Intervention de Catherine Conconne

Réunion du 18 décembre 2018 à 14h30
Sortie de l'indivision successorale et politique du logement en outre-mer — Discussion en deuxième lecture d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Catherine ConconneCatherine Conconne :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je suis particulièrement heureuse aujourd’hui, à plusieurs titres. Nous vivons en effet l’aboutissement d’une démarche législative entamée il y a plusieurs mois et qui devrait connaître – je le souhaite ardemment ! – une issue heureuse au Sénat ce soir.

Je suis heureuse, aussi, de contribuer, comme nous le commande une si particulière situation, à sortir de l’éternel constat des problèmes ; heureuse d’apporter ma pierre, notre pierre, celle du Sénat, à l’initiative législative du président du mouvement auquel j’appartiens, non sans fierté : le parti progressiste martiniquais.

En effet, le député Serge Letchimy, après près de trente ans de pratique politique très en phase avec son pays et son peuple, apporte une fois de plus la preuve, avec ce texte, de sa volonté de faire.

Il faut de la volonté concrète, au quotidien, pour défier la fatalité de la difficulté ; oui, il faut de la volonté pour sortir des verbiages chroniques, des « y a qu’à » et des « faut qu’on » ! Le poète nous le rappelle : « Seul le dur est arable. »

La réalité est là : notre histoire jeune et tourmentée n’a pas rimé, jusqu’à présent, avec une approche apaisée de la propriété. Liberté, égalité, fraternité, certes, mais cette belle devise républicaine n’a pas toujours trouvé facilement un écho sous nos cieux. Point n’est besoin de vous rappeler ce qui a fait, et ce qui fait encore, notre histoire…

Cette loi devient donc un bel outil au service de ce vœu vertueux pour nos peuples. Grâce à elle, pourra se dénouer la pelote emmêlée des fils, pas toujours très soyeux, d’une jeune humanité.

Je suis heureuse de voir que la demande d’un particularisme positif trouve un écho auprès du Gouvernement et je vous remercie, madame la ministre, d’avoir pris toute votre part dans ce processus et d’avoir ainsi contribué à faciliter l’éclosion de ce texte.

Oui, il fallait accepter l’exception, l’expérimentation spécifique, le cousu main, à propos d’une problématique présente là-bas et nulle part ailleurs. C’est, à mes yeux, le signe d’une ère révolutionnaire qui s’ouvre. Le besoin de particularité n’a pas toujours été sans embûches pour nous, voire sans sacrifice de vies humaines.

C’est ainsi, grâce à vos votes que je souhaite unanimes, que, pendant une période de dix ans, une boîte à outils sera mise à la disposition d’indivisaires qui l’ont été trop longtemps, de praticiens du droit – notaires ou avocats – impuissants, mais aussi d’édiles. Certains maires ont en effet déploré durant des années que des dizaines et des dizaines de maisons et de terrains soient livrés à la vindicte de la nature, de l’insalubrité et d’autres désordres. Nos villes souffrent de cette insoutenable médiocrité urbaine face à laquelle elles se sentent démunies.

Cette proposition de loi est tellement légitime, tellement juste et tellement symbolique, dans la République ; celle-ci se veut une et indivisible, mais elle peut reconnaître que l’adaptation à une situation spécifique n’est pas automatiquement synonyme de rupture ! L’État de droit, avec lequel nous souhaitons cheminer, accepte donc cette évolution. Je forme le vœu que beaucoup d’autres exceptions soient rendues possibles, maintenant, sans que leurs bénéficiaires quittent pour autant la République.

Enfin, je veux partager avec vous un dernier bonheur : nous faisons la démonstration que le Sénat n’est pas ce truc inutile et sans intérêt dont on a tellement entendu parler en ces temps agités, non sans caricature ou mépris. La suppression du Sénat ou sa réduction à sa plus simple expression ont fait l’objet d’insoutenables clameurs.

Cette loi, pourtant, a été enrichie par le Sénat, son auteur, Serge Letchimy le répète sans complexe et en toute sincérité, au point qu’elle a été adoptée par l’Assemblée nationale à l’unanimité dans la forme issue de nos travaux. Nous avons fait la démonstration, au contraire de la légende, que notre chambre est légitime et contribue au débat démocratique, à l’équilibre et à la diversité des pouvoirs et de la représentation populaire.

Cette loi est attendue, tant les cas douloureux, parfois dramatiques, sont nombreux ; tout le monde piaffe d’impatience.

J’en appelle donc, mes chers collègues, à votre confiance, dans laquelle nous puiserons la détermination nécessaire pour donner naissance à une vraie dynamique de renouvellement urbain.

Je conclus en vous remerciant, madame la ministre, et en remerciant mon vieil ami, mon frère de Mayotte, M. le vice-président du Sénat et rapporteur de ce texte, Thani Mohamed Soilihi, de ses nombreux apports judicieux !

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