écoles françaises à l’étranger d’ici à cinq ans. Depuis lors, le Président de la République, dans son discours de mars dernier, a fixé l’objectif de doubler le nombre d’élèves scolarisés dans l’enseignement français à l’étranger d’ici à 2025. L’objectif est désormais fixé à 2030.
Je me félicite que le réseau se mette « en marche », même si je regrette que cela soit une marche lente. Nous espérons que cela aboutira à une profonde réforme de l’AEFE, et nous nous réjouissons que le Premier ministre ait confié une mission à la députée Samantha Cazebonne sur le sujet. Nous appelons de nos vœux une transparence totale sur les dépenses de l’AEFE, qui, je le rappelle, n’accueille qu’un enfant français sur cinq établis à l’étranger. Lorsque des revenus de chef d’établissement sont supérieurs, comme on peut l’observer, à ceux des ministres, ou quand des enseignants résidents sont surpayés par rapport à leurs collègues recrutés localement pour effectuer le même travail, cela pose question, ne trouvez-vous pas, monsieur le ministre ?
Enfin, la politique de coopération culturelle constitue une part essentielle de l’action de la France à l’étranger. Elle permet à notre pays de rayonner hors de ses frontières auprès de publics étrangers, tout en s’adressant aussi à nos compatriotes expatriés. Nous saluons donc la hausse du budget alloué à ces actions dans le programme 185, bien que nous en déplorions la faiblesse des montants. Pour quatre enfants français sur cinq à l’étranger, les familles doivent donc se tourner vers l’enseignement local, voire vers les établissements internationaux. De fait, de nombreux enfants nés de couples binationaux ne parlent aujourd’hui pas notre langue, et ce alors même qu’ils disposent de la nationalité française.
L’objectif que nous proposons, comme nous l’avions fait l’an dernier, est que tous les Français parlent français. Je soumettrai donc trois amendements visant à apporter une réponse à cette problématique par le transfert des crédits de l’AEFE vers l’Institut français, pour financer l’expérimentation d’un chèque éducation ouvert à tous les enfants français à l’étranger. Cela participera au financement de l’Institut français et des alliances françaises, qui réalisent un travail essentiel de diffusion de la langue et de la culture françaises hors de nos frontières.
Dans un contexte de stagnation budgétaire, nous nous félicitons que l’Institut français fasse figure d’exception, puisque sa subvention augmente de près de 7 %. De même, les subventions aux alliances françaises croissent de 6 % pour mettre en œuvre le plan en faveur de la langue française. Or la Fondation Alliance française reste dans une situation difficile. Mon groupe aura donc l’occasion de vous soumettre un amendement visant à la soutenir.
Le groupe Union Centriste votera la mission « Action extérieure de l’État », tout en restant vigilant sur la mise en œuvre des crédits et leur évolution au cours des prochaines années.
Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, permettez-moi, à titre liminaire, de souligner l’importance de l’action environnementale multilatérale de la France, surtout en un moment où la question énergétique agite notre pays. Je salue d’ailleurs l’annonce de la future loi de programmation énergétique.
La mission « Action extérieure de l’État » est essentielle à l’heure de la redistribution des positions et des mutations géostratégiques, dans un contexte où les moyens d’influence se complexifient et se multiplient. Nous devons surtout ne pas oublier que les luttes d’influence ne sont plus seulement le fait d’États et de groupes politico-militaires, mais également de géants économiques.
La question du devenir du multilatéralisme est engagée. Le Président américain donnant un exemple à ne pas suivre, il est important que la France maintienne avec force sa doctrine et convainque ses partenaires. De ce point de vue, je m’associe aux propos du président Cambon sur l’importance du réseau, de la diplomatie et des moyens qui y sont consacrés, car ces femmes et ces hommes qui portent la parole de la France jouent un rôle essentiel.
La mission porte par ailleurs l’ambition du rayonnement français dans les domaines de la diplomatie, de l’économie, de la culture, de l’influence, de l’audiovisuel, de la coopération et du tourisme. Or on observe un net recul dans de nombreux secteurs, notamment celui, que j’évoquais précédemment, des Français de l’étranger ; il s’agit pourtant, selon nous, du premier vecteur du rayonnement de la France à l’international. Il aurait fallu sanctuariser les aides sociales ainsi que les bourses et travailler à l’élaboration de critères plus lisibles et plus adaptés, notamment aux demandes des Français de l’étranger. J’espère que la proposition qui vous a été faite d’associer l’ensemble des partenaires pourra être acceptée.
Je souhaite également évoquer la journée défense et citoyenneté, laquelle favorise le lien entre les jeunes concernés, dont la moitié est constituée de binationaux, et la République. Il n’est ni normal ni justifiable qu’elle soit aujourd’hui supprimée.
La réduction massive des crédits consulaires aura un impact sur le service public qui sera délivré. Cela va dans le mauvais sens et posera des problèmes à long terme.
J’en viens à la question de l’augmentation des frais d’inscription pour les étrangers non communautaires dans les universités françaises, qui pose un problème grave pour la logique d’influence. En effet, ces femmes et ces hommes qui étudient plusieurs années dans nos universités, partageant notre approche et notre vision du monde, participent au rayonnement de notre pays. Il conviendrait donc de revenir sur cette décision qui n’est pas appropriée.
Pour ce qui concerne l’audiovisuel public extérieur, des débats ont eu lieu et des amendements seront présentés. Il serait bon que le soutien que nous lui apportons, les uns et les autres, ne se fasse pas au détriment de France Télévisions, par exemple. L’amendement que nous avons adopté afin de remédier à cette situation voilà quelques jours va dans le bon sens.
Je tiens enfin à évoquer le secteur du tourisme, qui représente, ne l’oublions pas, 7 % de notre PIB et 2 millions d’emplois en France.
Il est important, monsieur le ministre, que nous puissions travailler sur la question des visas, lesquels permettent, même si c’est de façon trop réduite, de financer notre stratégie touristique. Si nous souhaitons atteindre l’objectif de 100 millions de visiteurs dans notre pays, il faut d’ores et déjà s’en préoccuper.
Pour terminer, je souhaite souligner la qualité et la richesse des travaux de la commission, sous la présidence de Christian Cambon. J’espère, monsieur le ministre, que vous ne serez pas sourd aux observations que nous avons formulées au cours de ce travail collectif et partagé.
Pour les raisons que j’ai expliquées et celles évoquées par Hélène Conway Mouret, le groupe socialiste et républicain votera contre les crédits de la mission.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.
Monsieur le président, monsieur le président de la commission, mesdames, messieurs les sénateurs, le budget de la mission « Action extérieure de l’État » est reconduit à périmètre constant. J’y insiste, toutes les dotations de cette mission sont reconduites à périmètre constant. La diminution de 4 % des crédits que vous avez pu constater s’explique par deux facteurs, que certains d’entre vous ont soulignés.
Tout d’abord, nos contributions internationales et aux opérations de maintien de la paix diminuent. La baisse précitée des crédits, monsieur Delahaye, est donc liée au simple constat de la réduction en volume, et non pas uniquement en proportion, des opérations de maintien de la paix. Nous avons également pu agir de manière habile et anticipée sur l’évolution du taux de change, ce qui nous permet de réaliser des économies.
Ensuite, il y a les crédits liés à la sécurité. Ils ne sont pas en baisse. Simplement, la possibilité a été ouverte au ministère de l’Europe et des affaires étrangères de puiser 100 millions d’euros dans le compte d’affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l’État », comme l’ont relevé les uns et les autres. Il a été rappelé également qu’il faudrait rembourser ce montant progressivement à partir de 2021. Nous allons donc immédiatement engager 100 millions d’euros de travaux pour la sécurité de nos lycées et de nos sites les plus exposés.
Si nous demeurons à politique constante, ce qui n’est sans doute pas la bonne méthode pour l’avenir, nous bénéficierons d’un apport supplémentaire de parc immobilier sous la forme de plus de 250 emprises immobilières, du fait de la politique qui a été lancée d’unification du pilotage interministériel de l’ensemble de l’action extérieure de l’État.
Ces points méritaient d’être soulignés en introduction.
Je précise, à l’intention des sénatrices et des sénateurs qui n’étaient pas présents lorsque nous examinions les crédits de la mission « Aide publique au développement », que je vais présenter un amendement visant à abonder de 6, 6 millions d’euros les trois programmes de la mission « Action extérieure de l’État », afin que ces crédits soient rétablis au niveau prévu dans le projet de loi de finances initial.
Le périmètre initial de ce budget n’est donc aucunement modifié, et MM. Delahaye et Féraud ont bien voulu le reconnaître dans leur propos introductif. Je leur sais gré de leur clarté à cet égard et de la précision de leurs analyses sur le projet de budget que je vous soumets.
Il a également été fait état de la décision de conforter le ministère de l’Europe et des affaires étrangères dans son rôle de pilotage interministériel de l’ensemble de l’action extérieure de l’État.
J’ai fait précédemment référence à la partie immobilière. Il s’agit de créer une véritable agence de l’État à l’étranger, sous l’autorité de l’ambassadeur. Désormais, la gestion des fonctions supports et des crédits de fonctionnement de tous les réseaux internationaux de l’État, aujourd’hui disséminés, sera unifiée sous la seule responsabilité du ministère de l’Europe et des affaires étrangères. C’est une mutation considérable, et je remercie les rapporteurs spéciaux d’avoir bien voulu le noter. Nous allons ainsi mettre un terme à l’effet « silo » de la gestion des moyens de l’État à l’étranger.
Il est vrai qu’en contrepartie de ces réorganisations et dans le cadre de la maîtrise des dépenses de l’État, le Premier ministre a fixé un objectif de réduction de 10 % de la masse salariale – et non pas des emplois ! – à l’étranger à l’horizon de 2022. Une confusion a d’ailleurs été faite entre l’objectif qui m’a été assigné et le projet de budget pour 2019 qui vous est soumis.
Le projet de budget pour 2019 prévoit effectivement, au sein du schéma d’emplois, une réduction de 130 emplois équivalents temps plein, mais cette baisse permettra de contribuer à l’effort qui nous est demandé sur la durée. Il ne s’agit pas d’une réduction de 10 % de la masse salariale. En effet, comme l’ont noté les rapporteurs spéciaux, les dépenses de personnel sont en réalité en augmentation de 36, 6 millions d’euros, en grande partie du fait que l’inflation à l’étranger, là où se trouve la majorité de nos personnels, est supérieure à celle que nous connaissons en France.
Puisque l’on m’a interrogé sur l’objectif de réduction de 10 % de la masse salariale à l’horizon de 2022, je veux dire que cette réduction concernera l’ensemble des ministères présents au sein de l’unité qui se met actuellement en place. Chacun devra contribuer à cet effort, et je veillerai personnellement à ce que notre capacité à mener à bien l’ensemble des missions ne soit en rien remise en cause. J’y serai très vigilant, le Premier ministre le sait, et je tiens à vous en informer.
Pour répondre à la question de M. Delahaye, j’indique que nous avons interrogé nos ambassadeurs et ceux-ci viennent de nous transmettre l’ensemble de leurs propositions. Je n’ai pas eu encore le temps de les étudier, mais, lorsque je le ferai, je serai extrêmement vigilant sur l’effort partagé, sur la durée et sur la préservation de toutes de nos missions, lesquelles ne sauraient être réduites par quelque dispositif que ce soit. Je ne pratique donc pas la politique du rabot !
Réorganiser les fonctions de l’État à l’étranger afin de les rationaliser et de les rendre cohérentes, en supprimant les doublons et en renforçant l’efficacité, c’est suivre une logique de cohérence, et non pas de rabot. Toutefois, le ministère de l’Europe et des affaires étrangères doit contribuer, comme les autres ministères, à la maîtrise des dépenses publiques.
J’entends de nombreux intervenants dire qu’il faut maîtriser les dépenses publiques. Pour notre part, nous y contribuons en essayant d’accroître notre efficacité.
Ce projet de budget doit nous permettre de mettre en œuvre les grandes priorités de notre diplomatie. La première d’entre elles est le soutien au multilatéralisme et, plus largement, aux acteurs qui agissent pour un monde plus équitable et plus stable.
Plusieurs d’entre vous, en particulier le président Christian Cambon ainsi que MM. Fouché et Poniatowski, ont fait état de la crise du multilatéralisme. Je reviens du sommet du G20, et je l’ai constatée de visu.
Il est nécessaire que nous soyons à l’avant-garde de la refondation du multilatéralisme, que nous maintenions nos positions sur ce sujet et que nous trouvions des alliés ; il y en a ! Il importe que nous soyons présents sur ce terrain. Notre rang international veut que nous œuvrions en faveur de la refondation du multilatéralisme, de la sécurité collective, de la coopération. C’est un autre débat, que je pourrais avoir avec vous prochainement en commission, mais ce point est tout à fait essentiel pour nous.
À cet égard, je voudrais préciser que nous sommes absolument en désaccord avec les propos tenus par Olaf Scholtz, le ministre de l’économie…
En tout cas, il ne s’agit pas du ministre des affaires étrangères allemand, avec qui j’ai discuté de cette question.
D’abord, il serait inconvenant à l’égard de la France de remettre en cause sa place de membre permanent du Conseil de sécurité.
Ensuite, il serait aléatoire de demander un siège unique européen au sein du Conseil de sécurité, alors que l’Europe en compte aujourd’hui cinq, dont deux permanents.
Par ailleurs, nous avons fait des propositions de réforme du Conseil de sécurité que certains d’entre vous ont évoquées et qui nous paraissent de bonne méthode pour s’adapter à l’évolution du monde. Il ne s’agit pas seulement de la présence de l’Europe au sein du Conseil.
Je voulais répondre à cette question avec beaucoup de clarté. Nous avons fait savoir aux autorités allemandes quelle était notre position sur ce sujet.
Monsieur Temal, puisque nous parlons de multilatéralisme et d’un monde plus stable, sachez que nous avons bien pris en compte, dans les rendez-vous à venir, l’hypothèse d’un Brexit sans accord. En cas de crise majeure, nous avons pris les dispositions nécessaires pour que nos consulats soient renforcés et qu’ils puissent réagir aux difficultés qui ne manqueraient pas de se produire alors.
La deuxième priorité assignée à mon ministère est de renforcer l’influence et l’attractivité de notre pays. C’est pourquoi j’ai souhaité que les moyens de notre réseau de coopération et d’action culturelle soient sanctuarisés. Ils ont été augmentés l’année dernière, et j’avais alors annoncé qu’ils seraient sanctuarisés à ce niveau, ce qui est aujourd’hui le cas. C’est même la première fois depuis longtemps que les moyens de ce réseau se stabilisent au lieu de baisser – je suis prêt à toutes les comparaisons avec le passé. Cet outil est tout à fait indispensable non seulement pour la diffusion de notre langue, mais aussi pour porter notre vision de la culture, défendre nos industries culturelles et créatives, nouer des partenariats dans tous les domaines scientifiques, ainsi que pour renforcer notre attractivité universitaire.
Les moyens de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger seront maintenus, conformément aux engagements du Président de la République. L’AEFE recevra ainsi une subvention de 384 millions d’euros. Le modèle de l’Agence sera conforté, et nous engagerons les évolutions nécessaires à un développement plus ambitieux de son réseau, comme l’a demandé le Président de la République. Je travaille sur ce sujet avec M. Blanquer, et je serai amené assez rapidement à faire des propositions au Président de la République – j’en informerai les commissions compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat – visant à doubler le nombre d’apprenants – M. Cadic y a fait allusion – à l’horizon de 2030.
L’enveloppe des bourses scolaires sera préservée. Son passage de 110 millions à 105 millions d’euros vise simplement à adapter le budget à la dépense réelle observée. Je tiens d’ailleurs à vous préciser que, lors de la discussion budgétaire en séance publique à l’Assemblée nationale, en réponse à plusieurs amendements déposés sur la possibilité d’augmenter le nombre de familles bénéficiaires d’une aide à la scolarité, j’ai annoncé que j’allais étudier la revalorisation du barème du quotient familial maximum de 21 000 à 23 000 euros pour la rentrée 2019-2020. Cette mesure n’est pas d’ordre législatif, mais je souhaite qu’elle puisse advenir dans les délais indiqués. En cas de besoin supérieur de crédits, la « soulte » accumulée par l’AEFE sur les bourses, aujourd’hui sous-consommée, pourra être mobilisée.
On m’a beaucoup parlé du STAFE. Sachez que je suis prêt à regarder avec vous comment valider le dispositif et même l’améliorer, à partir des retours d’expérience.
Concernant enfin les opérateurs, l’accroissement des moyens de l’Institut français, à hauteur de 2 millions d’euros, permettra notamment de financer les actions liées au plan Francophonie annoncé par le Président de la République en mars dernier.
Notre troisième priorité est bien entendu d’assurer au ministère des affaires étrangères les moyens de fonctionner dans de bonnes conditions.
J’ai eu l’occasion de vous donner des précisions sur le patrimoine immobilier de l’État à l’étranger. Nous allons poursuivre notre vigilance sur la bonne qualité de la mobilisation des fonds qui y sont affectés. À cet égard, je voudrais rassurer M. Cadic : notre ambassade à Séoul sera la première priorité de notre programmation en 2019.
Je sais qu’il y a beaucoup d’interrogations sur le programme temporaire 347, consacré à la présidence française du G7. Nous allons y revenir lors de la discussion des amendements, mais je voudrais d’ores et déjà vous dire que ce programme a été paramétré pour faire face aux besoins les plus indispensables, et guère plus. Nous avons une maîtrise très rigoureuse de ces crédits, sous le contrôle de la Cour des comptes. La vigilance sera donc totale.
Tels sont les quelques propos complémentaires dont je voulais vous faire part sur la mission « Action extérieure de l’État ». Sachez que les moyens mis à disposition me permettent d’agir et permettent à l’ensemble des acteurs du Quai d’Orsay d’agir de manière cohérente et efficace. Les leviers d’action à notre disposition permettront à la France de conserver une présence toujours à la hauteur de sa place dans le monde et à celle des enjeux de la refondation du multilatéralisme que nous appelons de nos vœux.
Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.
Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Action extérieure de l’État », figurant à l’état B.
En euros
Mission
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Action extérieure de l’État
Action de la France en Europe et dans le monde
Dont titre 2
660 989 072
660 989 072
Diplomatie culturelle et d’influence
Dont titre 2
74 235 198
74 235 198
Français à l’étranger et affaires consulaires
Dont titre 2
238 294 240
238 294 240
Présidence française du G7
L’amendement n° II-688, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
En euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Action de la France en Europe et dans le monde
dont titre 2
Diplomatie culturelle et d’influence
dont titre 2
Français à l’étranger et affaires consulaires
dont titre 2
Présidence française du G7
TOTAL
SOLDE
La parole est à M. le ministre.
Cet amendement est le pendant de celui que j’ai présenté lors de l’examen des crédits de la mission « Aide publique au développement ». Il s’agit d’abonder les crédits de la mission « Action extérieure de l’État » de 6, 6 millions d’euros à partir des trois programmes « Action de la France en Europe et dans le monde », « Diplomatie culturelle et d’influence » et « Français à l’étranger et affaires consulaires ».
Nous proposons de revenir à la situation initiale pour renforcer nos capacités de mener convenablement la mission « Action extérieure de l’État ».
Monsieur le ministre, pourriez-vous nous expliquer pourquoi les députés ont décidé d’amputer le budget de l’action extérieure de l’État de 6, 684 millions d’euros ?
Par ailleurs, cet amendement nous est parvenu très tardivement. La commission des finances s’est réunie ce matin pour étudier tous les amendements, mais n’a pu examiner celui-ci. Rémi Féraud et moi-même émettrons donc, à titre personnel, un avis favorable, parce qu’il s’agit d’abonder les crédits de la mission, mais nous souhaiterions que le Gouvernement nous fasse part de ses amendements un peu plus tôt, cela faciliterait notre travail…
J’ai eu l’occasion de m’en expliquer précédemment : le Premier ministre a initié une régulation pour financer les annonces faites en matière de transition écologique. Chaque ministère a dû y contribuer, et les différents programmes des missions dont j’ai la charge ont été amputés de 15 millions d’euros.
À la fin de la semaine dernière, ce qui explique le retard que vous évoquez, nous avons eu confirmation que les crédits que nous devions affecter au Fonds européen de développement étaient nettement inférieurs à nos prévisions. C’est la raison pour laquelle nous proposons de réabonder la mission « Action extérieure de l’État » de 6, 6 millions d’euros, comme le Sénat nous y a autorisés lors de l’examen des crédits de la mission « Aide publique au développement ».
Cet amendement est en quelque sorte le miroir de celui que nous avons adopté précédemment. C’est aussi une divine surprise : 6, 6 millions d’euros ne vous tombent pas tous les jours du ciel !
Sur la ligne « Français à l’étranger et affaires consulaires » sont inscrits 2, 9 millions d’euros. Pouvez-vous nous donner les grandes masses de leur affectation ?
Monsieur le ministre, comme j’ai été quelque peu bavard lors de la discussion générale, j’ai dépassé mon temps de parole sans pouvoir dire que nous allions voter votre budget, en dépit des observations et des inquiétudes que j’ai exprimées.
Bien évidemment, je suis tout à fait favorable à cet amendement. Vous avez en quelque sorte un petit peu entendu mon amicale critique sur le fait que vous n’aviez pas assez bien défendu votre quai d’Orsay lors de la Conférence des ambassadeurs. Vous rectifiez les choses dans le bon sens !
Monsieur Yung, les crédits ainsi débloqués serviront à rétablir entièrement l’aide sociale à son niveau d’origine.
Monsieur Poniatowski, de par mon expérience – qui commence à être un peu longue –, j’ai toujours considéré qu’il ne fallait mener qu’un combat à la fois ; jusqu’à présent, la méthode me réussit !
Sourires
L ’ amendement est adopté.
Mes chers collègues, nous allons entamer la discussion de douze amendements en discussion commune.
Ces amendements traitent de thématiques très variées. Malgré l’existence d’incompatibilités de fond, ils ont été inscrits en discussion commune, car, d’une part, deux d’entre eux visent à prélever des crédits sur l’action n° 05 du programme 185 pour un montant cumulé supérieur aux crédits inscrits et, d’autre part, huit d’entre eux tendent à prélever des crédits sur le programme 347 pour un montant cumulé très supérieur aux crédits inscrits.
En conséquence, en cas d’adoption d’amendements, ceux qui conduiraient à dépasser les crédits inscrits tomberaient.
L’amendement n° II-210 rectifié, présenté par Mme Prunaud, MM. P. Laurent, Bocquet, Savoldelli et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Promotion du français
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
En euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Action de la France en Europe et dans le monde
dont titre 2
Diplomatie culturelle et d’influence
dont titre 2
Français à l’étranger et affaires consulaires
dont titre 2
Présidence française du G7
Promotion du français
TOTAL
SOLDE
La parole est à Mme Christine Prunaud.
Le Premier ministre a annoncé 10 % de suppression de postes dans votre ministère, alors même que 150 demandes de missions de renfort ne peuvent être satisfaites à l’heure actuelle, faute de moyens.
En se basant sur les deux tiers des agents qui « badgent », les heures écrêtées effectuées et les congés perdus représentent 70 emplois à temps plein. Il existe donc un vrai différentiel entre les besoins et les ressources en matière de personnels, dont la conséquence la plus évidente est la baisse de qualité du service rendu aux Français expatriés.
Entre une surcharge de travail pour les agents et la fermeture d’antennes locales consulaires, les Français à l’étranger sont de plus en plus nombreux à renoncer à certaines démarches administratives. Nous avons tous en mémoire les témoignages de ces Français faisant plusieurs centaines de kilomètres pour aller voter l’an dernier.
Pour répondre à cette situation, vous avez lancé la généralisation des procédures numériques pour les démarches administratives. Cette dématérialisation peut effectivement constituer une alternative importante, à condition qu’elle ne remplace pas la possibilité de se déplacer – mais je ne développerai pas davantage.
Par ailleurs, je vous rappelle que le tribunal administratif a condamné l’État à requalifier en titulaires d’anciens fonctionnaires poussés à l’abandon de leur statut pour pouvoir être envoyés à l’étranger. J’avoue qu’il s’agit d’une situation particulièrement complexe.
Aujourd’hui, les agents titulaires ne sont plus qu’un tiers des personnels, un autre tiers est composé de recrutements locaux remplaçant les postes vacants dont la rémunération est basée sur le droit local et le dernier tiers est constitué de contractuels intérimaires de droit français. Cette répartition revient évidemment beaucoup moins cher à l’État, puisque les rémunérations et les perspectives de carrière sont extrêmement limitées. Par contre, cette situation interroge sur les conditions de vie et de travail induites et sur l’image de la France et de son réseau consulaire.
Cet amendement vise donc à redonner des moyens adaptés à nos services consulaires, ou tout du moins à nous renseigner davantage.
L’amendement n° II-268, présenté par M. Cadic, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
En euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Action de la France en Europe et dans le monde
dont titre 2
Diplomatie culturelle et d’influence
dont titre 2
Français à l’étranger et affaires consulaires
dont titre 2
Présidence française du G7
TOTAL
SOLDE
La parole est à M. Olivier Cadic.
Cet amendement a pour objet de permettre le financement des actions en faveur de l’enseignement du français pour les élèves de nationalité française vivant à l’étranger. Les fonds ainsi transférés du programme 185 vers le programme 151 ont en effet vocation à être réinjectés via deux autres amendements, que je présenterai dans quelques instants, dans le programme 185, et notamment son action n° 02 « Coopération culturelle et promotion du français ».
Ce transfert de crédits permettra la mise en place d’un chèque éducation ouvrant la possibilité, à tous les élèves français, de prendre des cours de français auprès des instituts français. Il servira aussi à soutenir le réseau FLAM, plébiscité par les familles françaises vivant à l’étranger.
L’amendement n° II-37, présenté par M. Delahaye, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
En euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Action de la France en Europe et dans le monde
dont titre 2
Diplomatie culturelle et d’influence
dont titre 2
Français à l’étranger et affaires consulaires
dont titre 2
Présidence française du G7
TOTAL
SOLDE
La parole est à M. le rapporteur spécial.
Cet amendement vise à réduire les crédits prévus pour l’organisation du G7 en raison des contraintes budgétaires que nous connaissons. Nous proposons de nous en tenir au budget du G20 de Deauville de 2011, corrigé de l’inflation, soit 33, 2 millions d’euros au lieu des 36, 4 millions retenus aujourd’hui.
Il s’agit en quelque sorte d’un amendement de principe.
L’amendement n° II-470, présenté par Mmes Lepage et Conway-Mouret, MM. Todeschini, Kanner et Boutant, Mme G. Jourda, M. Mazuir, Mme Perol-Dumont, MM. Roger, Temal, Vallini, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
En euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Action de la France en Europe et dans le monde
dont titre 2
Diplomatie culturelle et d’influence
dont titre 2
Français à l’étranger et affaires consulaires
dont titre 2
Présidence française du G7
TOTAL
SOLDE
La parole est à Mme Claudine Lepage.
L’Agence pour l’enseignement français à l’étranger a subi, dans le projet de loi de finances rectificative pour 2017, une annulation de crédits d’un montant de 33 millions d’euros qui a placé ce réseau dans une position plus que délicate.
Cette annulation de crédits a fragilisé l’AEFE, qui se trouvait déjà en situation de sous-financement depuis le transfert à l’Agence des compétences relatives au patrimoine immobilier ainsi que de la charge des pensions civiles, charges que le ministère n’a jamais compensées financièrement depuis 2008.
L’amputation du budget de l’AEFE l’a contrainte à prendre une série de mesures drastiques comme la diminution du nombre de titulaires détachés de l’éducation nationale. Elle a également affaibli ses capacités d’intervention, d’investissement et sa capacité de pilotage, dans un réseau pourtant largement reconnu dans le monde et indispensable à notre diplomatie d’influence.
Cette baisse de crédits survient alors que le Président de la République a fixé lui-même l’objectif de doubler le nombre d’élèves scolarisés à l’étranger d’ici à 2030. On ne peut énoncer un tel objectif ambitieux et, en même temps, ne pas se donner les moyens financiers de l’atteindre, surtout lorsque l’on constate une augmentation croissante des effectifs à un niveau de 2 % en moyenne par an. Il conviendrait, à l’inverse, que l’enseignement français à l’étranger et son opérateur public, l’AEFE, connaissent une augmentation de budget dans le cadre du projet de loi de finances pour 2019.
Le présent amendement vise donc à renforcer le budget de l’AEFE de 15 millions d’euros, qui seraient ainsi prélevés à l’action n° 01 du programme 347, « Présidence française du G7 », et attribués à l’action n° 05 du programme 185, « Diplomatie culturelle et d’influence ».
L’amendement n° II-28 rectifié quater, présenté par MM. Regnard et D. Laurent, Mme Deromedi, MM. Frassa, Henno et Le Gleut, Mmes Gruny et L. Darcos, MM. B. Fournier, Bonhomme, del Picchia, H. Leroy, Revet, Vial et Brisson, Mme Bonfanti-Dossat et MM. Karoutchi et Wattebled, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
En euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Action de la France en Europe et dans le monde
dont titre 2
Diplomatie culturelle et d’influence
dont titre 2
Français à l’étranger et affaires consulaires
dont titre 2
Présidence française du G7
TOTAL
SOLDE
La parole est à M. Damien Regnard.
Cet amendement vise à augmenter de 4, 7 millions d’euros la subvention pour charges de service public versée à l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger afin de compenser, dans sa totalité, les effets de l’annulation d’une partie de la subvention en juillet 2017.
La question de la soutenabilité budgétaire du réseau de l’Agence est clairement posée à la suite de l’annonce, par le Président de la République, de doubler le nombre d’élèves dans ces établissements scolaires d’ici à 2025.
Aujourd’hui, 350 000 élèves sont scolarisés dans 492 établissements homologués à travers 137 pays. Le seuil de tolérance des familles est désormais atteint et le désengagement progressif de l’État devient menaçant.
Pour ces raisons, les auteurs de cet amendement proposent d’augmenter la dotation de l’AEFE de 4, 7 millions d’euros pour lui permettre de faire face à ses missions.
L’amendement n° II-467, présenté par Mmes Conway-Mouret et Lepage, MM. Todeschini, Kanner et Boutant, Mme G. Jourda, M. Mazuir, Mme Perol-Dumont, MM. Roger, Temal, Vallini, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
En euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Action de la France en Europe et dans le monde
dont titre 2
Diplomatie culturelle et d’influence
dont titre 2
Français à l’étranger et affaires consulaires
dont titre 2
Présidence française du G7
TOTAL
SOLDE
La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret.
Cet amendement vise à flécher 10 millions d’euros de crédits de paiement supplémentaires vers l’action « Réseau diplomatique », au sein du programme « Action de la France en Europe et dans le monde », et à réduire d’autant les crédits de paiement de l’action « Préparation et organisation du sommet du G7 » au sein du programme « Présidence française du G7 ».
Nous préférons flécher les crédits au bénéfice du plus grand nombre, même si nous souhaitons le plus grand succès du G7, puisque cet amendement vise à soutenir l’action de notre réseau des ambassades afin de préserver la sécurité des postes à l’étranger.
L’amendement n° II-29 rectifié quater, présenté par MM. Regnard et D. Laurent, Mme Deromedi, MM. Frassa, Henno et Le Gleut, Mmes Gruny et L. Darcos, MM. B. Fournier, Bonhomme, del Picchia, H. Leroy, Revet, Vial et Brisson, Mme Bonfanti-Dossat et MM. Karoutchi et Wattebled, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
En euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Action de la France en Europe et dans le monde
dont titre 2
Diplomatie culturelle et d’influence
dont titre 2
Français à l’étranger et affaires consulaires
dont titre 2
Présidence française du G7
TOTAL
SOLDE
La parole est à M. Damien Regnard.
Cet amendement vise à soutenir le dispositif des bourses scolaires en faveur des familles à revenus modestes et à accompagner les élèves en situation de handicap.
Les familles qui rencontrent des difficultés pour faire face aux frais de scolarité doivent pouvoir être soutenues et accompagnées afin que l’excellence des enseignements dispensés par les établissements du réseau de l’AEFE leur soit également accessible. C’est la raison pour laquelle les auteurs de cet amendement proposent d’augmenter la dotation de l’AEFE de 7 millions d’euros.
L’amendement n° II-468, présenté par Mmes Conway-Mouret et Lepage, MM. Todeschini, Kanner et Boutant, Mme G. Jourda, M. Mazuir, Mme Perol-Dumont, MM. Roger, Temal, Vallini, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
En euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Action de la France en Europe et dans le monde
dont titre 2
Diplomatie culturelle et d’influence
dont titre 2
Français à l’étranger et affaires consulaires
dont titre 2
Présidence française du G7
TOTAL
SOLDE
La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret.
Le Président de la République avait annoncé, en juillet 2017, un gel des crédits de l’AEFE de 33 millions d’euros et s’était engagé à sanctuariser ce budget au même niveau en 2018.
Le programme 151 affirme ainsi qu’il faut stabiliser la dotation annuelle consacrée à l’aide à la scolarité des enfants français inscrits dans les établissements du réseau de l’AEFE à son niveau de 110 millions d’euros. Or le programme prévoit une aide à la scolarité budgétée à 105 millions d’euros, auxquels s’ajouterait un prélèvement de 5 millions d’euros sur des liquidités accumulées au sein de l’AEFE. Cette soulte ne peut être considérée comme un maintien au même niveau des dotations dédiées à l’AEFE ; elle relève plutôt de l’artifice comptable. Elle a été constituée au cours des années antérieures par des trop-perçus et des gains au change des années précédentes.
Le Gouvernement affirme que l’AEFE disposerait des moyens nécessaires pour faire face au coût anticipé de la campagne des bourses et aux risques éventuels d’une perte au change ou d’une augmentation des frais de scolarité. Si cela était vrai, nous serions obligés de faire entrer au forceps les besoins des familles dans une enveloppe qui n’y répond pas aujourd’hui. Or nous savons que l’AEFE ne dispose pas des moyens nécessaires pour faire face à cette augmentation de 5 millions d’euros.
La diminution des dotations entraîne une augmentation des frais de scolarité, qui touche, de fait, les familles les plus modestes. Les demandes de bourses s’en trouvent ainsi augmentées, et toutes ne sont pas satisfaites à hauteur des besoins. La tendance est d’ailleurs à s’attaquer aux boursiers à 100 % en réduisant leur quotité pour des raisons budgétaires.
De nombreux établissements doivent aussi faire face à de plus en plus d’impayés, en raison des difficultés financières des familles. De telles situations sont intolérables.
Alors que le Président de la République souhaite doubler le nombre d’apprenants du français, faudra-t-il alors que ces lycées soient réservés aux plus privilégiés ?
Pour ces raisons, le groupe socialiste propose le rétablissement des crédits à hauteur de 5 millions d’euros.
L’amendement n° II-524, présenté par Mme Lepage et M. Leconte, est ainsi libellé :
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Autorisations d’engagement
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Action de la France en Europe et dans le monde
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Diplomatie culturelle et d’influence
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Français à l’étranger et affaires consulaires
dont titre 2
Présidence française du G7
TOTAL
SOLDE
La parole est à Mme Claudine Lepage.
Le Premier ministre a annoncé récemment la stratégie d’attractivité du Gouvernement pour les étudiants internationaux, dont Campus France est l’un des opérateurs. Cette stratégie, censée améliorer notre capacité à attirer davantage d’étudiants et à faire face à la concurrence des pays étrangers, fait quasiment l’unanimité contre elle. Il est vrai que l’on peut s’interroger sur l’efficacité de cette stratégie, qui repose principalement sur l’augmentation des frais d’inscription pour les étudiants étrangers.
Si je peux concéder que l’augmentation du prix des formations pourrait attirer certains étudiants de nationalité chinoise ou indienne, pour qui un prix élevé de scolarité est souvent synonyme de qualité, cette hausse va nécessairement nous priver d’étudiants plus modestes. En effet, le droit d’étudier sera désormais fixé à 2 770 euros en licence, contre 170 euros aujourd’hui, et à 3 770 euros en master et en doctorat, contre 243 euros en master et 380 euros en doctorat aujourd’hui, soit un prix prohibitif pour de nombreux étudiants.
Certains d’entre eux, notamment en Afrique francophone, ont réagi avec tristesse et colère à vos annonces. Ils ont en effet eu le sentiment d’être trahis. Comment ne pas les comprendre, alors que le Président de la République avait indiqué à plusieurs reprises ces derniers mois son ambition pour la francophonie ? Au regard de cette stratégie, cette ambition francophone ne me semble plus crédible.
Monsieur le ministre, au lieu d’augmenter les frais d’inscription, nous vous proposons, par cet amendement visant à renforcer le budget de Campus France de 5 millions d’euros, d’améliorer significativement l’accueil et les conditions de vie des étudiants étrangers.
L’amendement n° II-30 rectifié ter, présenté par MM. Regnard et D. Laurent, Mme Deromedi, MM. Frassa, Henno et Le Gleut, Mmes Gruny et L. Darcos, MM. B. Fournier, Bonhomme, del Picchia, H. Leroy, Revet, Vial et Brisson, Mme Bonfanti-Dossat et MM. Karoutchi et Wattebled, est ainsi libellé :
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Action de la France en Europe et dans le monde
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Présidence française du G7
TOTAL
SOLDE
La parole est à M. Damien Regnard.
Pour 2017, 3, 34 millions d’euros de crédits étaient inscrits dans le projet de loi de finances au titre de la réserve parlementaire des députés et sénateurs des Français de l’étranger, au programme 151, « Français à l’étranger et affaires consulaires », dans la mission « Action extérieure de l’État ». Ces crédits budgétaires apportaient une contribution vitale à la vie associative française à l’étranger, que ce soit dans le domaine de la culture, de la solidarité ou de l’emploi.
Pour compenser la suppression de la réserve parlementaire, prévue à l’article 14 de la loi organique n° 2017 1338 du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique, le Gouvernement a mis en place un dispositif de soutien au tissu associatif des Français de l’étranger.
En 2018, la commission consultative du STAFE a versé 1, 74 million d’euros pour le financement de 223 projets à travers le monde. Pour 2019, le programme 151 a été doté de 2 millions d’euros.
Pourtant, le 2 octobre 2017, devant l’Assemblée des Français de l’étranger, le Président de la République a déclaré : « Je demande au ministre de l’Europe et des affaires étrangères […] d’étudier la mise en place d’un dispositif permettant d’accompagner le tissu associatif des Français de l’étranger compte tenu de la suppression de cette réserve.
« Nous devons avoir là un principe de justice, je sais que pour beaucoup d’associations que vous souteniez et que les parlementaires accompagnaient, la réserve était un élément important et donc nous devons regarder là-dessus comment créer avec le Quai un dispositif comparable et que les ministres puissent instruire cela en lien avec vous-même et les parlementaires. »
Or le STAFE est très loin de compenser la réserve parlementaire. Entre 2017 et 2019, l’effort budgétaire en direction des associations françaises à l’étranger a baissé de 40 %.
De fait, l’immense majorité des associations françaises qui structurent le lien social des communautés à l’étranger sont abandonnées par l’État. Or elles remplissent une mission essentielle d’intérêt général et ne peuvent s’appuyer sur aucune autre personne publique, qu’il s’agisse du maire, du conseil départemental ou du conseil régional…
Le système d’« appel à projets » est inégalitaire, dans la mesure où il favorise les associations les plus importantes, lesquelles sont déjà les mieux positionnées pour lever des fonds. Il est aussi peu démocratique, car il exclut les parlementaires du processus de sélection des projets.
Cet amendement vise donc à augmenter la dotation du STAFE afin de compenser totalement celle de la réserve parlementaire. Pour ce faire, il tend à opérer un transfert de 3, 34 millions d’euros, au lieu de 2 millions d’euros, vers le Fonds pour le développement de la vie associative, à l’action n° 01 du programme 151, « Français à l’étranger et affaires consulaires », en soustrayant la somme de 1, 34 million d’euros au programme 105.
L’amendement n° II-514, présenté par M. Leconte et Mmes Conway-Mouret et Lepage, est ainsi libellé :
Mission « Action extérieure de l’État »
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Action de la France en Europe et dans le monde
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Diplomatie culturelle et d’influence
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Français à l’étranger et affaires consulaires
dont titre 2
Présidence française du G7
TOTAL
SOLDE
La parole est à M. Jean-Yves Leconte.
Cet amendement procède du même esprit que celui que vient de défendre Damien Regnard.
La suppression de la réserve parlementaire a conduit le Gouvernement à déposer un amendement l’année dernière visant à abonder de 2 millions d’euros le programme « Jeunesse et vie associative » pour soutenir l’action associative des Français vivant hors de France.
Monsieur le ministre, vous avez globalement tenu parole sur la mise en place de cette enveloppe.
J’ai déposé cet amendement avec deux objectifs.
Le premier, c’est pour augmenter cette somme, car, 2 millions d’euros, c’est peu au regard du montant dont nous disposions auparavant, auquel il serait souhaitable de revenir.
Le second, c’est pour montrer que, après une année de fonctionnement, trois éléments du STAFE mériteraient d’être corrigés.
Tout d’abord, le nombre de projets pouvant être sélectionnés est plafonné à six, que la circonscription regroupe 1 000 ou 200 000 Français.
Ensuite, alors que tous les pays ne connaissent pas la liberté d’association, vous demandez que l’association percevant la subvention relève du droit local. Cela fonctionne très bien dans les pays européens, mais dans ceux où la vie associative est fragile et où l’argent venant de l’étranger n’est pas bien vu, il n’est pas possible d’aider les associations de droit français.
Enfin, la condition selon laquelle plus de 50 % du financement d’une action doit provenir d’un autre moyen fait disparaître tout le système de la réserve parlementaire, qui permettait d’amorcer de nouvelles idées.
Il me semble qu’il faut revoir le dispositif du STAFE à la lumière de ces trois remarques et accélérer sa mise en œuvre au cours de l’année budgétaire.
L’amendement n° II-503 rectifié, présenté par M. Cadic et les membres du groupe Union Centriste, est ainsi libellé :
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Autorisations d’engagement
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Action de la France en Europe et dans le monde
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Diplomatie culturelle et d’influence
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Français à l’étranger et affaires consulaires
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Présidence française du G7
TOTAL
SOLDE
La parole est à M. Olivier Cadic.
Monsieur le ministre, il y a un an, nous vous avions sollicité, avec la présidente Catherine Morin-Desailly, pour la Fondation Alliance française, qui se trouvait dans une situation désespérée. Grâce à votre concours et à l’appui des pouvoirs publics, elle a pu être sauvée, au prix d’une restructuration majeure : elle a été recentrée sur ses missions premières d’animation du réseau mondial des alliances françaises et elle s’est rapprochée de l’Institut français, au moyen d’une clarification de leurs rôles respectifs, en réponse au vœu présidentiel. Enfin, son contentieux avec l’Alliance française Paris Île-de-France est en cours de règlement.
Cet assainissement, qui va permettre de préserver une tête de réseau mondial, interface entre les sociétés civiles locales, dont les alliances sont l’émanation, et notre diplomatie d’influence, n’est toutefois pas entièrement acquis. La Fondation tire en effet une part substantielle de ses recettes des locations immobilières de son site du boulevard Raspail. Or, dans le cadre du rapprochement avec l’Institut français, il est prévu que celui-ci s’installe, en tant que locataire, dans ces locaux. Cette installation, annoncée par le Président de la République en mars dernier, priverait la Fondation de ressources pendant la durée, estimée à plus de deux ans, des travaux importants nécessaires à l’accueil de près de 150 agents sur près de 3 000 mètres carrés.
En l’absence de confirmation de cette décision, le budget de la Fondation pour 2019 ne peut être établi. En 2018, le ministère de l’Europe et des affaires étrangères avait demandé à la Fondation de ne pas renouveler certains baux locatifs, dans l’attente de la confirmation de l’arrivée de l’Institut, et avait versé une subvention exceptionnelle pour soutenir cet effort.
Si, l’an prochain, le chantier d’installation était maintenu, la Fondation serait confrontée à un manque à gagner de quelque 600 000 euros, soit le quart de son budget. Pour mémoire, dans le cadre de sa restructuration, elle a déjà réduit ses effectifs de 45 %. Avec moins de dix agents, elle court le risque d’être incapable de faire face à ses missions au service de quelque 835 alliances.
Le présent amendement a donc pour objet de transférer 600 000 euros du programme 347 vers l’action n° 02 du programme 185, afin de compenser cette perte et de sécuriser la situation financière de la Fondation Alliance française.
Si vous le permettez, monsieur le président, mon collègue Rémi Féraud et moi-même vous proposons, pour la clarté de nos débats, de donner l’avis de la commission en alternance.
L’amendement n° II-210 rectifié vise à augmenter de 37 millions d’euros les crédits affectés à l’administration consulaire et à créer un programme dédié à la promotion du français, doté de 488 millions d’euros, par le regroupement des crédits consacrés à la promotion culturelle dans le programme 185 et de ceux de l’AEFE.
Sur la forme, la création d’un programme dédié à la promotion du français n’apparaît pas comme une nécessité en l’état de la maquette budgétaire.
Sur le fond, cet amendement tend à réduire les crédits consacrés à Atout France et la somme destinée à l’organisation du sommet du G7 de 20 millions d’euros chacun. Si ces deux postes de dépenses pourraient sans doute faire l’objet d’une réduction budgétaire, une diminution d’une telle ampleur compromettrait le bon fonctionnement de leurs missions et serait dommageable pour l’organisation du G7. Sur ce dernier point, deux amendements déposés par la commission des finances visent à diminuer les crédits de façon plus mesurée.
Enfin, cet amendement abonde les crédits de l’administration consulaire de 37 millions d’euros. Une telle hausse ne semble pas nécessaire, d’autant que nos travaux ont mis en évidence les chantiers de modernisation du réseau consulaire à moindres frais.
L’avis est donc défavorable.
L’amendement n° II-268 vise à financer la mise en place d’un chèque éducation pour les élèves français vivant à l’étranger et à soutenir le réseau associatif FLAM. Il tend également à retirer 31 millions d’euros, soit 8 % de son budget, à l’AEFE, laquelle a pourtant déjà supprimé 174 postes cette année et en supprimera 166 l’année prochaine. L’adoption d’une modification budgétaire d’une telle ampleur nous entraînerait vers un autre système d’enseignement français à l’étranger. En conséquence, l’avis ne peut être que défavorable.
L’amendement n° II-470 vise à abonder de 15 millions d’euros le budget de l’AEFE en privant celui du G7 de la même somme. Nous comprenons l’intérêt que présente le gain de cette somme pour l’AEFE, mais l’équilibre qui en résulterait serait déraisonnable pour l’organisation du sommet. L’avis est donc défavorable.
L’amendement n° II-28 rectifié quater tend à ponctionner le programme 105 de 4, 7 millions d’euros au profit de l’AEFE. Ces crédits manqueraient évidemment audit programme, alors que, je tiens à le rappeler, l’allocation de l’AEFE est à peu près stable. En effet, si elle diminue en apparence de 14, 7 millions d’euros, les dépenses de sécurisation qui correspondent à ce montant relèveront, en 2019, du compte d’affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l’État ». Je me contente de la qualifier « d’à peu près stable », car il faudra bien rembourser ces sommes dans les budgets suivants ; monsieur le ministre, vous pourrez peut-être nous apporter des éléments à ce sujet. En tout état de cause, cela ne grèvera pas le budget de l’AEFE cette année. L’avis est donc défavorable.
L’amendement n° II-467 vise à augmenter de 10 millions d’euros l’action « Réseau diplomatique » au sein du programme 105, en réduisant d’autant le budget du G7. Or la baisse des crédits de cette action n’est que la conséquence d’une écriture comptable : la suppression des loyers budgétaires et des nouvelles modalités de financement des dépenses de sécurisation, ainsi que vient de l’indiquer mon collègue Rémi Féraud.
En outre, si l’on réduisait de 10 millions d’euros son budget, le G7 deviendrait très difficile à organiser. La commission des finances a déposé deux amendements qui amputent ce budget d’une somme moins importante ; je vous suggère de vous y rallier.
Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.
Les amendements n° II-29 rectifié quater et II-468 visent à abonder le budget des bourses scolaires respectivement de 7 millions d’euros et de 5 millions d’euros. Or, dans le cadre de nos travaux, ce budget ne nous est pas apparu insuffisant à barème constant. Il ne serait sans doute pas aberrant d’envisager une modification de ce barème, mais il n’existe pas de besoin budgétaire pour l’instant.
En outre, puisqu’il faut bien trouver l’argent quelque part, l’amendement n° II-29 rectifié quater tend à soustraire des crédits au budget d’organisation du G7, lequel, à force d’être ponctionné, sera bientôt réduit à la portion congrue ! S’agissant de l’amendement n° II-468, il ne me semble pas non plus raisonnable de retirer 5 millions d’euros au programme 105.
L’amendement n° II-524 vise encore à prélever des crédits destinés à l’organisation du G7 – à ce rythme, ils vont finir à zéro ! – pour abonder, à hauteur de 5 millions d’euros, la subvention de Campus France, laquelle est pourtant maintenue au niveau de 2018 et en augmentation par rapport à 2017.
Pour 2019, Campus France devrait bénéficier de 81, 3 millions d’euros de financement public, soit 16 % de plus qu’en 2016. Sa subvention pour charges de service public versée par la mission « Action extérieure de l’État » est stable entre 2018 et 2019, à 3, 8 millions d’euros.
Depuis 2016, l’attractivité de l’enseignement supérieur français pour les étudiants étrangers se confirme. Le nombre d’étudiants étrangers en mobilité en France est ainsi passé de 184 000 en 2016 à 192 000 en 2018 et devrait atteindre 200 000 en 2020, d’après le projet annuel de performance de la mission.
L’avis de la commission est donc défavorable sur cet amendement.
Les amendements n° II-30 rectifié ter et II-514 visent à augmenter de 1, 34 million d’euros les crédits du dispositif STAFE.
Doté d’un budget de 2 millions d’euros, ce dispositif a été mis en place pour compenser en partie la suppression de la réserve parlementaire l’année dernière. Selon les informations transmises par le ministère à vos rapporteurs spéciaux, il n’a démarré qu’à la moitié de l’année 2018, entraînant des retards dans l’instruction des dossiers. Toutefois, les postes diplomatiques et consulaires semblent s’être bien approprié cet outil, puisque, début octobre, 302 projets émanant de 112 postes diplomatiques avaient été reçus et examinés par la commission consultative du STAFE.
Reste que le budget dédié de 2 millions d’euros est inférieur au budget précédemment consacré à la réserve parlementaire des députés et sénateurs des Français de l’étranger, qui atteignait 3, 34 millions d’euros. La commission souhaiterait donc entendre l’avis du Gouvernement sur ces deux amendements.
L’amendement n° II-503 rectifié vise à accorder une subvention exceptionnelle de 600 000 euros à la Fondation Alliance française. Ce montant, très limité, tient compte de la situation particulière de la Fondation.
L’effort de rapprochement avec l’Institut français peut permettre à cette dernière de sortir par le haut d’une crise liée, notamment, à ses difficultés avec l’Alliance française Paris Île-de-France. Toutefois, ce processus a des conséquences immédiates – une période de travaux préalable au versement de loyers par l’Institut français – qui vont peser sur les rentrées budgétaires de la Fondation.
La somme de 600 000 euros, visée dans cet amendement, serait prise sur le budget d’organisation du G7. Elle ne nous semble pas déraisonnable, mais elle correspond à une situation que nous n’avons pas pu étudier à fond. En conséquence, la commission s’en remet à la sagesse du Sénat sur cet amendement et souhaite également connaître l’avis du Gouvernement.
Le Gouvernement partage l’avis de la commission sur la quasi-totalité des amendements. Il est donc inutile que je reprenne ses arguments, si ce n’est un, qui s’adresse à tout le monde, y compris, en partie, aux rapporteurs spéciaux.
J’ai entendu plusieurs intervenants appeler de leurs vœux le renforcement de la présence et de l’influence de la France. Ils ont raison ! Pourtant, j’entends les mêmes presque nous dire qu’il faut supprimer le G7 !
À force de le priver de financement, on ne pourra plus l’organiser. Si on ne l’organise plus, on n’en sera plus membre. Et alors, adieu les initiatives sur le multilatéralisme ! Évitons donc les effets de manches !
J’avoue que l’accumulation des ponctions sur le budget d’organisation du G7 m’épate un peu de la part de sénateurs soucieux de la présence de la France dans le monde. On finance tout avec le G7 ! C’est extraordinaire !
Vous avez été député, vous savez bien ce qu’on fait lors d’un débat budgétaire !
Sur l’amendement n° II-210 rectifié, l’avis du Gouvernement est défavorable, pour les raisons qu’a exposées le rapporteur spécial, M. Delahaye.
Monsieur Cadic, le rapporteur spécial a indiqué à raison qu’il ne paraît pas logique de retirer de l’argent à l’AEFE pour financer le chèque éducation. Des efforts importants sont par ailleurs effectués à l’égard du réseau des Français à l’étranger dans le cadre du dispositif FLAM : amputer une partie des crédits de l’AEFE ne serait pas de bonne politique. Le Gouvernement est donc défavorable à votre amendement n° II-268.
Je ne partage pas l’avis de M. Delahaye sur la diminution du budget du G7.
Comme je l’ai dit dans mon propos introductif, la maîtrise des coûts sera très rigoureuse. Les présidences italienne, en 2017, et canadienne, en 2018, ont déployé des moyens beaucoup plus importants que les nôtres. Je suis prêt à me soumettre à la comparaison. Nous sommes bien en dessous ! Il est vrai que le budget prévu est un peu supérieur à celui de l’organisation du sommet de Deauville, mais, depuis cette date, les aménagements techniques et sécuritaires sont beaucoup plus importants. C’était presque une autre époque… L’avis est donc défavorable sur l’amendement n° II-37.
Au fil des amendements, comme je l’ai dit, on nous propose la suppression progressive du budget de la présidence du G7. C’est le cas de l’amendement n° II-470 pour financer l’AEFE. Je rappelle à Mmes Lepage et Conway-Mouret, comme à tous ceux d’entre vous qui sont intervenus sur ce sujet, que les crédits de l’AEFE sont maintenus. Nous avions annoncé qu’ils seraient sanctuarisés, ils le sont ! J’en avais pris l’engagement, je l’ai tenu ! J’entends bien qu’ils restent sanctuarisés pour les années qui viennent.
S’agissant du développement de l’enseignement du français à l’étranger, je rappelle que le Président de la République m’a sollicité pour faire des propositions ; j’y travaille, et je livrerai rapidement mes conclusions, lesquelles ne remettront pas en cause l’existence de l’AEFE ni son architecture actuelle. J’ajoute que le Premier ministre a demandé à Mme Cazebonne d’établir un diagnostic sur la situation des effectifs scolarisés en français et de faire des préconisations pour la réalisation de l’objectif de doublement des élèves d’ici à 2030 ; j’attends ce rapport pour le confronter aux résultats de mes réflexions et aboutir ainsi à une proposition globale.
Les dépenses de sécurisation de l’AEFE seront prises en charge par le compte d’affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l’État » du ministère de l’action et des comptes publics. Nous avons obtenu de mobiliser 100 millions d’euros pour les travaux de sécurisation, ce qui permettra d’accélérer les procédures.
Les crédits de l’AEFE ne diminuant pas, ainsi que le rapporteur spécial a bien voulu le rappeler, l’avis est défavorable sur l’amendement n° II-470, ainsi que sur l’amendement n° II-28 rectifié quater.
Le Gouvernement partage l’avis de la commission sur l’amendement n° II-467, qui concerne la réforme des réseaux.
Les amendements n° II-29 rectifié quater et II-468 visent les bourses scolaires. Je comprends la préoccupation exprimée par M. Regnard et par Mme Conway-Mouret, mais, je le répète, la réduction de 5 millions d’euros s’explique par le fait que la mobilisation des crédits est insuffisante. Nous n’allons pas ajouter de l’argent alors que les crédits disponibles n’ont pas été consommés. Si d’aventure un besoin supplémentaire se faisait jour, il existe une soulte des bourses de l’AEFE qui pourra être utilisée. Les effets de manches sont donc appuyés sur un argumentaire techniquement incorrect.
Pour le plafond du quotient familial, j’ai proposé qu’il soit relevé de 21 000 à 23 000 euros. Cette mesure n’étant pas d’ordre législatif, je la prendrai, ce qui permettra, dans le cadre de l’enveloppe actuelle, même diminuée, de mobiliser ce financement en direction des familles directement concernées.
L’avis du Gouvernement est donc défavorable sur ces deux amendements.
L’amendement n° II-524 a pour objet d’augmenter la subvention de Campus France en ponctionnant, une fois de plus, le budget du G7. Je rappelle que ladite subvention a été maintenue en 2019 à son niveau de 2018.
S’agissant des frais d’inscription des étudiants étrangers non communautaires, je voudrais répondre à M. Vallini qu’il faut décliner cette mesure conjointement avec les quatre dimensions du plan.
Premièrement, nous allons bel et bien faire payer les droits d’inscription aux étudiants étrangers non communautaires, mais ceux-ci ne représenteront que le tiers de leur valeur réelle. La quasi-totalité des pays qui accueillent des étudiants étrangers non communautaires font payer des droits d’inscription, souvent beaucoup plus élevés que ceux que nous allons demander.
Deuxièmement, nous multiplions par trois le nombre de bourses d’exonération pour les étudiants étrangers qui s’inscrivent auprès des postes consulaires pour entrer à l’université en France. Ces bourses vont s’ajouter aux bourses financières existantes.
Troisièmement, Campus France sera chargé de faire en sorte que l’accueil des étudiants étrangers soit renforcé dans les universités.
Quatrièmement, enfin, au-delà de l’attractivité de nos propres universités, l’objectif de fond de cette réforme est de proposer des formations françaises en partenariat avec les universités locales dans les pays concernés. Nous avons mis en place cela à Abidjan, où j’ai récemment inauguré le hub éducatif franco-ivoirien, qui offre des cursus doubles et des formations françaises en Côte d’Ivoire. Nous sommes en train de travailler en ce sens au Sénégal et, bientôt, en Tunisie.
La logique de cette réforme est d’établir des partenariats croisés permettant aux étudiants étrangers de poursuivre sur leur propre territoire des études de qualité bénéficiant du label de l’excellence française. Le Premier ministre a bien évoqué cet ensemble de mesures, et non la seule augmentation des droits d’inscription, laquelle serait incompréhensible si on l’envisageait en dehors de ce cadre.
L’avis est donc défavorable sur l’amendement n° II-524.
Concernant le dispositif STAFE, vous avez bien voulu reconnaître, monsieur Leconte, que j’avais respecté mes engagements, puisqu’il existe un fonds de 2 millions d’euros. Mais, excusez-moi du peu, seul 1, 7 million d’euros a été dépensé ! Ce fonds étant destiné à financer les actions et non le fonctionnement des associations, des critères rigoureux s’appliquent. Or ceux-ci n’ont pas provoqué de blocage, puisque 75 % des projets déposés ont été retenus.
Je considère donc que le dispositif est aujourd’hui satisfaisant, mais je suis prêt à le revoir le moment venu, quand nous aurons tous les éléments, et à faire un point sur le sujet avec la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, si son président le souhaite. Aujourd’hui, toutefois, l’avis du Gouvernement est défavorable sur les amendements n° II-30 rectifié ter et II-514.
Concernant la Fondation Alliance française, qui fait l’objet de l’amendement n° II-503 rectifié, vous posez une bonne question, monsieur Olivier Cadic, mais, à mon sens, il est un peu trop tôt pour lui apporter une réponse. Nous étions face à une situation de crise compliquée, tonique même, à différents égards, mais nous sommes parvenus à un résultat : un accord entre l’Institut français et la Fondation Alliance française. Cette dernière a vu ses fonctions limitées, de sorte qu’elle n’entre plus en concurrence avec d’autres outils, car il est de bon sens de favoriser la cohérence en la matière.
Il me semble donc qu’il est trop tôt pour avoir une opinion arrêtée sur un dispositif qui vient de naître. Comme pour le dispositif STAFE, je souhaite que nous en reparlions un peu plus tard. Pour le moment, l’avis du Gouvernement est défavorable sur l’amendement n° II-503 rectifié.
Quel est, maintenant, l’avis de la commission sur les amendements n° II-30 rectifié ter et II-514 ?
M. le ministre a expliqué que l’enveloppe de 2 millions d’euros allouée au dispositif STAFE n’avait pas été complètement consommée. C’est que les trois quarts seulement des dossiers ont été acceptés.
Nous n’avions pas connaissance des critères d’acceptation ou de refus.
Il est un peu regrettable que le remplacement de la réserve parlementaire par un dispositif piloté par les services de l’État conduise à une transparence incomplète et à une réduction des crédits.
Compte tenu de l’avis du Gouvernement, la commission s’en remet à la sagesse du Sénat sur les deux amendements.
La commission maintient-elle son avis de sagesse sur l’amendement n° II-503 rectifié, à propos duquel elle a également souhaité entendre l’avis du Gouvernement ?
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
La parole est à M. Olivier Cadic, pour explication de vote sur l’amendement n° II-268.
L’effort de 31 millions d’euros – et non pas 33, monsieur le rapporteur spécial – est un peu moindre que celui qui avait été consenti l’an dernier. C’était donc possible.
On pourrait revenir sur l’exécution de ce budget par l’AEFE en 2018, qui n’a pas donné vraiment satisfaction. Je pense en particulier à la décision unilatérale de faire payer les écoles conventionnées à hauteur de 9 %, et non plus 6 %, de leur chiffre d’affaires, alors même que des contrats couraient.
Dans le système actuel, tout l’argent va vers un enfant sur cinq à l’étranger, et rien vers les quatre autres. J’y reviendrai en expliquant mon vote sur des amendements ultérieurs. S’agissant de celui-ci, je le retire.
L’amendement n° II-268 est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° II-37.
L ’ amendement est adopté.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
La parole est à M. Ladislas Poniatowski, pour explication de vote sur l’amendement n° II-28 rectifié quater.
Je suis encore moins d’accord avec cet amendement qu’avec les autres.
Les autres amendements ont pour contrepartie, à titre de caution, une réduction des crédits du programme « Présidence française du G7 » – comme, dans le temps, on gageait tous les amendements par une augmentation des droits sur les tabacs. D’ailleurs, monsieur le ministre, vous auriez pu arguer qu’en additionnant toutes ces « cautions G7 » le budget du G7 exploserait en vol, si je puis dire ! On parle là de sommes avoisinant non plus 24 millions d’euros, ni même 39 millions d’euros, mais 60 millions d’euros.
L’amendement n° II-28 rectifié quater, lui, a pour contrepartie une réduction des crédits du programme 105. Je vous ai félicité il y a quelques instants, monsieur le ministre, de proposer l’abondement de ce programme à hauteur de 2, 2 millions d’euros. On voudrait ici que nous lui retirions 4, 7 millions d’euros. J’y suis tout à fait opposé !
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote sur l’amendement n° II-524.
À propos de l’accueil des étudiants étrangers, je souhaite présenter quelques remarques et formuler une grosse interrogation.
Je commencerai par la grosse interrogation : alors que le Premier ministre a annoncé, le 19 novembre dernier, le triplement des bourses, le bleu budgétaire prévoit un niveau de bourses de 58 535 236 euros, soit exactement le même que cette année. J’ai même cru qu’il y avait erreur, qu’on avait fait un copier-coller entre les deux projets de loi de finances. Comment peut-on annoncer le triplement des bourses et prévoir un montant inchangé par rapport à cette année ?
Je puis concevoir que la mesure n’ait pas encore été budgétée ; mais il faut alors nous dire quand elle le sera, et avec quelle contrepartie. Monsieur le ministre, comment financerez-vous le triplement des bourses ? Quand on est parlementaire, c’est le G7…
Au regard de l’objectif du Président de la République de doubler le nombre d’élèves dans les établissements scolaires français à l’étranger, il est absolument impératif que tous ceux ayant fait leurs études dans nos établissements et qui sont titulaires du baccalauréat puissent bénéficier des mêmes tarifs qu’actuellement.
Par ailleurs, s’agissant des pays qui voudront maintenir les tarifs actuels d’accès à l’université en France, ce qui sera utile pour nous, il faut au moins que cela puisse se faire sur une base bilatérale.
J’ajoute que ceux qui ont déjà commencé leurs études ne pourront peut-être pas faire face aux évolutions des frais de scolarité.
Enfin, il y a du travail dans notre réseau sur la question des visas étudiants. Dans certains pays d’Afrique, il faut plus d’un mois pour avoir un rendez-vous en vue d’obtenir un visa étudiant. Dans d’autres pays, où nous n’avons plus d’ambassade, il n’est plus possible de demander un visa étudiant.
Même si je sais que cela dépend non pas de vous, monsieur le ministre, mais du ministère de l’intérieur, l’exigence systématique de biométrie fait que nous avons du mal à attirer des étudiants du Brésil, du Japon ou des États-Unis.
Il nous reste donc beaucoup de travail à faire pour être attractifs.
Monsieur Leconte, je n’ouvrirai pas un débat de fond sur un sujet qui ne relève pas directement de la compétence de mon ministère, mais je tiens à apporter certaines précisions.
D’abord, je n’ai été à l’origine de la fermeture d’aucune ambassade et n’ai l’intention d’en fermer aucune. Cela doit remonter à loin – en tout cas, ce n’était pas sous ma responsabilité.
Par ailleurs, vous ne m’avez pas bien entendu : nous allons tripler le nombre de bourses d’exonération, ce qui signifie que les étudiants susceptibles de ne pas pouvoir payer le montant indiqué, qui est le tiers du coût réel supporté par le contribuable français, bénéficieront d’un dispositif leur permettant de poursuivre leurs études en France.
Par ailleurs, l’ensemble des mesures indiquées ne s’applique pas aux étudiants déjà en scolarité.
L’augmentation des frais d’inscription pour les étudiants étrangers non communautaires est un problème dramatique.
Monsieur le ministre, vous avez raison de signaler que le nombre d’étudiants étrangers a augmenté en France de 4, 6 %. Mais, dans le monde, l’augmentation est de près de 7 %, en sorte que la France a perdu un rang, au profit de l’Australie, et en perdra sans doute deux autres l’année prochaine, au profit de la Russie et de l’Allemagne.
Par ailleurs, si vous considérez que la connaissance et la pédagogie universitaires sont un marché, les étudiants iront au plus offrant, c’est-à-dire vers les universités qui les paient pour étudier. C’est de cette façon que l’Arabie Saoudite et la Turquie, par exemple, ont augmenté leur nombre d’étudiants étrangers de 172 %.
Que veut la France ? Monsieur le ministre, si elle veut s’effacer derrière des nations qui font aujourd’hui l’effort de chercher les étudiants, alors votre politique est la bonne !
Dans certains pays, pour éviter tous les problèmes liés à la nécessité de se rendre à l’ambassade, l’étudiant étranger obtient son visa à son arrivée. Ainsi, en Angleterre, c’est en arrivant à Londres que les étudiants étrangers se voient accorder leur visa, en relation avec leur université.
Pour le reste, je comprends ce qui est dit, mais il faut bien voir qu’ailleurs, par exemple au Royaume-Uni, les étudiants qui ne sont pas de l’Union européenne ont des frais de scolarité supérieurs à 20 000 euros par an. Faire payer tout le service au contribuable, cela pose question. C’est d’ailleurs ce sur quoi certains nous alertent actuellement.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
La parole est à M. Ladislas Poniatowski, pour explication de vote sur l’amendement n° II-30 rectifié ter.
Voilà encore un amendement gagé par une amputation des crédits du programme 105. J’observe que certains de ses signataires sont en contradiction avec les propos qu’ils ont tenus à la tribune visant à défendre la dotation de ce programme. Pour ma part, je suis tout à fait hostile à cet amendement !
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
Après son effort de restructuration, la Fondation Alliance française fonctionne avec dix équivalents temps plein et pourrait même descendre à six l’année prochaine, faute de recettes supplémentaires ; elle serait alors à la limite de la rupture pour faire face à ses missions.
Par ailleurs, pour l’accueil de l’Institut français dans ses locaux du boulevard Raspail, des travaux d’un montant de 15 millions d’euros sont à prévoir sur deux ans.
Monsieur le ministre, je vous ai entendu sur ce sujet, mais je vous demande de surveiller la situation de près, pour que la Fondation Alliance française ait les moyens de fonctionner correctement en 2019.
La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret, pour explication de vote sur l’amendement n° II-503 rectifié.
Monsieur le ministre, vous expliquez qu’il serait trop tôt. C’est aussi ce que vous disiez l’année dernière, parce qu’un audit était en cours sur les grosses difficultés rencontrées par la Fondation Alliance française.
Nous avions déposé un amendement à hauteur de 1, 5 million d’euros, pour éviter le dépôt de bilan qui s’est malheureusement produit au mois de janvier suivant, entraînant la démission du président, M. Clément, et de plusieurs membres éminents du conseil d’administration, dont faisaient partie M. Juppé et Mme Carrère d’Encausse.
Depuis lors, il y a le sentiment qu’il manque un pilote dans l’avion. Alors que cette fondation rassemble chaque année l’ensemble des présidents d’alliance française à Paris, elle n’a pas pu le faire l’année dernière et ne le fera pas cette année.
Tous les directeurs d’alliance que je rencontre au cours de mes déplacements attendent que cette fondation, qui donne une certaine direction à l’ensemble du réseau, reprenne la main. Je voterai donc l’amendement de M. Cadic, car il serait incompréhensible de ne pas soutenir une structure qui est, avec le réseau des alliances françaises, l’un des piliers de notre diplomatie linguistique et culturelle.
Du fait des difficultés de la fondation, les alliances françaises, qui accomplissent un travail formidable pour la présence française à l’étranger sans que cela coûte rien au budget, ont été très heurtées ces dernières années. En particulier, nombre d’entre elles sont assez perturbées par ce qui s’est passé au cours des dix-huit derniers mois autour de la Fondation Alliance française et par les difficultés de nomination des directeurs liés à des détachements programmés, avec des retards dans la signature des contrats.
Aussi, monsieur le ministre, l’année prochaine, vous devriez faire en sorte que les présidents et les comités des alliances françaises soient rassérénés par vos orientations et l’importance que vous leur reconnaîtriez en les recevant. C’est une demande que j’entends souvent quand je les visite. Y accéder serait important pour marquer la valeur du travail qu’ils accomplissent et leur montrer que, dorénavant, l’outil peut repartir de l’avant en ayant dépassé les difficultés des deux dernières années.
J’appuie la position du rapporteur pour avis de la commission de la culture.
L’année dernière, monsieur le ministre, j’avais demandé qu’un débat soit organisé dans cet hémicycle, en amont de la loi de finances pour 2018, sur l’articulation entre l’Institut français et les alliances françaises. Nous avions débattu des très grandes difficultés dans lesquelles se trouvait la Fondation Alliance française.
L’amendement de M. Cadic me paraît de bon sens et raisonnable, compte tenu de ce que nous observons. Quand nous nous déplaçons à l’étranger, notre commission ne manque jamais de visiter les alliances françaises et les instituts français. Partout dans le monde, nous constatons un certain nombre de difficultés, d’autant que les moyens de la mission « Action extérieure de l’État », pour le volet « diplomatie culturelle », ont été considérablement réduits lors du précédent quinquennat, il faut le rappeler.
Si les crédits ont été stabilisés depuis deux ans, on est loin d’avoir retrouvé l’ensemble des ressources nécessaires à l’ambition défendue aujourd’hui par le Président de la République.
Mes chers collègues, les alliances françaises font un travail remarquable au service de l’enseignement du français à l’étranger !
Je remercie nos collègues qui se sont exprimés en faveur de mon amendement et la commission de la culture pour ses commentaires. Tout le monde s’accorde à dire que la Fondation Alliance française est un outil nécessaire. Maintenant, mes chers collègues, adoptons l’amendement !
L ’ amendement est adopté.
L’amendement n° II-269, présenté par M. Cadic, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
En euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Action de la France en Europe et dans le monde
dont titre 2
Diplomatie culturelle et d’influence
dont titre 2
Français à l’étranger et affaires consulaires
dont titre 2
Présidence française du G7
TOTAL
SOLDE
La parole est à M. Olivier Cadic.
L’amendement n° II-268 ayant été retiré, celui-ci devient un amendement d’appel. Il s’inscrit dans la volonté exprimée par le Président de la République de renforcer le soutien à l’enseignement du français à destination des enfants de nos concitoyens expatriés.
L’article 2 de notre Constitution affirme : « La langue de la République est le français. » Mais comment s’assurer que tous les Français parlent la langue de la République, dès lors que, de plus en plus, les nouvelles générations qui naissent à l’étranger ne pratiquent pas le français ?
Dans certains pays, plus de la moitié des Français nés à l’étranger ne maîtrisent pas notre langue ; cette proportion atteint parfois les deux tiers en Amérique latine.
Alors que seul un jeune Français sur cinq à l’étranger suit l’enseignement offert par le réseau AEFE, cet amendement vise à réorienter une partie du budget vers les 80 % d’enfants français à l’étranger qui ne reçoivent aucune aide pour apprendre notre langue. Il s’agit de garantir à tous nos compatriotes un accès égal à l’enseignement du français à l’étranger, en créant un « chèque éducation » pour chaque enfant en âge d’être scolarisé vivant hors de France, dont la valeur dépendrait du pays.
Ce chèque éducation unique pourrait être utilisé exclusivement pour financer un enseignement du français ou en français, au sein d’un établissement du réseau AEFE, du réseau des missions laïques françaises, de l’Institut français, d’une alliance française ou d’une école privée, avec un objectif de suivi par acquisition obligatoire du diplôme d’enseignement de langue française, le DELF, et de la certification du Centre international d’études pédagogiques, le CIEP, pour s’assurer de la maîtrise du français acquise.
La création de ce dispositif nécessiterait de transférer 30 millions d’euros du programme 151 vers le programme 185, notamment son action n° 02, Coopération culturelle et promotion du français.
L’attribution de ce chèque éducation et son suivi seraient confiés à l’Institut français, dont la mission est justement d’assurer la promotion de la langue française en s’appuyant sur un réseau d’alliances françaises et d’instituts français bien plus développé et décentralisé que celui de l’AEFE, et qui permet donc de toucher davantage de familles.
Il est défavorable. M. Cadic a lui-même indiqué qu’il s’agissait d’un amendement d’appel. Reste qu’il sera intéressant d’entendre le Gouvernement sur le fond du sujet. L’idée d’un chèque éducation a aussi été évoquée par Pierre Vimont lors de son audition au Sénat. En l’occurrence, il s’agirait de retirer 30 millions d’euros au programme 151, c’est-à-dire de réduire de 30 % le budget des bourses scolaires, ce à quoi nous ne pouvons que nous opposer.
Il ne s’agit pas de déshabiller Pierre pour habiller Paul. Cet amendement nous appelle à la réflexion sur l’ambition que nous défendons en matière d’enseignement du français à l’étranger au-delà des établissements gérés par l’AEFE et sur les moyens qu’ont les instituts français et l’Alliance française pour scolariser un plus grand nombre de jeunes Français afin de leur apprendre leur langue maternelle.
Cette question renvoie bien entendu à l’adéquation de l’ambition portée par le Gouvernement aux moyens budgétaires, ainsi qu’aux manières d’intéresser les jeunes Français à l’étranger à rejoindre des cours de français.
Ce sujet mérite un travail de fond, ne serait-ce que pour disposer de davantage de statistiques et de données sur tous ces jeunes Français à l’étranger, parfois très éloignés des lycées français. Cet amendement est une invitation à engager cette réflexion dès l’année prochaine.
M. Cadic ne sera pas surpris que je ne soutienne pas son amendement, car nous en avons déjà plusieurs fois parlé ; cette mesure fait partie d’une liste de propositions qu’il a faites voilà déjà quelques années.
Cet amendement tombe au mauvais moment, alors que des Français expriment leur colère contre l’injustice fiscale dont ils se sentent victimes. En effet, avec ce chèque éducation, on nous propose, si je comprends bien, de donner la même somme à toutes les familles, qu’elles gagnent 1 500 ou 15 000 euros par mois.
Aujourd’hui, nous avons un système de bourses scolaires progressif, afin de faire appel à la solidarité nationale pour aider les familles qui en ont le plus besoin. Si l’on donne la même somme à tout le monde, la famille qui a 15 000 euros de revenus sera certes heureuse, mais elle n’en aura peut-être pas besoin, alors que, pour celle qui a 1 500 euros de revenus, l’aide ne sera certainement pas suffisante pour scolariser un enfant dans le réseau AEFE, où les frais de scolarité sont assez élevés.
Monsieur Cadic, je comprends votre volonté, mais, sincèrement, je ne pense pas que la méthode soit la bonne.
Monsieur le rapporteur spécial, mon intention n’est pas de retirer aux bourses scolaires la somme nécessaire au financement du chèque éducation ; j’ai proposé, pour compenser, un autre prélèvement en provenance de l’AEFE.
Madame Conway-Mouret, j’ai bien entendu votre propos. Mais cela ne vous gêne-t-il pas de voir autant de Français à qui on n’apprend pas à parler français ?
On peut faire des grandes déclarations sur la francophonie et dire à tout le monde qu’on va apprendre le français au monde entier, mais, quand on n’est même pas capable d’apprendre le français à nos compatriotes, il y a un problème !
Quand je vois que personne ne fait rien, je m’interroge. Je propose une solution sous forme d’expérimentation. Tout le monde ne toucherait pas la même chose, car l’aide dépendrait des pays : le coût pour apprendre le français n’est pas le même dans une alliance française à Madagascar et dans un pays de l’Union européenne.
Travaillons ensemble pour mener une telle expérimentation. J’aurais aimé que tout le monde se rassemble autour de cet objectif : que tous les Français puissent apprendre à parler français !
Pour l’heure, je retire l’amendement.
L’amendement n° II-269 est retiré.
L’amendement n° II-270, présenté par M. Cadic, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
En euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Action de la France en Europe et dans le monde
dont titre 2
Diplomatie culturelle et d’influence
dont titre 2
Français à l’étranger et affaires consulaires
dont titre 2
Présidence française du G7
TOTAL
SOLDE
La parole est à M. Olivier Cadic.
Initié en 2001 par le ministère de l’Europe et des affaires étrangères, sur l’initiative des représentants des Français établis hors de France, le dispositif « Français langue maternelle », ou FLAM, vise à soutenir des associations qui proposent à des enfants français établis à l’étranger, dans un contexte extrascolaire, des activités permettant de conserver la pratique du français en tant que langue maternelle et le contact avec les cultures française et francophones.
Les associations peuvent ainsi bénéficier de subventions d’appui au fonctionnement au démarrage de leur projet, ainsi que de subventions pour l’organisation de regroupements régionaux d’associations FLAM.
L’opérateur désigné par le ministère pour la gestion administrative de ce dispositif est l’AEFE.
Cet amendement vise à la fois à développer le programme FLAM, en lui affectant un budget propre de 1 million d’euros, et à en transférer la gestion à l’Institut français, dont la mission est justement d’assurer la promotion de la langue française, en s’appuyant sur un réseau d’alliances françaises et d’instituts français, qui, je le répète, est bien plus développé et décentralisé que celui de l’AEFE.
Il est défavorable. Si nous avons bien compris, cet amendement va avec les amendements n° II-268 et II-269. Sans entrer dans le débat de fond, il n’y aurait pas de cohérence à l’adopter seul.
Je prends note de ces avis. Puisque cet amendement n’est plus financé, par cohérence, je le retire. Mais j’insiste, monsieur le ministre : le dispositif FLAM serait mieux dirigé par l’Institut français !
L’amendement n° II-270 est retiré.
L’amendement n° II-38, présenté par M. Delahaye, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
En euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Action de la France en Europe et dans le monde
dont titre 2
Diplomatie culturelle et d’influence
dont titre 2
Français à l’étranger et affaires consulaires
dont titre 2
Présidence française du G7
TOTAL
SOLDE
La parole est à M. le rapporteur spécial.
Les dépenses protocolaires augmentent fortement, de 8, 6 millions d’euros, en prévision de plusieurs conférences internationales. Mais cette hausse inclut 3, 1 millions d’euros pour le G7, qui fait l’objet par ailleurs d’un budget spécifique. Il n’y a pas de raison de maintenir une ligne pour le G7 dans ces dépenses protocolaires.
Si cet amendement était adopté, à mes collègues membres du G7 auxquels j’ai dit, lors du G20, que nous nous retrouverions bientôt pour continuer d’aborder des sujets difficiles, je devrais expliquer dès demain matin que le Sénat s’oppose à cette réunion. Monsieur le rapporteur spécial, maintenant que vous connaissez la destination de ce financement, je vous demande de retirer votre amendement.
L’amendement n° II-38 est retiré.
L’amendement n° II-402, présenté par M. Yung, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
En euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Action de la France en Europe et dans le monde
dont titre 2
Diplomatie culturelle et d’influence
dont titre 2
Français à l’étranger et affaires consulaires
dont titre 2
Présidence française du G7
TOTAL
SOLDE
La parole est à M. Richard Yung.
Je voudrais évoquer un sujet qui a déjà été abordé, celui des crédits qui sont consacrés à la sécurisation des établissements scolaires français à l’étranger.
Nous avons tous conscience que ces écoles, ces lycées, peuvent être des cibles de « choix » pour tous ceux qui nous veulent du mal. On peut imaginer ce que susciterait un drame qui se déroulerait dans tel ou tel pays, y compris dans l’opinion publique française.
Jusqu’à maintenant, ces crédits étaient inscrits dans le programme 185. Cette année, ils ont été transférés dans le CAS « Gestion du patrimoine immobilier de l’État ».
On pourrait penser que les deux affectations budgétaires se valent, mais ce ne pas le cas : en réalité, le transfert de ces crédits au CAS signifie qu’ils devront être remboursés sur une certaine période, deux ou trois ans, je ne sais plus. En d’autres termes, il s’agit non plus d’une dotation budgétaire de 14, 7 millions d’euros, mais d’une avance qui sert aux différents établissements pour réaliser leurs travaux.
Je crains que le transfert de ces dépenses de sécurisation n’ouvre la voie à leur réduction progressive au fil des ans – ce sera non plus 14, 7 millions d’euros, mais peut-être 10 millions d’euros l’année prochaine, puis 8 millions d’euros l’année suivante, etc. –, au motif qu’il deviendrait très difficile de les financer. Après tout, il est vrai que nous avons de moins en moins de bijoux de famille, comme on dit, à vendre.
Je propose de réaffecter 14, 7 millions d’euros du programme 105 au programme 185, afin d’éviter avec certitude que ces crédits ne puissent être remis en cause.
Nous en avons parlé tout à l’heure, la commission est défavorable à l’amendement, et ce pour deux raisons : d’abord, cette mesure priverait le programme 105 de 14, 7 millions d’euros et réduirait les moyens de notre diplomatie ; ensuite, le financement de ces dépenses par l’intermédiaire d’un compte d’affectation spéciale relève d’un choix du Gouvernement.
En tout cas, ce choix n’aura pas d’impact budgétaire négatif en 2019. L’enjeu porte sur le remboursement des avances du CAS les années suivantes.
L’avis du Gouvernement est également défavorable, mais je voudrais en donner les raisons à M. Yung, car mes propos précédents n’ont peut-être pas été assez clairs.
C’est à ma demande que les 100 millions d’euros dont j’ai parlé tout à l’heure ont été affectés à un compte d’affectation spéciale, après une discussion assez ferme avec le ministre de l’action et des comptes publics, et à la suite de mon déplacement à Ouagadougou.
Lorsque j’ai compris qu’il y aurait eu des morts dans l’ambassade de France au Burkina Faso si nous n’avions pas réalisé de travaux avant l’attentat, j’ai décidé d’accélérer le processus de sécurisation des lieux les plus sensibles, que ce soient les ambassades, les centres culturels, les lycées ou l’ensemble des établissements français.
Je souhaite que ces 100 millions d’euros soient dépensés le plus rapidement possible et que les travaux nécessaires soient effectués. Le remboursement des avances n’interviendra qu’à partir de 2021, ce qui signifie que les 14, 7 millions d’euros dont vous parlez auront déjà été dépensés. Vous n’avez donc aucune inquiétude à avoir sur ce point, sous réserve que les acteurs soient en mesure de réaliser les travaux très rapidement.
En outre, le remboursement interviendra à partir de 2021, mais sur un parc immobilier très élargi. Je l’ai dit dans mon propos initial, nous allons acquérir 215 emprises immobilières supplémentaires – je me suis trompé sur le chiffre. Il faudra les gérer, les rendre sans doute plus cohérentes, ce qui permettra du même coup de percevoir des recettes qui n’étaient pas prévues initialement. Il s’agit donc d’un processus gagnant-gagnant.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° II-511, présenté par M. Leconte et Mme Lepage, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
En euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Action de la France en Europe et dans le monde
dont titre 2
Diplomatie culturelle et d’influence
dont titre 2
Français à l’étranger et affaires consulaires
dont titre 2
Présidence française du G7
TOTAL
SOLDE
La parole est à M. Jean-Yves Leconte.
Comme l’indiquait Olivier Cadic, il y a un certain nombre d’enfants français qui ne sont pas scolarisés dans notre réseau et, parmi ceux-là, beaucoup ne sont pas scolarisés parce que leurs parents ne peuvent pas payer les frais de scolarité.
Lorsque la scolarité d’un seul enfant coûte entre 5 000 et 20 000 euros et que les bourses scolaires sont partielles, le reste à charge est trop important. C’est la raison pour laquelle il est absolument essentiel de revaloriser le barème des bourses. Vous l’avez évoqué tout à l’heure, monsieur le ministre, ce barème doit permettre aux familles de payer une juste quotité, qui leur permette de scolariser leurs enfants. Ce n’est pas le cas aujourd’hui.
J’attire votre attention sur deux autres sujets.
Le premier concerne l’enjeu de l’école inclusive. Aujourd’hui, rien n’est vraiment normé en termes de moyens pour aider les familles dont les enfants ont besoin d’auxiliaires de vie scolaire, ou AVS. Lorsqu’on est boursier, il est possible d’obtenir des aides, mais ce n’est pas toujours très clair. En revanche, quand on n’est pas boursier, mais que l’on n’a pas pour autant les moyens de financer un AVS, on n’a rien. Il faudrait donc mieux prendre en compte cet objectif.
Le second a trait aux voies de recours. Ce n’est pas parce que l’on obtient une bourse à 10 % que l’on a pour autant obtenu satisfaction. Cela veut seulement dire qu’il vous reste 90 % des frais de scolarité à payer.
Pour les familles qui se voient notifier une décision en première commission, il faut mettre en place un système qui garantisse des voies de recours et qui informe systématiquement les familles de ces voies. Toutes les familles concernées ont en effet le droit de déposer un recours en seconde commission.
C’est une vraie souffrance pour nous de constater, comme nous l’avons fait lors du projet de loi de finances rectificative pour 2018, que 11 millions d’euros repartent vers le budget général, faute d’avoir été utilisés. C’est une souffrance quand on voit le nombre de familles qui ne peuvent pas scolariser leurs enfants pour des raisons financières.
Cela étant, dans la mesure où il est quasi identique à l’amendement n° II-468, je ne comprends pas pourquoi mon amendement n’est pas tombé. Cela m’aura au moins permis d’insister sur une question réellement importante.
Compte tenu de ce que vous nous expliquez, monsieur Leconte, souhaitez-vous maintenir l’amendement n° II-511 ?
L’amendement n° II-511 est retiré.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° II-469 est présenté par Mme Lepage, MM. Todeschini, Kanner et Boutant, Mmes Conway-Mouret et G. Jourda, M. Mazuir, Mme Perol-Dumont, MM. Roger, Temal, Vallini, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain.
L’amendement n° II-564 est présenté par MM. Capus, Bignon, Chasseing, Decool, Fouché, Guerriau, Lagourgue, Malhuret et A. Marc, Mme Mélot et M. Wattebled.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
En euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Action de la France en Europe et dans le monde
dont titre 2
Diplomatie culturelle et d’influence
dont titre 2
Français à l’étranger et affaires consulaires
dont titre 2
Présidence française du G7
TOTAL
SOLDE
La parole est à Mme Claudine Lepage, pour présenter l’amendement n° II-469.
Cet amendement vise à doubler la hausse de 5 millions d’euros de crédits décidée par le Gouvernement, en abondant le budget par un montant équivalent en faveur de la coopération culturelle et de la promotion du français.
Le doublement de ces crédits résulte de la conviction que l’apprentissage ainsi que la promotion de la langue française et du plurilinguisme constituent une nécessité et un atout dans la mondialisation, de même qu’un facteur de diversité indispensable.
Cette mesure permettrait d’augmenter les dotations aux instituts français et les subventions aux alliances françaises, qui en ont besoin pour être de véritables acteurs de la modernisation de l’offre éducative et de la coopération linguistique.
La parole est à M. Alain Fouché, pour présenter l’amendement n° II-564.
En préambule, je veux rappeler à certains de mes collègues qui se sont exprimés que la suppression de la réserve parlementaire a eu des effets néfastes, que celle-ci n’a pas été redistribuée et a été en grande partie conservée par l’État, contrairement à ce qui avait été annoncé.
Pour en revenir à mon amendement, il vise, comme l’amendement précédent, un doublement des crédits et résulte de la conviction que le rayonnement culturel de la France ainsi que la promotion de la langue française et le pluralisme constituent une nécessité et un atout dans la mondialisation, de même qu’un facteur de diversité indispensable, et ce dans tous les domaines : instituts français, subventions aux alliances françaises, etc.
La commission demande à leurs auteurs de retirer ces amendements, faute de quoi elle y sera défavorable. En effet, on a déjà voté tout à l’heure un amendement qui augmente de 600 000 euros les crédits de l’Alliance française.
Je tiens à apporter une précision. On fait souvent la confusion, monsieur le rapporteur spécial, entre l’Institut français, qui est un établissement public industriel et commercial situé à Paris, la Fondation Alliance française, également située à Paris, et le réseau des instituts français et celui des alliances françaises.
En réalité, il n’y a aucun lien entre les réseaux des instituts et des alliances et les organismes que j’ai mentionnés. Quand on accorde une subvention à la Fondation Alliance française, c’est pour son fonctionnement. Cela ne veut pas dire que les alliances françaises situées partout dans le monde en bénéficieront.
Les amendements ne sont pas adoptés.
Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Action extérieure de l’État », figurant à l’état B.
Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits, modifiés.
Les crédits sont adoptés.
J’appelle en discussion l’article 71 ter et les amendements portant article additionnel après l’article 71 ter, qui sont rattachés pour leur examen aux crédits de la mission « Action extérieure de l’État ».
Action extérieure de l ’ État
I. – Le 1° du I de l’article 128 de la loi n° 2005-1720 du 30 décembre 2005 de finances rectificative pour 2005 est abrogé.
II. – Le Gouvernement joint au projet de loi de finances de l’année une annexe générale présentant :
1° Ses choix stratégiques quant à la présence géographique et fonctionnelle à l’étranger de l’État et de ses opérateurs ;
2° Les réformes envisagées ou engagées pour diminuer de 10 %, à horizon 2022, la masse salariale afférente aux personnels de l’État et de ses opérateurs en poste à l’étranger, en faisant ressortir, en crédits et en effectifs, la contribution de chaque ministère et opérateur à cette diminution ;
3° L’état du parc immobilier de l’État et de ses opérateurs à l’étranger, les dispositions prises pour le rationaliser ainsi que les économies et recettes qui en découlent.
L ’ article 71 ter est adopté.
L’amendement n° II-517, présenté par M. Leconte et Mmes Conway-Mouret et Lepage, est ainsi libellé :
Après l’article 71 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Pour l’application du plafond des autorisations d’emplois du programme « Diplomatie culturelle et d’influence » de la mission « Action extérieure de l’État », le calcul du montant des équivalents temps plein travaillés attribué à l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger s’effectue par l’addition des prorata de rémunération de chaque équivalent temps plein travaillé qui ne sont pas financés par une ressource extrabudgétaire.
La parole est à M. Jean-Yves Leconte.
Je souhaite évoquer la question des plafonds d’emplois de l’AEFE et de leur mode de calcul.
Le Président de la République a annoncé vouloir doubler le nombre des élèves dans les établissements conventionnés. Or le plafond d’emplois dans ces établissements passe de 6 117 à 5 882 équivalents temps plein travaillé, ou ETPT, en un an.
Pour remédier à ce problème, et comme nombre de ces ETPT sont financés non par l’État, mais par les frais de scolarité, par les établissements et les familles, je propose un nouveau mode de calcul de ces emplois sur la base de la part effectivement prise en charge par l’État. Ainsi, la part des personnels pris en charge par l’établissement scolaire ne serait pas considérée comme des ETPT. Cette disposition permettrait de favoriser largement le développement de nos établissements scolaires.
J’en profite pour vous interroger sur deux autres sujets, monsieur le ministre
Ma première question touche aux emplois rémunérés par l’AEFE. Le bleu budgétaire précise qu’il existe 4 894 ETPT rémunérés par cet opérateur hors plafond. Comment expliquez-vous ces 4 894 ETPT, alors que les emplois rémunérés dans les établissements en gestion directe, y compris donc s’agissant de l’AEFE, sont censés être sous plafond ? Il y a là une contradiction.
Deuxième question : je voudrais avoir votre opinion sur les plafonds d’emplois qui s’appliquent aux établissements à autonomie financière, c’est-à-dire à nos instituts français à l’étranger. Quand nous allons les voter dans le cadre de l’examen de l’article 45, vous ne serez pas au banc du Gouvernement. Ce dispositif est absolument aberrant, parce que ces plafonds empêchent nos instituts de disposer des moyens, c’est-à-dire des personnels, leur permettant de développer leur activité.
C’est la raison pour laquelle la question des plafonds d’emplois mérite d’être posée dans cette discussion budgétaire.
Si ma mémoire est bonne, vous aviez déposé un amendement similaire l’an dernier, mon cher collègue, et la commission avait déjà émis un avis défavorable.
C’est vrai que l’AEFE présente des spécificités en tant qu’opérateur de l’État, mais l’amendement tend à calculer son plafond d’emplois de manière dérogatoire. Vous présentez un raisonnement qui peut y conduire, mais, à ce stade, la commission des finances émettra de nouveau un avis défavorable.
Le Gouvernement est également défavorable à l’amendement, même si la question posée est juste et mérite qu’on y réfléchisse.
Il est encore un peu prématuré d’y apporter des solutions, mais il est certain que cette question va revenir d’une manière ou d’une autre dans le cadre des réflexions en cours sur le possible doublement du nombre d’élèves dans les établissements. Je préfère que le sujet soit débattu dans ce cadre qu’au détour d’un amendement. Vous aviez déjà fait une telle proposition l’année dernière, mais elle n’a tout simplement pas encore sa pertinence pour l’instant.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° II-513, présenté par M. Leconte et Mmes Conway-Mouret et Lepage, est ainsi libellé :
Après l’article 71 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après le 6° du II de la section V du chapitre premier du titre premier de la première partie du livre premier du code général des impôts, il est inséré un 7° ainsi rédigé :
« 7° Réduction d’impôt accordée au titre des frais de scolarité des enfants poursuivant des études du premier ou du second degré dans un établissement français d’enseignement à l’étranger
« Art. 199 quater … – I. – Les contribuables peuvent bénéficier d’une réduction d’impôt sur le revenu lorsque les enfants qu’ils ont à leur charge, au sens de l’article 196, sont scolarisés dans les enseignements du premier ou du second degré dans des établissements français d’enseignement à l’étranger, mentionnés au titre V du livre IV de la deuxième partie du code de l’éducation, durant l’année scolaire en cours au 31 décembre de l’année d’imposition.
« La réduction d’impôt s’applique également lorsque l’enfant est majeur et âgé de moins de vingt-et-un ans, qu’il a opté pour le rattachement au foyer fiscal dont il faisait partie avant sa majorité, en application du 3 de l’article 6 du présent code, dès lors qu’il est scolarisé dans un enseignement du second degré durant l’année scolaire en cours au 31 décembre de l’année d’imposition en vue de l’obtention du baccalauréat.
« II. – La réduction d’impôt est égale aux frais de scolarité engagés par les contribuables, déduction faite de la part prise en charge par l’employeur ou par une bourse, mentionnée au 5° de l’article L. 452-2 du code de l’éducation.
« Son montant est divisé par deux lorsque l’enfant est réputé à charge égale de l’un et l’autre de ses parents.
« III. – Le bénéfice de la réduction d’impôt est subordonné à la condition que soient mentionnés sur la déclaration des revenus, pour chaque enfant concerné, ses nom et prénom, le nom de l’établissement scolaire et la classe qu’il fréquente.
« Le 5 du I de l’article 197 est applicable.
« IV. – Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application du présent article. »
II. – Le I ne s’applique qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.
… – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-Yves Leconte.
Comme tout à l’heure pour mon amendement sur les bourses scolaires, je me demande pourquoi on examine cet amendement à ce stade de la discussion budgétaire. C’est une surprise pour moi, mais il s’agit sûrement des mystères de la séance…
Je propose que les frais de scolarité payés par un contribuable français puissent ouvrir droit à une réduction d’impôt. Eu égard au montant de ces frais, il me semble important d’aider toutes les familles qui scolarisent leurs enfants dans les établissements scolaires. Cette disposition permettrait d’accompagner certaines familles, qui ont deux ou trois enfants dans le réseau et qui sont en partie contribuables en France.
La commission est défavorable à l’amendement.
Pourquoi créer une réduction d’impôt spécifique pour les Français de l’étranger ? Pourquoi pas pour les autres Français qui ont aussi des enfants scolarisés ?
Il n’y a aucune raison de prévoir une réduction spécifique à l’étranger, qui ne s’appliquerait pas sur l’ensemble du territoire.
En outre, cette mesure a un coût, mon cher collègue. Quel est-il, selon vous ? Vous ne l’avez pas chiffré et c’est embêtant. La commission, pour sa part, a évalué le coût de cette disposition à 650 millions d’euros au bas mot, en tablant sur 125 000 bénéficiaires !
M. Christian Cambon, président de la commission des affaires étrangères, s ’ exclame.
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial. Honnêtement, ce coût est hyper-excessif, ce qui fait que la commission y est hyper-défavorable !
Sourires.
M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Même avis défavorable, avec les mêmes superlatifs que la commission !
Nouveaux sourires.
Monsieur le rapporteur spécial, ce n’est pas parce que cet amendement ne devrait probablement être examiné à ce stade du débat budgétaire qu’il faut donner des évaluations complètement déraisonnables.
Au total, les frais de scolarité dans les établissements scolaires français à l’étranger coûtent aux familles entre 2 milliards et 2, 2 milliards d’euros. Dès lors que, dans 90 % des cas, ces personnes sont résidentes fiscales dans le pays dans lequel elles habitent, je ne vois pas comment on pourrait arriver à un tel chiffrage. Le coût de la mesure équivaudrait au quart de ce que l’ensemble des familles paie. C’est complètement dément ! Je n’ai pas chiffré le dispositif que je propose, mais je préfère ne pas le faire plutôt que de donner une telle estimation.
Sur le fond, les frais de scolarité dont je parle n’ont rien à voir avec les frais de scolarité d’un établissement privé sous contrat en France. On évalue ces frais entre 4 000 et 15 000 euros par enfant. Chaque famille qui scolarise ses enfants participe au financement d’un établissement scolaire et au rayonnement de la France. Et ce n’est pas spécifique aux Français de l’étranger, c’est spécifique à toute personne qui scolarise ses enfants dans le réseau et qui est pour partie contribuable en France.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° II-516, présenté par M. Leconte et Mme Lepage, est ainsi libellé :
Après l’article 71 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la première phrase de l’article L. 452-8 du code de l’éducation, après les mots : « des frais de scolarité », sont insérés les mots : «, du produit des frais de cession ».
La parole est à M. Jean-Yves Leconte.
En 2018, pour la première fois, une activité développée par un établissement scolaire en gestion directe a été cédée à un opérateur privé sans appel à manifestation d’intérêt et sans qu’un protocole d’accord entre l’État, l’AEFE et le repreneur, qui précise les conditions de la transaction, ait été rendu public.
Ce type d’opération est absolument inadmissible, d’autant qu’aucune clarification n’a été faite pour l’instant. C’est la raison pour laquelle il nous semble utile de prévoir que le rapport annuel que l’AEFE remet au Parlement devra préciser le produit des frais de cession qu’elle opère en son sein.
Jean-Yves Leconte parle vraisemblablement du cas d’une école à Saint-Pétersbourg. Il s’agit d’une mesure de transparence, qui sera utile à tous. Elle est tout à fait raisonnable et ne coûte rien, qui plus est. La commission est donc favorable à l’amendement.
L ’ amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 71 ter.
L’amendement n° II-515, présenté par M. Leconte et Mmes Conway-Mouret et Lepage, est ainsi libellé :
Après l’article 71 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les établissements scolaires établis à l’étranger, homologués par l’éducation nationale et accueillant du personnel détaché direct par l’éducation nationale, paient annuellement à l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger une redevance de :
1° 4 000 € par détaché direct s’il y a moins de 2, 5 détachés directs pour 100 élèves inscrits dans le cursus homologué, ou si le cursus a moins de 30 élèves et un maximum d’un détaché ;
2° 10 000 € par détaché direct s’il y a plus de 2, 5 détachés pour 100 élèves dans le cursus homologué.
La parole est à M. Jean-Yves Leconte.
J’ai déjà déposé un amendement similaire l’an dernier.
Depuis lors, je me suis rendu compte que le nombre de personnels détachés directs dans le réseau homologué est passé de 2 190 à 2 490, ce qui représente pour l’État un coût caché de plus de 10 millions d’euros supplémentaires.
Les établissements homologués par l’éducation nationale, dits « partenaires » ou « totalement privés », ne sont pas à coût zéro pour l’État. Chaque personnel détaché direct dans ces établissements, même si son salaire est payé directement par l’établissement lui-même, voit sa pension civile de fonctionnaire prise en charge par l’État : cela représente entre 20 000 et 30 000 euros par an et par enseignant. C’est d’ailleurs l’une des difficultés que rencontre l’AEFE avec les personnels qui sont détachés auprès d’elle.
Le dispositif que je propose contribue à verser environ 10 millions d’euros de plus – c’est l’estimation que j’en fais – à l’État pour combler les 10 millions d’euros de coût caché qu’engendre l’augmentation du nombre de détachés directs entre cette année et l’année dernière.
D’une manière plus générale, dans le cadre de la réflexion sur l’évolution du réseau de l’enseignement français à l’étranger, nous ne pouvons pas continuer avec ces personnels détachés directs qui coûtent à l’État, d’autant que ce coût est complètement caché et ignoré de tous. On parle d’établissements autofinancés, alors que c’est inexact. Il me semblerait par conséquent logique de demander à ces établissements de contribuer auprès de l’État de la même manière que les établissements gérés par l’AEFE.
Comme l’an dernier, la commission est défavorable à l’amendement.
Il s’agit d’une vraie question, mais l’adoption de cet amendement aurait des conséquences qui dépassent l’objectif visé. Elle conduirait notamment à instaurer une forme de redevance de la part des établissements partenaires, que le Gouvernement souhaite au contraire développer pour accroître notamment le nombre d’élèves. Le problème soulevé en termes d’équité entre les établissements est bien réel, mais il mériterait d’être étudié dans le cadre d’un débat plus approfondi.
Le Gouvernement est défavorable à l’amendement, tout en précisant que la question posée est légitime. Il faudrait probablement l’étudier dans un cadre plus large. Ce sujet fait partie des réflexions en cours sur la perspective de doublement des capacités d’accueil de nos établissements et des partenariats à développer.
Je vous demanderai de retirer votre amendement, monsieur le sénateur, faute de quoi j’y serai défavorable pour une raison d’opportunité et de moment.
Non, monsieur le président, compte tenu des propos que je viens d’entendre. Cela étant, il faudra vraiment prendre ce sujet en compte dans la réflexion sur l’avenir de l’enseignement français à l’étranger.
Je retire l’amendement.
L’amendement n° II-515 est retiré.
L’amendement n° II-519, présenté par M. Leconte et Mmes Conway-Mouret et Lepage, est ainsi libellé :
Après l’article 71 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans les six mois à compter de la publication de la présente loi, le ministre chargé de l’économie et le ministre des affaires étrangères remettent au Parlement un rapport portant sur l’application de l’article 51 de la loi de finances rectificative pour 1964 (n° 64-1278 du 23 décembre 1964), complété par l’article 89 de la loi n° 70-1199 de finances pour 1971.
La parole est à M. Jean-Yves Leconte.
Cet amendement est tout autant essentiel pour le développement du réseau d’enseignement français à l’étranger que le précédent.
Depuis 1971, un décret précise les modalités d’attribution de la garantie de l’État à des écoles françaises privées à l’étranger développant des projets immobiliers. Ce dispositif est absolument primordial pour le développement de notre réseau.
Toutefois, la direction générale du Trésor a décidé, en août 2018, de ne plus participer aux comités de prêts, qui aidaient à la préparation des dossiers de demande de garantie de l’État.
Compte tenu de l’évolution du nombre des dossiers, de leur montant et des risques encourus, je peux comprendre qu’une réflexion s’engage sur la manière d’attribuer cette garantie de l’État. Cependant, nous ne pouvons accepter que des projets soient bloqués, gelés ou même abandonnés en raison de l’incertitude qui pèse aujourd’hui sur les futures modalités d’attribution de la garantie de l’État.
C’est la raison pour laquelle nous demandons la remise d’un rapport portant sur l’application des dispositions des lois de 1964 et de 1971, qui prévoyaient la mise en place de cette garantie.
Aujourd’hui, plus d’une dizaine d’établissements ont gelé ou abandonné leurs projets et attendent des informations. Je le répète, cette problématique est primordiale pour la croissance du réseau d’enseignement français à l’étranger. Monsieur le ministre, que pouvez-vous nous dire à ce sujet ?
En ce qui concerne les demandes de rapport, le Sénat recommande parfois d’en limiter le nombre. En même temps, il s’agit d’un vrai sujet : la commission est donc plutôt favorable à l’amendement si le Gouvernement l’est aussi.
Le Gouvernement considère lui aussi qu’il s’agit d’un vrai sujet, qui mérite d’être étudié et approfondi, et sur lequel on doit faire des propositions. J’y réfléchis moi-même dans le cadre du projet dont j’ai parlé à plusieurs reprises.
Pour juger de l’opportunité de cette demande de rapport supplémentaire – s’il y a parfois des demandes de rapport sur des sujets accessoires, celle-ci a du sens -, je m’en remets à la sagesse du Sénat.
L ’ amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 71 ter.
Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Action extérieure de la France ».
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à dix-neuf heures cinquante-cinq, est reprise à vingt-et-une heures trente, sous la présidence de M. David Assouline.