Intervention de Véronique Guillotin

Réunion du 17 décembre 2018 à 15h00
Convention fiscale avec le grand-duché de luxembourg — Adoption d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Véronique GuillotinVéronique Guillotin :

D’autre part, comment parler de cette convention sans évoquer ses effets sur la vie quotidienne des hommes et des femmes concernés ?

Malgré tous ses apports positifs, elle comporte un angle mort, sur lequel je tiens à attirer votre attention : il s’agit de la situation des travailleurs frontaliers résidant en France.

Ces travailleurs sont en effet prélevés à la source au Luxembourg, mais doivent tout de même effectuer une déclaration de revenus à l’administration française. Pour éviter une double imposition, il est prévu de faire bénéficier ces contribuables d’un crédit d’impôt calculé en fonction de ce qu’ils ont déjà payé à l’administration fiscale luxembourgeoise. Or ce crédit d’impôt ne sera pas calculé de la même façon selon leur situation, qu’il s’agisse de la structure de leurs revenus ou de leur situation familiale.

Le contribuable résidant en France sera soumis au taux d’imposition le plus élevé entre les deux États, sans compter la charge administrative supplémentaire que cela représente.

D’une manière générale, les frontaliers français risquent – je reste prudente – de se retrouver dans une situation inégale par rapport à leurs collègues belges ou allemands, avec un système moins avantageux en matière d’imposition. Ce point aurait mérité une étude d’impact bien plus aboutie.

Je veux également évoquer, à l’occasion de l’examen de cette convention, les nécessaires coopérations à renforcer. Être voisin du Luxembourg est, je le répète, une opportunité, une véritable chance, car, 90 000 habitants du Grand Est, principalement du Nord lorrain, y travaillent chaque jour, et la dynamique se poursuit. En conséquence, 12 000 voyageurs empruntent quotidiennement la ligne de train express régional Nancy-Luxembourg, et des dizaines de milliers de véhicules circulent sur l’autoroute A31 et sur l’ensemble des routes secondaires. Chaque jour qui passe, trente et un frontaliers supplémentaires franchissent la frontière, soit presque autant de voitures supplémentaires sur nos routes.

Toutefois, les enjeux transfrontaliers dépassent largement la seule question de la mobilité, j’ai eu l’occasion de l’évoquer lors d’une question au Gouvernement, le 13 mars dernier, en marge de la visite d’État du Grand-Duc de Luxembourg en France.

Ainsi, si l’équilibre général de la convention doit être salué et soutenu, de même que les stipulations relatives aux frontaliers souhaitant faire du télétravail, ce traité ne règle pas tout du point de vue du différentiel fiscal, et il ne saurait se passer, sur ce sujet, des avancées attendues du droit européen.

La grande majorité du groupe du RDSE votera pour l’approbation de cette convention, mais regrette que les incidences de ce texte n’aient pas été suffisamment évaluées. J’appelle en outre l’attention du Gouvernement sur la nécessité de ne pas laisser retomber le soufflé en matière de coopération transfrontalière, à la suite de la visite d’État de mars dernier, mais au contraire d’intensifier ces coopérations, en encourageant l’expérimentation et la créativité avec, comme objectif, la coconstruction d’un espace transfrontalier dynamique et surtout équilibré, où chacun gagne à faire avancer l’autre.

En effet, nous avons des intérêts communs et complémentaires sur de nombreux sujets, comme la mobilité, la santé, la formation, ou encore l’enseignement supérieur, autant de projets à coconstruire pour une Europe qui facilite la vie quotidienne de nos concitoyens.

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