Intervention de Bruno Coquet

Délégation aux entreprises — Réunion du 13 décembre 2018 à 9h00
Impact de l'éventuelle instauration d'un bonus-malus sur les contributions patronales à l'assurance chômage — Présentation par l'observatoire français des conjonctures économiques de l'étude demandée par la délégation aux entreprises

Bruno Coquet, chercheur affilié à l'OFCE :

On dit parfois de l'assurance chômage qu'elle est « généreuse » - le terme est impropre, mais passons - en arguant d'exemples comme celui que vous venez de donner. Or, formellement, il est impossible de toucher 28 mois d'indemnisation en ayant travaillé 4 mois. Le système est parfaitement contributif : 4 mois de travail ouvrent 4 mois de droits potentiels. En moyenne, la durée d'emploi des chômeurs entrant dans le système est de 16 mois, donnant droit, donc, à 16 mois d'indemnisation potentielle, consommés à 60 % environ.

Vous avez raison sur un point : certaines règles font qu'on peut durablement alterner emploi et chômage, au-delà même, en théorie, de 28 mois. En pratique, nous ignorons qui se trouve dans cette situation : ce chômeur-là, nous ne l'avons jamais vu. Mais les deux règles que j'ai évoquées tout à l'heure, salaire de référence et taux de remplacement, rendent bel et bien possible le genre de cas que vous avez cité.

Le salaire de référence est calculé sur la base de la rémunération journalière, qui est multipliée par trente : l'assurance ne remplace donc pas les revenus effectivement touchés sur un mois. Autrement dit, il peut exister un bonus à l'entrée au chômage en cas d'interruptions de travail durant la période de référence. Par ailleurs, et pour des raisons historiques, le taux de remplacement est plus élevé pour les bas salaires que pour les hauts salaires. Le taux « normal » est de 57 % ; mais les chômeurs dont le salaire était inférieur à 1 000 euros bénéficient d'un taux de remplacement qui peut aller jusqu'à 75 %. Encore faut-il ajouter que, les cotisations n'étant pas de même niveau sur les allocations et sur les salaires, il faut faire le calcul sur le net, et non sur le brut. Conclusion : pour un salarié dont le salaire journalier de référence est à peu près au niveau du SMIC, le taux de remplacement net est de l'ordre de 80 % de l'ancien salaire.

A contrario, la suppression brutale de ces règles, qui engendrerait certes d'importantes économies, ferait beaucoup de dégâts : les personnes concernées deviendraient pauvres.

Il faut malgré tout définir une trajectoire permettant, progressivement, de défaire ces incitations à l'usage de contrats courts.

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