Intervention de Cécile Cukierman

Réunion du 12 décembre 2018 à 14h30
Services environnementaux rendus par les agriculteurs — Rejet d'une proposition de résolution

Photo de Cécile CukiermanCécile Cukierman :

L’idée est séduisante, et le débat sur les PSE permet d’interroger la notion de bien commun, dans laquelle j’inclus bien évidemment l’environnement ; mais il soulève également des questions sur la notion de propriété foncière : quid de la transmission des contrats en cas de cession d’exploitation ? Bien plus, ce débat pose la question d’un réel accompagnement des agriculteurs dans la transition agroécologique.

Pour séduisants qu’ils soient, les PSE soulèvent des questions qui nous semblent occultées, en tout cas peu traitées, par la présente proposition de résolution. Ainsi, comment éviter les effets d’aubaine ou l’éco-opportunisme ? Les PSE ne sont intéressants que si tout risque de chantage environnemental – si vous ne me payez pas, je détruirai – est écarté et si tous les agriculteurs peuvent potentiellement en bénéficier.

De plus, comme le soulignent certains, la généralisation des PSE pourrait entraîner la disparition de pratiques désintéressées participant à la protection de la nature : dès lors qu’une rémunération peut être envisagée, pourquoi ne pas en profiter ? Peut-être aussi deviendrait-il de plus en plus difficile de mettre en place des normes environnementales, du fait, notamment, du principe de contractualisation, qui s’appliquerait au détriment des normes législatives.

Enfin, il faut être attentif à l’écueil consistant à voir dans la protection de l’environnement, à terme, l’unique justification de l’intervention publique en agriculture.

La correction des défaillances de marchés au fondement des crises économiques agricoles ne serait alors plus légitime, alors qu’elle justifie tout autant une intervention publique. Cette dernière action est d’autant plus nécessaire que les propositions aujourd’hui sur la table des négociations laissent présager une PAC beaucoup moins commune, dans laquelle les budgets seraient fortement réduits et on renoncerait à toute politique environnementale ambitieuse et globale.

Ces contrats PSE peuvent ainsi participer à une remise en cause de la vision publique de l’environnement et à la possibilité d’une privatisation – j’ose le mot – du droit de l’environnement.

Pour toutes ces raisons, la majorité des membres de notre groupe ne votera pas cette proposition de résolution, qui, sans garde-fou, risque de laisser de nombreux agriculteurs en dehors du dispositif.

Nous pensons qu’il faut développer une réflexion alternative, ainsi qu’il a été précédemment évoqué, notamment autour du concept de rémunération des externalités positives, qui prend en compte l’environnement, mais aussi les avantages sociaux, la dimension humaine, l’aménagement du territoire et, finalement, le lien entre territoires ruraux, pratiques agricoles et défis climatiques à venir.

Selon nous, le passage d’un modèle intensif à un modèle vertueux doit être largement soutenu. Pour autant, la majorité d’entre nous pensent que cela ne passe pas par le dispositif proposé, tel qu’il est aujourd’hui conçu. La plupart d’entre nous s’abstiendront donc sur cette proposition de résolution.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion