Le sujet du recrutement est effectivement très important. À mon sens, et j’ai un peu d’expérience dans ce domaine, il nous faut changer nos approches. Aujourd’hui, malgré des changements en cours, les employeurs ont une approche trop « clonée », c’est-à-dire que, s’ils ne cherchent que des hommes entre 28 et 40 ans, qui ont le bon diplôme et la bonne expérience, sans handicap et qui n’habitent pas dans un quartier prioritaire de la ville, ils ne vont pas les trouver. C’est ce que je leur dis souvent. En revanche, s’ils s’ouvrent aux seniors, aux femmes, aux personnes en situation de handicap, aux réfugiés, aux habitants des quartiers prioritaires de la ville, et qu’on aide ces publics à accéder à l’emploi, alors, à ce moment-là, le vivier de ressources devient beaucoup plus grand.
Je crois que cette approche est très importante, même si elle ne permet pas de répondre à toutes les situations. J’étais voilà quelques semaines à Poitiers dans une entreprise qui a accueilli des réfugiés formés dans le cadre d’un de nos programmes, avec un taux de succès à 100 %. Les dirigeants, ravis d’avoir trouvé des gens motivés, formés, ont changé leur manière de recruter.
C’est pareil pour les jeunes et pour les habitants des quartiers prioritaires de la ville. L’expérimentation « emplois francs », qui a mis quelques mois à bien prendre son envol, est en phase d’accélération. En la matière, il faut passer outre les préjugés et les stéréotypes, qui s’apparentent parfois à de la discrimination.
Cela fait partie aussi de notre stratégie de lutte contre le chômage. Il y a des représentations erronées des métiers et de l’emploi du côté des demandeurs d’emploi, mais il y a aussi des représentations erronées des demandeurs d’emploi du côté des recruteurs.
Cette approche est d’autant plus importante que tout le monde va évoluer dans ces métiers. On a testé chez Pôle emploi un type de recrutement où l’on s’intéresse non pas aux CV ou aux diplômes, mais aux compétences. Je puis vous dire que les succès sont remarquables, car cela permet aux demandeurs d’emploi de découvrir qu’ils ont des compétences et de les formaliser. Du côté des employeurs, les taux de réussite sont très importants.
En résumé, il faut aussi que nous changions les mentalités, ce que j’ose appeler le logiciel de recrutement.
Sur la question européenne – c’est un des volets de la réforme de l’apprentissage –, nous allons mettre tous les moyens pour développer l’Erasmus de l’apprentissage. Nous avons déverrouillé grâce à la loi tout ce qui empêchait de le faire. Cela fera partie de l’attractivité de l’apprentissage. Nos apprentis, comme nos étudiants, doivent pouvoir s’ouvrir à d’autres pays, apprendre d’autres techniques et découvrir d’autres cultures.