Intervention de Monique Lubin

Réunion du 6 décembre 2018 à 14h30
Loi de finances pour 2019 — Compte d'affectation spéciale : pensions

Photo de Monique LubinMonique Lubin :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, c’est pour préparer une année bien particulière et à un moment singulier que nous discutons de la mission « Régimes sociaux et de retraite » du projet de loi de finances pour 2019.

Le moment est celui d’une crise sociale et politique qui renvoie notamment à la problématique du pouvoir d’achat des Français. Aiguë, elle est en partie nourrie par des choix opérés par le Gouvernement au travers des projets de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 et pour 2019. Je pense ici au choix d’augmenter la CSG pour 8 millions de retraités et à la non-indexation des pensions sur l’inflation.

L’année particulière, c’est 2019 : selon l’agenda du Gouvernement, elle devrait être celle de la réforme des retraites, l’objectif affiché étant de simplifier un système complexe et difficilement lisible pour nos concitoyens. Les régimes spéciaux de retraite en seront un sujet clef.

L’examen des crédits de la mission « Régimes sociaux et de retraite » me donne l’occasion de m’exprimer à propos de cette réforme.

Les crédits de cette mission restent d’année en année relativement stables. Certaines interrogations perdurent, notamment sur l’imputation de la retraite complémentaire obligatoire des non-salariés agricoles sur la mission examinée aujourd’hui, et non sur la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales ».

Cette mission prend surtout en charge les subventions d’équilibre versées par le budget de l’État à onze régimes spéciaux de retraite, ainsi que la subvention de l’État au régime complémentaire obligatoire des exploitants agricoles.

L’évolution qui sera proposée sera l’un des enjeux de la réforme des retraites à venir. Le haut-commissaire à la réforme des retraites, M. Jean-Paul Delevoye, est venu en présenter les prémices devant la commission des affaires sociales du Sénat. Il a été clair et bienveillant, mais nous considérons que tout reste à faire, car la bienveillance et la compétence ne font pas tout…

Ainsi, les représentants des régimes spéciaux de retraite ont signifié leur attachement à la singularité de leurs régimes respectifs et ont exprimé une inquiétude légitime, liée à la crainte d’être stigmatisés.

De fait, il va nous falloir être particulièrement vigilants ; l’état actuel de la France, caractérisé par une colère qui gronde et un profond mécontentement qui se fait jour, nous commande de faire tout particulièrement attention à la manière dont nous aborderons et traiterons ce dossier.

Je n’imagine d’ailleurs pas qu’une transformation aussi profonde de notre système de retraites que celle qui est envisagée aujourd’hui, dans un contexte aussi tendu et porteur de tant de remises en question, ne fasse pas l’objet d’un temps de travail et de réflexion particulièrement important.

C’est la raison pour laquelle je m’interroge sur la possibilité et la pertinence de voter ce texte dès 2019, sachant que la discussion ne démarrerait qu’au troisième trimestre de cette même année.

Si, toutefois, cette réforme devait être menée, j’ose espérer que l’on mettra – pour une fois – le temps qu’il faudra pour parvenir à un résultat juste et équilibré : une acceptation des Français sera indispensable, et demandera travail et dialogue.

Beaucoup de questions se posent : que deviendront les pensions de réversion, sujet .extrêmement sensible ? Sur quels régimes seront alignées les retraites des fonctionnaires ? Quid des carrières longues ? Nombreux sont ceux qui ont commencé à travailler très tôt et qui ont effectué des carrières longues et pénibles. Il est bien sûr hors de question que la réforme remette en cause leurs droits. Quid de la valeur du point, de son évolution, de la gouvernance du futur système ?

Monsieur le secrétaire d’État, les temps démontrent qu’aucune réforme, grande ou petite, ne peut être menée sans une véritable concertation avec la représentation nationale et les corps intermédiaires. Ils sont nécessaires à l’équilibre de notre démocratie. Ils sont indispensables pour que notre action soit comprise par nos concitoyens, dont le consentement est un préalable indispensable à toute réforme.

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