Intervention de Stéphane Bern

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 30 janvier 2019 à 14h10
Audition de M. Stéphane Bern sur le bilan de la mission sur le patrimoine confiée par le président de la république

Stéphane Bern :

Je partage tout à fait votre opinion quant au rôle des assemblées territoriales. Il faut qu'on revienne vers le local. D'ailleurs, le but de ma mission était de réconcilier les Français avec leur ruralité ; il ne faut pas oublier que la moitié du patrimoine se situe dans des communes de moins de 2 000 habitants. C'est ce qui fait vivre des villages entiers, avec l'ouverture d'une auberge et de commerces autour de ce monument. Les assemblées territoriales ont donc leur rôle à jouer en nous aidant à convaincre les maires de l'importance de valoriser le patrimoine de leurs communes. C'est la raison pour laquelle je me suis opposé à certaines dispositions de la loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (ELAN) qui s'en remettait au « bon goût » du maire. Il est trop facile de dire « le monument était vétuste, il a fallu le détruire ». Habiter dans un immeuble historique rénové, cela ne doit pas être réservé aux « bobos ». C'est ce message que doivent passer les assemblées territoriales aux maires : les lotissements, c'est bien, mais il faut également préserver vos centres-villes et vos centres-bourgs. Cela signifie aussi leur apporter l'aide administrative dont ils ont besoin pour monter les dossiers de subvention.

En ce qui concerne la subvention au mobilier, il revient plutôt à l'État d'assurer la sauvegarde des biens mobiliers. Toutefois, je souhaiterais attirer votre attention sur ce que je considère comme une anomalie. En France, les oeuvres d'art sont exonérées de toute taxe, mais on ne tient pas compte de leur environnement. Or, les oeuvres d'art sont souvent exposées dans des châteaux, qui ne bénéficient d'aucune exonération. Ce n'est pas un hasard si la France est le pays d'Europe où il y a le plus de châteaux à vendre. Les familles n'arrivent plus à les entretenir. Il y aurait donc des dispositions à prendre - exonération de droits de succession et de taxe d'habitation - au bénéfice de certains patrimoines. Bien sûr, il faudrait fixer des critères, telles que l'ouverture au public ou la présence en zone rurale, afin d'éviter que les propriétaires d'hôtels particuliers parisiens bénéficient également de ce dispositif. Mais une telle disposition permettrait de faciliter l'entretien de notre patrimoine national. Il revient à l'État d'assurer l'entretien du patrimoine. Comme il n'y parvient pas, il fait porter cette charge sur les familles et cette exonération est en quelque sorte une compensation de la part de l'État de ne pas assurer son rôle.

Il me semble également qu'il faudrait davantage se tourner vers les présidents des entreprises de taille intermédiaire. Non seulement ils ont de l'argent, mais en outre ils ont ce sens de la transmission. Ils seraient donc prêts à faire plus pour le patrimoine.

En ce qui concerne le comité de sélection qui se tiendra en 2019, la plateforme internet est déjà ouverte sur laquelle peuvent être déposées toutes les candidatures. Ensuite, une première sélection sera réalisée par les DRAC et le ministre de la culture puis transmise pour examen au comité de sélection. Celui-ci est composé du ministre de la culture, du directeur général du patrimoine, du président de la fondation du patrimoine, de sa directrice générale et de la Française des jeux. La Monnaie de Paris pourrait également en faire partie. En effet, celle-ci m'avait demandé de créer une collection de pièces de monnaie qui rappelle les grandes dates de l'histoire de France. Au dos de ces « pièces d'histoire », il a été prévu de mettre en valeur le patrimoine numismatique de la Monnaie de Paris (sesterces, louis, etc). En contrepartie de ma collaboration, j'ai demandé à ce que pour la vente de toute pièce, un euro soit reversé au profit de la mission sur le patrimoine, ce qui permettrait de récolter près d'un million d'euros.

Le comité de sélection devrait se réunir fin février, puis présenter les dossiers qu'il a retenus au Président de la République. Je tiens à souligner que la procédure de sélection est très rigoureuse : chaque monument fait l'objet d'une fiche dans laquelle sont décrits son état de péril ainsi que les besoins de financement. Par conséquent, la sélection est toujours très consensuelle.

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