Intervention de Christophe Castaner

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 16 janvier 2019 à 9h00
Dépouillement des scrutins sur les propositions de nomination par le président de la république de m. yves saint-geours et mme sandrine clavel aux fonctions de membre du conseil supérieur de la magistrature

Christophe Castaner , ministre :

Monsieur le président, même si vous avez retiré votre question, je souhaite revenir sur l'utilisation de l'article 40 du code de procédure pénale : il ne peut être question de mettre en oeuvre cette procédure si vous n'avez aucun doute sur la validité du document qui vous a été transmis ! Le fonctionnaire qui a instruit ce dossier l'a donc fait correctement.

En ce qui concerne le rôle de M. Benalla quand il était collaborateur à la présidence de la République, monsieur le sénateur Grosdidier, je ne suis ministre de l'intérieur que depuis trois mois et je n'ai jamais eu connaissance, depuis lors, d'une quelconque activité ou d'un quelconque rapport.

Le 8 décembre, nous avons effectivement changé la doctrine d'emploi des forces de l'ordre, j'ai d'ailleurs eu l'occasion d'évoquer ce sujet devant votre commission. Ni mes collaborateurs, ni le secrétaire d'État Laurent Nunez, ni moi-même n'avons échangé avec M. Benalla sur cette question.

Concernant la décision de la préfecture de police d'accorder un permis de port d'arme, il n'est pas nécessaire de rappeler que le ministère de l'intérieur avait été sollicité en ce sens plusieurs fois par M. Benalla au long de sa - jeune - carrière et que le ministère, sous des ministres différents, avait systématiquement refusé. Le préfet de police a-t-il bien fait de délivrer ce permis de port d'arme ? J'ai en tête les propos que le préfet de police lui-même a tenus devant vous : il vous avait indiqué que cette décision prêtait à interrogation. D'ailleurs, il l'a abrogée dans la foulée, en considérant que cet acte était irrégulier, et je vous confirme les propos du préfet de police. Cette décision de retrait a été prise avant mon entrée en fonction, elle me suffit et je n'ai pas regardé le dossier depuis lors.

En ce qui concerne les passeports diplomatiques, je vous ai dit que nous n'en avons pas connaissance quand ils sont utilisés. Heureusement ! Monsieur le sénateur Leconte, les policiers qui voient passer un individu, même s'il est connu, ne font pas remonter l'information au ministère de l'intérieur. Les policiers travaillent dans un cadre procédural précis et agissent en cas d'alerte, par exemple si la personne qui tente de passer la frontière est inscrite au fichier des personnes recherchées. Si M. Benalla avait été inscrit dans un fichier ou interdit de sortir du territoire, ce qui n'est pas le cas, le ministère en aurait été averti.

En pratique, M. Benalla avait un document qui restait légal, mais qu'il n'avait plus le droit d'utiliser. Je rappelle d'ailleurs à l'ensemble des personnes qui sont détentrices d'un passeport diplomatique qu'elles doivent le rendre, lorsque le motif qui a permis sa délivrance n'est plus valide. En tant que ministre, j'ai été doté d'un passeport diplomatique et j'ai signé un papier dans lequel je m'engageais à le restituer. Vous voyez bien la difficulté : le document conserve un caractère légal, en particulier pour l'agent qui le contrôle, mais son détenteur n'a plus le droit de l'utiliser.

M. Benalla n'était pas sous surveillance, il s'est déplacé, il est libre de le faire et le ministère de l'intérieur n'a pas vocation à enregistrer ses sorties du territoire et à en faire état au ministre !

Les passeports diplomatiques ont-ils une sécurité suffisante ? Je laisserai Jean-Yves Le Drian vous répondre sur ce point, mais il est vrai que nombre de ces passeports ne sont pas biométriques et nous devons effectivement renforcer leur sécurité. Pour autant, les raisons de délivrance d'un passeport diplomatique sont limitées et il me semble que les risques qu'une personne qui en détient un commette un acte terroriste sont faibles.

Y a-t-il eu un échange de messages entre M. Macron et M. Benalla ? Je n'en sais strictement rien, madame la sénatrice Benbassa, et je n'ai pas vocation à le savoir ! J'ai lu dans la presse un certain nombre de choses, comme vous. On dit souvent que le ministre de l'intérieur est le « premier flic de France » et qu'il est très bien informé, mais vous n'imaginez pas le nombre d'informations dont il ne dispose pas...

En ce qui concerne la question de M. le sénateur Kerrouche, le ministère a eu le 8 novembre, je l'ai dit tout à l'heure, une liste de vingt-cinq références de passeports diplomatiques, dont deux concernaient M. Benalla, et les échanges entre nos ministères ont alors commencé.

Je n'ai pas connaissance de l'information selon laquelle la PAF aurait fait un rapport sur un déplacement de M. Benalla à Londres. Je n'ai reçu aucune précision à ce sujet le concernant. En revanche, j'aurais eu une telle information si M. Benalla avait été accompagné d'une personne inscrite dans l'un des fichiers qui sont consultés au moment d'un passage de frontière. Je crois avoir lu des éléments à ce sujet dans la presse, mais je ne veux pas me prononcer, parce que je n'ai pas davantage d'informations que cet article.

Si une personne est inscrite dans un fichier du type fichier S, une alerte apparaît au moment du contrôle du passage de la frontière et l'information remonte, uniquement dans ce cadre, au ministère, en tout cas pas au ministre. Nous avons donc un dispositif sécurisé en cas d'alarme, mais nous avons aussi une fragilité fonctionnelle sur les passeports diplomatiques qu'il nous faudra résoudre.

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