Intervention de Agnès Buzyn

Réunion du 6 décembre 2018 à 14h30
Loi de finances pour 2019 — Santé

Agnès Buzyn :

Madame la présidente, monsieur le président de la commission des affaires sociales, madame, monsieur les rapporteurs, mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, après ce moment très dense, républicain, nous reprenons l’examen des crédits de la mission « Santé » inscrits au projet de loi de finances pour 2019.

Ce budget s’inscrit dans la continuité de celui de 2018 en ce qui concerne la structuration de la mission et le montant des crédits alloués.

Ces derniers sont en augmentation de 3, 5 % et atteindront plus de 1, 4 milliard d’euros en 2019. Ils ne représentent toutefois, vous le savez, qu’une petite partie des financements que les pouvoirs publics consacrent à la politique de santé et qui sont, pour l’essentiel, discutés dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Il m’apparaît donc nécessaire de conserver à l’esprit, lors de l’examen de ces crédits, le champ plus vaste dans lequel ils s’inscrivent.

Je commencerai par évoquer le programme 204, consacré à la prévention, à la sécurité sanitaire et à l’offre de soins.

Les grandes masses de ce programme, doté de près de 500 millions d’euros, sont relativement stables. Plus des deux tiers des crédits sont consacrés aux quatre agences sanitaires financées par ce budget, c’est-à-dire l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, l’ANSM, l’Agence nationale de santé publique, l’ANSP, l’Institut national du cancer, l’INCa, et l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, l’ANSES.

Ces crédits progressent en 2019 de 2, 4 millions d’euros, ce qui permet de consolider les moyens de ces quatre structures.

Le périmètre des opérateurs concernés n’a pas évolué, la loi de finances de 2018 ayant mis en œuvre les dernières opérations de décroisement des crédits de l’État et de l’assurance maladie, avec le transfert à l’assurance maladie des dotations de l’Agence de la biomédecine et de l’École des hautes études en santé publique.

J’ai senti une certaine réserve, au travers de vos propos, sur les crédits de prévention du programme 204. Ils s’élèvent à 89 millions d’euros ; en légère progression, ils sont consacrés, pour l’essentiel, à la dotation de l’Agence nationale de santé publique.

Il faut toutefois, pour apprécier l’évolution des moyens que nous consacrons à la prévention, considérer l’ensemble des financements disponibles, quel qu’en soit le support. On constate alors que ces moyens augmentent de façon significative. Toutes les décisions que j’ai prises vont en effet dans le sens d’une progression des crédits consacrés à la prévention.

Ainsi, les crédits du Fonds national de prévention, d’éducation et d’information sanitaire, le FNPEIS, gérés par la CNAM, vont augmenter de 20 % par rapport à la période précédente dans le cadre de la convention d’objectifs et de gestion 2018-2022, pour s’établir à 379 millions d’euros.

Les crédits du Fonds de lutte contre le tabac, alimenté par la taxe sur les distributeurs, se sont élevés à 100 millions d’euros en 2018, contre 30 millions d’euros en 2017. Ils vont maintenant couvrir d’autres addictions que le seul tabac.

Les crédits du fonds d’intervention régional, le FIR, qui porte notamment les actions de prévention menées par les agences régionales de santé, s’élevaient à 515 millions d’euros en 2017. Ils ont augmenté de 3, 3 % en 2018 et augmenteront encore de 4, 8 % en 2019.

Enfin, les crédits du Fonds national de prévention des accidents du travail, consacrés à des aides incitatives à la prévention pour les entreprises, vont doubler, passant de 50 millions à 100 millions d’euros dans le cadre de la convention d’objectifs et de gestion 2018-2022.

Vous l’aurez compris, tous ces crédits sont au service des priorités de la politique de prévention telles que définies dans le plan national de santé publique présenté par le Premier ministre le 26 mars dernier, que nous avons appelé « plan Priorité prévention ».

La mise en œuvre de cette politique sera soutenue par le déploiement, d’ores et déjà en cours, du service sanitaire : 47 000 étudiants consacreront ainsi une partie de leur temps de formation à des actions de prévention dans tous les milieux, notamment auprès des jeunes. C’est l’occasion à la fois d’ancrer la culture de prévention chez ces futurs professionnels de santé et de démultiplier, au plus près du terrain, l’impact de l’éducation à la santé.

Le programme 204 porte également les dépenses d’indemnisation des victimes de la dépakine. Comme vous le savez, ce dispositif d’indemnisation est conduit par l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, l’ONIAM.

Les deux instances d’expertise – le collège d’experts et le comité d’indemnisation – ont achevé de mettre en place leurs outils et méthodes de travail. Les premiers avis d’indemnisation pourront ainsi être rendus avant la fin de l’année 2018, et le nombre de décisions au bénéfice des victimes progressera de façon très significative en 2019.

Les crédits inscrits à ce budget et les reports d’un exercice sur l’autre qui interviendront à hauteur de plus de 30 millions d’euros garantiront un financement de l’ONIAM cohérent avec les demandes d’indemnisation.

Le Gouvernement soutiendra l’amendement des sénateurs du groupe La République En Marche, qui ont par ailleurs souhaité vous proposer d’améliorer le dispositif d’indemnisation en permettant le réexamen des demandes d’indemnisation ayant fait l’objet d’un rejet lorsque l’évolution des connaissances scientifiques le justifie.

Le deuxième programme de la mission, le programme 183, est consacré pour l’essentiel à l’aide médicale de l’État, l’AME.

Je suis, vous le savez, très attachée à la préservation de ce dispositif, qui est à la fois un dispositif humanitaire, conforme à nos valeurs républicaines, et un dispositif sanitaire nécessaire, répondant à un intérêt de santé publique pour tous nos concitoyens. Les crédits qui y sont consacrés augmentent ; ils s’élèveront, en ce qui concerne l’AME de droit commun, à 893 millions d’euros en 2019, en ligne avec la progression attendue des effectifs, même si, en la matière, la prévision demeure très complexe.

Il n’est pas inutile de le préciser une nouvelle fois, ces crédits servent à financer des prestations de santé dispensées, pour l’essentiel, par les hôpitaux de notre pays et permettent donc d’éviter que les établissements de santé ne supportent seuls la charge correspondante. Toute diminution de ces crédits, comme proposée par votre commission des finances à travers un amendement, se traduirait par un report de charge sur les hôpitaux.

Comme j’ai eu l’occasion de l’indiquer lors de l’examen du projet de loi de règlement de 2017, nous devons encore progresser en matière de connaissance des dépenses et des bénéficiaires de l’AME. C’est une de mes priorités. J’ai ainsi demandé à la CNAM de développer la qualité des remontées d’information. Ces données nous permettront de mieux analyser les flux et d’améliorer la prévision. La centralisation, en 2019, de l’instruction des demandes d’AME dans trois caisses – celles de Bobigny, de Paris et de Marseille – contribuera aussi à la connaissance plus fine du dispositif.

Je souhaite, pour terminer, évoquer le Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante, le FIVA, qui relève également du programme 183.

Les crédits du budget de l’État destinés à doter ce fonds sont reconduits. Cette dotation intervient au titre de l’État employeur, mais correspond également à l’exercice d’une solidarité nationale à l’égard des victimes non professionnelles, qu’elles soient environnementales ou familiales, par exemple. Il s’agit bien évidemment d’une contribution annexe pour le FIVA, lequel est financé principalement, au titre de l’exposition professionnelle, par la branche accidents du travail-maladies professionnelles de la sécurité sociale. À cet égard, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2019 prévoit de doter le fonds de 260 millions d’euros, ce qui permettra de lui assurer sans difficulté un niveau prudentiel suffisant.

Tels sont, mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, les principaux axes d’un budget dont vous aurez compris qu’il se caractérise par sa stabilité et la continuité des programmes qu’il soutient.

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