Intervention de Sylvie Vermeillet

Réunion du 6 décembre 2018 à 14h30
Loi de finances pour 2019 — Compte d'affectation spéciale : pensions

Photo de Sylvie VermeilletSylvie Vermeillet :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la contribution de l’État aux régimes sociaux et de retraite s’élève à 6, 28 milliards d’euros. Elle est nécessaire pour couvrir les deux tiers des retraites versées par les caisses des régimes spéciaux, principalement ceux de la SNCF, pour 3, 3 milliards d’euros, de la RATP, pour 736 millions d’euros, des marins, pour 815 millions d’euros, et des mines, pour 1, 1 milliard d’euros.

Les besoins de financement de ces régimes proviennent des déséquilibres démographiques résultant d’un nombre de cotisants très inférieur à celui des pensionnés. Dans le régime général, on compte 1, 3 actif pour un pensionné, contre 0, 65 à la SNCF et 0, 85 à la RATP.

La contribution de l’État couvre également des avantages dérogatoires. L’âge de départ est de 52 ans pour les agents de conduite de la SNCF, et la durée de service d’une pension atteint 40 ans à la RATP, soit plus que la période d’activité.

La revalorisation des retraites au 1er janvier 2019 va coûter 30 millions d’euros ; la non-indexation des pensions sur l’inflation représente toutefois une économie de 100 millions d’euros.

Le compte d’affectation spéciale « Pensions » bénéficie de la sous-revalorisation des retraites. Compte tenu des charges, qui s’élèvent à 59 milliards d’euros, l’effet est très significatif, avec une économie de 600 millions d’euros par point d’inflation non pris en compte. En l’absence de revalorisation générale du point d’indice et du fait de la hausse du nombre de contractuels – 11, 8 % des effectifs en 2006, contre 16, 5 % aujourd’hui –, les recettes augmentent peu.

Malgré tout, le solde du compte d’affectation spéciale est largement positif, à 1, 6 milliard d’euros ; à la fin de l’exercice budgétaire, les excédents cumulés s’élèveront à plus de 8 milliards d’euros, car, ces dernières années, les cotisations salariales des fonctionnaires ont davantage augmenté que la charge employeur, alimentant ainsi l’excédent.

Globalement, les soldes financiers des régimes couverts par le compte d’affectation spéciale devraient demeurer positifs – ils le sont dans tous les scénarios – à l’horizon de 2070, au contraire du solde du régime général, qui ne pourra l’être que si la croissance est supérieure à 1, 5 % par an.

Les perspectives financières à long terme induisent une réduction du taux de rendement des cotisations du fait de l’allongement de la vie active, qui réduit la valeur actualisée des droits, et de la décorrélation entre les droits à pension et la croissance économique.

Sans surprise, dans un tel contexte, le niveau de vie des retraités de la fonction publique recule par rapport à celui de la population active. La perspective du taux de remplacement n’est pas sans poser problème, puisqu’elle incite les intéressés à accroître leur effort d’épargne, avec probablement des effets assez discriminants selon les niveaux de revenu d’activité et la composition des familles.

Pour les régimes spéciaux, le rééquilibrage des comptes suppose que les anciennes réformes portent leurs fruits, en particulier le relèvement de l’âge de départ effectif à la retraite, pour la SNCF et la RATP.

L’adoption du pacte ferroviaire entraîne la création d’un nouveau régime spécial de retraite SNCF. Le déficit de ce nouveau régime va d’abord se creuser, car il n’y aura plus de nouveaux cotisants, et les besoins d’équilibre vont augmenter. À très long terme, le déficit s’effacera de lui-même avec la diminution naturelle du nombre de pensionnés.

L’un des objectifs de la réforme des retraites est, dit-on, d’instaurer un système plus juste. Le principe d’uniformité des rendements contributifs nécessitera néanmoins le maintien d’un certain niveau de solidarité, ce qui, finalement, nous ramènera à une situation assez proche de l’existant.

La question de la transition entre les deux systèmes est fondamentale : quelle en sera la durée ? Que fera-t-on des excédents ou des déficits des différents régimes actuels ? Les uns compenseront-ils les autres ? Comment prendra-t-on en compte la pénibilité ou la dangerosité de certains métiers – je pense notamment aux militaires ou aux gendarmes ? Comment prendra-t-on en compte les différentes situations familiales ? Que vont devenir les actuels gestionnaires des retraites appelés à se regrouper en une seule entité ? Les personnels seront-ils déplacés ? Les sites de province seront-ils abandonnés? Comment sera pilotée la valeur fondamentale du point dans le futur système ? Comment convaincre les fonctionnaires que leur salaire net actuel doit baisser pour une meilleure retraite ?

Je n’ai pas la réponse à ces questions, et l’échéance de juin 2019 annoncé par le Gouvernement pour y répondre me paraît bien proche.

Pour conclure, malgré ces interrogations lourdes de conséquences, et compte tenu de la nécessité de l’équilibre du compte d’affectation spéciale « Pensions » et des actuels besoins de la mission « Régimes sociaux et de retraite », je vous propose, mes chers collègues, d’adopter les crédits.

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