Intervention de Julien Bargeton

Réunion du 4 décembre 2018 à 14h30
Loi de finances pour 2019 — Culture

Photo de Julien BargetonJulien Bargeton :

Le loto du patrimoine, que le président Éblé a évoqué, est un autre aspect positif.

Mais, d’un autre côté, le ministère de la culture et ses opérateurs portent de nombreux projets immobiliers dont la faisabilité financière doit être examinée précisément. Les opérateurs du ministère doivent composer avec des dotations stables, ce qui pourrait s’avérer problématique sur le long terme, du fait de l’évolution mécanique de leurs charges.

Le budget de la culture pour l’année 2019 témoigne de la continuité des orientations de la politique culturelle fixées l’année dernière. L’éducation artistique et culturelle et, plus généralement, l’accès à la culture pour tous continuent de constituer l’objectif prioritaire des politiques conduites par le ministère de la culture. Environ 110 millions d’euros y sont consacrés, dans le cadre du plan « 100 % EAC », qui vise à faire bénéficier l’ensemble des jeunes en âge d’être scolarisés d’au moins une action d’éducation artistique et culturelle subventionnée par le ministère de la culture. La culture n’est pas qu’un budget, elle est, d’abord et avant tout, une espérance républicaine.

Parmi les nombreuses actions menées dans ce domaine, nous avons, cette année, pu mesurer l’intérêt, par exemple, des orchestres Démos. Ce projet, conçu par la Philharmonie de Paris depuis 2010, vise un public de jeunes de sept à douze ans, vivant dans des quartiers classés en politique de la ville ou en zones rurales éloignées. Ceux-ci sont initiés à la pratique musicale classique en participant à un orchestre pour une durée de trois ans. Cette initiation à la pratique orchestrale doit permettre de renforcer le capital culturel des enfants concernés et contribuer à une meilleure insertion sociale. L’objectif pour la période 2019-2022 est désormais de mettre en place une soixantaine d’orchestres.

Le Pass culture constitue un autre aspect de la politique en faveur de l’éducation artistique et culturelle. Il trouve, dans ce projet de loi de finances, une véritable traduction budgétaire : 5 millions d’euros seulement lui avaient été alloués en 2018. Ces crédits ont permis d’élaborer l’outil de pilotage du Pass culture. Nous entrons maintenant dans une phase d’expérimentation, et non plus de test, ce qui conduit à mobiliser 34 millions d’euros. À ce titre, les amendements qui tendent à gager des hausses de crédits au bénéfice d’autres actions par la disparition ou la baisse des crédits du Pass culture posent problème, quel que soit leur intérêt intrinsèque, au regard des dispositions de la LOLF relatives aux gages.

Cette expérimentation va concerner 10 000 jeunes, sélectionnés afin de garantir la représentativité de l’échantillon, dans cinq départements : le Finistère, la Guyane, l’Hérault, le Bas-Rhin et la Seine-Saint-Denis. Le dispositif devrait par la suite monter progressivement en puissance, pour toucher jusqu’à 200 000 jeunes de dix-huit ans.

Selon les estimations du Gouvernement, le Pass culture pourrait concerner, en régime plein, jusqu’à 820 000 personnes. Cette estimation porte le coût théorique total du dispositif à plus de 400 millions d’euros chaque année. Les premières expérimentations apporteront des indications utiles sur les pratiques culturelles ou les taux d’utilisation, par exemple, à partir desquels un scénario réaliste de financement pourra nous être proposé. Nous veillerons en outre à ce que le coût du Pass culture ne conduise pas à une diminution des financements consacrés aux autres actions d’éducation artistique et culturelle.

Les crédits de paiement du programme « Création » sont fixés, pour 2019, à un niveau globalement équivalent à celui de 2018, ce qui permet de poursuivre l’aide au réseau de structures labellisées. Les financements en matière de spectacle vivant sont particulièrement fléchés en raison de multiples labellisations et conventionnements.

À l’occasion des travaux que nous avons menés sur la gestion des crédits déconcentrés du ministère de la culture, nous avons pu mesurer les contraintes qui pèsent sur la gestion du programme « Création ». Si la structure particulière de ce dernier explique en partie cette spécificité, on nous a néanmoins fait part d’un interventionnisme parfois marqué de l’administration centrale quant à la répartition des mesures nouvelles au sein du programme.

Cependant, des initiatives sont prises pour renforcer la liberté de gestion des personnels des directions régionales des affaires culturelles, les DRAC. C’est le cas, par exemple, de l’expérimentation qui va être menée en 2019 dans les DRAC de Bretagne et de Nouvelle Aquitaine. Un fonds mutualisé entre les programmes « Création » et « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture » sera confié à ces DRAC, pour tenir compte de la porosité fréquemment observée, sur le terrain, entre les actions en faveur de l’accès à la culture et les initiatives en matière de création artistique. Cela est conforme à l’objectif de responsabilisation accrue des gestionnaires dans les territoires.

En matière de création artistique, le soutien de l’État se conjugue aux aides et aux subventions apportées par les collectivités territoriales. Le financement assuré par la mission « Culture » représente ainsi environ 30 % de l’aide totale apportée par les collectivités publiques.

Deux projets immobiliers d’envergure sont également portés par le programme. Le premier est la Cité du théâtre, aux ateliers Berthier, qui doit permettre d’accroître les tournées en province des grandes institutions culturelles, auxquelles on reproche parfois d’être trop parisiennes. L’un des objectifs prioritaires de ce chantier est précisément de faire rayonner ces établissements sur l’ensemble de la France. Le second projet est la relocalisation du Centre national des arts plastiques, le CNAP, à Pantin.

Pour ces deux projets, le calendrier d’engagement des dépenses conduira, en 2019, à une diminution du montant total des autorisations d’engagement du programme.

Pour terminer, je formulerai deux remarques à propos de la gestion des emplois de la mission « Culture », qui doit être modifiée.

La première a trait au choix fait par le ministère de la culture de renforcer la responsabilisation des établissements publics administratifs qui disposent de la taille critique nécessaire pour gérer plus directement leurs emplois. Trois établissements seront concernés par cette réforme en 2019 : le Centre des monuments nationaux, le château de Versailles et le musée d’Orsay. Des amendements ont été présentés par le Gouvernement à l’Assemblée nationale pour réaliser le transfert de la gestion des emplois de ces opérateurs, sur le modèle de ce qui a été fait pour le musée du Louvre.

La seconde remarque concerne la poursuite du chantier de la revalorisation indemnitaire. Le sujet n’est pas forcément à la mode, mais le décrochage indemnitaire que connaissent les personnels du ministère de la culture par rapport à ceux des autres ministères entraîne un défaut d’attractivité qui pose des difficultés. Il est donc important de poursuivre le rattrapage.

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