Intervention de Antoine Lefèvre

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 30 janvier 2019 à 10h05
Prise en charge financière des victimes du terrorisme — Audition pour suite à donner à l'enquête de la cour des comptes

Photo de Antoine LefèvreAntoine Lefèvre, rapporteur spécial des crédits de la mission « Justice » :

Nous avons demandé à la Cour des comptes cette enquête à la suite des attentats terroristes qui ont endeuillé la France à plusieurs reprises. Deux préoccupations principales nous animaient. Pour aborder la question du point de vue des victimes, nous souhaitions tout d'abord mesurer l'efficacité du dispositif de prise en charge financière, notamment en le comparant avec ceux d'autres pays européens. En effet, après les attentats de 2015, des critiques ont été formulées : absence de guichet unique, demandes redondantes, manque de coopération entre les services de l'État ; les reproches concernaient également l'évaluation du préjudice subi et la réparation versée en conséquence par le fonds de garantie.

La seconde préoccupation avait trait à la pérennité du financement du fonds de garantie, qui, à la suite d'une évaluation individuelle, verse aux victimes - pas uniquement les victimes du terrorisme, d'ailleurs - une indemnité en réparation du préjudice subi. Il s'agissait aussi de savoir si le fonds est en capacité de verser les sommes dues aux victimes, malgré l'augmentation de leur nombre.

L'enquête remise aujourd'hui s'inscrit dans un contexte particulier, puisque le projet de loi de programmation 2018-2022 et de réforme de la justice actuellement en nouvelle lecture au Parlement contient des dispositions sur le sujet, certaines susceptibles de répondre, au moins partiellement, aux préconisations qui viennent d'être formulées par M. Raoul Briet.

La Cour des comptes fait le constat que, même s'il est encore possible de simplifier le « parcours » des victimes du terrorisme, leur prise en charge financière a été améliorée depuis 2015, notamment s'agissant des avances de frais médicaux. Madame la déléguée interministérielle à l'aide aux victimes, quelles actions sont actuellement entreprises afin d'améliorer les dispositifs existants ? De façon plus générale, quels obstacles rencontrez-vous dans la mise en place d'une véritable politique interministérielle en la matière ? Je pense par exemple aux modalités d'accès du FGTI aux informations utiles à la détection de la fraude - même si de tels cas sont exceptionnels, ils demeurent particulièrement choquants.

Une des difficultés identifiées par la Cour concerne la définition même de la victime d'un acte terroriste : qui peut-on ou qui doit-on considérer comme telle ? Actuellement, il revient au FGTI d'en décider. La Cour des comptes semble assez dubitative quant aux effets de la création d'un juge de l'indemnisation des victimes d'actes de terrorisme (JIVAT), inscrite dans le projet de loi de programmation : pourquoi ce peu d'enthousiasme ? Quelle solution alternative aurait pu être envisagée ?

Comme le montre l'enquête, le système français de prise en charge financière des victimes du terrorisme est assez complet et, par rapport à celui d'autres pays, il peut être considéré comme généreux. Outre l'indemnisation individuelle ou la prise en charge des frais médicaux, la Cour des comptes mentionne la création, par le FGTI, d'une aide spécifique, visant à indemniser le préjudice spécifique des victimes du terrorisme créé en 1987, devenu en 2014 le préjudice exceptionnel spécifique des victimes du terrorisme. Cette aide n'est pas exempte de critiques de la part de la Cour des comptes. Les responsables du FGTI ici présents peuvent-ils revenir sur la création et l'évolution de cette aide nouvelle ?

Monsieur le Président de chambre de la Cour des comptes, si cette aide était financée par le budget de l'État plutôt que par le FGTI, qu'est-ce que cela changerait ?

S'agissant du financement du fonds, nos craintes initiales s'avèrent partiellement fondées : à ce jour, l'indemnisation des victimes du terrorisme n'est pas de nature à déstabiliser le fonds de garantie, en revanche, à moyen terme, le dynamisme des réparations en faveur des victimes d'autres infractions pourrait s'avérer problématique. Cette question mérite que nous nous y intéressions, en lien également avec les assureurs, afin de garantir, comme le préconise la Cour des comptes, un financement du fonds équitable et efficace. Messieurs Rencki et Delmas-Goyon, pouvez-vous nous indiquer si vous partagez ces préoccupations et ces orientations de la Cour ?

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