Intervention de Annick Billon

Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes — Réunion du 7 février 2019 : 1ère réunion
Échange de vues sur la parité dans les élections municipales

Photo de Annick BillonAnnick Billon, présidente :

Mes chers collègues, nous en venons au second point de notre ordre du jour : un échange de vues sur les suites de la table ronde du 17 janvier sur la parité dans les intercommunalités et de notre réunion du 22 janvier dernier.

Je rappelle qu'au cours de la table ronde du 17 janvier, nous avons entendu l'AMF, l'Assemblée des communautés de France (AdCF) et le Haut conseil à l'égalité ainsi que l'association Elles aussi.

Chaque intervenant a alors insisté sur le fait que le levier des élections municipales était essentiel pour renforcer la féminisation des instances communautaires, affectée par les fusions intervenues en lien avec la loi NOTRe1(*). Nous le savons, quand une commune ne dispose plus que d'un siège dans l'intercommunalité, elle y est représentée par son maire. Or 84 % des maires sont des hommes.

Par un communiqué de presse publié le 18 juillet 2018, l'AMF s'est prononcée en faveur de l'élargissement du scrutin de liste paritaire et alternée femme/homme à toutes les communes, même à celles de moins de 1 000 habitants, de l'élection des maires adjoints à partir d'une liste alternant hommes et femmes, et de l'obligation de désigner au poste de premier adjoint un candidat de sexe différent de celui du maire.

Au cours de notre réunion du 22 janvier, nous nous sommes posé la question de la traduction, par une proposition de loi, des recommandations de l'Association des maires de France. J'ai alors constaté le souhait de la majorité des présents de ne pas se limiter aux questions de droit électoral, mais d'étendre notre propos aux exécutifs. Sur la base de ces réflexions, j'ai demandé à la division de soutien à l'initiative parlementaire, en lien avec le secrétariat de la délégation, de travailler à un projet de texte tirant les conséquences de nos précédents échanges.

Je rappelle que les délégations ne sont pas habilitées à déposer collectivement des propositions de loi : une telle démarche relève de l'initiative personnelle de ses membres.

Le dépôt éventuel de cette proposition de loi par des membres de la délégation poserait toutefois différents problèmes que nous devons aborder ce matin.

Tout d'abord un problème de délai.

Certes, on peut se demander si ce texte pourrait être adopté en temps voulu pour modifier les règles applicables aux prochaines élections municipales de 2020, compte tenu des contraintes afférentes à l'inscription à l'ordre du jour et à la navette parlementaire. Toutefois, il ne semble pas que l'usage consistant à s'abstenir de modifier les règles d'un scrutin au cours de l'année qui le précède soit de nature à nous empêcher de déposer ce texte. Rappelons en effet que la loi du 17 mai 2013 a modifié les règles applicables aux élections municipales de mars 2014. De plus, le Conseil constitutionnel ne semble pas considérer que le respect de ce délai d'un an conditionne la constitutionnalité des lois modifiant le code électoral, si l'on se réfère à une décision du 21 février 2008 concernant la loi facilitant l'égal accès des femmes et des hommes au mandat de conseiller général2(*).

Cette interrogation relative aux délais ne devrait pas nous décourager à l'excès : nous serions dans notre rôle en proposant de telles mesures, a fortiori en raison de la prise de position de l'AMF. Nous aurions de plus apporté notre contribution au débat sur la parité dans les élections municipales.

Un autre problème à débattre est le périmètre d'une éventuelle proposition de loi.

1er point : faut-il viser aussi la gouvernance des intercommunalités ou nous concentrer sur l'échelon communal ?

2e point : faut-il nous en tenir à l'élection des conseillers municipaux ou élargir ces propositions à la désignation des maires adjoints ? Le texte qui vous est distribué, et qui constitue notre base de discussion ce matin, prévoit les deux hypothèses. Il aborde donc aussi les autres collectivités (départements, région, Corse, métropole de Lyon) pour lesquelles la loi n'a pas prévu de règle de parité au sein des vice-présidents. Or il me semble difficile de définir des règles plus strictes pour les communes que pour les départements et régions.

Je persiste à m'interroger sur l'opportunité de ces dispositions, dès lors que notre sujet est de traiter la situation dans les intercommunalités...

Serait-il pertinent, par ailleurs, d'intégrer cette problématique, alors même que la seule question de l'extension du scrutin de liste paritaire aux petites communes est déjà plus complexe que l'on ne pourrait croire au premier abord ? Je pose la question.

Je vous propose de commenter rapidement le texte qui vous est distribué. Celui-ci constitue une base de discussion. Puis nous aurons un échange entre nous.

Je souhaite préciser d'emblée que ce texte ne prévoit pas d'extension aux collectivités ultramarines : cela supposerait la consultation des autorités locales, de la compétence du Gouvernement. Il m'a donc semblé préférable de nous en tenir, dans un premier temps du moins, à la métropole.

La proposition de loi dont le texte vous a été distribué étend aux communes de moins de 1 000 habitants le mode de scrutin applicable aux communes de plus de 1 000 habitants.

Ensuite, ce texte propose des adaptations de ce mode de scrutin aux spécificités des petites communes.

Ainsi, il permet aux listes candidates dans les communes de moins de 1 000 habitants d'être incomplètes, comme c'est le cas actuellement3(*). Cela répond à la difficulté de trouver autant de candidats que de sièges à pourvoir, souvent mise en avant pour contester la parité dans ces communes. L'idée est que le manque allégué de candidats, susceptible d'être aggravé par l'exigence de parité, ne revienne pas à priver une partie des électeurs de la possibilité de désigner leur conseil municipal et, indirectement, à les empêcher de participer à l'élection des sénateurs.

Par ailleurs, bien que les listes puissent être incomplètes, la proposition de loi écarte explicitement les candidatures isolées qui pourraient encourager des stratégies de contournement, sauf dans les communes de moins de 50 habitants où des dérogations sont nécessaires. Nous devons voir entre nous si une telle dérogation est souhaitable et quel est le seuil le plus pertinent à cet égard.

En outre, ce texte pose le principe d'un nombre minimal de candidats, fixé à un tiers du nombre de sièges à pourvoir.

De plus, la proposition de loi propose, pour départager les listes ayant obtenu un nombre égal de voix, d'avantager celles qui comporteraient le plus de candidats, afin d'encourager la constitution de listes aussi complètes que possible.

Enfin, une autre adaptation est proposée pour les communes de moins de 50 habitants (là encore, nous devons discuter du seuil le plus adapté) : il s'agit de les exonérer de l'obligation d'avoir un nombre minimum de conseillers résidant dans la commune. Cet assouplissement vise à prendre en compte les difficultés supplémentaires qui pourraient résulter, du fait de la parité, dans ces très petites communes où, semble-t-il, il n'est pas garanti de trouver des candidats. À mon avis, cette objection vaut autant pour les hommes que pour les femmes, en réalité.

Cela vous paraît-il utile ?

Le texte comporte également des dispositions déclinant la parité dans les exécutifs. Les autres dispositions (articles 3 et 4) sont des coordinations techniques et des mises à jour.

Le débat est ouvert.

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