Intervention de Colette Mélot

Réunion du 17 décembre 2018 à 15h00
Convention fiscale avec le grand-duché de luxembourg — Adoption d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Colette MélotColette Mélot :

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la convention fiscale que nous examinons aujourd’hui suscite beaucoup de phantasmes, à mon avis injustifiés.

On comprend aisément pourquoi : le Luxembourg est depuis de nombreuses années au cœur de scandales financiers et fiscaux, dont celui des LuxLeaks est le dernier exemple. Il est vrai que le Luxembourg a longtemps été l’un des mauvais élèves de l’OCDE en matière fiscale. Le Forum mondial sur la transparence et l’échange de renseignements a, par exemple, estimé jusqu’en 2015 que ses pratiques n’étaient pas conformes aux standards internationaux.

La situation est en train d’évoluer, dans le bon sens. Le Luxembourg figure désormais parmi les pays qui ont adopté la nouvelle norme commune d’échange automatique de l’OCDE. Les premiers échanges de renseignements concernant les données financières ont été effectifs cette année, ce qui était inconcevable il y a encore trois ans. Le Luxembourg a changé de pratiques, car le monde change de pratiques…

L’OCDE, sous l’impulsion du Français Pascal Saint-Amans, a réalisé un travail phénoménal pour lutter contre l’érosion des bases taxables dans le monde. La Haute Assemblée a ainsi examiné, voilà quelques semaines, le projet de loi autorisant la ratification de la convention multilatérale de l’OCDE. Cet objet juridique unique, signé le 7 juin 2017 à Paris, permet de modifier d’un seul tenant des dizaines de conventions bilatérales pour lutter contre les pratiques dommageables et les paradis fiscaux ; c’est une avancée considérable, que la France a soutenue.

Toutefois, ce n’est pas suffisant. Le champ de cet accord multilatéral ne couvre qu’un nombre limité de clauses des conventions fiscales bilatérales. Autrement dit, la seule application de cette convention multilatérale ne suffisait pas à assurer un respect intégral des normes internationales. D’où la nécessité de moderniser la convention de 1958, qui ne correspond plus au contexte normatif et économique d’aujourd’hui.

La présente convention traduit ainsi des avancées majeures pour adapter notre relation avec le Luxembourg. Elle permet notamment d’introduire une clause anti-abus générale contre les montages ayant un objet principalement fiscal, une définition plus précise de la résidence fiscale, visant à prévenir les situations abusives, de nouvelles règles de définition de l’établissement stable d’entreprise et, bien évidemment, une définition des dividendes permettant d’établir un régime plus clair et plus robuste d’imposition croisée.

Nous saluons en outre le fait que cette convention prend mieux en compte la situation des nombreux travailleurs frontaliers. Elle va donc dans le bon sens ; elle était nécessaire et le groupe Les Indépendants – République et Territoires votera en faveur de ce projet de loi d’approbation.

Toutefois, elle n’est pas suffisante pour régler la situation de compétition fiscale qui mine la solidarité en Europe. Les régimes fiscaux applicables aux entreprises et aux particuliers sont encore trop divers. Cela entraîne une course au moins-disant fiscal, qui sape les recettes des États et affaiblit donc leur capacité à agir pour les citoyens.

Cette concurrence doit cesser. L’Union européenne doit agir pour harmoniser la fiscalité entre les États membres. Nous soutenons le projet d’assiette commune consolidée pour l’impôt des sociétés, ou projet ACCIS, qui permettra d’avancer dans cette direction. Nous soutenons également le projet de la France de mieux taxer les géants du numérique. C’est une nécessité absolue.

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