Intervention de Alexandre Hezez

Mission commune d'information Répression infractions sexuelles sur mineurs — Réunion du 7 février 2019 à 11h00
Audition de l'association « la parole libérée » : Mm. François deVaux président alexandre hezez co-fondateur de l'association et maître nadia debbache avocate au barreau de lyon

Alexandre Hezez, co-fondateur de l'association « La Parole libérée » :

Il y a quelques mois, un débat s'est ouvert sur la nécessité pour les autorités publiques de mener une enquête sur les crimes sexuels, notamment dans l'Église. En réponse, la Conférence des évêques de France a mis en place une commission et affiché de fortes ambitions. Nous avons rencontré le président Sauvé au mois de décembre. La composition de cette commission vient de vous être annoncée. Elle est certes composée de gens de bonne volonté, tous des spécialistes, mais aucune victime ou association de victimes n'y est représentée.

S'il est trop tôt pour juger de l'ambition de cette commission, de nombreuses problématiques vont se poser. Nous ignorons ainsi de quels moyens elle disposera et quel sera son degré de liberté. Or, nous l'avons vu au sein de notre association, une telle commission a besoin de moyens financiers importants parce qu'il faut à la fois mener des enquêtes et amener les victimes à témoigner.

D'autres questions vont se poser, notamment celle de l'accès aux archives. Après l'affaire Pican en 2001, de nombreuses archives ont été détruites dans les diocèses pour éviter que d'autres cas ne sortent.

En outre, cette démarche de transparence sera non contraignante pour les évêques, qui sont de toute manière maîtres en leur diocèse. En plus, de nombreux évêques encore en place sont responsables de l'omerta instaurée depuis de très nombreuses années. Le travail de mémoire sera donc délicat, ce qui risque d'entacher la crédibilité de la commission.

Cette commission devra être légitime aux yeux de la société et des victimes. Depuis près de quatre ans, nous avons recueilli des centaines de témoignages. Si trente-six victimes ont porté plainte, nous avons recensé quatre-vingts victimes directes du père Preynat. D'autres associations ont été créées depuis. Nous recevons encore un ou deux mails par jour de victimes. Une grande majorité des victimes étant sorties de l'Église et ayant perdu toute confiance dans cette institution, la commission aura du mal à recueillir des témoignages.

Par ailleurs, un travail statistique de grande ampleur est nécessaire pour effectuer une analyse et proposer des solutions aux victimes. Les chiffres qui seront produits, si tant est que la commission parvienne à recueillir des témoignages, devront être comparés à ceux d'autres institutions afin de mettre en oeuvre une réponse à la fois éducative, préventive, mais aussi répressive. Or cette commission n'a pas la possibilité de faire tout cela.

À mon avis, le travail de cette commission se limitera à des discussions entre spécialistes, sur des sujets connus, alors que les problématiques ici sont davantage la prise de parole des victimes et l'action.

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