Intervention de Vincent Eblé

Réunion du 4 décembre 2018 à 14h30
Loi de finances pour 2019 — Culture

Photo de Vincent EbléVincent Eblé :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le niveau des crédits de la mission « Culture » sera relativement stable en 2019. Le projet de loi de finances prévoit 3, 1 milliards d’euros en autorisations d’engagement et 2, 9 milliards d’euros en crédits de paiement, répartis entre les trois programmes de la mission.

J’évoquerai, pour ma part, les crédits du programme « Patrimoines », dont le montant s’inscrit dans la continuité des orientations fixées dans la loi de finances pour 2018.

Les crédits dédiés à l’entretien et à la restauration des monuments historiques, hors grands projets, sont confortés en 2019 ; ils s’élèveront à 297 millions d’euros en crédits de paiement, en hausse de 4 millions d’euros par rapport à 2018. Nous avons souligné, dans notre rapport, que le maintien de ce niveau de financement en faveur du patrimoine était, dans un contexte budgétaire contraint, un motif de satisfaction, même si les besoins sont, en la matière, quasi illimités.

L’augmentation des crédits dédiés à la restauration et à l’entretien des monuments historiques est d’abord la conséquence de la mise en œuvre du fonds partenarial et incitatif en faveur des collectivités à faibles ressources financières créé en 2018 afin d’aider ces dernières à entretenir leurs monuments historiques.

Ce fonds est reconduit pour l’année 2019, à un niveau équivalent : 15 millions d’euros en autorisations d’engagement permettront de lancer de nouvelles opérations dans des communes qui comptent, pour la plupart, moins de 2 000 habitants.

Deux grands projets de restauration de monuments historiques expliquent, par ailleurs, la hausse des autorisations d’engagement du programme en 2019 : la rénovation du Grand Palais et celle du château de Villers-Cotterêts.

Concernant la rénovation du Grand Palais, vous avez sans doute pu prendre connaissance récemment, dans la presse, des polémiques sur la maîtrise des coûts et l’opportunité de la réalisation de ce chantier. Nous avons essayé de montrer, dans notre rapport, que, si le montant total est incontestablement élevé, ce projet présente de sérieuses garanties, sans qu’il existe, par ailleurs, de véritable alternative à la rénovation du site telle qu’elle est proposée par la RMN-GP, la Réunion des musées nationaux–Grand Palais. Imagine-t-on une friche culturelle durable au cœur de la capitale ?

Le Grand Palais n’a pas connu depuis sa construction, en 1900, de véritable rénovation d’ampleur, à l’exception des travaux réalisés sur la verrière au début des années 2000. Le projet actuel vise à remettre le bâtiment aux normes techniques, d’importantes surfaces n’étant actuellement pas ouvertes au public en raison de carences en matière de respect des normes de sécurité. Il permettra de mieux accueillir le public et d’élargir l’offre culturelle, en réunissant le Grand Palais et le Palais de la découverte, qui disposeront à l’avenir d’une entrée commune.

D’importantes contraintes de calendrier pèsent sur le projet, qui doit être achevé à temps pour les jeux Olympiques de 2024. Le Grand Palais sera donc fermé au public à compter de décembre 2020, et un Grand Palais éphémère va être créé sur le Champ-de-Mars. Ce projet est mené en partenariat avec Paris 2024, pour en partager les coûts. La structure sera donc reprise en 2023 par le comité d’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques.

Par ailleurs, les terrains aux abords du Grand Palais seront cédés par la Ville de Paris à l’État, qui en attribuera l’utilisation à la RMN-GP. À cette fin, deux amendements ont été présentés par le Gouvernement à l’Assemblée nationale lors de l’examen en première lecture du présent projet de loi de finances, visant l’un à créer un article 74 septies rattaché à la mission et autorisant cette cession, l’autre à tirer les conséquences de l’opération sur le budget de la mission « Culture ». La commission des finances a donné un avis favorable à l’adoption de l’article 74 septies.

Le chiffrage du projet s’élève à 466 millions d’euros, dont 137 millions d’euros au titre de la restauration du monument historique. Ce chiffrage – pour établir toute comparaison, il convient de s’assurer que le périmètre de travaux estimés est identique – est constant depuis la présentation du projet actuel. Le budget comporte notamment 118 millions d’euros de crédits budgétaires, qui seront répartis sur neuf ans, cet étalement permettant de ne pas remettre en cause l’effort consacré par la mission « Culture » à l’entretien et à la restauration des autres monuments historiques.

Une question subsiste, cependant, à propos du plan de financement de la rénovation du Grand Palais : 160 millions d’euros sont prévus au titre des investissements d’avenir, mais les crédits de paiement correspondants ne sont, pour le moment, pas retracés dans la mission « Investissements d’avenir ». Monsieur le ministre, pouvez-vous clarifier cet aspect du financement du projet du Grand Palais ?

Un autre grand chantier est la rénovation du château de Villers-Cotterêts, dans le cadre du projet de laboratoire de la francophonie.

Le Président de la République a choisi ce château afin d’y créer un lieu dédié à la francophonie. Ce monument, dont la place dans notre histoire nationale est exceptionnelle et la qualité patrimoniale élevée, même si son état est très dégradé, sera restauré et revalorisé. Il a vocation à devenir à la fois un site patrimonial attractif ouvert à la visite et un laboratoire de rencontre, d’expression et d’expérimentation autour de la francophonie et de l’avenir de la langue française.

Le coût de la première tranche du projet est évalué à 110 millions d’euros, dont 55 millions de crédits budgétaires, 30 millions d’euros issus du grand emprunt et 25 millions d’euros provenant du mécénat, avec un objectif de réalisation pour le printemps 2022. Le château a été mis à la disposition du Centre des monuments nationaux, le CMN, pour la mise en œuvre du projet.

Le maintien du niveau des crédits de la mission en faveur de l’entretien et de la restauration des monuments historiques ne doit pas occulter le fait que de nombreux projets restent à ce jour en attente d’un financement. C’est le cas du schéma directeur du centre Pompidou, de l’extension du site des archives de Pierrefitte-sur-Seine, rendue nécessaire par l’obsolescence du site de Fontainebleau, de la rénovation des toitures du Mont-Saint-Michel ou de la façade du Panthéon, après le dôme.

Dans ce contexte, le loto du patrimoine, qui s’est tenu pour la première fois en septembre dernier, dans le prolongement de la mission confiée par le Président de la République à Stéphane Bern, constitue un outil utile de sensibilisation du public à la nécessité de préserver et de sauvegarder le patrimoine. Nous souhaitons donc qu’il soit pérennisé, de même que l’affectation des recettes fiscales afférentes, conformément à la solution trouvée le 25 octobre 2018 par le ministre de l’action et des comptes publics, M. Darmanin, et vous-même, monsieur le ministre. Il serait fort dangereux d’accréditer auprès des joueurs – dont la Française des jeux et les buralistes nous disent qu’il ne s’agit pas d’habitués – l’idée que leurs mises sont fortement ponctionnées au bénéfice du budget général de l’État. C’est pour cette raison que nous avons, en accord avec le rapporteur général de la commission des finances, présenté un amendement visant à exonérer le loto du patrimoine des contributions et prélèvements habituellement dus sur les sommes misées aux jeux organisés et exploités par la Française des jeux. Cette exonération a pour but d’affecter la part la plus importante possible des sommes issues de ces loteries à l’entretien et à la restauration du patrimoine français. Le Sénat a adopté cet amendement à l’unanimité lors de la discussion de la première partie du projet de loi de finances. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous indiquer si le Gouvernement entend maintenir cette exonération dans le texte du projet de loi de finances ?

Pour conclure, compte tenu de la continuité des grandes orientations de la politique culturelle et du maintien des financements inscrits à la mission « Culture », la commission des finances a proposé l’adoption, sans modification, des crédits de la mission et de l’article 74 septies.

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