Intervention de Sébastien Lecornu

Réunion du 5 décembre 2018 à 14h15
Loi de finances pour 2019 — Article 81, amendement 100

Sébastien Lecornu :

Si vous le permettez, je répondrai plus globalement sur ce sujet, ce qui me permettra d’être plus rapide ensuite.

Les retours du terrain sur la DETR et la DSIL sont très disparates selon les départements. Même dans notre Normandie, monsieur Maurey, les ressentis des collègues élus dans des départements autres que l’Eure sont parfois un peu différents. Je pense que nous pouvons nous accorder sur quelques principes.

Premièrement, il me semble utile de garder une dotation très locale pour des priorités très locales, avec une commission très locale, donc plutôt rurale : c’est la DETR. Il me paraît également souhaitable de garder une dotation nationale, au sens non pas où les décisions seraient nationales, mais où le dispositif concernerait d’abord des priorités nationales. À cet égard, nous pouvons trouver des améliorations ensemble, puisque les critères nationaux peuvent être définis entre le Gouvernement et le Parlement. Je reprends l’exemple de notre beau département de l’Eure : la transition écologique apparaît peut-être davantage dans les priorisations de la DSIL que dans celles de la DETR. Ce n’est pas une critique ; c’est un constat. Cela me paraît une bonne chose de garder les deux dispositifs. La « priorité nationale » de la DSIL, ce n’est pas celle du Gouvernement ; c’est celle qui est définie avec le Parlement. Cela soulève peut-être la question d’une meilleure adaptabilité des critères.

Deuxièmement, pour les raisons que je viens d’indiquer, je ne suis pas particulièrement favorable – certes, nous pouvons faire mieux en matière de transparence – à la création d’une commission départementale pour la DSIL ou à la présentation des projets de DSIL en commission DETR. Certes, si c’est pour information, cela peut être intéressant ; mais si c’est pour avis, c’est beaucoup plus compliqué. Comme vous le savez, les élus qui gèrent la DETR dans le cadre des commissions DETR ne sont pas les mêmes que ceux qui sont éligibles pour la DSIL. Il y aurait donc rupture d’égalité. Il faudrait expliquer à quelques élus, par exemple, dans votre département, d’Évreux, de Louviers ou de Vernon, que les dossiers de DSIL passeraient devant une commission dans laquelle ils ne seraient pas représentés. Vous en conviendrez, c’est un peu délicat…

Troisièmement, oui, le préfet doit suivre les priorités – c’est l’objet d’un des sous-amendements – définies par la commission DETR ! Mais il serait un peu curieux d’inscrire cela dans la loi alors que, normalement, cela y figure déjà. Vous semblez estimer qu’un rappel s’impose ; je vous laisse le soin de préciser à quel niveau. Pour ma part, je peux l’indiquer dans des circulaires aux préfets. Les préfets sont tenus de respecter les priorités définies dans les commissions départementales ; je le répète pour que cela figure au Journal officiel. Si je dois prendre une nouvelle circulaire à la demande du Parlement, je le ferai. Et si vous avez connaissance de préfets qui ne joueraient pas le jeu, n’hésitez pas à me prévenir.

Sur la transparence, je crois que nous devons faire beaucoup mieux. Sincèrement, les 2 milliards d’euros liés à la DETR, à la DSIL, à la dotation politique de la ville, la DPV, ou à la dotation de soutien à l’investissement des départements, la DSID, passent inaperçus pour bon nombre de nos concitoyens. Alors que des interrogations sur l’utilité de l’impôt apparaissent et que le consentement à l’impôt est parfois remis en cause, nous devons progresser sur la reddition de comptes non seulement au Parlement et aux élus, mais également directement à nos concitoyens.

J’ai demandé – c’est la première fois que je le dis publiquement – à la direction générale des collectivités locales, la DGCL, de travailler à un portail numérique qui permettrait à chaque citoyen, dont évidemment les élus locaux, d’aller consulter les sommes et la nature des projets sur lequel des crédits de l’État que vous avez votés sont attribués dans chacune des collectivités ou EPCI éligibles, département par département. Non seulement cela semble indispensable pour des raisons démocratiques, mais en plus cela contribue à améliorer le consentement à l’impôt. Je vous propose de vous associer à cette démarche.

J’invite à une grande prudence sur l’abaissement des seuils pour la DETR, qui pourraient être commutés de 100 000 euros à 50 000 euros. Dans les départements où tout se passe bien, on nous demande de ne pas alourdir ou engorger la commission. Et dans ceux où ça se passe moins bien, on nous dit qu’on aimerait voir le seuil.

C’est tout le problème quand il s’agit de légiférer et d’adapter des règles à des situations particulières. Mais, au moment où nous parlons d’irritants et où nous voulons simplifier les choses, il me semble important de trouver un jugement de Salomon permet d’atteindre ces objectifs.

Nous le voyons bien, les chiffres liés à l’investissement local, au-delà des subventions ou dotations, repartent depuis un an et demi, tout simplement parce qu’on arrive dans la dernière partie du mandat municipal et communautaire. En plus, après la loi NOTRe et la recomposition des EPCI, les élus se remettent à investir. Les chiffres sont très disparates selon les territoires. D’ailleurs, j’ai commencé à demander à la DGCL et au préfet des informations sur ce sujet. Beaucoup de crédits ne sont pas utilisés, par exemple parce que le maître d’ouvrage a subi un certain nombre de difficultés. Je pense notamment aux petites communautés de communes qui ont vécu la loi NOTRe et qui ont dû arrêter des projets.

Je vais lancer un groupe de travail sur l’investissement local avec des députés et des sénateurs ; je proposerai bien volontiers au président du Sénat de désigner des membres de la Haute Assemblée pour y participer. Je souhaiterais y faire siéger non seulement les associations d’élus, mais également les bénéficiaires de la commande publique – la Fédération nationale des travaux publics, ou FNTP, la Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment, ou CAPEB, etc. –, afin de pouvoir disposer de données un peu plus fines sur le sujet.

Vous le voyez, mon propos est bienveillant. Je prends ces sous-amendements comme des sous-amendements d’appel. Faisons attention à ne pas figer ou rigidifier les choses.

J’en viens à l’amendement n° II-100 rectifié bis. Là aussi, les situations sont disparates. En Normandie, les enveloppes sont départementalisées par la préfète de région, qui signe les décisions, mais les choix de DSIL sont faits par les préfets de département. Qu’en est-il sur votre territoire, monsieur le rapporteur pour avis ?

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