Intervention de Fabien Gay

Réunion du 31 janvier 2019 à 10h30
Croissance et transformation des entreprises — Article 19 bis

Photo de Fabien GayFabien Gay :

Cet article assouplit les conditions de constitution et d’abondement du fonds commun de placement d’entreprise de reprise. Ce dispositif, adossé à l’épargne salariale, permet au salarié d’utiliser l’argent dont il dispose sur le plan d’épargne d’entreprise pour abonder un fonds de reprise, lequel rachètera des parts de l’entreprise en question, faisant ainsi du salarié un actionnaire.

Si l’idée de permettre à des salariés de participer à la reprise de leur entreprise est plutôt séduisante, la manière dont elle est mise en œuvre ici est peu satisfaisante : ce dispositif n’est finalement rien d’autre que le parent pauvre des coopératives. En effet, bien souvent, les salariés sont actionnaires minoritaires, et n’ont pas de réelle possibilité de participer à la gestion et à la prise de décision dans l’entreprise.

Prenons l’exemple du groupe Kering, cité dans le rapport : plus de 1 500 salariés de ce groupe ont participé au fonds commun de placement d’entreprise pour la reprise de La Redoute et de Relais Colis, mais ils ne détiennent que 16 % des parts de la holding possédant ces deux entreprises. Ainsi, les salariés, lorsqu’ils se regroupent, restent largement minoritaires, et de plus la voix des salariés considérés individuellement n’a aucun poids.

En fin de compte, les salariés financent l’entreprise qui les emploie sans vraiment avoir leur mot à dire ; au mieux, ils ont la possibilité de participer au noyau dur des actionnaires stables. Pour avoir un réel poids et prétendre être majoritaires, ils devraient rassembler une somme considérable au regard de leurs revenus, surtout quand il s’agit de grandes entreprises dont les parts valent cher.

D’ailleurs, ce dispositif est assez discriminant : tous les salariés ne disposent pas d’une épargne, et tous ne peuvent pas épargner à la même hauteur. Ceux qui pourront acheter des parts en grand nombre sont ceux qui ont les revenus les plus importants. Il est regrettable que tous les salariés ne puissent pas s’impliquer de manière égale dans la gestion de leur entreprise.

Ce dispositif, créé en 2006, semble être, malgré les modifications apportées par cet article, une mauvaise adaptation de la possibilité qu’ont toujours eue les salariés de se regrouper, quand une entreprise est en difficulté, pour la reprendre eux-mêmes.

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