Intervention de Gérard Longuet

Réunion du 5 décembre 2018 à 21h45
Loi de finances pour 2019 — Enseignement scolaire

Photo de Gérard LonguetGérard Longuet :

Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, à dire vrai, la commission des finances du Sénat est plutôt satisfaite. Je vais donc faire retomber une insoutenable tension : elle préconise le vote des crédits de cette mission !

Globalement, la progression de la dépense publique est raisonnable : 1, 7 %. Elle avait été de 2, 4 % en moyenne lors du quinquennat précédent. Nous avons également identifié des points positifs, qui mériteront sans doute d’être éclairés au cours du débat.

Le premier est l’évolution des effectifs, qui reprend un parcours plus réaliste, avec la suppression de 1 850 équivalents temps plein, dont 1 250 postes dans l’enseignement public, 550 postes dans l’enseignement privé et 50 postes dans l’enseignement agricole, dont la mission a également la charge. Je reviendrai ultérieurement sur ces suppressions.

Le deuxième point positif est le fait que vous ayez engagé, monsieur le ministre, une politique de pré-professionnalisation pour le recrutement des enseignants. Cette initiative importante prendra sous votre impulsion, je le crois, une dimension massive. Elle concerne des étudiants de L2, de L3 et de M1. Nous pourrions atteindre le chiffre de 10 000 étudiants associés, initiés à la vie professorale. Ils pourraient ainsi s’en imprégner et, s’ils réussissaient leurs examens, intégrer leur classe avec une connaissance et un bagage.

Le troisième point positif que je tiens à signaler concerne des mesures catégorielles : vous reprenez le chemin d’une revalorisation, certes toujours insuffisante, mais réelle, de la condition d’enseignant. Ainsi, 227 millions d’euros supplémentaires seront consacrés à cet effort, dont une partie s’explique par la reprise du protocole « Parcours professionnels, carrières et rémunérations », le célèbre PPCR, pour 133 millions d’euros.

Vous avez aussi une politique plus volontariste en ce qui concerne les débutants. Dans les zones difficiles, la prime atteindra pratiquement 2 000 euros annuels, si j’ai bien retenu vos chiffres. Je note néanmoins que cette prime est hiérarchisée en fonction de l’ancienneté. À l’éducation nationale, il est bon d’être vieux et en fin de carrière, parce qu’on y gagne plus d’argent ! Pour les plus anciens, cette prime atteindrait 11 000 euros par an. Pourriez-vous nous confirmer ce chiffre ?

Le quatrième point positif que je veux souligner est sans doute le plus important, car la commission des finances, comme la commission des affaires culturelles d’ailleurs, a pour souci permanent le renforcement de l’enseignement primaire. Si, globalement, nous assistons à une diminution des équivalents temps plein, l’enseignement primaire bénéficiera de la création de 1 800 emplois, ce qui vous permettra notamment d’achever le dédoublement des CP et des CE1 dans les zones REP et REP+. C’est une excellente formule. C’est aussi un effort significatif sur le plan financier. J’ai noté que la dépense représentait 500 millions d’euros pour 300 000 élèves, soit 1 666 euros par élève. L’État investit donc dans la jeunesse française et dans la jeunesse la moins favorisée.

J’évoquerai également les stages de réussite, que vous poursuivez et que vous développez.

Par ailleurs, le dispositif « Devoirs faits » vise à faire du collège un endroit où l’élève reçoit un véritable soutien afin d’amortir les différences de soutiens familiaux.

J’ajoute que vous avez décidé de dispenser une « instruction » – mais est-ce le terme exact – à partir de trois ans. Se fera-t-elle par la voie de la scolarisation ? Les familles y sont attentives.

Le cinquième point positif que je veux évoquer concerne la rationalisation du second degré. Nous savons tous que le second degré dans l’enseignement public français est mieux servi que le primaire en raison notamment de la diversité des options, de la multiplicité des filières et d’un ratio enseignants-élèves très favorable au surencadrement.

Le Gouvernement procède à une rationalisation du baccalauréat – l’actualité en fait état ; c’est un marronnier… Cela étant, il y a une véritable décision de fond. Il s’agit d’un bac plus simple, plus clarifié, qui permet accessoirement de regagner des semaines de travail dans les établissements et qui engage une réforme en amont. Je suis persuadé que vous nous en parlerez.

Vous avez opté pour un moyen nouveau : la deuxième heure supplémentaire que le chef d’établissement peut demander aux enseignants. Il pouvait déjà en demander une. Il pourra dorénavant en demander deux. Ce sera sans doute une façon d’amortir dans un premier temps la diminution des effectifs.

J’évoquerai rapidement la voie professionnelle pour vous interroger sur ce que vous entendez par « campus d’excellence ».

Enfin, dernier point de satisfaction, mais c’est presque un peu mesquin de la part de la commission des finances : nous nous réjouissons que vous ayez renoncé au projet SIRHEN après avoir constaté qu’il ne parvenait pas à aboutir.

Pour conclure, j’exposerai les points de vigilance.

Tout d’abord, vous ne respectez pas la loi de programmation triennale, puisque vous dépassez le plafond de 170 millions d’euros. L’avantage c’est la sincérité ; l’inconvénient, c’est la soutenabilité dans le temps de votre budget au regard de la loi de programmation des finances publiques.

Ensuite, il faudra évaluer en permanence – je pense que vous n’y êtes pas hostile – le rapport entre le coût et le rendement des mesures nouvelles qui ont été évoquées pour le primaire. Nous les soutenons spontanément, mais il faudra tout de même évaluer leur coût, en particulier la partie qui incombe aux collectivités locales. Vous savez que le Sénat est toujours attentif à ces questions. Le dédoublement des classes ne va pas sans mètres carrés supplémentaires. La généralisation de l’instruction à partir de trois ans ne se fera pas non plus sans effort supplémentaire, en termes aussi bien de bâtiments que de personnels d’accompagnement.

S’agissant de la voie professionnelle, nous avons cherché à comprendre quel rôle joueront les régions entre les professions et l’éducation nationale. Nous nous sommes également intéressés, au nom du territoire, au rapport Gouttebel que vous avez demandé et qui devrait permettre d’ouvrir des pistes nouvelles sur le renouveau de l’internat.

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