Les actions sont désormais assorties d’un préambule et d’une présentation. Mais, en même temps, j’avoue une grande déception. Les trois quarts des autorisations d’engagement et le tiers des crédits de paiement de la mission sont consacrés à la rénovation thermique et à l’accessibilité des bâtiments administratifs. Certes, bien souvent, ce n’est pas du luxe – vous connaissez d’ailleurs mon attachement à la rénovation thermique des bâtiments publics. Il s’agit là d’une action concrète au service de la sobriété énergétique. De plus, selon la direction de l’immobilier de l’État, au regard des résultats des premiers rapports d’audit, les besoins du parc des cités administratives dépassent potentiellement le montant total du programme. Ce qui est vrai pour l’État l’est aussi pour les collectivités territoriales : faites donc un geste en leur faveur et maintenez l’article, introduit par le Sénat, leur reversant une partie des recettes fiscales sur l’énergie. Comme vous pouvez le constater, je suis tenace !
J’en reviens aux crédits dont nous débattons.
Quel est le lien entre la maquette budgétaire qui nous est présentée et la transformation de l’action publique décrite avec tant d’emphase ? En analysant cette maquette, j’ai eu l’impression de revivre la déception du comité Action publique 2022 : les discours ne se traduisent pas en actes.
Pendant plusieurs mois, les membres dudit comité ont conduit des auditions pour faire foisonner des idées et, ainsi, tenter de répondre à cet impératif de modernisation de l’action publique. Mais au nom de quelle logique les avoir fait travailler sur des sujets comme l’agriculture ou le logement, alors que le projet de loi ÉGALIM pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et pour une alimentation saine, durable et accessible à tous et le projet de loi ÉLAN portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique avaient déjà été rédigés par le Gouvernement ? Comment prétendre que vous respectez leur travail dès lors que vous refusez de leur laisser lire l’intégralité du rapport auquel ils étaient censés avoir contribué ? J’emploie sciemment cette expression, car les missions d’appui et la direction interministérielle de la transformation publique ont fini par prendre la plume, pour ne pas dire plus, au cours de la phase finale.
Je ne rappellerai ni les soubresauts qui ont marqué la publicité du rapport ni le fait que le président de la commission des finances de notre assemblée ait dû expressément en demander la communication. Là encore, où est la cohérence avec les propos tenus par le ministre Gérald Darmanin devant la commission des finances en septembre 2017 ? Il déclarait alors : « Le Président de la République et le Premier ministre vont lancer la revue de ces missions. Elle sera réalisée par un comité Action publique 2022 […]. Le Parlement se saisira de ce travail, et nous pourrons alors définir collectivement ce que sont les missions de l’État, ainsi que les moyens humains et les crédits budgétaires correspondants. » De toute évidence, nous n’avons pas la même définition du mot « collectivement »…
La transformation de l’action publique est la pierre angulaire de la stratégie budgétaire du quinquennat. Si les économies annoncées ne sont pas au rendez-vous, l’objectif de réduction du déficit structurel ne sera jamais atteint.
Le chemin à accomplir jusqu’en 2022 est encore long. La présentation du projet de loi de finances pour 2019 en énumère les premières étapes : réforme des aides personnelles au logement, réforme de l’audiovisuel public, réduction du nombre des contrats aidés, mise en place du nouveau service public de l’emploi, ou encore réorganisation des services de l’État et de ses opérateurs à l’étranger.
Il vous reste trois ans, trois ans seulement, pour réduire de 50 000 le nombre des emplois dans la fonction publique d’État, 2018 ayant été une année blanche en la matière. À première vue, les efforts réalisés en 2019 seront quatre fois plus importants, avec la suppression de 4 164 ETP. Mais ce satisfecit relatif ne tient pas longtemps. En effet, lorsque l’on y regarde de plus près et que l’on raisonne en équivalents temps plein travaillé, c’est-à-dire lorsque l’on considère ce qui pèse sur la masse salariale, le solde des plafonds d’emplois sur le périmètre de l’État et des opérateurs progresse de 1 322 ETPT.
Le chemin est encore long pour transformer notre pays ; c’est utile et nécessaire. Les événements des derniers jours nous rappellent que cette transformation ne pourra se faire sans concertation avec les corps intermédiaires et sans le maintien de services publics de proximité.