Intervention de Philippe Bas

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 4 décembre 2018 à 16h30
Manifestations à paris et dans plusieurs villes de france — Audition de Mm. Christophe Castaner ministre de l'intérieur et laurent nunez secrétaire d'état auprès du ministre de l'intérieur

Photo de Philippe BasPhilippe Bas, président :

Mes chers collègues, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, j'ai décidé de procéder à cette audition en raison des événements d'une gravité exceptionnelle que nous avons connus ces dernières semaines, en particulier samedi dernier, que le préfet de police, que je salue aussi, a lui-même qualifiés de « sans précédent ».

Le mouvement social profond qui se manifeste dans notre pays a un caractère national : toutes les régions sont concernées. Les formes d'action sont également totalement nouvelles et sont en général, il faut le dire, pacifiques. Cette expression populaire prend des formes dont notre société n'a jusqu'à présent pas fait l'expérience. Ces rassemblements, largement spontanés, n'ont rien à voir avec les manifestations syndicales ou politiques qui ont pu émailler notre histoire. Les préfets n'ont pas d'interlocuteurs pour l'organisation de ces attroupements, rassemblements et manifestations. Il n'y a pas de service d'ordre organisé par les manifestants eux-mêmes pour contribuer au bon déroulement de ces manifestations, en coopération avec la police et la gendarmerie. Les abcès de fixation sont multiples et mobiles, et ne sont donc pas toujours prévisibles.

Comme on pouvait le prévoir, des groupes violents se sont greffés sur ces rassemblements pacifiques, agissant comme des essaims de frelons, avec leur cortège de pillards. Dans ces conditions, samedi dernier, vos dispositifs de sécurité se sont retrouvés dépassés et débordés à Paris, mais pas seulement.

Nos forces de sécurité, dont je tiens à saluer le professionnalisme, mais aussi le sang-froid et l'engagement, ont été gravement tenues en échec. Aussi, nous sommes très inquiets à la perspective que de nouveaux rassemblements susceptibles de dégénérer plus gravement encore puissent avoir lieu au cours des jours qui viennent, et je sais que vous l'êtes aussi, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État.

C'est la raison pour laquelle nous avons décidé d'organiser cette audition, qui s'inscrit dans le cadre normal de l'exercice du pouvoir de contrôle du Parlement. En vertu de l'article 15 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, « la société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration ». La société, c'est la représentation nationale, qui exprime son exigence ; cette mission est tout à fait essentielle pour nous, au même titre que la mission législative ou le vote du budget de l'État. À cet égard, je rappelle que nous avons procédé à l'audition de M. Bernard Cazeneuve, alors ministre de l'intérieur, sur la situation à Calais, puis sur le fichier des cartes nationales d'identité, dont la mise en place soulevait beaucoup d'inquiétudes, M. Bruno Le Roux, alors ministre de l'intérieur, en mars 2017, sur l'« affaire Théo », puis, plus récemment, Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, sur le grave mouvement social qui a eu lieu au début de l'année dans les prisons françaises. Nous nous inscrivons donc dans une forme de travail parlementaire qui nous est habituelle, même si les événements justifiant cette audition sont tout à fait exceptionnels par leur gravité et l'inquiétude qu'ils provoquent auprès de nous tous, quelles que soient les responsabilités que nous exerçons.

Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, je vous propose de commencer par un exposé introductif, avant de laisser ensuite la parole aux membres de la commission des lois, puis à nos collègues, nombreux, qui ont tenu à assister à cette audition, si le temps le permet. Je tiens auparavant à vous remercier d'avoir répondu immédiatement à la demande que nous avons formulée dimanche matin, et j'ai apprécié le cadre coopératif dans lequel nous avons pu préparer cette audition - je tiens à le souligner parce que j'y attache beaucoup d'importance.

Enfin, je veux vous dire que, dans mon esprit, deux volets sont reliés l'un à l'autre, d'une part, l'analyse des événements de samedi dernier et des semaines précédentes et, d'autre part, les conséquences que vous en tirez pour que nos forces de sécurité soient en mesure de faire face à tout nouveau risque de dérapage à l'occasion d'autres manifestations.

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