Encore faut-il, pour qu'ils puissent intervenir, que les ministres soient saisis. Tel n'a pas été le cas.
Lorsque vous présentez un passeport diplomatique à l'aubette du contrôle de la police aux frontières, l'application Covadis (contrôle et vérification automatiques des documents sécurisés) reconnaît votre nom et deux bases sont interrogées : le fichier des personnes recherchées et le fichier SLTD (Stolen and Lost Travel Documents), lui-même relié à un troisième fichier, le FOVeS (fichier des objets et des véhicules signalés), qui recense les passeports volés ou perdus. Mais ce dispositif ne fonctionne pas pour les passeports invalidés. Le cas d'invalidation n'existe tout simplement pas, aujourd'hui, dans notre système numérique.
Je sais parfaitement, au nom du ministère de l'intérieur, émettre une information sur un titre émis par ledit ministère, ce qui n'est pas le cas pour les passeports diplomatiques. Notre système numérique est très efficace concernant l'ensemble des passeports émis par le ministère de l'intérieur ; en revanche, pour les passeports diplomatiques, qui, de surcroît, ne sont pas biométriques, il est impossible d'interdire leur utilisation.
Un signalement personnel serait possible, mais illégal. Jusqu'à nouvel ordre, en effet, M. Benalla n'a pas été condamné et aucune interdiction de sortie du territoire n'a été prononcée. La PAF n'est pas en mesure de décider qui peut ou non sortir du territoire national. Et lorsque le ministère des affaires étrangères émet un passeport diplomatique, nous n'en sommes pas informés, de même que nous ne sommes pas informés lorsqu'un passeport diplomatique perd sa vocation à être utilisé parce que son détenteur perd la fonction qui en avait justifié la délivrance.
Autrement dit, le ministère de l'intérieur assume l'émission et la gestion de quatre types de passeports, dont le suivi est possible. En revanche, une telle information n'est pas disponible pour les passeports diplomatiques, dont la « désactivation » avant expiration est impossible. À défaut de réquisition judiciaire, le ministère de l'intérieur n'est donc pas en mesure d'interdire leur utilisation.
Nous avons donc un problème technique. Le dispositif actuel remonte à un décret de 2005 ; il ne couvre pas le cas d'un passeport diplomatique qui n'aurait pas été perdu ou volé, qui n'aurait donc fait l'objet d'aucune déclaration devant la police, mais dont le motif d'émission serait caduc : s'il perd sa fonction, nous ne pouvons tout simplement pas le savoir. Ce constat est assez récent ; c'est la première fois que la question se pose dans les relations entre les deux ministères. Nous avons donc décidé, avec Jean-Yves Le Drian, qu'un groupe de travail serait mis en place pour réfléchir à l'élaboration rapide de solutions techniques.