Chaque cas est différent. Les professionnels de la santé ont évolué très récemment sur cette question. Par exemple, moi, je me suis construit avec ça, cela fait partie de ma vie. D'autres se sont enfermés dans le silence et ont dû faire un long chemin avant de prendre conscience de la réalité de leur vécu et de faire leur coming out si je puis dire. Il y a des cas d'amnésies traumatiques. On voit à quel point les conséquences psychiques peuvent formater le cerveau.
Je pense que lorsqu'on libère la parole, et c'est là notre réussite, on entre dans un processus salvateur et on avance. Sortir du silence permet une reconstruction personnelle. On passe une première partie de sa vie - et c'est là où la question de la prescription est très intéressante - à essayer de la construire et à panser ses souffrances du mieux qu'on peut, puis une seconde partie, vers quarante ou cinquante ans, à s'accepter et à se préparer à quitter cette terre en harmonie avec ce qu'on est. C'est le chemin de tout le monde, qu'on soit laïc, catholique ou athée. C'est le cheminement de la maturité en fait. Face à cela, les pressions ne tiennent pas, qu'elles soient familiales, culturelles ou spirituelles.
Vous êtes mieux placés que nous pour répondre à la question de l'imprescriptibilité. Vraisemblablement, elle pose un problème de constitutionnalité. Nous ne sommes pas compétents sur ce sujet. Cela étant dit, il me semble que c'est une question de bon sens. Le cadre législatif n'est-il pas fait dans l'intérêt des citoyens, et donc des enfants, qui représentent l'avenir de notre nation ? Les marques sont tellement indélébiles que l'imprescriptibilité semble une évidence absolue.