Intervention de Denis Morin

Commission des affaires sociales — Réunion du 12 décembre 2018 à 9h30
Rôle des centres hospitaliers universitaires dans l'offre de soins — Audition pour suite à donner à l'enquête de la cour des comptes

Denis Morin, président de la sixième chambre de la Cour des comptes :

Notre idée de départ était que l'instauration de réseaux de CHU dégagerait des têtes de réseaux et aboutirait à la suppression, par attrition progressive, de certains sites. Nous avons évolué et estimons désormais qu'il faudra laisser aux territoires la capacité de s'organiser. D'ailleurs, contrairement à ce que nous pensions, la coopération entre CHU devrait maintenir en activité les sites les plus fragilisés - comme ce fut le cas pour les CH au sein des GHT.

Je suis heureux que la tour de Caen soit enfin remplacée, et que vous construisiez aussi une nouvelle faculté - sans préjudice des coopérations entre Caen et Rouen.

Sans GHT, nous assisterons à la fermeture progressive des plateaux techniques de taille insuffisante. La coopération permet de maintenir une présence en faisant des GHT le lieu de la mutualisation et de l'organisation de consultations avancées dans les territoires. Même remarque sur les CHU : l'alternative à la mise en place de réseaux est l'attrition progressive de certains sites - telle qu'on la connaît déjà depuis vingt ans - et leur suppression.

L'approche fine de la gestion des établissements hospitaliers relève du Copermo, qu'il s'agisse de leur performance, de leur équilibre budgétaire ou des grands projets d'investissement, qui font l'objet, au-delà de 100 millions d'euros, d'une expertise et d'une contre-expertise.

Oui, les financements sont en tuyau d'orgue, ce qui freine les coopérations. La réforme annoncée dans le plan santé 2022 semble prometteuse, notamment le financement au parcours. Pour décloisonner, la signature de conventions précisant les relations financières entre les acteurs est aussi un outil utile. La réforme de la tarification devrait lever certains obstacles.

Le secteur privé représente près de 40 % de la prise en charge médicale, mais il est globalement méconnu par les ministères et les ARS. Le régulateur ne l'appréhende qu'à travers la discussion annuelle sur les tarifs, toujours conflictuelle, avec la fédération des cliniques et hôpitaux privés de France. Grâce à l'extension de compétences que le législateur nous a donnée, nous pourrons apporter des éléments d'information précis sur le fonctionnement de ce secteur. Nous avons prévu un référé pour donner à la ministre les premières conclusions des seize contrôles auxquels nous avons procédé. En tous cas, passer d'une situation concurrentielle à une situation de coopération n'est pas facile.

La prise en charge des personnes âgées dans les CHU souffre d'un effet d'éviction, qui ne résulte pas, toutefois, d'une politique d'adressage systématique. Les CHU évitent ces prises en charge pour ne pas alourdir leurs coûts, et laissent ces personnes aux CH, ce qui pose quelques problèmes. La médicalisation des Ehpad est encore devant nous...

Faire entrer les cliniques dans les GHT est possible. Déjà, certains blocs opératoires fonctionnent en partenariat public-privé, mais c'est encore rare.

Nous n'avons pas établi que l'évolution comparée des soins de villes et de ceux dispensés à l'hôpital traduise la mise en oeuvre du virage ambulatoire. La prise en charge ambulatoire à l'hôpital est plutôt une source de réduction des dépenses pour l'ensemble du système. Le virage ambulatoire a été bien pris en chirurgie, même dans les CHU. Carton rouge, en revanche, pour la médecine ambulatoire. Quant à la bascule de l'ensemble du système de l'hôpital vers la ville, elle tarde à se faire sentir, malgré quelques annonces. Un prochain rapport sur les urgences montrera même que le flux des entrées continue à s'y accroître.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion