Intervention de Marie-Christine Saragosse

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 31 janvier 2019 à 10h00
Audiovisuel extérieur en europe — Audition conjointe de Mme Marie-Christine Saragosse présidente de france médias monde et M. Peter Limbourg directeur général de la chaîne de télévision internationale allemande deutsche welle

Marie-Christine Saragosse, présidente de France Médias Monde :

Il m'est difficile de vous répondre sur la part que nous consacrons au numérique. On intègre le numérique dans la conception des émissions. Les rédactions dédiées, qui ne font que du numérique, doivent représenter 20 % de nos programmes en coûts directs.

Le numérique n'évolue pas au même rythme dans tous les pays. En Afrique, nous passons par les ondes courtes, sinon nous ne touchons pas certains territoires qui représentent de gros volumes d'audience. Dans le même temps, nous utilisons des OTT (over-the-top television) et les dernières technologies.

J'ai parlé de guerre froide des médias, car il y a toujours eu des pays dans lesquels nous sommes interdits de diffusion, coupés ou brouillés. Parfois, nos correspondants se voient retirer leur accréditation. Nous sommes complétement interdits en Chine. On nous répond que TV5 Monde est déjà présente, mais c'est une chaîne généraliste multilatérale francophone, dont la mission est différente de la nôtre. BBC World y est en revanche présente.

Quant aux réseaux sociaux, ce sont des lieux d'attaque, de mensonge parfois. Dans certains pays - en Afrique - certains sites font de la titrologie et ne donnent plus que les titres, qui sont mensongers ; les gens ne lisent plus les articles. Nous sommes très souvent attaqués sur les réseaux sociaux, quand nos correspondants ne sont pas mis en prison, comme cela est arrivé à Amhed Abba, détenu deux ans et demi. Cela continue en Amérique latine. Selon Reporters sans frontières, 80 journalistes sont morts l'année dernière ; les auteurs de ces crimes restent impunis. Seuls 7 % des cas sont résolus. C'est de cette guerre de tranchées, de manipulation, dont je parle. Il est difficile de démentir de fausses informations, le mal est très vite fait.

Concernant les agences de presse, je dois tenir compte du fait que je suis administratrice de l'AFP et que je ne peux pas nuire à ses intérêts. L'AFP est une magnifique agence, la seule agence européenne à vocation mondiale. France Médias Monde est parmi les premiers clients de l'AFP ; nous lui achetons énormément de productions.

L'AFP a une stratégie de montée en puissance de l'image, de la vidéo et de la photo, mais aussi une stratégie internationale. L'Agence doit se réinventer compte tenu de la baisse de ses ressources. Si l'AFP se rapprochait trop de France Médias Monde, elle pourrait être considérée comme notre agence. Ce serait alors plus difficile pour elle de vendre ses productions à d'autres clients.

En revanche, nous avons des correspondants communs, dans des pays difficiles, comme cela est arrivé au Burundi. Ce sont des pigistes, qui adaptent leurs productions. Pour l'AFP, ils adoptent un angle factuel et neutre pour que leurs papiers puissent être vendus à tout le monde ; pour France Médias Monde, ils écrivent sous un angle particulier.

Maintenant que nous pouvons tagger de très près nos vidéos, nous pourrions peut-être alimenter certaines langues de l'AFP pour atteindre une masse critique. Pour ne rien vous cacher, j'ai rendez-vous la semaine prochaine avec le président de l'AFP sur ce sujet.

Enfin, j'en viens aux preuves d'amour ! Je salue la mobilisation totale du Quai d'Orsay et des ambassades sur le terrain lorsque des journalistes sont en danger, ce qui arrive régulièrement. L'État français est très mobilisé et s'est doté d'une palette assez variée, d'Arte à France Médias Monde en passant par TV5 Monde. L'amour est là, mais le budget est difficile. Cela ne tombe pas bien compte tenu du contexte international.

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