Madame la présidente, madame la ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », qui porte les politiques publiques de solidarité et de cohésion sociale de l’État en faveur des personnes les plus fragiles, est dotée, en 2019, de 21, 1 milliards d’euros de crédits de paiement. Ces crédits progressent ainsi de 7, 5 % par rapport à 2018.
Cette augmentation est principalement due au dynamisme des dépenses d’intervention, qui représentent 93 % des crédits de la mission, mais s’explique également par les revalorisations dites « exceptionnelles » de la prime d’activité et de l’allocation aux adultes handicapés.
Il y a ainsi un effort budgétaire d’ensemble de la part du Gouvernement, que nous reconnaissons, mais qui doit cependant être nuancé par l’existence d’un certain nombre de mesures de paramètre, des mesures dont l’impact sur les bénéficiaires ne semble, d’ailleurs, pas vraiment maîtrisé par le Gouvernement, ce qui est quelque peu inquiétant.
Derrière la communication gouvernementale et les revalorisations annoncées, la réalité des crédits de la mission atteste, en effet, de la mise en œuvre d’un certain nombre de réformes de paramètre, qui viennent minorer, voire neutraliser dans certains cas, les revalorisations annoncées, le Gouvernement ayant choisi de faire sien le célèbre adage « donner d’une main pour mieux reprendre de l’autre »…
En effet, parallèlement aux revalorisations annoncées, différentes mesures sont prévues par le projet de loi de finances pour 2019, ou ont déjà été mises en œuvre par la loi de finances pour 2018.
Concernant tout d’abord la prime d’activité, il s’agit de la baisse de l’abattement portant sur les revenus d’activité pris en compte dans le calcul de la prime – de 62 % à 61 % –, intervenue par un décret d’octobre dernier. Ainsi, d’après des simulations effectuées, sur les 20 euros de revalorisation forfaitaire annoncés, une personne au SMIC et sans enfant bénéficierait d’un gain de seulement 8 euros !
Autre réforme paramétrique, l’exclusion pour les « nouveaux entrants » du bénéfice de la prime d’activité : les bénéficiaires de rentes accidents du travail et maladies professionnelles, ou AT-MP, et de pensions d’invalidité.
Enfin, il a été décidé la suppression de la revalorisation annuelle du 1er avril pour 2019 et 2020 de la prime et de son bonus, indexées jusque-là sur l’inflation.
De même, pour l’allocation aux adultes handicapés, l’AAH, sont prévues ou déjà mises en œuvre les réformes de paramètre suivantes.
Le rapprochement des règles de prise en compte des revenus d’un couple dont l’un des deux perçoit l’AAH, sur celles d’un couple percevant le revenu de solidarité active, le RSA, a déjà débuté, avec la publication d’un décret, fin octobre, qui abaisse le plafond de ressources à 1, 89. En 2019, celui-ci sera abaissé à 1, 81.
Autre mesure qui atténue la revalorisation annoncée, la suppression d’un des deux compléments de l’AAH, le complément de ressources. D’un montant de 179 euros par mois pour les personnes les plus fragiles, il sera supprimé par l’article 83 rattaché à la mission, sur lequel nous présenterons un amendement de suppression.
Enfin, dernière mesure paramétrique, je citerai, comme pour la prime d’activité, la suppression de la revalorisation annuelle indexée sur l’inflation pour 2019, et sa limitation à 0, 3 % en 2020.
Outre le fond de ces mesures, c’est surtout la méthode du Gouvernement qui est quelque peu critiquable, madame la ministre. Le Gouvernement a su abondamment communiquer sur les coups de pouce, en oubliant d’évoquer ces nombreux coups de ciseaux, qui seront autant de mauvaises surprises pour les bénéficiaires, c’est-à-dire, madame la ministre, madame la secrétaire d’État, ne l’oublions pas, les plus vulnérables de nos concitoyens.
Nous souhaiterions ainsi, madame la ministre, que nous soient transmis des éléments chiffrés et statistiques, et notamment les simulations réalisées par le Gouvernement, pour connaître le réel impact de toutes ces mesures de restriction budgétaire sur les bénéficiaires. Nous nous sommes essayés à l’exercice et avons obtenu des ordres de grandeur, mais nous aimerions avoir des chiffres plus précis.
Malgré ces insuffisances, que je regrette, la commission des finances a décidé d’adopter ces crédits, mais également de voter un amendement visant à maintenir, conformément au droit existant, le complément de ressources à l’allocation aux adultes handicapés.