Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je centrerai mon intervention sur l’augmentation des frais d’inscription pour les étudiants extracommunautaires, une augmentation à la fois brutale et considérable. Certes, le Premier ministre a annoncé en contrepartie une hausse du nombre de bourses, mais cela ne fera que compenser la diminution régulière des crédits, qui ont été divisés par deux en douze ans. Cette mesure aura en tout cas un effet très négatif sur les étudiants originaires du continent africain. Ils sont à la fois les plus nombreux et les plus fragiles économiquement. Or, contrairement à un cliché trop souvent répandu, ils sont bien loin d’être tous issus des classes favorisées.
Au moment où se dessine un mouvement de restitution aux pays africains de biens mal acquis sur l’initiative du Président de la République, au moment de l’amorce d’un processus d’inventaire de la colonisation, notamment de la colonisation de l’Algérie, cette hausse brutale du montant d’inscription constitue un très mauvais signal. En renonçant à accueillir une majorité d’étudiants africains, la France renonce à toute relation privilégiée avec les cadres africains de demain. Or ces futurs cadres sont convoités par de nouveaux acteurs, comme la Chine, l’Inde et la Russie.
En 2018, les étudiants africains inscrits en Chine devraient atteindre le chiffre de 80 000. Ils y bénéficient de la scolarisation et du logement gratuits ainsi que de bourses de 400 euros mensuels. Si l’Europe et la France restent leur priorité, nous perdons du terrain, notamment au profit de l’Arabie saoudite, des Émirats arabes unis ou de la Turquie, qui proposent des bourses dans des universités islamiques. L’Arabie saoudite est ainsi passée de la trentième à la treizième place dans la liste des pays pourvoyeurs de bourse, et la Turquie est passée de la vingt-septième à la onzième place.
Le désengagement de la France auprès de la jeunesse africaine est un renoncement. On abandonne à d’autres pays le soin de former les cadres de demain. Ce renoncement va aggraver la perte d’influence de la France sur le continent africain, la déception, le dépit et, demain, le rejet de notre pays par la jeunesse du continent le plus jeune du monde.
Les réactions en Afrique, notamment à Dakar, mais pas seulement, relatées ces derniers jours par la presse, la manifestation de samedi ou des tribunes dans le journal Le Monde doivent vous alerter, monsieur le ministre. Il faut absolument revoir cette décision funeste pour le rayonnement culturel et économique de la France, mais aussi pour la francophonie.