Monsieur le président, madame la ministre, madame, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, à l’occasion de l’examen des crédits de la mission « Travail et emploi », j’aborderai deux sujets : l’emploi des travailleurs handicapés et l’insertion par l’activité économique.
Je tiens à souligner les moyens financiers consacrés à l’emploi des personnes handicapées, en particulier pour la prise en charge de 5 000 équivalents temps plein supplémentaires.
Toutefois, un certain nombre d’inquiétudes et d’incompréhensions demeurent.
En effet, la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel a modifié les modalités de calcul de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés, l’OETH, afin de favoriser l’emploi direct. L’analyse de leurs effets nécessitera quelque temps, mais je crains un manque d’anticipation de ces effets sur les entreprises adaptées et les établissements d’aide par le travail. La sous-traitance et les prestations ne pourront pas, à l’avenir, être autant mobilisées qu’aujourd’hui par les employeurs pour s’acquitter partiellement de leur OETH.
Il paraît paradoxal d’augmenter si fortement la création de postes, notamment au sein des entreprises adaptées, quand, en même temps, il y a un véritable risque de diminution de leurs carnets de commandes, par l’application des nouvelles règles de calcul de l’OETH.
De plus, malgré les nombreuses annonces gouvernementales exhortant à décloisonner et à fluidifier les parcours des personnes handicapées, on peine encore à penser le travail de ces dernières en dehors d’une étanche tripartition entre milieu protégé, milieu adapté et milieu ordinaire. Or il est impossible de modifier l’équilibre de l’un de ces milieux sans bouleverser celui des autres et, par ricochet, affecter les travailleurs qui y sont employés.
Pour que les mesures que vous proposez, madame la ministre, soient véritablement efficaces pour l’emploi des travailleurs handicapés, il conviendrait de compléter la réglementation pour permettre à ceux-ci de passer plus facilement du milieu protégé au milieu ordinaire, d’une place dans un établissement médico-social à un emploi au sein d’une entreprise.
En ce qui concerne l’insertion par l’activité économique, l’augmentation des crédits de la mission permettra également la création de 5 000 équivalents temps plein supplémentaires. On ne peut que saluer cet effort, mais il ne compensera que partiellement la diminution importante des emplois aidés.
En ma qualité de membre du conseil d’administration du fonds de l’expérimentation territoriale visant à résorber le chômage de longue durée, je voudrais présenter les résultats intermédiaires de cette opération.
À la suite de l’adoption de la loi du 29 février 2016, dix territoires, dont celui de Mauléon, dans les Deux-Sèvres, ont été sélectionnés afin de tester ce dispositif innovant. Un premier bilan intermédiaire laisse apparaître des résultats très encourageants. Ainsi, au 30 juin dernier, après dix-huit mois d’expérimentation, sur l’ensemble des dix territoires, près de 1 000 personnes ont été recrutées sur un emploi pérenne. Les entreprises à but d’emploi ont créé des emplois supplémentaires non concurrents et utiles.
Le 13 septembre dernier, à l’occasion de la présentation du plan contre la pauvreté, le Président de la République a annoncé sa volonté d’étendre cette expérimentation à quarante nouveaux territoires. J’aimerais, madame la ministre, que vous nous indiquiez les conditions dans lesquelles cette expérimentation sera étendue.
Aujourd’hui, on dénombre un certain nombre d’outils pour l’insertion par l’activité économique, destinés notamment à aider les personnes éloignées de l’emploi : les parcours emploi compétences, les ateliers et chantiers d’insertion, les entreprises d’insertion, les entreprises à but d’emploi, les entreprises adaptées, etc.
Peut-être serait-il utile de donner une meilleure lisibilité et une certaine cohérence à l’ensemble de ces dispositifs, qui restent efficaces et nécessaires. Est-ce là la future mission du service public de l’insertion annoncé dans le cadre de la stratégie de lutte contre la pauvreté ?
Madame la ministre, le Gouvernement se veut actif en matière de lutte contre le chômage, mais, aujourd’hui, les effets durables de la politique menée peinent à se faire sentir. Nombre de mesures proposées aujourd’hui ont été élaborées dans la précipitation, en associant souvent trop peu les acteurs des territoires ou parfois dans un délai relativement court. Être plus proche des acteurs territoriaux vous permettrait sans doute d’être plus efficace !