Intervention de Michel Sappin

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 23 janvier 2019 à 8h30
Audition de M. Michel Sappin candidat proposé par le président du sénat aux fonctions de membre de la commission indépendante prévue à l'article 25 de la constitution et chargée de se prononcer par un avis public sur les projets de texte et propositions de loi délimitant les circonscriptions pour l'élection des députés et la répartition des sièges de députés ou de sénateurs

Michel Sappin, candidat proposé par le Président du Sénat aux fonctions de membre de la commission indépendante prévue à l'article 25 de la Constitution :

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le grand oral que je passe devant vous ce matin me rappelle de très bons souvenirs...

J'ai été à la fois heureux et surpris d'apprendre que le président Gérard Larcher ait pensé à moi pour remplir la fonction de membre de la commission indépendante prévue à l'article 25 de la Constitution. En effet, les quatre autres membres déjà nommés, notamment M. Christian Vigouroux, sont de grands juristes - des professeurs de droit émérites, des hauts magistrats -, contrairement à moi. En discutant avec le président Gérard Larcher, j'ai vite compris que le choix d'un homme de terrain, proche des réalités profondes de nos territoires, correspondait un peu à l'art du contre-pied qu'il manie parfois. Il m'a expliqué que le profil d'un préfet ayant pas mal « bourlingué » sur le territoire pouvait être intéressant. Peut-être a-t-il aussi été intéressé par le caractère trempé qui est le mien et que je revendique pleinement, car il faut pouvoir défendre et attaquer, ce que je ferai sans hésiter.

Quel est mon parcours ?

J'ai travaillé dans trois ministères : j'ai passé sept ans au ministère de l'équipement, six ans au ministère de l'éducation nationale et le reste de ma carrière au ministère de l'intérieur où j'ai été à la fois sous-directeur, directeur de la défense et de la sécurité civile, sous-préfet de l'arrondissement de Vendôme dans le Loir-et-Cher, secrétaire général de préfecture, sous-préfet d'Orléans, préfet délégué pour la sécurité et la défense à Marseille, préfet du Lot, préfet de la Seine-Saint-Denis, préfet de la région Picardie, préfet de la Somme, préfet de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur (PACA) et j'ai terminé ma carrière comme chef de l'Inspection générale de l'administration (IGA), que j'ai dirigée pendant deux ans et demi, avant de prendre ma retraite voilà quelques années.

Je suis toujours au plus proche du terrain, puisque j'exerce aujourd'hui les fonctions de médiateur de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur. En étroite relation avec les élus et les administrés, j'essaie de régler les problèmes des uns et des autres dans leurs relations avec les services de la région. À cet égard, seules la région d'Île-de-France et la région PACA ont un médiateur. Une sénatrice de la Gironde a d'ailleurs déposé une proposition de loi visant à étendre la fonction de médiateur à certaines collectivités territoriales.

Dans le cadre de mes fonctions, j'ai également été chef de cabinet, conseiller technique et directeur adjoint de cabinet du ministre de l'intérieur. Au vu de mon parcours, c'est sans doute ma vision assez large de ce qui se passe sur notre territoire qui a intéressé le président Gérard Larcher.

Cette présence sur le territoire m'a également permis de mieux appréhender le rôle des élus. À peine arrivé depuis deux jours à Vendôme, j'ai dû avertir en pleine nuit, avec le maire d'une petite commune proche, une famille du décès accidentel de deux de ses enfants. J'ai alors pris conscience qu'un maire est au plus proche des réalités, les plus heureuses comme les plus malheureuses. De même, dans le cadre de mes fonctions de directeur de la défense et de la sécurité civile, j'ai dû gérer un certain nombre de catastrophes, en lien avec les élus de terrain, qu'il s'agisse des inondations, des feux de forêt ou de l'explosion de l'usine AZF.

En tant que sénateurs, je vous sais proches des maires, qui participent d'ailleurs à votre élection. Je fais souvent une comparaison avec les préfets : les préfets le deviennent après avoir longtemps été sous-préfets, sauf exception ; votre parcours d'élu de terrain vous conduit souvent à devenir sénateur après avoir exercé un mandat local.

Cette vision du Sénat, que j'ai évoquée avec le président Philippe Bas, doit transparaître dans les projets de réforme des cartes électorales pour ce qui concerne tant les députés que les sénateurs. Pour avoir participé, en 2009, au redécoupage des circonscriptions législatives dans les Bouches-du-Rhône, je sais combien ce travail est difficile. Au-delà des textes qui imposent un certain nombre de règles, c'est aussi un véritable sujet de cohérence des territoires. Cette dimension est plus forte encore pour le Sénat : un sénateur dans un département comme celui des Alpes-de-Haute-Provence, des Hautes-Alpes ou du Lot a évidemment un rôle considérable sur le terrain. Pour nombre de maires, le sénateur a, avec le préfet d'ailleurs, un rôle de garant, il est celui qui peut à la fois donner des conseils, aider et assister. Je défendrai ardemment ce rôle des sénateurs au sein de la commission indépendante prévue à l'article 25 de la Constitution.

Le Sénat, c'est la chambre des sages, celle des territoires, une chambre qui recèle beaucoup de compétences et suscite beaucoup d'attentes : où que j'aie exercé, y compris dans un territoire comme la Seine-Saint-Denis, les maires m'ont toujours parlé de leurs sénateurs avec une considération différente de celle qu'ils pouvaient exprimer pour les députés. On peut devenir député parfois un peu par hasard - pour le dire un peu crûment, on le voit d'ailleurs particulièrement en ce moment ! -, mais on ne devient pas sénateur par hasard.

Cette vision que je peux avoir de votre assemblée et de votre mission guidera mon action si j'intègre la commission indépendante et je ferai tout pour la défendre.

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