Ce qu’attendent les agriculteurs aujourd’hui, ce n’est pas une énième loi ou une énième résolution, surtout pas une résolution dont l’adoption, de l’aveu même de ses auteurs, aboutirait à une complexité dans les règles, alors que la complexité actuelle fait déjà boguer les ordinateurs du ministère de l’agriculture… C’est cette complexité qui est en cause !
À un moment, dans cet hémicycle, au ministère et dans les milieux environnementaux, il va falloir prendre le temps d’écouter un peu aussi les agriculteurs, de voir ceux qui font des efforts et ont acquis des connaissances environnementales depuis trente ans d’expérience, mais ne sont pas écoutés.
L’orateur précédent a parlé de l’avenir de la technique du couvert végétal. Les agriculteurs disent : oui, dans quatre, cinq ou dix ans, nous n’aurons peut-être plus besoin de pesticides, mais, aujourd’hui, si vous nous enlevez le glyphosate, c’est comme si vous enleviez le cuivre ou la chaux en agriculture biologique. Voilà la réalité, que les utopistes nient et ne veulent pas reconnaître !
Il faut simplifier véritablement les procédures. Robuchon le disait, le summum de la cuisine, c’est la simplicité du plat. Eh bien, je crois que le summum d’une réglementation environnementale pour l’agriculture, ce sera la simplicité des mesures appliquées, à rebours de la complexité que vous défendez tous, les uns et les autres. Pour ma part, je considère avec beaucoup de perplexité et de douleur la manière dont, dans les hémicycles, on s’acharne quelquefois à complexifier des lois qui, au départ, partent d’un bon état d’esprit, un état d’esprit simple.
Tout d’abord, les agriculteurs ont besoin de mesures rapides et efficaces qui leur permettent de travailler et de gagner leur vie. Là est l’urgence absolue. Prendre d’autres mesures est pris un peu comme une provocation.
Ensuite, ils sont d’accord pour une agriculture européenne qui applique ces mesures environnementales, en tirant toute l’agriculture européenne vers le haut et sans pénaliser l’agriculture française. Prendre des mesures franco-françaises et s’imaginer que nous pouvons laver plus blanc que blanc, que nous sommes les meilleurs au monde dans les lois, c’est une utopie qui condamne notre agriculture à disparaître.
C’est comme de s’imaginer qu’on peut avoir une agriculture pastorale avec un élevage de loups bien dressés pour venir manger les moutons tous les jours… On ne peut pas avoir la chèvre et le chou dans le même parc !
À cet égard, il faut prendre le temps d’écouter un minimum les agriculteurs qui s’investissent énormément, mais aussi un peu les scientifiques. J’ai eu l’occasion d’entendre des chercheurs de l’INRA, qui disent : « Pour les loups, vous êtes fous ! »
D’autres pays connaissent les loups et savent comment en avoir, y compris dans leur espace agricole, mais les méthodes à la française ne tiennent pas debout : regardez ce qui se passe dans les autres pays du monde, et vous verrez que des loups en nombre raisonnable peuvent vivre en même temps qu’une agriculture pastorale. En France, nous ne savons pas faire, parce que nous nous imaginons qu’il suffit de légiférer pour que tout aille bien.
Mes chers collègues, je vous suggère d’attendre pour cette révolution. Je proposerai à mes collègues du groupe Union Centriste de ne pas voter cette proposition de résolution, qui arrive trop tôt : réglons d’abord nos problèmes d’aujourd’hui, puis adoptons une résolution au moment de la réforme de la politique agricole commune ; battons-nous pour une agriculture européenne, mais ne sacrifions pas l’agriculture française au bénéfice de quelques idéologies !