… et alors même que plusieurs syndicats d’enseignants rejoignent désormais les mobilisations.
Les suppressions de postes suscitent colère et inquiétude, comme les réformes qui risquent d’accentuer les inégalités sociales. Votre politique est construite sur ce postulat : la France investirait trop dans le secondaire et pas assez dans le primaire. Ce parti pris vous a conduit à dédoubler les classes en CP et en CE1 en REP et REP+. Mais l’augmentation du nombre de postes n’a pas suivi. Du coup, cette mesure, pourtant louable, s’est traduite par des retraits de postes et donc des classes surchargées dans beaucoup de territoires.
Le dispositif « Plus de maîtres que de classes » a été réduit d’un tiers en 2018 et va continuer à diminuer en 2019. Vous avez justifié cette décision en avançant qu’il n’existait pas de preuves tangibles et scientifiques qu’un taux d’encadrement plus élevé favorisait la réussite. Cet argumentaire est à géométrie variable ! La réduction du nombre d’élèves par classe est la première des priorités pour le CP, mais, « en même temps », on réduit le nombre d’enseignants dans le secondaire et on ferme même des classes rurales au prétexte que le nombre d’élèves y est trop faible. On cherche la cohérence….
Le jeu de vases communicants auquel vous vous êtes livré pour mettre en place le dédoublement des classes de CP et CE1 pose deux problèmes majeurs.
Il est vrai que le primaire est le parent pauvre de l’école française, mais il est faux de croire que le secondaire dispose de moyens suffisants, à plus forte raison au collège ou dans l’enseignement professionnel. Permettez-moi de rappeler que, en vingt ans, la part des dépenses d’éducation a baissé de 1 point de PIB, ce qui représente tout de même 23 milliards d’euros. C’est d’autant plus problématique que la réforme du baccalauréat demandera un investissement supplémentaire aux enseignants de lycée, dorénavant chargés d’organiser des épreuves et de gérer la place accrue du contrôle continu. Surtout, ces réductions de moyens et d’effectifs sont incompréhensibles au vu des évolutions démographiques. Ainsi, dans le seul secondaire, ce sont plus de 40 000 nouveaux élèves qui sont attendus d’ici à 2021.
Au regard de ce constat, vous augmentez les heures supplémentaires des enseignants. Or, d’une part, un enseignant français travaille devant les élèves 900 heures, contre 784 en moyenne dans l’OCDE, et, d’autre part, les équipes éducatives ne cessent de demander des temps hors cours pour travailler sur la vie scolaire et la cohésion au sein du lycée, notamment pour lutter contre les incivilités ou les violences.
Face à la crise de recrutement que nous connaissons, ce sont les salaires des enseignants, particulièrement bas en France, qu’il faut augmenter, plutôt que de passer par le subterfuge des heures supplémentaires. Il n’aura échappé à personne, ces jours-ci, que la question du pouvoir d’achat s’impose… Il serait temps d’y répondre réellement !
Je serai plus nuancée que vous ne l’êtes, monsieur le ministre, sur la hausse de 850 millions d’euros de votre budget que vous vous plaisez à mettre en avant, ce que l’on peut parfaitement comprendre.
Tout d’abord, 400 millions d’euros sont mécaniquement abondés pour les lignes « Glissement vieillesse technicité » et « Parcours professionnels, carrières et rémunérations ».
Ensuite, il y a une bascule budgétaire du recrutement et de la rémunération des AESH, pour 213 millions d’euros. Sur ce point, je me permets de rappeler que de très nombreux enfants en situation de handicap n’ont toujours pas d’accompagnant alors que nous approchons des vacances de Noël. Vous savez que ce sujet me tient particulièrement à cœur. D’ordinaire, les situations sont pratiquement toutes réglées entre la rentrée de septembre et celle de la Toussaint. Ce n’est pas le cas aujourd’hui. S’agit-il d’attendre janvier pour faire passer ces recrutements sur le budget 2019, comme semblent en attester certains témoignages ?
Enfin, le même mouvement d’écriture comptable est à appliquer aux crédits de la vie associative dévolus aux activités périscolaires.
Concernant la voie professionnelle, vous considérez que le lycée professionnel est celui qui « coûte le plus cher et a le plus d’heures de cours sans être synonyme de réussite ». Vous prévoyez la diminution du nombre d’heures d’enseignement. Cela se vérifie, notamment, à travers l’effondrement des postes de professeurs de lycée professionnel mis au concours pour 2019.
Je rappelle que la voie professionnelle est celle qui prépare le mieux les jeunes à l’obtention d’une qualification et à l’insertion professionnelle. Elle permet à de nombreux jeunes, notamment des milieux populaires, d’accéder au bac, puis à l’enseignement supérieur. Elle est également indispensable pour maintenir et développer des savoir-faire, dans l’industrie par exemple. L’apprentissage ne peut pas être la seule réponse, d’autant que la réforme qui dessaisit les régions de cette mission pour la confier aux branches professionnelles risque de porter un coup fatal à de nombreux centres de formation des apprentis, qui maillent nos territoires, et de mener à l’abandon d’un certain nombre de formations.
En conséquence, notre groupe votera contre ce budget.