Intervention de Thierry Foucaud

Réunion du 26 novembre 2007 à 10h00
Loi de finances pour 2008 — Article 8

Photo de Thierry FoucaudThierry Foucaud :

Cet amendement visant à réécrire l'article 8 du présent projet de loi porte sur une question d'une grande importance.

Au détour d'un article assez nettement amendé lors de la discussion parlementaire, la loi de finances rectificative pour 2005 a procédé à une réforme profonde du mode de taxation des plus-values.

Pour aller vite, les conditions de l'exonération intégrale des revenus concernés ont été créées par adjonction dans le code général des impôts des deux articles dont nous demandons aujourd'hui la suppression.

Dans les faits, le revenu concerné bénéficie depuis le 1er janvier 2006 de règles d'abattement sur le montant de la base imposable qui laissent rêveur.

Au bout de huit années de détention d'un actif quelconque, la plus-value tirée de sa cession devient, en effet, non imposable.

Cette situation a trouvé, assez étonnamment, sans doute, à s'appliquer dans le cadre du plan de cession d'actions EADS mis en place par les dirigeants du groupe Lagardère.

Je rappellerai les propos que nous avions tenus à l'époque, lors de la discussion de l'article 19.

« Il organise très concrètement les conditions de l'exemption totale d'imposition des plus-values de cession de titres mobiliers pour les particuliers.

« Une telle démarche est parfaitement scandaleuse au regard de la réalité de notre fiscalité de l'épargne. En effet, la liste est longue des mesures qui corrigent l'imposition des revenus de capitaux mobiliers dans la législation de l'impôt sur le revenu. Qu'il s'agisse du taux privilégié d'imposition - 16 %, même majoré des 11 % de prélèvements sociaux -, des prélèvements libératoires, des exonérations de produits de cession de faible montant annuel, de la large exonération des plans d'épargne en actions ou des plans d'épargne d'entreprise, tout concourt à exempter largement les revenus de capitaux d'une juste imposition. »

Nous indiquions également : « En effet, la valorisation des actifs cédés, sur la durée, n'est pas la récompense de la patience des détenteurs, mais le plus souvent l'effet de la progression du cours en bourse des valeurs détenues.

« Ce n'est pas l'épargnant qui valorise ses biens, ce sont plutôt les décisions stratégiques de l'entreprise concernée qui motivent cette valorisation. Par exemple, une entreprise qui n'augmente pas ses salaires, qui compresse la part de la valeur ajoutée qu'elle consacre à l'emploi et qui distribue de généreux dividendes est bien souvent une entreprise dont les titres se valorisent.

« La non-imposition des plus-values de cession qui nous est proposée dans cet article est en quelque sorte la validation des choix de financiarisation de l'activité économique réelle.

« Les dividendes et la progression des cours de bourse sont un hold-up permanent sur le travail des salariés !

« Ce sont les plans sociaux, les investissements non réalisés et la modération salariale qui motivent la progression des cours de bourse. »

M. Jean-François Copé, alors ministre délégué au budget, nous avait fait la réponse suivante.

« Le dispositif comporte deux volets.

« Le premier volet est en faveur de tous les actionnaires, personnes physiques ou sociétés, et a pour objet de prendre en compte la durée de détention des titres pour le calcul de leurs gains nets de cession de titres. Il s'agit de récompenser la fidélité des actionnaires et d'encourager ainsi, monsieur Foucaud, la détention d'actions longue. C'est très important, parce que cela permet de stabiliser l'actionnariat et de protéger le capital de nos entreprises. Il n'y a donc en réalité aucun effet d'aubaine.

« Le second volet est lui centré sur les dirigeants de sociétés ayant atteint ou dépassé l'âge de départ en retraite et souhaitant céder leurs entreprises. Pour eux, la mesure sera d'application immédiate. C'est dans l'intérêt de l'emploi et de la pérennité des PME, puisque les transmissions d'entreprises ne seront pas ainsi gelées. »

Le rappel de l'affaire EADS, qui a commencé de se nouer dans le courant du premier trimestre 2006, montre avec quel éclat l'absence d'effet d'aubaine s'est fait sentir dans le cas qui nous préoccupe.

C'est bel et bien parce que le dispositif voté en décembre 2005 a permis au groupe Lagardère de réaliser une opération de 472 millions d'euros, peut-être doublée d'un délit d'initié, que nous ne pouvons que proposer la suppression de ces dispositions.

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